COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT MIXTE
DU 03 MARS 2011
HF
N° 2011/154
Rôle N° 10/01278
[R] [A] [W]
[G] [U] épouse [W]
C/
[E] [D] veuve [P]
[J] [P]
[O] [P]
[B] [P] épouse [K]
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 11 Janvier 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/05655.
APPELANTS
Monsieur [R] [A] [W]
né le [Date naissance 4] 1941 à [Localité 18] (33), demeurant [Adresse 16]
Madame [G] [U] épouse [W]
née le [Date naissance 3] 1939 à [Localité 13] (ALLEMAGNE), demeurant [Adresse 16]
Représentés tous deux par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour,
Assistés de la SCP COUTELIER, avocats au barreau de TOULON en la personne de Me Laurent COUTELIER, avocat au barreau de TOULON
INTIMES
Madame [E] [D] veuve [P]
née le [Date naissance 2] 1924 à [Localité 17], demeurant [Adresse 9]
Monsieur [J] [P]
né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 14] (83), demeurant [Adresse 8]
Mademoiselle [O] [P]
née le [Date naissance 7] 1954 à [Localité 14] (83), demeurant [Adresse 12]
Madame [B] [P] épouse [K]
née le [Date naissance 6] 1955 à [Localité 14] (83), demeurant [Adresse 11]
Représentés tous les quatre par la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER, avoués à la Cour,
Assistés de Me Sophie QUIROUARD-FRILEUSE, avocat au barreau de TOULON
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 26 Janvier 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, monsieur François GROSJEAN, président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Michel NAGET, Conseiller
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Lugdivine BERTHON.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2011,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mademoiselle Lugdivine BERTHON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 24 décembre 1989, monsieur [V] [P] vendait à monsieur et madame [W] une parcelle de terre n° [Cadastre 5] sur la commune de [Localité 15] (Var), supportant diverses constructions à usage agricole, pour un prix de 600.000 francs, payable par fractions et dans son intégralité au plus tard le 1er juillet 1992, date de signature de l'acte authentique de vente, sous condition suspensive du paiement du prix aux échéances fixées.
Le même jour, monsieur [V] [P] et monsieur [W] signaient un bail rural à ferme portant sur la même parcelle pour une durée de neuf années du 1er janvier 1990 au 1er janvier 1999.
Un document manuscrit de monsieur [V] [P] établissait les comptes entre les parties au 31 décembre 1993, faisant ressortir un retard de paiement de la part des acheteurs, et fixant un nouvel échéancier jusqu'au 1er juillet 1997, en tenant compte d'une revalorisation du prix et d'intérêts moratoires.
Monsieur [V] [P] décédait le [Date décès 10] 1994.
Des paiements étaient effectués par les acheteurs jusqu'en décembre 1998.
*
Monsieur [R] [I], maraîcher, faisait l'objet le 1er octobre 1998 de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, donnant lieu à l'arrêté d'un plan de redressement, puis à un jugement de clôture pour extinction du passif en date du 2 décembre 2010.
Madame [I] faisait également l'objet de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire par jugement du 8 novembre 1999, donnant également lieu à l'arrêté d'un plan de redressement, et le prononcé en date du 15 février 2010 d'un jugement de clôture pour extinction du passif.
*
Par exploit du 6 octobre 2006, les époux [I] assignaient madame [E] [D] veuve [P], monsieur [J] [P], mademoiselle [O] [P], madame [B] [K] (les consorts [P]), devant le tribunal de grande instance de Toulon pour dire la vente de la parcelle de terre parfaite.
Vu leur appel le 21 janvier 2010 du jugement prononcé le 11 janvier 2010 ayant débouté les consorts [P] d'une fin de non-recevoir, débouté les époux [I] de leur demande de réalisation de la vente, constaté la résolution de cette dernière, dit que les consorts [P] conserveront les sommes versées par les époux [I] (125.770,44 euros), débouté les époux [W] de toutes leurs autres demandes, condamné aux dépens et au paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;
Vu leurs conclusions notifiées le 29 novembre 2010 tendant à voir dire la vente parfaite, que l'arrêt à venir vaudra titre de propriété et sera publié, voir condamner les consorts [P] au paiement d'une indemnité de 10.000 euros pour leur résistance abusive, subsidiairement voir condamner les consorts [P] au remboursement de la somme de 125.770,44 euros outre le paiement d'une somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts, en tout état de cause les voir condamner aux dépens et au paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions signifiées le 11 janvier 2011 par les consorts [P], partiellement appelants à titre incident sur leur fin de non-recevoir, tendant pour le surplus à la confirmation, et à la condamnation des appelants aux dépens et au paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu la clôture prononcée le 26 janvier 2011 ;
MOTIFS
1) Quel que soit le mérite de leur action, les époux [W] ont à l'évidence intérêt à agir, et les consorts [P] ne peuvent qu'être déboutés de leur fin de non-recevoir pour ce motif.
2) Aux termes de l'acte du 24 décembre 1989, la vente était faite 'sous la condition suspensive du paiement des sommes (...) et des dates mentionnées' et il était prévu que '... faute d'un réglement à la date indiquée (...) cela entraînera en outre la déchéance du terme (...)' et qu' 'à défaut d'un règlement dans les délais prévus, la présente vente sera considérée comme nulle et non avenue si bon semble à monsieur [V] [P], qui aura le droit s'il le préfère d'en exiger la réalisation avec mise en demeure immédiate du prix (...)', ce qui donne aux consorts [P] le choix, en cas de non réalisation de la condition suspensive, soit d'estimer que la vente est nulle, soit d'exiger la réalisation de la vente en délivrant une mise en demeure de payer le solde du prix restant dû.
Aux termes de leurs écritures, les époux [I] indiquent avoir versé, au 30 juin 1997, une somme totale 712.500 francs (450.000 + 75.000 + 75.000 + 75.000 + 37.500).
Or, à s'en tenir à l'état de compte au 31 décembre 1993 rédigé par monsieur [V] [P], valant prorogation de délai de paiement jusqu'au 30 juin 1997 (avec fixation d'un nouvel échéancier), intégrant les intérêts au taux annuel de 12 % prévus à l'acte du 24 décembre 1989 en cas de retard de paiement à compter du 1er juillet 1992, et dont la portée contractuelle n'est discutée par aucune des parties, les époux [I] auraient dû avoir réglé au 30 juin 1997, pour la seule fin de l'acquisition de la parcelle et indépendamment des fermages à régler en exécution du bail rural, la somme totale de 758.500 francs, suivant le décompte suivant :
- au 31/12/89 ........................................................ 150.000
- du 01/01/90 au 31/12/93 : 75.000 x 4 = ......... 300.000
- int à 12 % du 01/07/92 au 31/12/93 .................. 13.500
- du 01/01/94 au 31/12/96 : 84.000 x 3 ............... 252.000
- du 01/01/97 au 30/06/97 ................................... 43.000
---------
Total 758.500
N'ayant pas respecté le nouvel échancier octroyé par monsieur [P], ses ayants-droit, qui demandent à la cour de 'constater le défaut de règlement dans les délais prévus et (dire) la présente vente nulle', sont fondés à opposer à la demande des époux [W] de voir dire la vente parfaite, le moyen tiré de la nullité de la vente, expressément prévu au contrat en cas de non réalisation de la condition suspensive du respect de l'échéancier des paiements, et sans qu'il importe à cet égard que les époux [W] aient, postérieurement au 1er juillet 1997, été déclarés en redressement judiciaire, et que les consorts [P] n'aient pas déclaré de créance au passif de leurs procédures collectives (qui n'en détenaient aucune à ce moment par suite de la non-réalisation de la condition suspensive de l'annulation de la vente), et il y aura lieu de dire que la vente est, non pas résolue, mais nulle.
3) Sur la question du sort des sommes payées par les époux [W] pour l'acquisition de la parcelle, la cour estime nécessaire, d'office, de révoquer la clôture et d'ordonner la réouverture des débats à l'effet de recueillir les observations des parties sur la qualification de clause pénale qui pourrait être donnée à la clause de l'acte de vente du 24 décembre 1989 prévoyant que 'faute d'un règlement à la date indiquée (...) les sommes versées resteront définitivement acquises au vendeur (...)', et sur son éventuel caractère manifestement excessif.
4) Le sort des autres demandes est réservé.
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Il suit de l'ensemble de ce qui précède que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté les consorts [P] de leur fin de non-recevoir, déclaré recevable la demande des époux [W], débouté les époux [W] de leur demande en réalisation de la vente, et infirmé en ce qu'il a constaté la résolution de la vente passée le 24 décembre 1984.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté les consorts [P] de leur fin de non-recevoir, déclaré recevable la demande des époux [W], débouté les époux [W] de leur demande en réalisation de la vente.
L'infirme en ce qu'il a constaté la résolution de la vente passée le 24 décembre 1984.
Statuant à nouveau du chef de la disposition infirmée,
Dit nulle la vente conclue le 24 décembre 1984.
Avant-dire-droit,
Révoque la clôture et ordonne la réouverture des débats aux fins énoncées dans les motifs à l'audience du 25 mai 2011 à 14H30.
Dit qu'une nouvelle clôture interviendra à cette audience avant l'ouverture des débats.
Réserve le sort des autres demandes.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT