COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 07 JANVIER 2009
No / 2009
Rôle No 07 / 13022
LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES TERRORISTES ET D'AUTRES INFRACTIONS
C /
Andine X...
Laurent X...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Décision rendue le 03 Juillet 2007 par la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, enregistrée au répertoire général sous le no 07 / 179.
APPELANT
LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES TERRORISTES ET D'AUTRES INFRACTIONS, géré par le Fonds de garantie des Assurances Obligatoires de dommages FGAO, dont le siège social est 64, rue Defrance 94080 VINCENNES pris en la personne de son représentant légal élisant domicile, en cette qualité, en sa délégation sise, 39, Boulevard Vincent Delpuech-Les Bureaux du Méditerranée-13255 MARSEILLE CÉDEX 06
représenté par la SCP GIACOMETTI-DESOMBRE, avoués à la Cour, assisté de Me Alain Y..., avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE substitué par Me Annabelle DEGRADO, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
INTIMES
Madame Andine X..., agissant ès qualités d'administratrice légale de son fils mineur Antoine X...
née le 22 Février 1967 à GRENOBLE (38000), demeurant...
représentée par la SCP COHEN-GUEDJ, avoués à la Cour,
assistée de Me Agnès BAURAND, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur Laurent X..., agissant ès qualités d'administrateur légal de son fils mineur Antoine X...
né le 27 Mars 1967 à LES SALLES DU GARDON (30110), demeurant...
représenté par la SCP COHEN-GUEDJ, avoués à la Cour,
assisté de Me Agnès BAURAND, avocat au barreau de MARSEILLE
*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 18 Novembre 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Janvier 2009..
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Janvier 2009.
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
E X P O S É D U L I T I G E
Par requête déposée le 9 août 2005 devant la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, M. Laurent X... et Mme Catherine Z... épouse X..., agissant ès-qualités d'administrateurs légaux des biens de leur fils mineur Antoine X..., exposent que leur fils a été victime, le 12 mars 2005 à MARSEILLE (Bouches-du-Rhône), d'un tir à la carabine à plomb qui l'a blessé à l'œ il gauche.
Il demandent qu'une expertise médicale de leur fils soit ordonnée.
Par ordonnance du 8 novembre 2005, la Présidente de la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a ordonné une expertise médicale du jeune Antoine X..., confiée au Dr Bernard C....
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 2 juin 2006.
Les parties ont signé les 19 et 23 octobre 2006 un constat d'accord pour une indemnisation globale de 67. 000 €.
Par ordonnance du 5 décembre 2006, la Présidente de la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a refusé d'homologuer ce constat d'accord et a renvoyé l'affaire à l'audience du 9 janvier 2007.
Par décision du 6 février 2007, la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a alloué aux époux X..., ès-qualités d'administrateurs légaux des biens de leur fils mineur Antoine X..., une indemnité de 100. 000 € en réparation de l'entier préjudice corporel global subi par leur fils.
Le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, géré par le Fonds de Garantie d'Assurances Obligatoires (F. G. A. O.), a régulièrement interjeté appel de cette décision les 25 juillet 2007 (enregistré sous la référence RG 07 / 13023) et 3 août 2007 (enregistré sous la référence RG 07 / 13772).
Par décision du 3 juillet 2007, la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a rejeté la requête en rectification d'erreur matérielle présentée par le F. G. A. O.
Le F. G. A. O. a régulièrement interjeté appel de cette décision les 25 juillet 2007 (enregistré sous la référence RG 07 / 13022) et 3 août 2007 (enregistré sous la référence RG 07 / 13770).
Vu l'ordonnance rendue le 28 août 2007 par le conseiller de la mise en état joignant les procédures 07 / 13023, 07 / 13770 et 07 / 13772 à la procédure 07 / 13022.
Vu les conclusions récapitulatives du F. G. A. O. en date du 9 juin 2008.
Vu les conclusions récapitulatives de M. Laurent X... et de Mme Catherine Z... épouse X..., agissant ès-qualités d'administrateurs légaux des biens de leur fils mineur Antoine X..., en date du 20 octobre 2008.
Le Ministère Public s'en rapporte le 17 octobre 2008.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 18 novembre 2008.
S U R Q U O I, L A C O U R
Attendu qu'à titre principal le F. G. A. O. soulève la nullité de la décision du 6 février 2007 (et par voie de conséquence celle du 3 juillet 2007) au visa de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des Droits de l'homme et des libertés fondamentales stipulant que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial.
Attendu que l'impartialité se définit par l'absence de préjugé ou de parti pris.
Attendu qu'il est constant que la décision déférée du 6 février 2007 a été rendue sous la présidence de Mme MAGNAN, présidente de la commission d'indemnisation, et que ce même magistrat avait auparavant rendu l'ordonnance du 5 décembre 2006 refusant d'homologuer le constat d'accord signé entre les parties.
Attendu que si l'article 706-5-1 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction en vigueur à l'époque, dispose que le constat d'accord est transmis au président de la commission d'indemnisation aux fins d'homologation et qu'en cas de refus motivé du fonds de garantie ou de désaccord de la victime sur l'offre qui lui est faite, l'instruction de l'affaire par le président de la commission se poursuit, force est de constater qu'en l'espèce le refus d'homologation prononcé le 5 décembre 2006 par la présidente de la commission n'est pas intervenu en raison d'un refus du fonds de garantie ou d'un désaccord de la victime sur cette offre mais a été prononcé à la seule initiative de la présidente de la commission au motif, expressément énoncé dans le dispositif de l'ordonnance, " que les offres du fonds de garantie sont insuffisantes et donc non conformes à l'intérêt du mineur ", qu'ainsi ce magistrat a, par cette ordonnance, manifesté son opinion quant à l'importance de l'indemnisation devant revenir à la victime.
Attendu que ce même magistrat ayant ultérieurement présidé l'audience au fond de la commission d'indemnisation du 9 janvier 2007 ayant conduit à la décision déférée du 6 février 2007 qui a alloué à la victime une indemnité plus importante que celle prévue au constat d'accord, la Cour estime que le fonds de garantie a été jugé par un tribunal à l'impartialité discutable au regard des stipulations de l'article 6-1 précité.
Attendu qu'il convient en conséquence de prononcer la nullité de la décision rendue le 6 février 2007 au visa de l'article 6-1 précité et, par voie de conséquence, la nullité de la décision subséquente du 3 juillet 2007 et de renvoyer la cause et les parties devant la juridiction de première instance afin qu'il soit statué à nouveau au fond sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens de nullité et de fond présentés à titre subsidiaire par le fonds de garantie.
Attendu que conformément aux dispositions des articles R 50-21, R 91 et R 92, 15o du Code de Procédure Pénale, il convient de décharger en totalité les époux X... des dépens et d'en laisser la charge au Trésor Public avec distraction au profit des avoués de la cause.
P A R C E S M O T I F S
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.
Vu l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des Droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Annule pour défaut d'impartialité de la juridiction la décision déférée du 6 février 2007 et, par voie de conséquence, la décision déférée subséquente du 3 juillet 2007.
Renvoie la cause et les parties devant la juridiction de première instance afin qu'il soit statué au fond.
Laisse les dépens de la procédure à la charge du Trésor Public.
Autorise les avoués de la cause à recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.
Rédacteur : M. RAJBAUT
Madame JAUFFRESMadame SAUVAGE
GREFFIÈREPRÉSIDENTE