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15/10/2008 | FRANCE | N°07/08094

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0023, 15 octobre 2008, 07/08094


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 15 OCTOBRE 2008

No 2008 /

Rôle No 07 / 08094

AXA FRANCE ASSURANCES
Guy X...
Guy Y...
Eliane Z... épouse X...
Nathalie X...
Denis X...
Gilbert X...
Chantal A... épouse X...
Henri Z...
Miranda B... épouse Z...

C /

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du

05 Avril 2007 enregistré au répertoire général sous le no 02 / 10499.

APPELANTS

AXA FRANCE ASSURANCES, pris en la personne de son représentant légal en exer...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 15 OCTOBRE 2008

No 2008 /

Rôle No 07 / 08094

AXA FRANCE ASSURANCES
Guy X...
Guy Y...
Eliane Z... épouse X...
Nathalie X...
Denis X...
Gilbert X...
Chantal A... épouse X...
Henri Z...
Miranda B... épouse Z...

C /

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Avril 2007 enregistré au répertoire général sous le no 02 / 10499.

APPELANTS

AXA FRANCE ASSURANCES, pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis, 26 rue Louis Legrand-75119 PARIS CEDEX 02
représentée par la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU, avoués à la Cour,
assistée de Me Bruno ZANDOTTI, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Guy X... agissant tant en son nom propre qu'en sa qualité d'administrateur légal de son fils Loïc X... né le 27 / 08 / 1991 à Marseille de nationalité française et ès-qualité de mandataire spécial de sa fille Nathalie X..., née le 29 mars 1989 à MARSEILLE, de nationalité française en vertu d'une ordonnance du Tribunal d'Instance de MARSEILLE du 18 juillet 2007
né le 09 Novembre 1962 à MARSEILLE (13000), demeurant...
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assisté de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Guy Y...
demeurant...
représenté par la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU, avoués à la Cour,
assisté de Me Bruno ZANDOTTI, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame Eliane Z... épouse X... agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administrateur légal de son fils Loïc X... né le 27 / 08 / 1991 à Marseille de nationalité française
née le 28 Mai 1963 à MARSEILLE (13000), demeurant...
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Mademoiselle Nathalie X...
née le 29 Mars 1989 à MARSEILLE (13000), demeurant...
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Denis X...
né le 29 Mars 1989 à MARSEILLE (13000), demeurant...
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assisté de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Gilbert X...
né le 29 Novembre 1925 à LIMOGES (87000), demeurant...
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assisté de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame Chantal A... épouse X...
née le 21 Août 1929 à MARSEILLE (13000), demeurant...
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Henri Z...
né le 03 Mars 1928 à MARSEILLE (13000), demeurant...
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assisté de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame Miranda B... épouse Z...
née le 03 Février 1931 à TRIESTE, demeurant...
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de Me Sophie MISTRE-VERONNEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF, organisme de sécurité sociale, représentée par son Directeur Frédéric E..., prise en la personne de son représentant légal domicilié au siège sis, 17, Avenue du Général Leclerc-13347 MARSEILLE CEDEX 20
représentée par la SCP PRIMOUT-FAIVRE, avoués à la Cour,
ayant la SCP SCAPEL ET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Juin 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Septembre 2008. Le 17 septembre 2008, le délibéré a été prorogé au 15 / 10 / 2008

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 octobre 2008,

Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille le 5 avril 2007

Vu l'appel des consorts X...- Z... en date du 11 mai 2007

Vu les conclusions de ces appelants en date du 23 mai 2008

Vu l'appel de la compagnie AXA et de M. le docteur F... en date du 22 mai 2007

Vu les conclusions de la compagnie AXA et du docteur F... en date du 22 avril 2008

Vu les conclusions de la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF en date du 18 mars 2008

Vu l'ordonnance de clôture en date du 6 mai 2008 révoquée à l'audience avec l'accord de l'ensemble des parties et la clôture à nouveau de la procédure

***

Les consorts Z... et X... ainsi que la compagnie AXA et le Dr F... sont appelants du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille le 5 avril 2007 ayant retenu, à hauteur de 20 %, la responsabilité de ce dernier dans le préjudice subi par Nathalie X..., enfant jumelle née prématurément avec un grave handicap neurologique le 23 mars 1989 (tétraplégique).

Le tribunal a condamné le Dr F... et la compagnie AXA a payer aux parents représentant cet enfant différentes sommes en réparation du préjudice de cette dernière (aménagement de véhicule, rentes trimestrielle pour le préjudice professionnel et la tierce personne ainsi que préjudices extra patrimoniaux) et a, avant dire droit, sur les dépenses de santé demeurés à charge, ordonné la réouverture des débats jusqu'à production de justificatifs précis, ainsi que des mesures d'expertise concernant les demandes formées au titre de l'assistance technique, de la tierce personne entre 0 et 18 ans et de l'aménagement du domicile.

Le tribunal a retenu, en fonction des constatations des experts judiciaires, qu'il y a eu une souffrance f œ tale constituant un facteur ayant pu être favorisant et en tout cas aggravant des anomalies neurologiques présentées par l'enfant en raison d'un retard de croissance intra utérin.

Le Dr F... conteste cette appréciation en indiquant que la diminution des oscillations du rythme cardiaque de l'un des deux f œ tus n'est apparue de manière significative que le 23 mars 1989, soit le jour de l'accouchement. Il conclut en conséquence au débouté des demandeurs. Subsidiairement, il estime que la preuve du lien de causalité entre les manquements allégée et le préjudice n'est pas établie.

Les consorts X... et Z... ont conclu à l'instauration d'un complément d'expertise sur le pourcentage de la perte de chance de l'enfant avant sa naissance d'échapper en tout ou partie aux séquelles dont elle est atteinte. Subsidiairement, ils invoquent un droit à réparation intégrale de l'enfant, estimant que les séquelles ne se sont pas développées pendant la grossesse mais dans le prolongement de l'accouchement et demandent la réparation des préjudices de Nathalie X... et de leurs préjudices.

La discussion porte également sur la créance de frais futurs de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (689 673, 24 €) estimée surévaluée par les appelants.

***

La cour se réfère expressément d'une part au rappel chronologique détaillé effectué par les premiers juges sur la période se situant entre l'échographie du 19 janvier 1989 ayant révélé un retard de croissance sur l'un des jumeaux à 26, 4 semaines d'aménorhée et le monitorage du 23 mars 1989 à 19 h 10 ayant montré un rythme cardiaque f œ tal plat, d'autre part aux observations et conclusions des trois experts judiciaires judiciairement commis, également reproduites dans le jugement (pages 8, 9 et 10).

Au regard de ceux-ci, le tribunal a pu juger, par des motifs pertinents que la cour adopte, d'une part que le Dr F... a commis une faute dans le choix de surseoir à l'extraction de l'enfant alors que la situation était objectivement alarmante pour Nathalie X..., d'autre part que l'extraction tardive de l'enfant a pu contribuer à son préjudice en l'aggravant.

La demande des consorts X... tendant à l'instauration d'un complément d'expertise en vue de déterminer le pourcentage de la perte de chance de l'enfant Nathalie X... d'échapper aux séquelles dont elle se trouve atteinte apparaît inutile en l'espèce, tous les experts s'accordant sur l'impossibilité d'apporter une réponse précise sur ce point par voie d'expertise.

À cet égard, il convient de rappeler les termes précis des rapports d'expertise :

Professeur G... :

" Dire quand les lésions se sont constituées ?

Le retard de croissance intra utérin a pu entraîner des lésions. Le retard à l'extraction ne les a pas provoquées mais a pu constituer un facteur favorable et a pu être un facteur aggravant ".

Dr H... :

" Il est possible qu'une extraction plus précoce n'ait pas empêché une mauvaise évolution neurologique … ".

Professeur I... :

" On ne peut pas affirmer avec certitude qu'une extraction plus précoce aurait empêché les séquelles de Nathalie mais le retard à l'extraction a pu être le facteur favorisant et a été de toute évidence un facteur aggravant pour le jumeau hypotrophe ".

À aucun moment, les experts ne s'accordent à dire, comme soutenu par les consorts X..., que le retard de croissance intra utérin ne pouvait entraîner que des séquelles extrêmement modestes sans incidence sur la vie quotidienne.

Il ne peut non plus être jugé, au regard des constatations et conclusions expertales, que le retard à l'extraction dont a souffert Nathalie X... est le facteur déclenchant des séquelles neurologiques qu'elle présente aujourd'hui.

La réparation des préjudices invoqués en l'espèce ne peut donc être appréciée qu'en termes de perte de chance pour l'enfant Nathalie X... d'avoir des séquelles moins graves que celles qu'elle présente aujourd'hui.

Sur cette question de perte de chance, le Dr H... et le professeur G..., sapiteurs du professeur I..., ont, après analyse de la situation clinique à la naissance et évocation des hypothèses envisageables sur les anomalies neurologiques, privilégié comme la plus probable celle d'une décompensation aiguë ou subaiguë survenue sur un organisme fragilisé, sans réserve, venu aggraver un état antérieurement pathologique.

Sur le point de savoir la part des conséquences neurologiques du retard de croissance utérin et celle du retard à l'extraction du f œ tus fragilisé, les experts notent l'impossibilité de faire une proportion (Professeur H... p. 15, Professeur I... p. 18)

Toutefois, sur le plan juridique, il doit être considéré que la faute du Dr F... a fait perdre à Nathalie X..., atteinte de tétraplégie, la chance d'éviter l'aggravation d'éventuelles lésions cérébrales préexistantes. Cette analyse conduit la cour à maintenir l'appréciation de la perte de chance au taux de 20 % retenue par le tribunal.

Préjudice de Nathalie X... :

Les conclusions de l'expertise du professeur I... en date du 23 mars 2005 relativement aux préjudices présentés par Nathalie X... sont les suivantes :

Nathalie est sévèrement handicapée. Son incapacité temporaire de travail ne peut être cotée car elle ne pourra jamais travailler et restera invalide

Le pretium doloris et de 7 / 7

Le préjudice esthétique et de 7 / 7

Son incapacité permanente est de 100 %. L'état de Nathalie n'est pas susceptible d'amélioration

Nous signalons un préjudice pour les parents qui ont en charge cette enfant handicapée qui nécessitera, à terme, l'aide d'une tierce personne

-Dépenses de santé actuelles :

En fonction des débours exposés selon les relevés de prestations produits par la caisse de retraite et de prévoyance de la SNCF, mentionnés dans les pièces communiquées (8 relevés de prestations), celles-ci doivent être fixées à la somme de 448 942, 13 € dont 20 % = 89 788, 43 €

- Dépenses de santé futures à la charge de Nathalie X... en sus de la créance de l'organisme social :

Il s'agit des dépenses afférentes aux couches, bavoirs et gants de toilette ainsi que des frais pharmaceutiques restés à charge.

Il est sollicité à ce titre la somme de 607, 40 € par mois avec une capitalisation, soit la somme de 204 203, 02 € au titre des frais pharmaceutiques à charge depuis la consolidation.

La cour se trouve ici devant une demande identique à celle déjà formulée devant le tribunal, lequel a sursis à statuer et a réouvert les débats en invitant les parties à justifier des dépenses de santé effectivement à leur charge, déduction faite des remboursements de la caisse de sécurité sociale, et ce après avoir constaté que les pièces versées aux débats ne permettaient pas de déterminer avec suffisamment de précision les dépenses mensuelles hors remboursement de l'organisme social demeurant effectivement à la charge de la victime.

Au vu des dépenses de changes, bavoirs et gants de toilette exposées en 2002, 2005, 2006 et 2007 selon les factures produites aux débats émanant des sociétés OXYMED et Matériel Médical de MONLEON, la somme de 6 090 € doit être retenue

Au titre de la capitalisation, ces mêmes pièces permettent de retenir la somme de 208, 80 € par mois pour les dépenses de couches et celle de 46, 80 € par mois pour celles afférentes aux bavoirs et aux gants jetables

Les frais pharmaceutiques restés à charge recouvrent des dépenses nutritionnelles et pharmaceutiques selon les factures et feuilles de soins produites aux débats. La somme sollicitée à hauteur de 117, 80 € par mois doit être retenue.

(208, 80 € + 46, 80 € + 117, 80 €) x 12 x 27, 622 (€ de rente viager à l'âge de 19 ans selon la Gazette du Palais du 7 au 9 novembre 2004) = 123. 768, 66 €

A cette somme doit être ajoutée celle représentant les dépenses exposées selon factures (6 090 €)

Total = 129 858, 66 €

Dont 20 % = 25 971, 73 €

- Frais d'aménagement du véhicule :

La cour confirme par adoption des motifs du jugement l'indemnisation de ce poste de préjudice, soit 7 234 € compte tenu du coefficient réducteur de 20 %.

- Aide technique et frais de logement adapté :

Le tribunal a ordonné relativement à ces demandes deux mesures d'expertise, l'une confiée au professeur J... et l'autre à M. K..., architecte et condamné le Dr F... et la compagnie AXA à verser à Nathalie X... représentée par ses parents une provision de 15 000 € au titre de l'aménagement du domicile et de l'assistance technique.

Il y a lieu de maintenir la décision du tribunal de surseoir à statuer sur ces demandes dans l'attente des expertises ordonnées.

- Perte de gains professionnels futurs :

Il est demandé la somme de 590 958, 27 € sur la base d'un revenu moyen mensuel de 1811 € capitalisé.

La cour confirme par adoption des motifs pertinents du premier juge la décision ayant fixé ce poste de préjudice à la somme de 111 072 € après application du coefficient de 20 % mais le réforme sur le mode de versement de ladite somme, estimant légitime la demande d'allocation de cette somme en capital

-Déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste de préjudice ne peut être coté séparément s'agissant d'une personne totalement invalide à vie dès sa naissance.

- Déficit fonctionnel permanent :

La cour confirme par adoption des motifs des premiers juges l'évaluation opérée à hauteur de la somme de 500 000 € pour ce poste de préjudice recouvrant 100 % d'incapacité. Compte tenu du coefficient de 20 % il est dû à ce titre la somme de 100 000 €.

- Préjudice esthétique :

La cour confirme par adoption des motifs des premiers juges la somme de 60 000 €. Compte tenu du coefficient de 20 % il est dû à ce titre une somme de 12 000 €.

- Préjudices sexuel et d'établissement :

La cour confirme par adoption des motifs des premiers juges la somme de 40 000 €. Compte tenu du coefficient de 20 % il est dû à ce titre une somme de 8 000 €.

- Préjudice d'agrément :

La cour confirme par adoption des motifs des premiers juges la somme de 40 000 €. Contenu du coefficient de 20 % il est dû à ce titre une somme de 8 000 €.

- Tierce personne :

La nécessité d'une assistance permanente de Nathalie X... apparaît indiscutable.

La référence aux coûts pratiqués par des associations d'aides aux personnes handicapées conduit la cour a examiner concrètement les modalités de prise en charge de ces associations par rapport au cas particulier de l'espèce.

La prise en charge permanente de Nathalie X... au domicile familial inclut un ensemble de prestations différentes telles que les actes essentiels de la vie, les soins non médicaux, l'accompagnement et la présence.

De telles prestations, impliquant nécessairement l'intervention de plusieurs intervenants successifs, ne peuvent être réellement et efficacement effectuées que par une association investie d'un mandat lui permettant de coordonner et de gérer ces personnes.

A cet égard l'étude de faisabilité DOMISERVE concernant Nathalie X... permet de constater que des associations prestataires intervenant en mode mandataire, ayant reçu un agrément de qualité, assument l'ensemble des obligations y compris administratives relatives à des embauches en contrat de travail à durée indéterminée.

Ce document comporte différents devis d'offre de services par assistance d'une tierce personne 24 heures sur 24 heures émanant de plusieurs partenaires habilités à s'occuper des personnes handicapées et couvrant le bassin méditerranéen, la Provence et plus spécialement la ville de Marseille.

Au regard des offres ainsi proposées, la cour estime devoir retenir comme base d'une juste appréciation du coût de la tierce personne de Nathalie X... celle de l'association La MÉMOIRE DU TEMPS, établie sur la ville de Marseille où est domiciliée Nathalie X..., en date du 15 octobre 2007, pour un tarif de 8 364, 90 € par mois, chiffre voisin d'un " devis estimatif mandataire " de l'ADMR de l'ARBRESLE (69) établi le 11 janvier 2005 à la demande du conseil des consorts X... pour un coût mensuel de 7 772, 19 €.

Après application du coefficient de 20 %, il est dû mensuellement la somme de 1672, 98 € au titre de la tierce personne

Préjudices par ricochet des proches de Nathalie X... :

- Préjudices moraux :

L'indemnisation de ces postes de préjudice inclut par définition tant le préjudice résultant de la vision du handicap de la victime que celui afférent au vécu des proches de la victime du fait de ce handicap.

Il convient de confirmer les sommes allouées au titre des préjudices moraux subis par les parents, les frères et les grands-parents de Nathalie X... lesquels constituent de justes appréciations.

- Demande de préjudice matériel présentée par M. Guy X... liée au coût de la thérapie familiale :

Au vu des pièces justificatives des dépenses engagées, il a été exposé une dépense de 880 € selon les factures produites concernant des consultations psychologiques effectuées entre le 10 décembre 2004 et le 16 décembre 2005 et une dépense de 880 € pour les factures de consultation effectuée en 2006. Aucune autre facture et aucune autre pièce n'étant produite aux débats, la cour estime devoir réformer le jugement déféré ayant octroyé en sus pour l'avenir une somme capitalisée représentant un préjudice futur incertain.

Après application du coefficient de 20 % il est dû au titre de ce préjudice la somme de 352 €.

Frais futurs de la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF :

Ces frais devront être réglés par le Dr F... et la compagnie AXA dans la proportion de 20 % au fur et à mesure de leur exposition, sur présentation des justificatifs sans qu'il y ait lieu de statuer sur une demande de provisionnelle de ce chef.

Au titre de l'article 700 du code de procédure civile, il apparaît équitable d'allouer la somme de 3000 € à l'ensemble des consorts X... et celle de 1500 € à la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que le Dr F... a commis une faute en prenant la décision de ne pas extraire en urgence l'enfant Nathalie X...

Le réforme en ce qu'il a dit que la faute commise par le Dr F... est responsable à hauteur de 20 % du préjudice total subi par Nathalie X...

Dit que cette faute est à l'origine d'une perte de chance pour Nathalie X... d'éviter l'aggravation d'éventuelles lésions cérébrales préexistantes

Fixe à 20 % des dommages l'indemnisation des préjudices de Nathalie X... et de sa parenté liée à cette perte de chance

Confirme la condamnation prononcée au titre des préjudices extra patrimoniaux de Nathalie X...

Confirme les condamnations prononcées à l'encontre du Dr F... et de la compagnie AXA au titre des préjudices moraux des parents, des frères et des grands-parents de Nathalie X...

Confirme la condamnation prononcée au titre de l'aménagement du véhicule

Confirme le jugement déféré du chef des mesures d'expertise ordonnée et de la provision allouée

Le réforme pour le surplus

Et statuant à nouveau :

Condamne in solidum M. le Dr F... et la compagnie AXA à payer :

- à M. Guy X... ès qualité de mandataire de sa fille Nathalie X... :

* la somme de 111 072, 25 € en réparation du préjudice professionnel de cette dernière

*la somme de 25 971, 73 € au titre des dépenses de santé future à charge

*une rente mensuelle de 1672, 98 € au titre de la tierce personne

Dit que cette rente sera indexée conformément aux dispositions de l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et que son versement sera suspendu en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme social d'une durée supérieure à 45 jours

-à M. Guy X... la somme de 352 € en réparation de son préjudice matériel.

Rejette la demande relative aux frais de psychothérapie à venir de M. Guy X...

Condamne in solidum M. F... et la compagnie AXA a payer à la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF :

* la somme de 89 788, 43 € au titre des dépenses de santé actuelles échues au 29 novembre 2007

* les frais médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques, d'hospitalisations, de transport, d'appareillages et matériels divers exposés par cette caisse en rapport avec le handicap de Nathalie X..., dans la proportion de 20 %

- Prend acte de ce que la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF indique que les dépenses futures précitées seront prises en charge par le régime général de sécurité sociale à partir de la 21e année de Nathalie X...

- Condamne in solidum M. F... et la compagnie AXA a payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 € aux consorts X... et celle de 1500 € à la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF

-Ordonne l'envoi d'une copie du présent arrêt au juge des tutelles du tribunal d'instance de MARSEILLE à toutes fins utiles.

- Condamne in solidum M. F... et la compagnie AXA aux dépens distraits au profit de la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN et de la SCP PIMOUT-FAIVRE, avoués

Rédacteur : Mme KERHARO-CHALUMEAU

Le GreffierLa Présidente
Mme JAUFFRES Mme SAUVAGE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0023
Numéro d'arrêt : 07/08094
Date de la décision : 15/10/2008

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin gynécologue obstétricien - Responsabilité contractuelle - Dommage - Réparation - Perte d'une chance -

Constitue la perte d'une chance d'éviter l'aggravation d'éventuelles lésions cérébrales pré-existantes l'extraction tardive d'un enfant prématuré présentant un retard de croissance intra-utérin en l'état des conclusions du collège d'experts sur la probabilité d'une décompensation aiguë ou sub-aiguë survenue sur un organisme fragilisé et sans réserves, venue aggraver un état antérieur pathologique et de l'impossibilité pour ces mêmes experts de faire la part des conséquences neurologiques du retard de croissance et de celles du retard à l'exécution. Dans le cas où la nécessité d'une assistance permanente du handicapé apparaît indiscutable, la référence aux coûts pratiqués par des associations d'aides aux personnes handicapées doit conduire à examiner concrètement les modalités de prise en charge de ces associations par rapport au cas particulier de l'espèce


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Marseille, 05 avril 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2008-10-15;07.08094 ?
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