COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 17 MARS 2011
N° 2011/192
Rôle N° 09/13880
URSSAF DU VAR
C/
Société CONSTRUCTIONS INDUSTRIELLES MEDITERRANEE - CNIM
CRAM DU SUD-EST
Grosse délivrée
le :
à :
URSSAF DU VAR
SCP VIDAL-NAQUET, avocats au barreau de MARSEILLE
CRAM DU SUD-EST
Décision déférée à la Cour :
Arrêt de Cour de Cassation en date du 11 Juin 2009
Arrêt de Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE du 29 janvier 2001
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Var en date du 25 Novembre 2005
APPELANTE
URSSAF DU VAR, demeurant [Adresse 3]
représenté par M. [X] [D] (inspecteur du contentieux) en vertu d'un pouvoir général
INTIMEES
Société CONSTRUCTIONS INDUSTRIELLES MEDITERRANEE - CNIM, demeurant [Adresse 4]
représentée par la SCP VIDAL-NAQUET, avocats au barreau de MARSEILLE
CRAM DU SUD-EST, demeurant [Adresse 1]
représenté par Mme [R] [O] (représentante auprès des tribunaux) en vertu d'un pouvoir général
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2011 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Michel VANNIER, Président
Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller
Madame Laure ROCHE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Mars 2011..
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 17 Mars 2011.
Signé par Monsieur Michel VANNIER, Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
A la suite de l'accident du travail dont a été victime monsieur [E] le 20 novembre 1990, la Cram, devenue la Carsat du sud-est, a notifié à son employeur, la société de constructions industrielles du sud-est (la Cnim), des taux réels de cotisation accident du travail majorés qui ont été acquittées du 1er janvier 1993 au 30 avril 2000.
Par arrêt définitif du 23 janvier 2001, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a déclaré la régie des transports de Marseille seule responsable du dommage subi par monsieur [E] et a renvoyé la Cnim - appelée en garantie par la Rtm dès le 23 juin 1994 - à faire valoir sa demande de remboursement de salaires lors de la liquidation du préjudice de son salarié.
Le 21 mars 2002, la Cram notifiait à la Cnim les taux de cotisations rectifiés des années 1992 à 2002 en retirant de la base de calcul le coût des prestations servies à monsieur [E].
Par lettre du 7 mai 2002, l'employeur avisait l'Urssaf du Var qu'il procéderait, par l'intermédiaire du bordereau récapitulatif des cotisations relatif au mois de mai 2002, à une régularisation de cotisations d'un montant de 32.962,64 euros correspondant au montant de la majoration du taux 'accident du travail' indûment versée pour la période courant de l'année 2000 au 1er trimestre 2002 et il demandait en outre le remboursement d'une somme de 1.649.770,86 euros correspondant au montant de la majoration du taux de la cotisation 'accident du travail' indûment versée pour la période de 1994 à 1999.
Par courrier du 3 juin 2002, la Cnim informait encore l'Urssaf qu'il convenait également d'inclure l'année 1993 dans le remboursement demandé ce qui portait le montant total du remboursement sollicité à la somme de 1.714.611,25 euros.
Après l'avoir avisé par un courrier du 21 juin 2002 - qui ne vaut pas accord quant au remboursement des sommes demandées - que son 'dossier est en cours de traitement par [le] service comptabilité afin de procéder au remboursement des sommes indûment versées', l'Urssaf indiquait à l'employeur, par lettre du 17 septembre 2002, que rien ne lui permettait 'de fixer le point de départ du délai de prescription fixé par l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale à une date antérieure au 7 mai 2002" et elle lui notifiait, d'une part, qu'elle était redevable de la somme de 3.337 euros correspondant au montant de la majoration de la cotisation 'accident du travail' appelée pour les mois de janvier à avril 2000 et, d'autre part, qu'elle ne pouvait accéder à sa demande de remboursement de la majoration de la cotisation pour la période 1993 - 1999.
Le 10 décembre 2002, la commission de recours amiable confirmait le rejet du remboursement et la Cnim saisissait le tribunal des affaires de sécurité sociale du Var d'une demande en répétition de l'indu.
Par jugement en date du 25 novembre 2005, le tribunal a fait droit à la demande de l'employeur et a condamné l'Urssaf du Var à lui payer à la somme de 1.684.985,62 euros au titre des cotisations indûment réglées depuis le 1er janvier 1993 jusqu'au 30 avril 2000 assortie des intérêts au taux légal depuis le paiement outre 1.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 20 novembre 2007 la 14ème chambre de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé le jugement déféré.
Par arrêt en date 11 juin 2009, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt du 20 novembre 2007, a remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.
La Cnim demande à la cour de confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Var du 25 novembre 2005, de débouter l'Urssaf en toutes ses demandes comme étant infondées et de la condamner à lui payer la somme de 3.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'Urssaf conclut à l'infirmation du jugement déféré et à la condamnation de la Cnim à payer les sommes remboursées et les intérêts calculés au taux légal avec anatocisme, soit 2.416.793,01 euros ainsi que celle de 2.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La caisse d'assurance retraite de la santé au travail sud-est (Carsat) demande à la cour de dire et juger ce que de droit.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale et aux écritures déposées, oralement soutenues à l'audience du 17 janvier 2011.
MOTIFS DE LA DECISION :
Selon l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003, alors applicable, la demande en remboursement des cotisations de sécurité sociale indûment versées se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle ces cotisations ont été acquittées ; en outre, la prescription court à compter du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu valablement agir.
Le contrat signé par la Rtm et la Cnim le 19 décembre 1975, qui avait pour objet l'entretien des escaliers mécaniques équipant plusieurs stations du métro de [Localité 2], prévoyait en un article 7 'responsabilité de l'entrepreneur - assurances' :
- que l'entrepreneur serait tenu de se soumettre aux règles de la législation et de la réglementation du travail ;
- qu'il aurait à sa charge la stricte application des mesures d'hygiène et de sécurité prescrites par les lois et règlements et serait tenu, sous sa responsabilité, de veiller à ce que toutes les précautions soient prises pour éviter les accidents à ses ouvriers, au personnel du maître de l'ouvrage ou à des tiers ;
- qu'il demeurerait responsable de ces accidents et serait tenu en outre de garantir le maître de l'ouvrage de toute action qui serait dirigée contre lui pour des faits de cette nature.
Le 20 novembre 1990, monsieur [E] qui travaillait pour le compte de la Cnim à la réparation d'un escalier mécanique de la station Frais Vallon, a fait tomber une douille de clef à cliquet sur le plancher supérieur d'une plate-forme en béton située sous l'escalier ; alors qu'il tentait de récupérer son outil, un carré de contreplaqué du plancher s'est effondré sous son poids et il a fait une chute d'une hauteur de 4 mètres.
La Cnim, qui connaissait les circonstances dans lesquels l'accident de son salarié est intervenu sur le toit d'un local de la Rtm dont elle estimait ne pas avoir la garde puisque dès le 10 décembre 1990, elle avait fait connaître au maître de l'ouvrage qu'il ne lui appartenait pas - à elle, la Cnim - 'de modifier, en quoi que ce soit et de [sa] propre initiative, la configuration d'origine' du local en cause et qui ne pouvait ignorer depuis son appel en garantie du 23 juin 1994, que monsieur [E] recherchait la responsabilité de la Rtm dans l'accident dont il a été victime, ne saurait justifier son abstention à demander le remboursement des cotisations indûment versées depuis 1993 en invoquant l'article 7 du contrat du 19 décembre 1975 qui ne s'appliquait pas aux faits de la cause et qui, en toute hypothèse, ne lui interdisait pas de contester le report à son compte employeur du coût des prestations servies à son salarié et l'augmentation corrélative de son taux de cotisations en invoquant la responsabilité de la régie marseillaise dans la survenance de l'accident.
Ainsi, c'est à bon droit que l'Urssaf a considéré que les sommes acquittées par la Cnim depuis plus de deux ans au jour de la demande en remboursement du 7 mai 2002 se trouvaient atteintes par la prescription biennale.
Le jugement déféré sera donc infirmé et la Cnim devra rembourser à l'Urssaf du Var la somme non contestée dans son quantum de 2.416.793,01 euros.
Les sommes allouées seront capitalisées conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Infirme le jugement déféré,
Dit que la Cnim ne peut prétendre au remboursement des sommes versées antérieurement au 7 mai 2000,
La condamne à rembourser à l'Urssaf du Var la somme de 2.416.793,01 euros qui sera capitalisée dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses frais irrépétibles et de ses propres dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT