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10/02/2009 | FRANCE | N°07/00294

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, 14e chambre, 10 février 2009, 07/00294


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE14e Chambre

ARRÊT AU FOND DU 10 FÉVRIER 2009

N° 2009
Rôle N° 07/00294
Association OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU
C/
URSSAF DES ALPES MARITIMES
OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU SECRETERIAT GENERALDRASS

Me François BRETONNIERE, avocat au barreau de LIMOGES
Me Richard ALVAREZ, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ALPES MARITIMES en date du 12 Décembre 2006, enregistré au répertoire général sous le n° 20401753.

APPELANT

E

Association OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU, demeurant BP 75 - 06902 SOPHIA ANTIPOLIS CEDEX
représentée par Me Fr...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE14e Chambre

ARRÊT AU FOND DU 10 FÉVRIER 2009

N° 2009
Rôle N° 07/00294
Association OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU
C/
URSSAF DES ALPES MARITIMES
OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU SECRETERIAT GENERALDRASS

Me François BRETONNIERE, avocat au barreau de LIMOGES
Me Richard ALVAREZ, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ALPES MARITIMES en date du 12 Décembre 2006, enregistré au répertoire général sous le n° 20401753.

APPELANTE

Association OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU, demeurant BP 75 - 06902 SOPHIA ANTIPOLIS CEDEX
représentée par Me François BRETONNIERE, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
URSSAF DES ALPES MARITIMES, demeurant 152 avenue de la Californie - 06295 NICE CEDEX 3
représenté par Me Richard ALVAREZ, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

OFFICE INTERNATIONAL DE L'EAU SECRETERIAT GENERAL, demeurant 22 rue Edouard Chamberland - 87065 LIMOGES CEDEX
représentée par Me François BRETONNIERE, avocat au barreau de LIMOGES
DRASS, demeurant 23-25 Rue Borde - 13285 MARSEILLE CEDEX 08
non comparant
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 02 Décembre 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Daniel DUCHEMIN, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Daniel DUCHEMIN, PrésidentMadame Martine MATHIEU-GALLI, ConseillerMonsieur André CHAUVET, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Janvier 2009 et prorogé au 03 Février 2009.

ARRÊT

Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Février 2009
Signé par Monsieur Daniel DUCHEMIN, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
- Procédure et prétentions
L'Office International de l'Eau (OIEau) est une association de la loi de 1901 reconnue d'utilité publique, dont l'activité concerne le développement de compétences pour la gestion et la protection des ressources en eau, dans le cadre de la mise en oeuvre de programmes européens et internationaux de coopération.
Il a fait l'objet d'un contrôle de l'URSSAF des Alpes Maritimes portant sur la période 2000-2002 et un redressement lui a été notifié concernant le refus d'exonération et la réintégration de cotisations sociales portant sur les rémunérations versées aux experts en mission de courte durée.
Contestant cette décision l'OIEau a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes Maritimes qui par jugement en date du 12 décembre 2006, a rejeté son recours et l'a condamnée à payer à l'URSSAF la somme de 15 957 euros.
L'OIEau a relevé appel de la décision le 04 janvier 2007. Il sollicite aujourd'hui l'infirmation de ce jugement et demande à la Cour de dire qu'aucune cotisation sur les sommes versées aux experts n'est due pour les années 2000 à 2002. En conséquence il demande l'annulation du chef de redressement correspondant pour un montant de 14 293 euros.
Il fonde ses prétentions sur le fait que lors de la mise en oeuvre de ces missions, il ne pouvait être considéré en qualité d'employeur, alors qu'il ne maîtrisait pas l'organisation de l'opération et qu'il ne disposait d'aucun pouvoir de direction à l'encontre des experts qui ne lui étaient pas subordonnés, en raison notamment de la spécificité de leurs missions, de leur qualité d'agent public, des sources de financement et du caractère d'intérêt général de ces missions.
Par ailleurs il soutient que l'exonération prévue à l'article D 171-11 du Code de la sécurité sociale doit lui bénéficier en tant qu'opérateur de l'Etat et affirme enfin que les autorités françaises considérant que les sommes ainsi versées ne sont assujetties à aucune taxation en dehors de la CSG et la CRDS, ce principe appliqué à d'autres organismes similaires doit logiquement lui bénéficier.
De son côté, l'URSSAF entend obtenir la confirmation de la décision sur le fondement de l'application de l'article L 311-2 du Code de la sécurité sociale quelque soit la qualification du contrat, alors qu'en l'espèce un lien de subordination existe entre l'organisme et l'expert, lien qui doit être apprécié en fonction de l'activité réelle exercée.
Par ailleurs il soutient que les dispositions de l'article D 171-11 du Code de la sécurité sociale ne sont pas applicables à un organisme privé qui ne peut ainsi bénéficier d'exonérations.
Il demande en conséquence la condamnation de l'OIEau à lui payer la somme de 15 957 euros outre la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer aux écritures des parties oralement reprises à l'audience.
La DRASS régulièrement avisée ne comparaît pas.
SUR CE
Le litige soumis à la Cour impose de s'interroger sur la nature de la relation entre l'OIEau et les agents publics, lors de l'exécution de missions de courte durée prévue par la convention-cadre européenne. Parallèlement se pose la question de la validité, de l'exonération prévue à l'article D 171-11 du Code de la sécurité sociale.
La Convention-cadre du 13 avril 1999
Pour la mise en oeuvre du programme européen « PHARE », le processus de mise à disposition d'experts nationaux ressort de l'application de la Convention-cadre du 13 avril 1999 autorisant l'Etat ou des organismes habilités comme les Agences de l'Eau (annexe 4), à conclure des conventions de jumelage. puis à faire appel à des établissements tels que l'OIEau.
L'intervention d'établissements tels que l'OIEau n'est cependant pas directement réglée par la convention mais découle de pratiques mises en oeuvre en droit interne.
En effet, l'appui institutionnel et de développement aux pays bénéficiaires de conventions de jumelage, a été confié en France à des organismes habilités, mandataires de l'Etat, puis à des établissements de droit privé ou public qui font appel à des agents de l'Etat ou sous contrat avec celui-ci.
Ces agents interviennent pour l'exécution de missions de courte durée, dans le cadre de la « mobilisation de fonctionnaires ou contractuels publics pour des missions courtes et moyennes » faisant l'objet du titre II de la Convention-cadre.
A ce titre les missions relevant de l'exécution de « paquets » (définis à l'article 7) n'entraînent pas une mise à disposition à plein temps du fonctionnaire (article 8 alinéa 1) et l'expert ainsi désigné continue de bénéficier de plein droit de la protection sociale et des assurances de son employeur, l'administration dans la plupart des cas (alinéa 2).
Bien que l'URSSAF semble opérer cette confusion, il convient de relever que la situation des experts (Titre II de la Convention-cadre et son annexe 1 bis) concernant les missions de courte durée ne doit pas être confondue avec celle des Conseillers Pré-Adhésion (CPA) dont le statut de détachement ou de mise à disposition demeure différent (Titre I et annexes 1, 2 et 6).
Il en est de même de la référence à des situations que l'URSSAF juge similaires, alors qu'il s'agissait de personnel détaché ou mis à sa disposition pour une mission de longue durée (pourvoi IFRTP cité par l'URSSAF).
La situation de l'Office
Les écritures des parties, contraires en fait, s'appuient de manière abondante sur une documentation d'origine européenne ou nationale.
Il doit cependant être préalablement considéré que l'ensemble de la documentation fournie par l'OIEau tend à favoriser une interprétation qui ne peut être retenue.
Cette interprétation est constituée par la volonté d'assimilation de la situation de l'OIEau à celle d'organismes de droit public obéissant à des règles différentes qui interviennent au titre d'une opération de jumelage.
Or, il n'est pas discuté que même si l'Etat, indirectement, lui confie l'organisation d'un ensemble de prestations, dans un cadre juridique que l'appelante ne définit pas exactement, l'OIEau ne saurait cependant pouvoir revendiquer un statut public ne résultant d'aucune disposition particulière et doit être considéré comme relevant uniquement du droit privé du fait de sa structure juridique.
En conséquence, bien que le fonctionnaire chargé d'une mission d'expertise de courte durée puisse être réputé exercer une activité accessoire pour laquelle des règles fiscales et sociales sont fixées et en particulier au titre de l'exonération de cotisations prévue à l'article D 171-11 du Code de la sécurité sociale, ces règles, à supposer que l'OIEau soit son employeur, ne peuvent trouver application au profit de cet établissement privé.
Les relations entre l'OIEau et les experts
Au regard de l'article L 311-2 du Code de la sécurité sociale et comme le relève avec pertinence l'URSSAF, l'assujettissement à un régime de sécurité sociale dépend des conditions réelles d'exercice de la profession associées à l'existence d'un lien de subordination, indépendamment de la qualification juridique donnée par les parties.
En l'espèce, l'URSSAF soutient qu'il s'agit de l'exercice pour un fonctionnaire d'une activité accessoire qui passe par un lien de subordination caractérisé par le fait que :dans l'exercice de son activité l'expert répond à un ensemble de directives données par l'OIEau en fonction de l'accord de jumelage, les rapports étaient remis à l'organisme et conditionnaient le paiement de la rémunérationils bénéficient des infrastructures de l'OIEau et ne prennent aucun risque économique.

Il importe en conséquence de procéder à l'analyse des conditions d'intervention de ces experts.
La convention particulière
Il doit être précisé qu'il n'est nul part produit un modèle de contrat ou de convention passée entre l'expert et l'OIEau et qu'aucune des parties n'en revendique la production.
Pourtant l'URSSAF, entend affirmer l'existence d'une relation de travail en fondant son argumentation sur l'énoncé de conditions de rattachement figurant au Titre I, article 3 de la convention-cadre.
Cependant, ce moyen ne saurait être retenu, dès lors que ce texte ne vise que la situation des CPA et demeure nécessairement sans incidence sur la situation d'expert visé au Titre II, d'autant que les conditions revendiquées par l'intimé ne concernent qu'une catégorie particulière de CPA (les agents publics temporaires).
La relation contractuelle est en réalité uniquement concrétisée par une pièce produite par l'OIEau, constituant à la fois un ordre de mission et un document servant à la liquidation des sommes versées.
Toutefois, l'examen de ce document permet de constater que tant l'ordre de mission que cette liquidation comptable sont signés par l'organisme habilité au sens de la Convention-cadre (annexe 4) à savoir l'Agence de l'Eau localement compétente.
La rémunération de l'expert
La rémunération de l'expert apparaît, à l'analyse, pré-déterminée lors de l'élaboration de la convention de jumelage à partir des éléments posés par la Convention-cadre, modifiée pour la partie française en 2001.
En effet, le programme PHARE met en place une contribution financière attachée à la mission ; cette contribution qui obéit à des règles pratiques définies par le programme est (ou peut être) versée au gestionnaire du « paquet » à l'intention de l'expert (article 9 et 10).
Dans ce cadre, l'annexe 1 bis dispose que pour les missions de courte et moyenne durée, les fonctionnaires ou contractuels bénéficient d'ordres de mission sans frais de leur administration d'origine.
L'Agence de l'Eau compétente apparaît alors comme étant le seul donneur d'ordre tant au niveau de la désignation de l'expert que sa rémunération.
Il en ressort que l'OIEau ne dispose d'aucune latitude concernant le montant, les modalités de calcul des sommes dont il n'est pas contesté qu'elle les verse aux experts après liquidation par l'Agence de l'Eau compétente, l'OIEau agissant ainsi en tant que simple organisme-payeur.
Les conditions d'exécution des missions
Le cadre général mais aussi les instructions de mise en oeuvre des missions de courte durée sont définies par :
la convention de jumelage et ses annexes qui règlent l'ensemble des conditions d'intervention tant vis à vis de l'Etat d'origine que de l'état jumeau, aussi bien en ce qui concerne la participation, le suivi, que les conditions matérielles d'exercice,
l'Etat français qui considère l'organisme habilité (l'Agence de l'eau et non l'OIEau) comme étant le mandataire d'une action, dont il entend conserver la direction, impliquant notamment les conditions de la fin de mission ou de son renouvellement, dans la mesure où les experts sont choisis et affectés par l'administration dont ils relèvent en fonction d'une sélection effectuée lors de la signature de la convention de jumelage (par exemple Convention RO 98/IB-EN04 du 20 octobre 1999 page 3).
l'organisme habilité qui défini les conditions administratives de la mission et le maintien du lien hiérarchique en tant que signataire de l'ordre de mission et liquidateur des rémunérations,
la lecture de la convention de jumelage et du fascicule ELARG-2002-01067 page 55 (manuel de référence) qui établissent que la mission s'exerce à l'étranger dans des locaux et un équipement mis à disposition par l'état jumeau.
Enfin, il apparaît résulter de cette situation que la remise de rapports de mission par l'intermédiaire de l'OIEau ne saurait impliquer un rapport hiérarchique avec cette structure, qui dans l'acception retenue ne servirait que d'instrument de collecte au profit de l'Agence de l'Eau elle-même mandataire de l'Etat.
Ces éléments renforcent l'argument selon lequel il n'est pas démontré en quoi l'OIEau avait la capacité de donner des directives particulières pour la mission en cours et ainsi de créer un lien de subordination qui aurait été caractérisé par l'exécution d'un travail sous son autorité, sa capacité à donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et surtout de sanctionner les manquements de son subordonné.
Ainsi la situation du fonctionnaire exerçant une mission d'expertise de courte durée dans le cadre d'une convention de jumelage du programme PHARE ne peut conduire à considérer l'OIEau comme étant son employeur même accessoire ou occasionnel, dès lors qu'il : - effectue sa mission à l'étranger dans des locaux et avec des moyens mis à sa disposition par l'Etat jumeau selon les termes d'une convention inter-Etats, - est rémunéré selon des modalités qui échappent totalement à l'OIEau, - exerce son activité dans des conditions que l'établissement ne contrôle pas, sauf à recueillir et transmettre le rapport de mission, - ne reçoit aucune directive particulière de celui-ci mais dépend des conditions de mise en oeuvre fixées par l'Etat et la convention de jumelage,- est choisi et affecté par le ministère dont il dépend,

En définitive, l'OIEau apparaît agir uniquement en qualité d'interface logistique dans une action à l'échelle européenne répondant à des impératifs politiques.
En conséquence, l'OIEau n'apparaissant pas redevable en tant qu'employeur de cotisations sociales à raison des sommes versées à cette occasion, il convient d'infirmer la décision déférée et statuant à nouveau de dire le redressement infondé ;
La procédure devant les juridictions de la sécurité sociale ne comportant pas de dépens, il n'y a pas lieu de statuer sur ceux-ci;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,
Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale,
Déclare recevable l'appel de l'Office International de l'Eau,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, reçoit le recours formé par l'Office et le dit bien fondé ;
Déclare infondé le redressement notifié au titre de la réintégration des cotisations sociales dues pour les années 2000, 2001 et 2002 concernant les sommes versées aux experts dans le cadre de missions de courte durée relevant de conventions de jumelage du programme PHARE ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 07/00294
Date de la décision : 10/02/2009

Analyses

SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Généralités - Conditions - Lien de subordination - Défaut - Cas

L'exercice d'une mission de courte durée par un fonctionnaire, et notamment des experts nationaux mis à la disposition, dans le cadre d'une convention de jumelage entre Etats avec une structure associative reconnue d'utilité publique entrant dans le cadre d'un programme cadre européen n'est pas toujours subordonnée. La qualification d'employeur pour l'association est exclue dès lors qu'elle ne définit pas ni ne contrôle la bonne exécution de la mission du fonctionnaire et que sa mise en oeuvre est dirigée par l'Etat et la convention de jumelage. Ainsi, l'association n'est pas redevable des cotisations sociales liées à cette intervention temporaire.


Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Nice, 12 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2009-02-10;07.00294 ?
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