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07/10/2008 | FRANCE | N°07/19931

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0023, 07 octobre 2008, 07/19931


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 07 OCTOBRE 2008

No / 2008

Rôle No 07 / 19931

Nicole X...

C /

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Décision rendue le 04 Décembre 2007 par la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, enregistrée au répertoire général sous le no 07 / 00511.

APPELAN

TE

Madame Nicole X...
né le 10 Juin 1969, demeurant...
représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
ayant la SCP LESCUDIER W. LESCUDIER J...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 07 OCTOBRE 2008

No / 2008

Rôle No 07 / 19931

Nicole X...

C /

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Décision rendue le 04 Décembre 2007 par la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, enregistrée au répertoire général sous le no 07 / 00511.

APPELANTE

Madame Nicole X...
né le 10 Juin 1969, demeurant...
représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
ayant la SCP LESCUDIER W. LESCUDIER J-L LESCUDIER R., avocats au barreau de MARSEILLE

INTIME

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, géré par le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages " FGAO ", dont le siège social est sis 64, rue Defrance, 94300 VINCENNES, pris en la personne de son Directeur Général élisant domicile en sa délégation de MARSEILLE ou est géré ce dossier pris en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié., demeurant 39 Boulevard Vincent Delpuech-Les Bureaux du Méditerranée-13255 MARSEILLE CEDEX 6
représenté par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
assisté de Me Alain TUILLIER, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE substitué par Me Laurence LLAHI, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 02 Septembre 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Octobre 2008..

MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Octobre 2008.

Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

E X P O S É D U L I T I G E

Par requête déposée le 20 juillet 2007 devant la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, complétée le 22 octobre 2007 d'une mémoire récapitulatif, Mme Nicole X... expose qu'elle a été victime, le 29 août 2004 à BORGO A MOZZANO (Italie), de blessures involontaires à l'occasion d'un saut en parapente

Elle demande qu'une expertise médicale soit ordonnée et qu'il lui soit alloué une provision de 50. 000 € à valoir sur la réparation ultérieure de son préjudice corporel, outre la somme de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par décision du 4 décembre 2007, la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a rejeté les demandes de Mme Nicole X....

Mme Nicole X... a régulièrement interjeté appel de cette décision le 6 décembre 2007.

Vu les conclusions récapitulatives du FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, géré par le Fonds de Garantie d'Assurances Obligatoires (F. G. A. O.), en date du 5 juin 2008.

Le Ministère Public s'en rapporte le 24 juillet 2008.

Vu les conclusions de Mme Nicole X... en date du 13 août 2008.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 septembre 2008.

S U R Q U O I, L A C O U R

Attendu en premier lieu qu'il ne saurait être sérieusement contesté que Mme Nicole X... a été victime, le 29 août 2004 en Italie, d'un accident de parapente ayant entraîné un préjudice corporel ainsi que cela résulte en particulier des pièces italiennes, régulièrement traduites en Français, et des constatations médicales.

Attendu que les circonstances de cet accident sont relatées en détail par M. Patrice A... dans une attestation dactylographiée et signée en date du 14 novembre 2004, que contrairement à ce qu'affirme le F. G. A. O., cette attestation (pièce no 3 du bordereau de communication de pièces) est accompagnée de la photocopie de la carte nationale d'identité de son auteur (pièce no 10 du bordereau) et qu'ainsi la Cour est en mesure de s'assurer de l'identité de l'auteur de cette attestation, étant rappelé que les dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité.

Attendu d'autre part que cette attestation, qui n'a fait l'objet d'aucune plainte en faux, ne saurait être ipso facto écartée au seul motif que son auteur serait (ou aurait été) le concubin de la victime, étant rappelé que l'accident est survenu à l'occasion de vacances en Italie et qu'il n'y a donc rien d'anormal à ce que le seul témoin français de l'accident soit un proche de la victime qui l'accompagnait à cette occasion.

Attendu, sur le fond, qu'il résulte de cette attestation que Mme Nicole X..., par ailleurs licenciée parapente auprès de la F. F. V. L., effectuait, le 29 août 2004 en début de soirée, un vol en parapente sur la commune italienne de BORGO A MOZZANO, qu'elle était dans sa procédure d'approche finale pour revenir au sol lorsqu'à une vingtaine de mètres du sol son aile a été abordée par un autre pilote, M. Giovanni B..., qui se trouvait au-dessus d'elle, également en procédure d'approche finale.

Attendu que les pieds de M. Giovanni B... se sont pris dans l'aile de Mme Nicole X... qui en a perdu le contrôle, les deux extrémités de l'aile se rejoignant (configuration dite de " crevette ") ; qu'elle a néanmoins réussi à remettre son aile en configuration de vol normal mais, ayant prématurément perdu de l'altitude et de la vitesse, n'a pu freiner efficacement son aile et a heurté violemment le sol.

Attendu que les déchirures de l'aile consécutives à un accrochage ont été constatées le 17 décembre 2004 par la société RIP'AIR de TALLOIRES (Haute-Savoie), chargée de la réparation de l'aile.

Attendu que la réglementation française aérienne du vol libre (planeurs, parapentes, deltas, ailes rigides) précise que lors d'un atterrissage l'aéronef le plus bas a priorité sur l'aéronef le plus haut, que cette règle, au demeurant de pur bon sens, est exactement la même en Italie ainsi que cela résulte de l'article 10 du décret présidentiel italien du 5 août 1988 disposant que lorsque deux ou plusieurs appareils s'approchent de la même zone pour l'atterrissage, l'appareil qui se trouve à une altitude plus haute doit donner la priorité à celui qui se trouve à une altitude plus basse.

Attendu qu'il apparaît donc que lors de la procédure d'atterrissage des deux parapentes Mme Nicole X..., qui était à l'altitude la plus basse, avait la priorité sur M. Giovanni B... qui se trouvait à une altitude plus haute et qui, sans prendre les précautions nécessaires, a heurté l'aérodyne de Mme Nicole X..., provoquant sa chute et le dommage corporel qui en est résulté.

Attendu qu'un tel comportement fautif, résultant d'une négligence et d'un non respect de la réglementation applicable (tant en France qu'en Italie), est bien constitutif du délit de coups et blessures involontaires et qu'ainsi Mme Nicole X... est en droit de réclamer l'indemnisation de ses préjudices en application des dispositions de l'article 706-3 du Code de procédure pénale.

Attendu que la décision déférée, qui l'a déboutée de ses demandes, sera donc infirmée et que, statuant à nouveau, il sera jugé que Mme Nicole X... a droit à la réparation de l'intégralité de ses préjudices consécutifs à l'accident dont elle a été victime le 29 août 2004.

Attendu qu'il sera fait droit à sa demande d'expertise médicale afin de décrire ses blessures et de permettre l'évaluation de ses postes de préjudice corporel, les frais de cette expertise étant pris en charge par le Trésor Public comme en matière de frais de justice criminelle conformément aux dispositions des articles R 91 et R 92, 15o du Code de procédure pénale.

Attendu que Mme Nicole X... a été examinée par l'expert de sa compagnie d'assurances qui a constaté qu'elle avait été victime, suite à cet accident, d'un traumatisme thoracique avec épanchement pleural, d'un traumatisme abdominal avec hématome péri-rénal et d'un traumatisme de l'ensemble de la colonne vertébrale avec des fractures complexes L2- L3, ostéosynthésées associées à une symptomatologie déficitaire sensitive et motrice de la queue de cheval.

Attendu que le préjudice corporel apparaît donc d'ores et déjà comme devant être important, qu'au vu de ces éléments il convient d'allouer à Mme Nicole X... une indemnité d'un montant de 30. 000 € à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel.

Attendu que compte tenu de la demande présentée dans la requête initiale et de l'effet dévolutif qui s'attache à l'appel de Mme Nicole X..., la Cour, par le présent arrêt, a vidé sa saisine, les parties étant renvoyées à faire liquider le préjudice définitif de la victime devant la juridiction de première instance, que pour le même motif le contrôle de l'expertise médicale sera confié à Mme la Présidente du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE ou son délégataire.

Attendu qu'il est équitable d'allouer à Mme Nicole X... la somme de 1. 000 € au titre des frais par elle exposés et non compris dans les dépens.

Attendu que conformément aux dispositions des articles R 91 et R 92, 15o précités, il convient de laisser la charge des dépens d'appel au Trésor Public avec distraction au profit des avoués de la cause.

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.

Infirme la décision déférée et, statuant à nouveau :

Dit que Mme Nicole X... a droit à la réparation de l'intégralité de ses préjudices consécutifs à l'accident dont elle a été victime le 29 août 2004.

Ordonne une mesure d'expertise médicale.

Désigne pour y procéder le Docteur Gérard C..., inscrit sur la liste des experts de la Cour d'Appel de céans, demeurant ...avec mission, en procédant conformément aux dispositions des articles 273 à 284 du Nouveau Code de Procédure Civile :

- de convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et de recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise,
- de se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

- d'examiner Mme Nicole X..., demeurant ...

- d'indiquer son état antérieur à la survenance de l'événement à l'origine du litige,

- de rappeler les soins, traitements, opérations et autres interventions à fins curatives, thérapeutiques, de restauration ou de rééducation nécessités par l'événement à l'origine du litige,

- de décrire précisément l'état actuel, les lésions qui lui ont été causées par l'événement à l'origine du litige, d'en exposer les conséquences, d'estimer la durée de l'invalidité ou des invalidités temporaires en indiquant la date de consolidation des blessures, d'apprécier, sur échelle allant de 1 à 7, le degré des souffrances physiques ou psychiques supportées en précisant la période de temps où elles se sont manifestées, d'évaluer, par référence aux barèmes d'évaluation de droit commun et aux échelles habituelles, le taux de l'incapacité permanente qui peut subsister avec, le cas échéant, les répercussions de cette incapacité permanente sur la vie courante et sur la vie professionnelle, en mentionnant les atteintes à l'autonomie et la nécessité de l'intervention d'une tierce personne, de donner son avis sur le préjudice d'agrément ainsi que sur le préjudice esthétique (sur une échelle allant de 1 à 7), et, d'une façon générale, de fournir tous éléments médicaux de nature à permettre l'évaluation des divers préjudices subis en relation directe et certaine avec l'événement à l'origine du litige,

- d'indiquer l'évolution prévisible dans le temps de cet état, soit par suite d'aggravation, soit par suite d'amélioration,

- de mettre, en temps utile, au terme des opérations d'expertise, les parties en mesure de faire valoir leurs observations.

Dit que l'expert pourra, s'il le juge nécessaire, recueillir l'avis d'un autre technicien dans une spécialité distincte de la sienne ou se faire assister dans l'accomplissement de sa mission par la personne de son choix, dont il mentionnera dans son rapport les nom et qualités et qui interviendra sous son contrôle et sa responsabilité.

Dit que l'expert fixera aux parties un délai pour formuler leurs observations ou réclamations et qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l'expiration de ce délai, sauf cause grave et dûment justifiée et après en avoir fait rapport au magistrat chargé de contrôler l'expertise.

Dit que l'expert mentionnera, dans son rapport, la suite qu'il aura donnée à ces observations ou réclamations.

Dit que l'expert devra déposer le rapport de ses opérations en double exemplaire, au Greffe du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE (CIVI) dans les QUATRE MOIS de sa saisine et, conformément à l'article 173 du Nouveau Code de Procédure Civile, en le mentionnant dans l'original, remettre aux parties et à leurs avocats copie de son rapport.

Dit que les frais et honoraires de l'expertise seront avancés par le Trésor Public comme en matière de frais de justice criminelle.

Désigne Madame la Présidente du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE ou son délégataire pour contrôler l'expertise ordonnée.

Alloue à Mme Nicole X... une indemnité provisionnelle de TRENTE MILLE EUROS (30. 000 €) à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel.

Dit que cette indemnité provisionnelle sera versée par Monsieur le Directeur Général du FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, géré par le Fonds de Garantie d'Assurances Obligatoires, dans le mois de la réception de l'expédition du présent arrêt.

Alloue à Mme Nicole X... la somme de MILLE EUROS (1. 000 €) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens qui sera à la charge du Trésor Public et recouvrée comme les dépens.

Laisse les dépens de la procédure à la charge du Trésor Public.

Autorise les avoués de la cause à recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.
Rédacteur : M. RAJBAUT

Madame JAUFFRESMadame SAUVAGE
GREFFIÈRE PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0023
Numéro d'arrêt : 07/19931
Date de la décision : 07/10/2008

Analyses

INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTION - Infraction - Article 706-3 du code de procédure pénale - Domaine d'application - /JDF

(1) - Une attestation, qui n'a fait l'objet d'aucune plainte en faux, ne saurait être ipso facto écartée au seul motif que son auteur serait (ou aurait été) le concubin de la victime, étant rappelé que l'accident est survenu à l'occasion de vacances en Italie et qu'il n'y a donc rien d'anormal à ce que le seul témoin français de l'accident soit un proche de la victime qui l'accompagnait à cette occasion. (2) - S'agissant d'un accident de parapente, lors de la procédure d'atterrissage des deux parapentes la victime, qui était à l'altitude la plus basse, avait la priorité sur l'autre parapentiste qui se trouvait à une altitude plus haute et qui, sans prendre les précautions nécessaires, a heurté l'aérodyne de la victime, provoquant sa chute et le dommage corporel qui en est résulté. Un tel comportement fautif, résultant d'une négligence et d'un non respect de la réglementation applicable (tant en France qu'en Italie), est bien constitutif du délit de coups et blessures involontaires et ainsi la victime est en droit de réclamer l'indemnisation de ses préjudices devant la commission d'indemnisation en application des dispositions de l'article 706-3 du Code de procédure pénale.


Références :

Décision attaquée : C.I.V.I près le tribunal de Marseille, 04 décembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2008-10-07;07.19931 ?
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