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27/05/2009 | FRANCE | N°08/03664

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, 10o chambre, 27 mai 2009, 08/03664


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 27 MAI 2009

No 2009 /

Rôle No 08 / 03664

Fabian X...

C /

Tahar Y...
MATMUT ASSURANCES
MUTUELLE SOCIALE AGRICOLE

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 16 Janvier 2008 enregistré au répertoire général sous le no 06 / 01202.

APPELANTE

Madame Fabian X...
né le 24 Décembre 1968 à MANOSQUE (04102), demeurant C /

Melle Z... Hélène ...
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de la SCP PREZIOSI-CECCALDI, avocats au barreau de MARSEILLE sub...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 27 MAI 2009

No 2009 /

Rôle No 08 / 03664

Fabian X...

C /

Tahar Y...
MATMUT ASSURANCES
MUTUELLE SOCIALE AGRICOLE

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 16 Janvier 2008 enregistré au répertoire général sous le no 06 / 01202.

APPELANTE

Madame Fabian X...
né le 24 Décembre 1968 à MANOSQUE (04102), demeurant C / Melle Z... Hélène ...
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de la SCP PREZIOSI-CECCALDI, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur Tahar Y..., demeurant ...
représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
assisté de la SCP BREU M. L-DE VILLEPIN E., avocats au barreau d'AIX EN PROVENCE substituée par Me Pierre CONTE, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

MATMUT ASSURANCES RCS ROUEN B 493 147 003, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis, 66, Rue de Sotteville-76030 ROUEN CEDEX
représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
assistée de la SCP BREU M. L-DE VILLEPIN E., avocats au barreau d'AIX EN PROVENCE substituée par Me Pierre CONTE, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

MUTUELLE SOCIALE AGRICOLE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège sis
assignée, 25 B Avenue du Commandant Dumont-05000 GAP
défaillant

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 25 Mars 2009 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2009.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2009,

Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

E X P O S É D U L I T I G E

M. Fabian X... a été victime, le 20 mars 2005 à MANOSQUE (Alpes-de-Haute-Provence) en tant que motocycliste, d'un accident de la circulation impliquant le véhicule terrestre à moteur conduit par M. Taha Y..., assuré auprès de la SA MATMUT assurances.

Par jugement contradictoire du 16 janvier 2008, le Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS a :

- dit que l'accident du 20 mars 2005 trouve sa cause exclusive dans la faute inexcusable du conducteur victime, M. Fabian X...,

- débouté M. Fabian X... de toutes ses demandes,

- condamné M. Fabian X... à payer à M. Tahar Y... et à la SA MATMUT assurances la somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné M. Fabian X... aux entiers dépens,

- ordonné l'exécution provisoire de sa décision.

M. Fabian X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 28 février 2008.

Vu les conclusions récapitulatives de M. Fabian X... en date du 16 décembre 2008.

Vu les conclusions récapitulatives de M. Tahar Y... et de la SA MATMUT assurances en date du 11 février 2009.

Vu l'assignation de la Mutuelle sociale agricole, notifiée à personne habilitée le 27 août 2008 à la requête de M. Fabian X....

Vu l'ordonnance de clôture en date du 25 février 2009.

M O T I F S D E L'A R R Ê T

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 4 de la loi no 85-677 du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur, abstraction faite du comportement de l'autre conducteur dont le véhicule est impliqué dans l'accident, a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis dès lors qu'elle a contribué à sa réalisation.

Attendu que c'est à tort que le premier juge a fait état d'une faute " inexcusable " de la victime, la loi n'imposant pas, pour limiter ou exclure son droit à indemnisation, que la faute de la victime présente un caractère inexcusable.

Attendu que c'est également à tort que le premier juge a dit que cette faute avait été la cause " exclusive " de l'accident, ce qui suppose l'analyse du comportement du conducteur impliqué.

Attendu dès lors qu'il convient d'infirmer le jugement déféré et de statuer à nouveau sur les demandes des parties.

Attendu qu'une procédure d'accident a été établie par le Commissariat de Police de MANOSQUE, qu'il en ressort que l'accident s'est produit le 20 mars 2005 à 18 h. 10, à l'intersection, hors agglomération, de la RD 907 et du CD 6, qu'à cette intersection se trouve, pour les conducteurs venant du CD 6, un ilôt directionnel à sens unique de circulation.

Attendu qu'aucun des protagonistes et témoin n'a indiqué avoir été gêné par le soleil couchant et qu'en conséquence il n'est nullement établi, comme l'allègue M. Fabian X... dans ses conclusions, que le soleil aurait " pu avoir un rôle perturbateur " (page 6, 5ème paragraphe).

Attendu que M. Fabian X... affirme qu'il circulait sur la RD 907 en provenance d'APT et en direction de MANOSQUE et qu'arrivé à l'intersection avec le CD 6 il est entré en collision avec l'automobile conduite par M. Tahar Y... qui circulait en sens inverse sur la même RD 907 et qui tournait à gauche pour s'engager dans le CD 6 en direction de PIERREVERT.

Attendu que M. Tahar Y... affirme, pour sa part, que M. Fabian X... l'a heurté de face, que dans une seconde déposition effectuée le 30 mai 2006, il précise que M. Fabian X... ne circulait pas sur la RD 907 en sens inverse mais venait de PIERREVERT sur le CD 6 et avait contourné l'ilôt directionnel sur la gauche, en sens inverse.

Attendu que contrairement à ce qu'allègue M. Fabian X..., les deux dépositions de M. Tahar Y... ne sont nullement contradictoires, la première étant simplement succincte et la deuxième venant apporter davantage de précisions sur les circonstances de l'accident.

Attendu par ailleurs qu'il existe un témoin de l'accident, Mme Isabelle D... épouse E... qui circulait au volant de son véhicule dans le même sens de circulation que M. Tahar Y..., derrière lui, qu'à l'intersection avec le CD 6, alors que ce dernier avait mis son clignotant pour signaler son changement de direction vers la gauche pour prendre le CD 6, elle a commencé à le dépasser sur la droite pour continuer tout droit en direction d'APT, qu'elle affirme, de façon formelle, que M. Fabian X... venait, quant à lui, de PIERREVERT sur le CD 6.

Attendu que rien ne permet d'affirmer, comme l'allègue M. Fabian X..., que ce témoin aurait eu sa visibilité gênée par le soleil, qu'en outre le fait que Mme Isabelle D... épouse E... circulait derrière M. Tahar Y... ne l'empêchait pas de voir autour d'elle étant observé que le véhicule de M. Tahar Y... est une berline de type Ford Mondeo dont le gabarit ne bouche pas la vue aux véhicules qui le suivent et que la configuration des lieux, telle qu'elle résulte des photographies produites aux débats, montre que le carrefour est situé sur une zone plane, particulièrement dégagée, sans aucun obstacle de nature à gêner la visibilité.

Attendu en conséquence que le témoignage de Mme Isabelle D... épouse E... est particulièrement circonstancié et crédible et vient confirmer la version de M. Tahar Y... selon laquelle M. Fabian X... circulait sur le CD 6 en provenance de PIERREVERT.

Attendu que l'examen des photographies des deux engins prises après l'accident montre que le point de choc du véhicule de M. Tahar Y... a eu lieu à l'avant gauche et que, pour la motocyclette de M. Fabian X..., il s'agit également d'un point de choc avant, qu'on est donc bien en présence d'un choc frontal des deux engins, venant encore confirmer les versions de M. Tahar Y... et de Mme Isabelle D... épouse E..., alors que dans la version de M. Fabian X... où, selon lui, le véhicule de M. Tahar Y... lui aurait coupé la route pour tourner à gauche devant lui, le point de choc aurait nécessairement dû se porter sur le côté droit du véhicule de M. Tahar Y....

Attendu qu'à l'appui de sa version M. Fabian X... produit un rapport d'expertise privée établi par M. Edmond F..., que cette pièce a été régulièrement produite aux débats et a pu faire l'objet d'une discussion contradictoire de la part de toutes les parties.

Attendu que cet expert, dans les seize premières pages de son rapport, ne fait que reprendre les procès-verbaux de police et les dépositions en y apportant des commentaires personnels purement subjectifs et ne comportant aucune appréciation d'ordre technique ou scientifique (affirmant notamment péremptoirement à plusieurs reprises que le soleil couchant était " gênant, voire dangereux ", ce qui relève de sa seule opinion).

Attendu que les sept pages suivantes ne sont que la description des deux véhicules accidentés, confirmant d'ailleurs qu'il s'agit bien d'un choc frontal et que les autres sept pages suivantes ne sont constituées, pour l'essentiel, que de croquis (dont deux reproductions d'une simulation informatique), reprenant les deux versions de l'accident.

Attendu que la motivation de l'expert pour retenir la seule version de M. Fabian X... ne tient, en réalité, qu'en une page sur les 32 de son rapport, que son argument essentiel (repris à trois reprises dans sa page de conclusions) est que le soleil couchant était " gênant, voire dangereux " pour lui permettre d'écarter purement et simplement le témoignage de Mme Isabelle D... épouse E... et d'expliquer que M. Tahar Y... a pu être ébloui par le soleil au moment de l'accident.

Attendu qu'il apparaît donc que sous une apparence d'objectivité scientifique, entretenue notamment par les croquis et les reproductions de simulations informatique, ces conclusions sont purement subjectives et hypothétiques, ne reposant que sur des présupposés affirmés péremptoirement sans aucune justification objective.

Attendu que ce document ne saurait donc pouvoir contredire sérieusement les constatations de police et les dépositions concordantes de M. Tahar Y... et du témoin Mme Isabelle D... épouse E... dont il résulte qu'il s'est agi d'un choc frontal alors que M. Fabian X..., circulant sur le CD 6 en provenance de PIERREVERT, s'était engagé dans l'intersection avec la RD 907 en prenant l'îlot directionnel sur la gauche au lieu de le prendre sur la droite, se trouvant ainsi à contresens, face au véhicule de M. Tahar Y....

Attendu qu'il s'agit bien là d'un comportement fautif de la part de M. Fabian X... d'une particulière gravité et que cette faute, par sa nature et son importance, exclut l'indemnisation des dommages qu'il a subis du fait de cet accident.

Attendu dès lors que M. Fabian X... sera débouté de l'ensemble de ses demandes.

Attendu que le présent arrêt sera déclaré commun et opposable à la Mutuelle sociale agricole.

Attendu qu'il est équitable, compte tenu au surplus de la situation économique de la partie condamnée, d'allouer à M. Tahar Y... et à la SA MATMUT assurances la somme globale de 1. 500 € au titre des frais par eux exposés et non compris dans les dépens.

Attendu que M. Fabian X..., partie perdante, sera condamné au paiement des dépens de première instance et d'appel.

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire.

Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau :

Dit que M. Fabian X... a commis une faute excluant l'indemnisation des dommages qu'il a subis du fait de l'accident de la circulation du 20 mars 2005.

Déboute en conséquence M. Fabian X... de l'ensemble de ses demandes.

Déclare le présent arrêt commun et opposable à la Mutuelle sociale agricole.

Condamne M. Fabian X... à payer à M. Tahar Y... et à la SA MATMUT assurances la somme globale de MILLE CINQ CENTS EUROS (1. 500 €) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Condamne M. Fabian X... aux dépens de la procédure de première instance et d'appel et autorise la S. C. P. SIDER Avoués associés, à recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.

Rédacteur : M. RAJBAUT

Madame JAUFFRESMadame SAUVAGE
GREFFIÈRE PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : 10o chambre
Numéro d'arrêt : 08/03664
Date de la décision : 27/05/2009

Analyses

ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Indemnisation - Exclusion ou limitation - Conditions - Faute du conducteur

En vertu des dispositions de l'article 4 de la loi nº 85-677 du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur, abstraction faite du comportement de l'autre conducteur dont le véhicule est impliqué dans l'accident, a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis dès lors qu'elle a contribué à sa réalisation. C'est à tort que le premier juge a fait état d'une faute "inexcusable" de la victime, la loi n'imposant pas, pour limiter ou exclure son droit à indemnisation, que la faute de la victime présente un caractère inexcusable. C'est également à tort que le premier juge a dit que cette faute avait été la cause "exclusive" de l'accident, ce qui suppose l'analyse du comportement du conducteur impliqué. Dès lors il convient d'infirmer le jugement déféré et de statuer à nouveau sur les demandes des parties.


Références :

article 4 de la loi nº 85-677 du 5 juillet 1985

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Digne-les-Bains, 16 janvier 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2009-05-27;08.03664 ?
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