COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
15e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 12 MAI 2011
N° 2011/ 268
Rôle N° 10/12272
CAISSE NATIONALE DE PREVOYANCE 'CNP ASSURANCES'
C/
[Z] [E] épouse [W]
Grosse délivrée
le :
à :
la SCP TOLLINCHI - PERRET-VIGNERON - BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI
la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN
ref:22042011-SM
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 08 Juin 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/3260.
APPELANTE
CAISSE NATIONALE DE PREVOYANCE 'CNP ASSURANCES',
dont le siège social est : [Adresse 1]
représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour, Me Claude GIANNESINI, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
Madame [Z] [E] épouse [W]
demeurant [Adresse 2]
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour, la SELAS CABINET DREVET, avocats au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Micheline DREVET DE TRETAIGNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 31 Mars 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Serge KERRAUDREN, Président
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2011,
Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DE L'AFFAIRE
Mme [W] qui a contracté le 13 octobre 2003 deux emprunts auprès de la société Crédit Agricole, a adhéré à la police d'assurance groupe proposée par la Caisse Nationale de Prévoyance (CNP)garantissant le remboursement des échéances pour les risques incapacité temporaire totale, perte irréversible d'autonomie, décès.
Mme [W] a été placée en arrêt de travail le 16 janvier 2008 et l'assureur a refusé toute indemnisation en arguant de l'existence d'une fausse déclaration intentionnelle dans le questionnaire de santé rempli lors de la souscription.
Contestant cette décision, Mme [W] a fait assigner cette compagnie d'assurances devant le Tribunal de Grande Instance de Draguignan pour qu'elle soit condamnée à exécuter les dispositions contractuelles .
Par jugement du 8 juin 2010, le tribunal a condamné l'assureur à garantir Mme [W] des conséquences du sinistre invoqué.
La CNP a interjeté appel de cette décision et soutient que Mme [W] n'a pas déclaré avoir été hospitalisée et opérée en janvier 1998 pour un chondrosarcome avec une période de rééducation.
Elle soutient donc que l'assuré a commis une fausse déclaration intentionnelle, demande que soit prononcée la nullité du contrat et conclut en conséquence à l'infirmation du jugement ansi qu'à la condamnation de Mme [W] à lui verser 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [W] rétorque que sa bonne foi ne saurait être mise en doute et que lors de la signature du contrat elle répondait aux critères de la déclaration de santé. Elle ajoute qu'elle ignorait qu'un chondrosarcone était une tumeur maligne puisqu'elle n'avait eu ni arrêt de travail, ni ALD ou chimiothérapie et qu'elle pensait que cette affection n'était que la conséquence d'une intervention chirurgicale subie en 1993 et déclarée dans le questionnaire de santé.
Elle estime donc que la société d'assurances doit prendre en charge le remboursement des prêts, sollicite la confirmation du jugement et le paiement d'une somme de 10000 euros à titre de dommages intérêts outre la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure.
La Cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.
MOTIFS
Lors de son adhésion à la police d'assurance groupe proposée par la CNP, Mme [W] a signé une déclaration de santé en répondant ainsi aux questions suivantes :
- à la question 5 : «avez-vous été hospitalisé ' Pourquoi ' Quand ' Durée '» , il a été répondu : « suite accident opération du genou droit 22 décembre 1993- 3 mois ».
- à la question 6-1 : « avez-vous subi une intervention chirurgicale ' Pourquoi ' Quand ' », il a été répondu : « suite accident opération genou droit du 22 décembre 1993 ».
Lors de sa demande de prise en charge de l'incapacité de travail, Mme [W] a signé une attestation médicale dans laquelle il était précisé qu'elle avait été opérée et hospitalisée le 12 janvier 1998 pour un chondrosarcome et le 14 août 2000 pour une occlusion intestinale. Il était en outre précisé par le médecin qui remplissait ce document que l'affection motif de l' arrêt travail était une récidive du chondrosarcome opéré en 1998.
Il convient de rappeler que la banque qui fait adhérer un emprunteur à une assurance groupe n'a pas la qualité de mandataire de l'assureur.
Il est indifférent que le questionnaire de santé ait été rempli en présence du directeur de l'agence bancaire puisque Mme [W] a apposé sa signature sur ce document, authentifiant ainsi les mentions portées.
La société de crédit en proposant une assurance groupe garantissant les divers risques susceptibles de survenir et en remettant à son client un formulaire de santé a parfaitement rempli les obligations lui incombant, l'assuré devant, sous sa seule responsabilité répondre avec exactitude aux questions posées.
Selon les dispositions de l'article L. 113-2 du code des assurances, l'assuré a pour obligation de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge.
L'assuré devait donc fournir à l'assureur les données en sa possession sur son état de santé et l'informer de celui-ci pour lui permettre d'évaluer le risque qu'il avait à garantir.
En raison des questions extrêmement claires et précises posées par l'assureur qui ne pouvaient insinuer un doute dans l'esprit de Mme [W] celle-ci en omettant de faire état de deux interventions chirurgicales avec hospitalisation a, compte tenu de son passé médical et de leurs conséquences, effectué ces fausses déclarations en toute connaissance de cause avec la volonté de tromper son co-contractant et donc intentionnellement.
L'assurée ne pouvait omettre de déclarer l'intervention chirurgicale survenue en janvier 1998 en estimant que celle-ci était une conséquence de l'opération survenue en 1993 puisqu'elle n'avait pas à porter un jugement sur l'évolution de son état de santé, sur l'opportunité ou l'utilité des renseignements à fournir dans le questionnaire de santé qui lui est soumis, et de son influence sur le risque.
Ces fausses déclarations ont changé l'objet du risque ou en ont diminué l'opinion pour l'assureur, qui a accepté de donner sa garantie dans l'ignorance exacte de l'état de santé de son co-contractant.
Dès lors, en application des dispositions de l'article L 113-8 du code des assurances, Mme [W] ne peut bénéficier de la garantie contractuelle souscrite, et il convient d'infirmer le jugement attaqué.
Mme [W] est donc déboutée de l'ensemble de ses réclamations et condamnée à payer à la CNP une indemnité de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement attaqué,
Statuant à nouveau,
Prononce la nullité du contrat souscrit par Mme [W] auprès de la société CNP,
Déboute Mme [W] de ses demandes,
La condamne à payer à la société CNP une indemnité de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La condamne aux dépens de première instance et d'appel recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT