COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 12 AVRIL 2011
N° 2011/ 190
Rôle N° 09/22658
[C] [L]
[D] [L] épouse [G]
[U] [L] épouse [A]
C/
[D] [N]
[Z] [N]
Grosse délivrée
le :
à : BLANC
SIDER
Dc
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Novembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 08/3829.
APPELANTES
Madame [C] [L]
née le [Date naissance 3] 1927 à [Localité 12], demeurant [Adresse 2]
Madame [D] [L] épouse [G]
née le [Date naissance 6] 1947 à [Localité 11], demeurant [Adresse 8]
Madame [U] [L] épouse [A]
née le [Date naissance 7] 1954 à [Localité 11], demeurant [Adresse 9]
représentés par la SCP BLANC-CHERFILS, avoués à la Cour,
assistés de Me Frédéric SARRAZIN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Jérôme BARBERIS, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Madame [D] [N]
née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 11], demeurant [Adresse 4]
Monsieur [Z] [N]
né le [Date naissance 5] 1952 à [Localité 10], demeurant [Adresse 4]
représentés par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
assistés de la SCP LESCUDIER J.L., LESCUDIER R., LESCUDIER W., avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Olivier BAYLOT, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 22 Février 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Didier CHALUMEAU, Président , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Didier CHALUMEAU, Président
Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller
Madame Valérie GERARD-MESCLE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Agnès BUCQUET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2011,
Signé par Monsieur Didier CHALUMEAU, Président et Madame Agnès BUCQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE du 10 novembre 2009, auquel il est renvoyé pour l'exposé du litige, qui a :
-condamné Monsieur [Z] [N] et Madame [D] [N] à réaliser, dans un délai de trois mois, les travaux préconisés par l'expert judiciaire et consistant en :
-remplissage du vide entre mitoyen et local cuisine par un matériau tout- venant ou isolant,
-réalisation d'une poutre béton liaisonnée à l'ossature du local cuisine et à la partie basse du mur mitoyen ( pente de 1 % minimum pour évacuation des eaux pluviales sur la propriété [N]),
-mise en place d'une étanchéité en partie supérieure de la poutre béton ( pax alumain ou similaire ) ;
-dit qu'à défaut de réalisation de ces travaux, dans le délai de trois mois, suivant la signification du jugement, Monsieur et Madame [N] seront redevables à l'égard de Madame [C] [L], de Madame [D] [L] épouse [G] et de Madame [U] [L] épouse [A], ensemble, d'une astreinte de 100 euros par jour de retard, pendant une durée de trois mois au plus,
-rejeté les demandes de dommages et intérêts ,
-condamné Monsieur [Z] [N] et Madame [D] [N] à payer à Madame [C] [L], Madame [D] [L] épouse [G] et Madame [U] [L] épouse [A], ensemble, la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
-ordonné l'exécution provisoire,
-condamné Monsieur [Z] [N] et Madame [D] [N] aux dépens, en ce compris les dépens de référé, et les frais d'expertise judiciaire.
Vu l'appel régulièrement interjeté par les consorts [L] le 16 décembre 2009,
Vu les dernières conclusions des appelantes : Mesdames [C] [L], [D] [L] épouse [G], [U] [L] épouse [A] du 18 octobre 2010, aux termes desquelles, elles demandent à la Cour de :
-réformer le jugement entrepris en ce qu' il a rejeté la demande de démolition et la demande de dommages et intérêts,
-s'entendre condamner, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à faire effectuer par une entreprise spécialisée les travaux préconisés par l'expert : point 6.3 page 28
de son rapport .
-venir Monsieur et Madame [N],
- s'entendre en toute hypothèse condamner , sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter de l'arrêt à intervenir, à démolir tout ouvrage, construction,
surélévation qu'ils ont effectués sur ce mur , sans autorisation des appelantes ,
-s'entendre condamner à payer aux appelantes une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
-s'entendre condamner à payer à chacune des appelantes la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
-les condamner aux entiers dépens au profit de la SCP BLANC- CHERFILS, avoués en ceux y compris les frais d'expertise .
Vu les dernières conclusions des époux [Z] et [D] [N] du
1er septembre 2010, aux termes desquelles, ils demandent à la Cour de :
-confirmer le jugement de première instance, en ce qu'il a débouté les consorts [L] de leur demande de démolition et de dommages et intérêts,
Par conséquent,
-constater que le mur litigieux est, à défaut d'être privatif aux consorts [N], mitoyen,
-constater que la surélévation effectuée par les consorts [N] de
30 centimètres, résulte d'un nivellement de l'ancien faîtage et de la pose d'une nouvelle toiture,
-constater que cette légère surélévation n'entraîne aucun risque quant à la solidité et à la pérennité du mur séparatif existant et qu'il est insusceptible de générer un quelconque préjudice,
-constater, en outre, qu'ils ne subissent aucun préjudice indemnisable du fait d'une légère perte d'ensoleillement sur une partie de leur jardin,
-prendre acte que les consorts [N] ont d'ores et déjà effectué les travaux préconisés par l'expert, en page 28, de son rapport, à savoir :
*le remplissage du vide entre le mur mitoyen et le local cuisine par un matériau tout -venant ou matériau isolant,
* la réalisation d'une poutre béton liaisonnée à l'ossature du local cuisine et à la partie basse du mur mitoyen avec une pente de 1 % minimum pour l'évacuation des eaux pluviales sur la propriété [N],
*la mise en place d'une étanchéité en partie supérieure de la poutre béton
( pax alumain ou similaire ),
- réformer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté les concluants de leur demande de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive et dilatoire,
Par conséquent,
-condamner les consorts [L] à leur payer les sommes de :
-5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
-5.000 euros sur la base de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
-condamner, enfin, solidairement les consorts [L] aux entiers dépens distraits au profit de la SCP SIDER, avoués et associés.
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure du 8 février 2011.
Motifs de la décision :
Les appelantes, pour critiquer le jugement les ayant déboutées de leur demande de démolition des ouvrages construits par les intimés, font valoir, que le mur litigieux étant mitoyen, l'adossement sur celui-ci, effectué par les époux [N], est prohibé par l'article 662 du Code Civil, sauf consentement du propriétaire du fonds mitoyen, inexistant en l'espèce, et que la surélévation en cause, qui affecte la solidité du mur, revêt un caractère abusif, comme violant la prescription du permis de construire et les règles d'urbanisme imposées par le P.L.U..
Le caractère mitoyen du mur en question ne peut être sérieusement discuté en l'état des pièces produites aux débats, l'expertise judiciaire ayant au surplus relevé que le cadastre le figurait comme de nature mitoyenne .
Le jugement déféré a donc par une juste application des articles 653 et 654 du Code Civil exactement qualifié ledit mur de mitoyen .
La nature des travaux réalisés par les intimés, constitue non seulement une surélévation
d'une partie dudit mur , mais aussi un adossement sur celui-ci de sorte que, ainsi que le relèvent avec raison les appelantes, l'article 662 du Code Civil est de nature à trouver application .
Mais cette surélévation de 30 centimètres de la partie supérieure du mur a été réalisée sur exhaussement déjà existant , exécuté par un précédent auteur des intimés, Monsieur [M] .
L'expert judiciaire indique que la solidité et la pérennité du mur séparatif ne sont pas affectées par la surélévation de 30 centimètres en cause, les micro fissures relevées ne semblant pas consécutives aux travaux des intimés ( page 27 du rapport [S] ).
L'expert judiciaire, concernant la hauteur de la construction [N], note :
*-' hauteur de la construction au faîtage mesurée depuis le terrain naturel de la propriété [L] : 3,60 mètres,
*-hauteur de la construction au faîtage mesurée depuis le terrain naturel de la propriété [N] : 3,30 mètres,
*-hauteur de la construction à l'égout du toit mesurée à partir du terrain naturel de la propriété [N] : 2,77 mètres.
La hauteur de l'édifice apparaît conforme au P.L.U. conformément à l'article R UD 10.2.2 à l'annexe 10 relatif à la hauteur des constructions ' .
Ces données, exclusives de violations des règles de l'urbanisme applicables, permettent d'exclure la demande de démolition des ouvrages des intimés, le caractère abusif des dits ouvrages n'étant pas démontré .
Concernant le préjudice invoqué par les appelantes relatif à une perte d'ensoleillement, la Cour fait siens les motifs de la décision déférée, ayant écarté l'existence d'un trouble anormal de voisinage susceptible de justifier l'indemnisation demandée à hauteur de 20.000 euros par les consorts [L] .
L'expertise a fait ressortir que lors de l'accédit du 27 novembre 2006, vers 10 heures, la construction [N] produisait de l'ombre sur le fonds des appelantes, sur la pelouse de celles-ci sur 12 m², cette ombre portée diminuant en cours de journée pour être nulle dans la plus grande partie de la journée .
L'expert a relevé que cette ombre portée sera plus importante en hiver, le matin, mais que l'habitation [L] ne subit pas de perte d'ensoleillement .
Les appelantes n'apportent pas davantage qu'en première instance d'éléments propres à écarter ces données expertales de sorte que la démonstration d'un trouble anormal de voisinage, dans le milieu urbain considéré, n'est en l'espèce pas établie .
Concernant les travaux imposés aux intimés pour combler l'espace vide susceptible de générer des infiltrations, la Cour ne peut que confirmer le jugement ayant prescrit ces travaux sous astreinte .
Il sera toutefois relevé que les intimés ont produit une facture en date du 7 juin 2010,
( Société de Constructions Traditionnelles Gérard DONATE) afférente à des travaux d'isolation entre les 2 murs, et la réalisation d'une poutre béton de 4,50 mètres et à une étanchéité avec relevé .
La procédure des consorts [L] ne revêtant pas de caractère abusif, la demande de dommages et intérêts de ce chef des intimés doit être écartée .
L'issue de la procédure d'appel conduit à mettre à la charge des appelantes les dépens de cette instance, sans application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de quiconque en cause d'appel .
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement,
-Reçoit l'appel, régulier en la forme ,
-Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à constater la production par les intimés d'une facture de travaux datée du 7 juin 2010, imputée aux travaux prescrits par le jugement dont appel,
- Déboute les époux [Z] et [D] [N] de leur demande de dommages et intérêts et d'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
-Condamne les consorts : [C] [L], [D] [L] épouse [G], [U] [L] épouse [A] aux dépens d'appel, distraits au profit de la SCP SIDER.
LE GREFFIER LE PRESIDENT