1o Chambre B
ARRÊT EN MATIÈRE DISCIPLINAIRE
DU 12 DÉCEMBRE 2008
GL
No 2008 / 19D
Rôle No 08 / 12503
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
C /
Fabien X...
Avis à : Le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice
Sur décision implicite de rejet du conseil régional de discipline des avocats de la cour d'appel d'Aix-en-Provence saisi de poursuites disciplinaires à l'encontre de Me Fabien X... par le bâtonnier de l'Ordre au barreau de Nice, suivant un acte du 19 octobre 2007.
APPELANT
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
près la cour d'appel-Palais Monclar-13616 Aix-en-Provence cédex
représenté par Monsieur Achille KIRIAKIDÈS, Substitut général
INTIMÉ
Maître Fabien X...
demeurant...
non comparant
assisté par Me Marcel CULIOLI, avocat au barreau de Nice
Avis à :
LE BÂTONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE NICE
Palais de justice-...
Me Eric-Michel EDEL, bâtonnier en exercice, comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue en audience solennelle le 31 octobre 2008 tenue dans les conditions prévues par l'article R 212-5 du code de l'organisation judiciaire devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre ATTHENONT, Premier Président
Monsieur Gérard LAMBREY, Président
Madame Anne VIDAL, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
Monsieur Michel CABARET, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT
Ministère Public : présent uniquement lors des débats
ARRÊT :
Réputé contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2008.
Signé par Monsieur Jean-Pierre ATTHENONT, Premier Président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Monsieur LAMBREY est entendu en son rapport
Monsieur Achille KIRIAKIDÈS est entendu en ses réquisitions,
Monsieur le bâtonnier EDEL est entendu en ses observations,
Maître CULIOLI avocat au barreau de Nice, assistant Me X..., non comparant, est entendu en ses explications.
Sur quoi, les débats sont déclarés clos et l'affaire mise en délibéré.
Les parties sont avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2008.
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Maître Fabien X... a été condamné en vertu d'une ordonnance sur contestation d'honoraires d'avocats rendue le 15 décembre 2004 par le Premier Président de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE à restituer un trop perçu d'honoraires de 2. 021, 60 euros.
En dépit de plusieurs mises en demeures et voies d'exécution, Maître X... ne s'est pas exécuté, ce qui a entraîné une plainte de la part des époux Z....
Le 10 août 2005 le Procureur Général a saisi le Bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de NICE en vue de diligenter une enquête aux termes de laquelle, l'intéressé n'ayant ni fourni d'explication ni exécuté la décision, ledit Bâtonnier a saisi le 19 octobre 2007 le Conseil Régional de Discipline en vue de statuer conformément au décret du 27 novembre 1991 modifié au visa de l'article 183 du décret du 27 novembre 1991 et de l'article 1 du R. I. N. réprimant les violations des principes d'honneur de loyauté et de délicatesse.
Le Procureur Général, informé par le Conseil Régional de Discipline des avocats par courrier du 24 juillet 2008 qu'aucune sanction disciplinaire n'était intervenue dans le délai de 8 mois de la saisine du conseil régional, a relevé appel le 15 juillet 2008 contre la décision implicite de rejet de la demande de poursuites disciplinaires.
Retenant à charge à la fois le mutisme total de Maître X... face aux multiples sollicitations de l'autorité ordinale, et le mépris envers une décision de justice dont un auxiliaire privilégié du service public de la justice doit un respect particulier, ainsi qu'une rétention abusive de dossiers concernant le syndicat des copropriétaires de l'immeuble des Moulins, le Ministère Public conclut au prononcé de la sanction disciplinaire de l'interdiction temporaire comportant la privation du droit de faire partie du Conseil de l'ordre, du Conseil national des barreaux et de toute autre fonction élective pendant cinq ans.
Fabien X... a fait déposer le 31 octobre 2008 par Me CULIOLI, avocat, des conclusions tendant à faire déclarer l'appel irrecevable pour " cause d'incompétence de la cour de céans " et le conseil régional compétent pour connaître la plainte disciplinaire et juger lorsque Me X... sera " en état d'être entendu et de se défendre dans les conditions légales ".
Motifs de la décision :
1- Attendu qu'aux termes de l'article 195 du décret du 27 novembre 1991 l'absence de décision du conseil régional de discipline dans les huit mois suivant sa saisine équivaut à une décision implicite de rejet ;
Attendu que par acte du 19 octobre 2007, le bâtonnier de Nice a saisi le conseil régional de discipline des avocats de la cour d'appel d'Aix-en-Provence d'une demande de poursuites disciplinaires à l'encontre de Me Fabien X..., avocat à Nice ;
Attendu qu'aucune décision n'est intervenue à la date du 20 juin 2008, soit au terme d'un délai de huit mois suivant la saisine du conseil régional ;
Attendu que cette absence de décision s'analyse en une décision implicite de rejet de la demande de poursuites disciplinaires formulée à l'encontre de Me Fabien X... ;
Attendu que la déclaration d'appel ayant été effectuée le 15 juillet 2008, dans les formes et délais légaux requis, l'appel du ministère public est recevable en la forme ;
2- Attendu que toute personne a droit à un procès équitable, respectueux des droits de la défense ;
Attendu que Me Fabien X... a répondu à la convocation de son bâtonnier le 19 mai 2008 ;
Attendu que pour justifier son refus de comparaître devant la cour, Me Fabien X... a fait remettre à la cour le certificat médical suivant :
" Je soussigné, Docteur J. P. A..., spécialiste qualifié en psychiatrie certifie que l'état de santé de Monsieur Fabien X... a nécessité un arrêt de travail depuis juillet 2007 et nécessite actuellement un traitement psychotrope régulier depuis le 24 août 2008 et une convalescence dans sa famille à Béziers pour une durée encore indéterminée.
Fait le 30 octobre 2008 "
Attendu que le certificat médical n'établit nullement l'existence ou l'aggravation d'un état psychique de nature à abolir le discernement de Me Fabien X... ou à empêcher l'organisation de sa défense et sa participation personnelle et efficace à la contestation des incriminations disciplinaires qui lui sont reprochées depuis février 2005 ;
Attendu par conséquent qu'il n'y a pas lieu de " surseoir à statuer " ni de se dessaisir au profit du conseil régional, la cour étant saisie de la procédure disciplinaire par l'effet dévolutif attaché à l'appel ;
3- Attendu que par lettre recommandée des 9 et 17 février 2005 dont il a signé les accusés de réception, Me X... a été mis en demeure d'exécuter l'ordonnance sur contestation d'honoraires rendue le 15 décembre 2004 entraînant l'obligation de restituer aux époux Z... la somme de 2021, 60 €, outre l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
Attendu que lors de son audition le 19 mai 2008 par le bâtonnier désigné rapporteur, Me X... s'est contenté d'indiquer qu'il se trouvait en état de cessation des paiements depuis le mois de juillet 2004, donc insolvable et dans l'impossibilité absolue d'exécuter l'ordonnance ;
4- Attendu que l'acte de saisine du bâtonnier porte également sur le refus de restituer début 2007 par Me X... de dossiers concernant le syndicat des propriétaires de l'immeuble " Les Moulins " au profit de son successeur Me C... ;
Attendu que l'avocat de Me X... a produit à la barre un courrier daté du 15 mai 2008 émanant de l'ancien président du conseil syndical de la copropriété " Les Moulins " attestant de la restitution de l'intégralité des documents transmis ultérieurement au nouvel avocat de la copropriété Me C... ;
Attendu que la cour observe que Me X... avait cru pouvoir soutenir devant le rapporteur qu'il ne " détenait aucune pièce à transmettre à son successeur " et qu'il n'avait jamais répondu aux demandes d'explication de Me EDEL, président de la commission de déontologie ;
5- Attendu que le défaut systématique de réponse aux interrogations du bâtonnier constitue un manquement au devoir de l'avocat à l'égard de son ordre et à ses obligations professionnelles ;
Attendu que le refus délibéré d'exécuter une décision de justice définitive prononcée à son encontre constitue un manquement caractérisé à l'honneur et à la profession d'avocat ;
Attendu que la cessation d'activité avec nomination de Me D... en qualité d'administrateur provisoire au cours du premier semestre de l'année 2008 et la procédure subséquente en liquidation judiciaire ne sauraient excuser rétroactivement la carence de Me X... caractérisée depuis le 3 mars 2005, ce dernier étant à l'époque et encore début 2008 en activité ;
Attendu que l'importance et la répétition des manquements de Me Fabien X... à ses obligations justifient le prononcé de la sanction de un an d'interdiction temporaire avec privation du droit de faire partie du conseil de l'Ordre, du Conseil national des barreaux et des autres organismes ou conseils professionnels ainsi que des fonctions de bâtonnier pendant une durée de 5 ans ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en audience solennelle, par mise à disposition au greffe de la cour par arrêt réputé contradictoire et en matière disciplinaire,
Déclare l'appel recevable ;
Dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer ;
Prononce à l'encontre de Me Fabien X... la peine de UN AN d'interdiction temporaire avec privation du droit de faire partie du conseil de l'Ordre, du Conseil national des barreaux et des autres organismes ou conseils professionnels ainsi que des fonctions de bâtonnier pendant une durée de cinq ans ;
Le condamne aux dépens ;
LE GREFFIER, LE PREMIER PRÉSIDENT,