COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 14 OCTOBRE 2008
MAV
No2008 /
Rôle No 08 / 00019
Michel X...
C /
Syndicat des
copropriétaires L'AMIRAL
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Novembre 2007 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 4747.
APPELANT
Monsieur Michel X..., pris en sa qualité de liquidateur amiable de la SARL L. R. A. A. I. anciennement dénommée SARL LEFRANCOIS REYNAUD
né le 24 Juillet 1943 à BAGNOLET (93), demeurant ...
représenté par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
assisté par Me Christian GILLON, avocat au barreau de GRASSE
INTIME
Syndicat des Copropriétaires L'AMIRAL, sis Marina Baie des Anges, 06270 VILLENEUVE LOUBET, agissant poursuites et diligences de son Syndic en exercice, la SA CABINET TABONI, lui-même agissant par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
dont le siège social Syndic CABINET TABONI SA-42 Rue Trachel-06000 NICE
représentée par la SCP Paul et Joseph MAGNAN, avoués à la Cour,
assisté par Me Nicolas DONNANTUONI, avocat au barreau de NICE
*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 Septembre 2008 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Gérard LAMBREY, Président, et Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller, chargés du rapport.
Monsieur Gérard LAMBREY, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Gérard LAMBREY, Président
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Octobre 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Octobre 2008.
Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Vu le jugement rendu contradictoirement le 22 novembre 2007 par le tribunal de grande instance de GRASSE dans le litige opposant le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL à Michel X..., pris en qualité de liquidateur de la SARL LRAAI ;
Vu la déclaration d'appel déposée par Michel X..., pris en qualité de liquidateur de la SARL LRAAI le 3 janvier 2008 ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées par le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL le 28 juillet 2008 ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées par Michel X... le 8 août 2008 ;
SUR CE :
Sur la genèse du litige
La SARL LRAAI, anciennement la SARL LEFRANCOIS REYNAUD, a été syndic de la copropriété L'AMIRAL jusqu'à l'assemblée générale des copropriétaires en date du 23 août 1991 qui a procédé à désignation d'un nouveau syndic en la personne du Cabinet TABONI SA. Ce dernier n'ayant pu obtenir d'explications de son prédécesseur quant à l'existence de certaines dépenses, une instance judiciaire a été exercée par le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL à l'encontre de la SARL LRAAI, représentée par son liquidateur amiable Michel X.... Cette procédure a abouti, après la désignation d'un expert et le dépôt de deux rapports successifs, à un jugement du tribunal de grande instance de GRASSE en date du 1er mars 2004, condamnant la SARL LRAAI à lui verser la somme de 27 012, 26 euros, augmentée des intérêts au taux légal au jour de l'assignation outre celles de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts et de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Dans le but d'obtenir le recouvrement de ces sommes, le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL a mandaté un huissier de justice qui, après délivrance d'un commandement de payer, a reçu un courrier de Michel X... en date du 27 avril 2004 lui indiquant que « les opérations de liquidation de la SARL LRAAI étaient terminées et les répartitions effectuées depuis le 20 janvier 1992, date depuis laquelle la société avait cessé toute activité, ne disposant plus d'aucun élément d'actif, ni de passif, non plus que de domicile, locaux, matériel ou autre ».
Le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL, estimant que Michel X... avait frauduleusement dissimulé la situation de la SARL LRAAI pendant toutes les années de procédure les ayant opposés, a fait assigner celui-ci, sur le fondement des dispositions de l'article L 237-12 du Code de commerce, pour qu'il soit déclaré responsable à son égard des fautes commises dans l'exercice de ses fonctions de liquidateur amiable de la SARL LRAAI et condamné en conséquence à réparer le préjudice subi du fait de ses agissements.
Le premier juge a fait droit à sa demande en déclarant cette action recevable et en condamnant Michel X... à lui verser la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Sur l'autorité de la chose jugée
Michel X... soulève l'irrecevabilité de la demande, au seul visa de l'article 481 du code de procédure civile, en faisant valoir que le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL a déjà obtenu la condamnation de la SARL LRAAI à lui verser la somme de 27 012, 26 euros en principal dans le cadre du jugement du 1er mars 2004, et qu'en conséquence, la présente action est diligentée sur les mêmes causes.
Il convient d'observer que la première procédure visait uniquement à obtenir, sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du Code civil, la condamnation de la SARL LRAAI à lui rembourser des postes de dépenses dont elle n'avait pu justifier alors que la présente procédure a pour objet de rechercher la responsabilité personnelle de Michel X... pour les fautes commises dans le cadre de sa mission de liquidateur amiable de cette société et ce, sur le fondement des dispositions de l'article L 237-12 du Code commerce.
Il n'existe donc aucune identité de cause et d'objet entre ces deux actions qui ont des fondements totalement différents et c'est à juste titre que le premier juge a écarté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée.
Sur la prescription
Aux termes des dispositions de l'article L 225-254 du Code de commerce, l'action en responsabilité contre les administrateurs se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation.
Michel X... soutient que l'action du syndicat des copropriétaires L'AMIRAL à son encontre est largement prescrite, fixant le point de départ de la prescription au 20 janvier 1992, date de la liquidation, voire au plus tard au 30 septembre 1993, date de l'assemblée générale ayant approuvé les actes de cession et l'apurement du passif.
Le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL réplique qu'elle n'a eu connaissance de ce que les opérations de liquidation étaient terminées que par le courrier de Michel X..., adressé le 27 avril 2004, à l'huissier de justice mandaté pour recouvrer les sommes allouées dans le cadre du jugement du 1er mars 2004.
L'extrait du Registre du commerce versé aux débats par Michel X... ne fait mention que de la dissolution de la SARL LRAAI intervenue à compter du 31 décembre 1991 et dans le cadre de laquelle, il a été désigné en qualité de liquidateur amiable. Malgré ses allégations, il ne justifie nullement de la publication d'un avis de clôture des opérations de liquidation tel que prévu à l'article L 237-11 du Code de commerce alors même qu'en vertu des dispositions des article 291 et 292 du décret du 23 mars 1967, il appartient au liquidateur d'accomplir, sous sa responsabilité, les formalités de publicité incombant aux représentant légaux.
Par ailleurs, il convient d'observer que pendant toute la durée de la procédure ayant opposé le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL à la SARL LRAAI, il n'a pas dénié représenter celle-ci sans indiquer que les opérations de liquidation étaient terminées et qu'il n'avait donc plus qualité pour le faire.
De ces constatations, il ressort que Michel X... a totalement dissimulé la situation réelle de la SARL LRAAI jusqu'au 27 avril 2004, date à laquelle le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL a eu révélation de ce que les opérations de liquidation étaient terminées depuis plus de douze ans.
Le point de départ de la prescription doit donc être fixé à cette date. Dès lors, l'action diligentée à l'encontre de Michel X... par acte du 27 juin 2005 a été exercée dans le délai de la prescription.
Le jugement sera encore confirmé en ce qu'il a débouté Michel X... de cette exception.
Sur l'autorisation du syndic d'ester en justice
Il est certain que l'autorisation donnée au syndic lors de l'assemblée générale des copropriétaires en date du 21 juillet 1995 pour ester en justice contre la SARL LEFRANCOIS REYNAUD ne peut être utilisée dans le cadre de la présente instance qui est totalement distincte comme il a été vu supra.
Cependant, le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL verse aux débats un procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires en date du 26 juillet 2008 ayant expressément autorisé le Cabinet TABONI SA à ester en justice contre Michel X.... Il est parfaitement admis que l'assemblée générale puisse donner une autorisation d'agir a posteriori à condition que cette régularisation intervienne avant qu'une décision définitive n'ait été rendue et avant que le syndicat de copropriétaires ait perdu son droit à agir.
En l'espèce, ladite autorisation est intervenue alors que la procédure était pendante devant la cour, le délai de la prescription ayant par ailleurs été interrompu par l'assignation délivré le 27 juin 2005. Elle est donc parfaitement valable
Sur la responsabilité de Michel X...
C'est par des motifs pertinents tant en fait qu'en droit qui seront adoptés par la cour que le premier juge a parfaitement caractérisé les nombreuses fautes commises pas Michel X... dans l'exécution de sa mission de liquidateur, notamment en omettant de provisionner la créance litigieuse du syndicat des copropriétaires L'AMIRAL alors même que la procédure intentée par celui-ci contre la SARL LRAAI l'avait été antérieurement à l'assemblée générale du 30 septembre 1993 qui a approuvé la cession de la clientèle de celle-ci à trois sociétés différentes dont l'une ayant pour gérant ce dernier et ce, de façon totalement dissimulée puisqu'il n'a été procédé à aucune des mesures de publicité prévues par les textes.
Il est certain que ces fautes sont à l'origine du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL résultant de l'impossibilité de recouvrer les sommes allouées dans le cadre du jugement du 1er mars 2004 et qui a été exactement évalué par le premier juge à la somme de 35 000 euros.
Sur la demande en dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL
Celui-ci ne justifie pas d'une faute ayant dégénéré en abus commise par l'appelant dans l'exercice légitime de son droit d'exercer les voies de recours mises à sa disposition. Il sera débouté de sa demande à ce titre.
Il convient de lui allouer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Michel X... qui succombe supportera les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et en matière civile,
En la forme,
Reçoit Michel X... en son appel principal et le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL en son appel incident,
Au fond,
Confirme le jugement du 22 novembre 2007 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute le syndicat des copropriétaires L'AMIRAL de sa demande en dommages et intérêts,
Condamne Michel X... à verser au syndicat des copropriétaires L'AMIRAL la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Michel X... aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT