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27/11/2009 | FRANCE | N°08/00568

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, 11e chambre a, 27 novembre 2009, 08/00568


ARRÊT AU FOND DU 27 NOVEMBRE 2009

No 2009 / 673

Rôle No 08 / 00568

Guy X...

C /

Patrice Y... SCP Z... A... Y...

Grosse délivrée le : à : SCP BLANC SCP LATIL

réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de FORCALQUIER en date du 19 Novembre 2007 enregistré au répertoire général sous le no 07 / 000084.

APPELANT

Monsieur Guy X... né le 20 Octobre 1939 à SIMIANE LA ROTONDE (04208), demeurant... représenté par la SCP BLANC-CHERFILS, avoués à la Cour, Assisté de Me Michel CHAPUIS

, avocat au barreau de DIGNE

INTIMES

Maître Patrice Y... demeurant...-13090 AIX EN PROVENCE représenté par la SCP LATIL-PENAR...

ARRÊT AU FOND DU 27 NOVEMBRE 2009

No 2009 / 673

Rôle No 08 / 00568

Guy X...

C /

Patrice Y... SCP Z... A... Y...

Grosse délivrée le : à : SCP BLANC SCP LATIL

réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de FORCALQUIER en date du 19 Novembre 2007 enregistré au répertoire général sous le no 07 / 000084.

APPELANT

Monsieur Guy X... né le 20 Octobre 1939 à SIMIANE LA ROTONDE (04208), demeurant... représenté par la SCP BLANC-CHERFILS, avoués à la Cour, Assisté de Me Michel CHAPUIS, avocat au barreau de DIGNE

INTIMES

Maître Patrice Y... demeurant...-13090 AIX EN PROVENCE représenté par la SCP LATIL-PENARROYA-LATIL-ALLIGIER, avoués à la Cour Assisté de Me Gérard DAUMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

SCP Z... A... Y... Huissiers de justice associés, demeurant...-13090 AIX EN PROVENCE représentée par la SCP LATIL-PENARROYA-LATIL-ALLIGIER, avoués à la Cour, Assistée de Me Gérard DAUMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2009 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Robert PARNEIX, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Robert PARNEIX, Président Madame Danielle VEYRE, Conseiller Mme Hélène BARTHE-NARI, Vice-président placé, affecté à la cour par ordonnance spéciale du Premier Président

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Novembre 2009.

ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Novembre 2009,
Signé par Monsieur Robert PARNEIX, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon bail verbal du 1er février 1993, M. X... a loué un studio à M. C.... Souhaitant réviser le montant du loyer, qui était alors de 224, 31 euros par mois, il a demandé, courant juillet 2004, à un agent immobilier, M. D..., d'évaluer la valeur locative de son bien et de saisir un huissier de justice afin d'engager la procédure de révision.
Au motif que l'acte délivré par l'huissier était nul et inefficace et lui avait fait perdre le bénéfice de l'augmentation escomptée, M. X... a assigné Maître Y..., ainsi que la SCP Z...- A...- Y..., en réparation de son préjudice.
Par jugement du 19 novembre 2007, le tribunal d'instance de Forcalquier l'a débouté de sa demande au motif que le courrier adressé à l'huissier par M. D... était imprécis, faute de mentionner la date de prise d'effet et donc d'échéance du bail.
M. X... a interjeté appel de cette décision par acte du 10 janvier 2008.
Dans ses conclusions déposées le 30 avril 2008, il sollicite la réformation du jugement et la condamnation de Maître Y... et de la SCP Z...- A...- Y... au paiement de la somme de 6 936, 84 euros, outre 86, 45 euros au titre des frais de signification de l'acte nul, le remboursement des frais d'expertise réglés à l'agent immobilier et 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir qu'il incombait à l'huissier de délivrer un acte efficace et non une simple attestation de valeur locative dépourvue de tout effet et inutile.
Dans ses conclusions en réplique déposées le 1er septembre 2009, Maître Y... fait valoir que seule la responsabilité de la SCP Z...- A...- Y... peut être recherchée. Il conteste avoir commis une faute et considère qu'en raison de l'ambiguïté de la lettre de M. D..., il pouvait n'adresser au locataire qu'une simple attestation de la valeur locative du studio. En effet, faute de précision sur la date d'échéance du bail, l'augmentation du loyer était subordonnée au consentement du locataire et ne pouvait s'effectuer dans les termes de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989.
A titre subsidiaire, il estime que sa responsabilité doit être partagée avec celle de l'agent immobilier et que le préjudice de M. X... est incertain. Il ne s'oppose pas à une expertise aux frais avancés de ce dernier et sollicite une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la mise hors de cause de Maître Y... à titre personnel
Attendu que le premier juge a exactement retenu que Maître Y... avait agi en qualité de membre de la SCP Z...- A...- Y... dont seule la responsabilité pouvait être recherchée, de sorte qu'il devait être mis hors de cause à titre personnel ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
2) Sur la responsabilité de la SCP Z...- A...- Y...
Attendu qu'après avoir estimé la valeur locative du studio à 417 euros par mois, M. D... a adressé le 6 juillet 2004 à la SCP Z...- A...- Y... une lettre rédigée en ces termes :
" J'interviens en qualité de conseil de M. X..., propriétaire d'un studio à Aix-en-Provence, ... et loué à M. C....
M. X... souhaite que vous notifiez à son locataire, avant le 31 juillet 2004, l'attestation de valeur locative, afin de procéder à la révision du prix de loyer.
Selon ses indications, M. C... est titulaire d'un bail verbal et serait entré dans les lieux au 1er février " ;

Attendu que l'acte signifié le 28 juillet 2004 par Maître Y... à M. C... est rédigé en ces termes :

" Il vous est signifié et remis copie certifiée conforme :
D'une attestation de loyer établie par M. Patrick D..., expert immobilier et commercial, en date du 6 juillet 2004 et relative à l'appartement que vous occupez en votre qualité de locataire (...).
Le montant du nouveau loyer défini et mentionné dans ladite attestation du 6 juillet 2004 sera effectif à compter du 1er février 2005 " ;
Attendu que cet acte était nul en la forme, en raison de l'absence de reproduction des termes de l'article 17 c de la loi du 6 juillet 1989 et ne pouvait donc introduire valablement la procédure de révision du loyer ;
Attendu que s'il est exact que la lettre de M. D... pouvait prêter à confusion, faute de mentionner la date précise de prise d'effet du bail, il appartenait cependant à Maître Y..., en sa qualité de professionnel qualifié, de dissiper cette ambiguïté en se rapprochant de son mandant ;
Attendu que M. X... s'est d'ailleurs rendu à l'étude d'huissier le 21 juillet 2004 et a expressément porté, sur la lettre de saisine de M. D..., que " la révision du montant du loyer sera effective à compter du 1er février 2005 ", ce qui impliquait que l'échéance du bail se situait à cette date ; que toutefois Maître Y... n'a pas tiré les conséquences de cette précision car, s'il a effectivement procédé à une signification avant le 31 juillet 2004, soit six mois avant l'échéance du bail, il s'est borné à délivrer une simple attestation de valeur locative, soumise à l'acceptation discrétionnaire du locataire et impropre à engager la procédure de révision légale du loyer ;
Attendu que l'imprécision de la lettre de M. D..., pouvant laisser penser que le bail avait débuté le 1er février 2004, ne suffit pas à exonérer Maître Y... de son erreur ; qu'en effet, toujours en sa qualité de professionnel, il aurait dû s'interroger sur la requête a priori surprenante d'un bailleur sollicitant une révision amiable du loyer quelques jours seulement après la signature du bail mais dans les formes prévues pour la révision du loyer en fin de contrat ;
Attendu qu'il résulte de ces constatations que Maître Y... a manqué tout à la fois à son obligation de conseil et à son devoir de délivrer un acte efficace conforme à la demande de son client ; qu'il est en conséquence tenu de réparer le préjudice causé par son erreur ; que le jugement qui a débouté M. X... de sa demande de dommages et intérêts sera réformé ;
3) Sur le préjudice
Attendu que M. X... estime que son préjudice est égal à la différence entre le loyer escompté après révision (15 012 euros) et le loyer effectivement perçu (8 075, 16 euros) ;
Mais attendu qu'il n'est pas établi que le loyer proposé aurait été accepté par le locataire ni qu'à l'issue de la conciliation amiable puis, le cas échéant, de la procédure judiciaire, la valeur locative finalement retenue aurait été identique à celle résultant de l'estimation de M. D... ; qu'en tout état de cause, l'augmentation du loyer aurait été appliquée par tiers chaque année et non d'emblée en sa totalité ; que le calcul proposé par M. X... est en conséquence inexact ;
Attendu, en définitive, que le préjudice subi par M. X... s'analyse en une perte de chance qui sera justement indemnisée par l'allocation d'une somme de 2 000 euros ; qu'il convient d'ajouter à cette somme le remboursement de l'acte inefficace délivré par Maître Y..., soit la somme de 86, 45 euros ; qu'en revanche il y a lieu de rejeter, faute de justification, la demande de remboursement des honoraires de l'agent immobilier ;
Attendu qu'il est justifié de faire droit à la demande de M. X... sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de lui allouer à ce titre une indemnité de 1 500 euros ; que la même demande formée par la SCP Z...- A...- Y..., qui succombe en cause d'appel, sera rejetée ;
Et attendu que la partie perdante est condamnée aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a mis hors de cause Maître Y... à titre personnel ;
Statuant à nouveau sur le surplus ;
Condamne la SCP Z...- A...- Y... à payer à M. X... la somme de 2 086, 45 euros (deux mille quatre vingt six euros et quarante cinq centimes) à titre de dommages et intérêts et celle de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette la demande de la SCP Z...- A...- Y... sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCP Z...- A...- Y... aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
Et le président a signé avec la greffière.

La greffièreLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 08/00568
Date de la décision : 27/11/2009

Analyses

AVOCAT - Responsabilité - Obligation de conseil - Rédaction d'actes

Si une erreur est présente dans la forme d'un acte impliquant un professionnel du droit, la responsabilité de ce dernier est engagée pour avoir manqué à son obligation de conseil et à son devoir de délivrer un acte efficace et conforme à la demande de son client


Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Forcalquier, 19 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2009-11-27;08.00568 ?
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