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14/03/2011 | FRANCE | N°10/01384

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre b, 14 mars 2011, 10/01384


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2011



N° 2011/ 132













Rôle N° 10/01384







S.A.S GLAUGES DES ALPILLES





C/



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Grosse délivrée

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à : BLANC

TOLLINCHI













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Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 14 Janvier 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 05/1420.







APPELANTE





S.A.S GLAUGES DES ALPILLES, prise en la personne de son Dirigeant en exercice domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Localité 8]



représentée par la SCP...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2011

N° 2011/ 132

Rôle N° 10/01384

S.A.S GLAUGES DES ALPILLES

C/

[I] [P] [O] [N]

Grosse délivrée

le :

à : BLANC

TOLLINCHI

réf

Jlg

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 14 Janvier 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 05/1420.

APPELANTE

S.A.S GLAUGES DES ALPILLES, prise en la personne de son Dirigeant en exercice domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Localité 8]

représentée par la SCP BLANC-CHERFILS, avoués à la Cour,

assistée de Me Jean-Pierre VOLFIN, avocat au barreau de TARASCON

INTIME

Monsieur [I] [N]

né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour,

assisté de Me Véronique TOURNAIRE-CHAILAN, avocat au barreau de TARASCON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Didier CHALUMEAU, Président

Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller

Madame Valérie GERARD-MESCLE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Agnès BUCQUET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2011,

Signé par Monsieur Didier CHALUMEAU, Président et Madame Agnès BUCQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure, prétentions et moyens des parties :

Par acte notarié du 31 juillet 1990, la SCEV [Adresse 7], dont le gérant était alors [I] [N], a acquis une propriété rurale située à [Localité 8], connue sous le nom de Domaine des Glauges et comprenant notamment une parcelle cadastrée section AT n° 76 pour 1ha 46a 60ca.

Le 31 octobre 1996, [I] [N], son épouse [R] [W] et son fils [O] [N], d'une part, [A] [L], d'autre part, ont conclu une convention dans laquelle il est notamment rappelé que les époux [N] détiennent des participations dans plusieurs sociétés dont une SCI dénommée LES EYGUIERES, que ces sociétés connaissent des difficultés et que [A] [L] s'est déclaré intéressé par leur reprise et prêt à faire un effort financier de 20 000 000 francs, à condition toutefois que les époux [N] assurent la reconstitution des fonds propres desdites sociétés.

Cette convention comporte un article 1 intitulé «Augmentation de capital de la SCI LES EYGUIERES » et dont la teneur est la suivante :

« Monsieur et Madame [N]-[W] s'engagent à apporter au capital de la société SCI LES EYGUIERES l'immeuble suivant :

Maison de maître à [Localité 8]. [Adresse 7], élevée pour partie d'un étage sur rez-de-chaussée, comprenant quatre chambres, salle de séjour, cuisine, trois salles de bain, garage-buanderie, auvent, pool house avec piscine.

Il est ici précisé que cette maison a été construite sur un fonds appartenant à la SCEV [Adresse 7], dans le cadre d'un prêt à usage en date du 2 janvier 1993 autorisant monsieur et madame [N]-[W] à construire ledit immeuble et leur en assurant la propriété jusqu'au terme du prêt.

Cet apport sera réalisé aux conditions suivantes :

-réserve du droit d'usage et d'habitation au profit de madame [N]-[W], sa vie durant.

-valeur : 1 540 000 francs, déterminée comme suit :

* valeur toute propriété : 2 200 000 francs.

* valeur droit d'usage : 30 %, par référence à l'article 762 du code général des impôts.

Il sera rémunéré par 62 parts sociales de 100 francs chacune, et la somme de 1 533 800 francs (1 540 000 - 6 200) sera affectée au compte prime d'émission. »

L'article 8 prévoit en outre la conclusion d'un contrat de travail entre [I] [N] et la SCEV DES VIGNOBLES [N] et en fixe les conditions.

Le 28 novembre 1996, les époux [N] et [O] [N], d'une part, [A] [L], d'autre part, ont signé une deuxième convention contenant notamment un article 2 intitulé « avenant à l'article 8 du protocole du 31 octobre 1996 », prévoyant que « monsieur et madame [N]-[W] continueront à occuper leur logement actuel, à titre de logement de fonction. »

Ce même 28 novembre 1996, l'assemblée générale des associés de la SCEV [Adresse 7], à savoir la SCEV DES VIGNOBLES [N], détenteur de 245 part, [I] [N], [R] [W], [O] [N], [S] [N] et [H] [N], détenant chacun une part, se sont réunis en assemblée générale extraordinaire et ont désigné [A] [L] en qualité de gérant.

Par acte notarié du 30 mars 2000, la SCEV [Adresse 7], représentée par son gérant [A] [L], a vendu le Domaine des Glauges à la SAS GLAUGES DES ALPILLES, cette propriété comprenant notamment une parcelle cadastrée section AT n ° [Cadastre 5] pour 11ha 06a 94ca, provenant de la division de l'ancienne parcelle AT [Cadastre 3].

Le 18 mai 2000, [K] [J] a adressé à [I] [N] une lettre dans laquelle il écrit notamment :

« La situation financière et juridique, ainsi que tous les problèmes rencontrés avec les Douanes françaises ont conduit à la création d'une nouvelle société la SAS GLAUGES DES ALPILLES dont je suis le président en raison de ma participation majoritaire.

En effet, l'ancienne SCEV [Adresse 7] a cédé son foncier, ses outils et ses bâtiments (sauf la villa que vous occupez) à la nouvelle société ; cette opération n'a pu être réalisée qu'avec la participation et l'accord de la SAFER.

Mr [A] [L] reste toujours gérant de cette SCEV [Adresse 7] qui n'existe que parce qu'elle est propriétaire de la villa que vous occupez ; Mr [A] [L] est aussi associé dans cette SAS GLAUGES DES ALPILLES.

Dans l'attente du règlement de la procédure de justice en cours actuellement concernant la propriété et l'occupation de cette villa construite sur le terrain appartenant à la SAS GLAUGES DES ALPILLES, nous avons, d'un commun accord entre la SAFER, Mr [A] [L] et moi-même, décidé d'isoler cette villa sur une parcelle lotie de 39a 93ca de surface. »

Par acte du 14 décembre 2000, la SCEV [Adresse 7] a vendu à la SAS GLAUGES DES ALPILLES, une maison d'habitation comprenant quatre chambres, salle de séjour, cuisine, trois salles de bain, garage, buanderie, auvent, pool house avec piscine, figurant au cadastre rénové de la commune d'[Localité 8], section AT n° [Cadastre 4] pour 39a 93ca, pour le prix de 266 785,78 euros. La parcelle AT [Cadastre 4] provient également de la division de l'ancienne parcelle AT [Cadastre 3].

Par arrêt du 23 septembre 2003, cette cour, confirmant un jugement rendu le 14 mars 2002 par le tribunal de grande instance de TARASCON, a déclaré [R] [W]-[N] occupante sans droit ni titre de la propriété cadastrée section AT n° [Cadastre 4] et a ordonné son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef.

Exposant qu'il avait financé le prix de la construction de la maison désignée dans l'acte du 14 décembre 2000 au moyen d'un apport personnel de 45 734,71 euros. et d'un prêt de 91 469,41 euros contracté avec son épouse auprès du Crédit Commercial de France, [I] [N] a, par

acte du 18 août 2005, assigné la SAS GLAUGES DES ALPILLES en paiement d'une somme de 414 435 euros sur le fondement de l'article 555 du code civil.

La SAS GLAUGES DES ALPILLES ayant été placée en redressement judiciaire selon jugement du 4 août 2006, [I] [N] a appelé en cause monsieur [Y] [U], pris en sa qualité d'administrateur judiciaire, et monsieur [A] [G], pris en sa qualité de représentant des créanciers.

Par jugement du 7 septembre 2007, le tribunal de commerce de TARASCON a ordonné la cession totale de l'entreprise et a constaté que le prix d'acquisition permettra le règlement intégral du passif de la SAS GLAUGES DES ALPILLES.

Par jugement du 1er février 2008, le tribunal de commerce de TARASCON a constaté que la SAS GLAUGES DES ALPILLES disposait de sommes suffisantes pour désintéresser ses créanciers et a prononcé la fin de la procédure de redressement judiciaire ouverte à son égard.

Par jugement du 14 janvier 2010, le tribunal de grande instance de TARASCON a condamné la SAS GLAUGES DES ALPILLES à payer à [I] [N] les sommes de 414 435 euros à titre de dommages et intérêts et de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et l'a condamnée aux dépens.

La SAS GLAUGES DES ALPILLES a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 janvier 2010.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 5 janvier 2011, auxquelles il convient de se référer, elle demande à la cour :

-d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

-de constater que le prêt à usage du 2 janvier 1993, lui est inopposable faute de publication,

-de constater que la convention du 31 octobre 1996 ainsi que son avenant du 28 novembre 1996 lui sont inopposables, tant en raison du défaut de publicité du droit d'usage et d'habitation qu'en application de l'article 1165 du code civil,

-de constater l'inapplicabilité en l'espèce de l'article 555 du code civil,

-à titre subsidiaire,

-de déclarer l'action fondée sur l'article 555 du code civil irrecevable à son encontre,

-de rejeter en conséquence toutes les demandes d'[I] [N],

-de condamner ce dernier, à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, ainsi que celle de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions déposées le 6 décembre 2010, auxquelles il convient de se référer, [I] [N] demande à la cour :

-de confirmer le jugement déféré,

-de constater que par ordonnance définitive rendue le 21 février 2008, son intérêt à agir ainsi que sa qualité et sa capacité à ester en justice ont été retenus,

-de lui donner acte de ce que par cette même ordonnance, il a été jugé que l'arrêt du 23 septembre 2003 n'a nullement autorité de la chose jugée à son égard,

-de déclarer ses demandes recevables,

-de constater qu'il a financé intégralement la construction édifiée sur le fonds de la SAS GLAUGES DES ALPILLES,

-de constater sa bonne foi dans la mesure où la construction a été édifiée en vertu d'un contrat de prêt à usage, l'autorisant expressément à construire et habiter avec sa famille, sa vie durant,

-de constater qu'à aucun moment, il n'a renoncé à ce prêt à usage et qu'au contraire, il a dû libérer les lieux contraint et forcé par la SAS GLAUGES DES ALPILLES,

-de condamner la SAS GLAUGES DES ALPILLES à lui payer la somme de 414 435 euros correspondant à la valeur dont le fonds a augmenté suite à la construction,

-de débouter la SAS GLAUGES DES ALPILLES de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose notamment que sa demande est fondée sur les dispositions de l'article 555 du code civil et non sur le commodat dont il a seulement fait état pour établir sa bonne foi et justifier des travaux qu'il a fait réaliser et qui ont augmenté la valeur de la propriété de la SAS GLAUGES DES ALPILLES, et qu'ainsi le problème de l'inopposabilité du commodat à cette société n'a aucun intérêt.

Une ordonnance de clôture a été rendue par le conseiller de la mise en état le 10 janvier 2011.

Motifs de la décision :

Attendu qu'il convient d'observer que contrairement aux énonciations du jugement déféré, l'acte sous seing privé du 2 janvier 1993, aux termes duquel [I] [N], agissant en qualité de gérant de la SCEV [Adresse 7], a autorisé les époux [N]-[W] à construire une maison d'habitation sur la parcelle alors cadastrée AT [Cadastre 3] et a mis à leur disposition une superficie d'un hectare de terrain autour de leur maison à charge pour eux de l'entretenir, de la valoriser et d'en faire un jardin d'agrément à leurs frais, étant précisé que « ce prêt à usage gratuit est donné leur vie durant », et que « monsieur et madame [N]-[W] resteront propriétaires de la maison construite jusqu'au terme du présent prêt », n'a pas été enregistré au service des impôts le 26 mai 1993 mais le 26 mai 2003 ;

Attendu que dans la lettre qu'elle a adressée à [I] [N] le 18 mai 2000, la SAS GLAUGES DES ALPILLES rappelle que la SCEV [Adresse 7] est propriétaire de la villa que ce dernier occupe et rien dans les termes de cette lettre ne permet d'établir qu'elle avait connaissance de la convention du 2 janvier 1993 ; qu'en tout état de cause, cette convention conclue entre la SCEV [Adresse 7] et les époux [N]-[W] n'est pas opposable à la SAS GLAUGES DES ALPILLES ;

Attendu qu'en demandant, sur le fondement de l'article 555 du code civil, le remboursement d'une somme égale à celle dont le fonds sur lequel il a édifié la maison litigieuse a augmenté de valeur, [I] [N] admet nécessairement que la convention du 2 janvier 1993 a cessé de s'appliquer et que l'accession s'est opérée ;

Attendu que cette convention n'étant pas opposable à la SAS GLAUGES DES ALPILLES, l'accession s'est nécessairement opérée au profit de la SCEV [Adresse 7] qui a pu lui vendre le terrain et la maison ; que l'action fondée sur l'article 555 du code civil devant être dirigée contre le propriétaire bénéficiaire de l'accession, il convient, sans que cela constitue une remise en cause de l'ordonnance du 21 février 2008 aux termes de laquelle le juge de la mise en état a statué sur des fins de non-recevoir et dont il est soutenu qu'elle a autorité de la chose jugée, de déclarer [I] [N] irrecevable en sa demande dirigée contre la SAS GLAUGES DES ALPILLES ;

Attendu que la mauvaise foi ou l'intention de nuire d'[I] [N] n'étant pas établies, ce dernier n'a commis aucune faute dans l'exercice de son droit d'agir en justice ; que la SAS GLAUGES DES ALPILLES sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Par ces motifs :

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare [I] [N] irrecevable en sa demande dirigée contre la SAS GLAUGES DES ALPILLES sur le fondement de l'article 555 du code civil,

Déboute la SAS GLAUGES DES ALPILLES de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne [I] [N] aux dépens de première instance et d'appel et autorise la SCP BLANC et CHERFILS, avoués, à recouvrer directement contre lui, ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre b
Numéro d'arrêt : 10/01384
Date de la décision : 14/03/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4B, arrêt n°10/01384 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-14;10.01384 ?
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