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02/10/2008 | FRANCE | N°06/17821

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 octobre 2008, 06/17821


4o Chambre C

ARRÊT AU FOND
DU 02 OCTOBRE 2008

No 2008 / 339



Rôle No 06 / 17821

Sébastien X...




C /

Eliane Y... épouse Z...


réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Octobre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 2501.

APPELANT

Monsieur Sébastien X...


né le 24 Novembre 1983 à NICE (06000),

demeurant ...


représenté par la SCP GIACOMETTI-DESOMBRE, avoués à la Cour,



assisté de Maître Renaud GIULIERI, avocat au barreau de NICE



INTIMEE

Madame Eliane Y... épouse Z...


née le 15 Novembre 1938 à NICE (06000),

demeurant ...


représenté...

4o Chambre C

ARRÊT AU FOND
DU 02 OCTOBRE 2008

No 2008 / 339

Rôle No 06 / 17821

Sébastien X...

C /

Eliane Y... épouse Z...

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Octobre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 2501.

APPELANT

Monsieur Sébastien X...

né le 24 Novembre 1983 à NICE (06000),

demeurant ...

représenté par la SCP GIACOMETTI-DESOMBRE, avoués à la Cour,

assisté de Maître Renaud GIULIERI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Madame Eliane Y... épouse Z...

née le 15 Novembre 1938 à NICE (06000),

demeurant ...

représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,

assistée de la SCP MARRO J., MARRO J., LADRET R., avocats au barreau de NICE

*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Juin 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Brigitte BERNARD, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Brigitte BERNARD, Président
Madame Marie-Françoise BREJOUX, Conseiller
Monsieur Michel NAGET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Christine RAGGINI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2008,

Signé par Madame Brigitte BERNARD, Président et Madame Marie-Christine RAGGINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte du 23 septembre 1994, Christian B..., aux droits duquel se trouve Sébastien X..., a donné à bail à Eliane Z... un local au sous-sol et un local indépendant à l'extérieur, le tout dépendant d'un immeuble sis à LA TRINITE (Alpes Maritimes), et ce, à usage d'entrepôt garde-meubles Par acte du 11 mars 2003, Sébastien X... a donné congé pour le 30 septembre 2003 à sa locataire avec dénégation du droit au statut des baux commerciaux, se fondant sur un défaut d'immatriculation des locaux loués au RCS de NICE.

Par acte du 28 avril 2005, Sébastien X... a assigné Eliane Z... devant le Tribunal de Grande Instance de NICE aux fins de juger valable le congé avec dénégation de droit au statut délivré le 11 mars 2003, subsidiairement dire que le bail ne bénéficie pas de la propriété commerciale et a pris fin au 30 septembre 2003, en toute hypothèse d'expulser la requise et de la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation, outre des dommages-intérêts.

Par jugement du 12 octobre 2006, le Tribunal de Grande Instance de NICE a :
- débouté Sébastien X... de l'ensemble de ses demandes,
- débouté Eliane Z... de sa demande en dommages-intérêts,
- condamné Sébastien X... à lui payer la somme de 1. 500 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.

Par acte du 23 octobre 2006, Sébastien X... a fait appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions signifiées le 9 mai 2008 et auxquelles il est renvoyé, Sébastien X... demande à la Cour :
- de déclarer recevable son appel et de réformer le jugement en toutes ses dispositions,
- de juger bon et valable le congé litigieux et d'ordonner l'expulsion immédiate et sans délai de l'intimée ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l'emploi de la force publique,
- de condamner l'intimée au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 3. 050 Euros HT, outre TVA, charges et taxes annexes, à compter du 1er octobre 2003 jusqu'à la date de départ effectif des lieux,
- de la condamner au paiement de la somme de 3. 000 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens.

A l'appui de ses demandes, l'appelant se fonde sur l'article L. 145-1, al. 1 du Code de commerce. Il invoque l'absence d'immatriculation de la locataire au RCS pour les locaux litigieux, au jour de la délivrance du congé, pour justifier le congé litigieux. Il en déduit une nécessaire indemnité d'occupation.
Concernant une possible application de l'alinéa 2 du même article, il relève l'inexistence des deux conditions cumulatives ; selon lui, d'une part, il n'y a jamais eu d'utilisation jointe au vu et au su du bailleur, d'autre part le local était un établissement distinct, " secondaire " et non " accessoire ", à usage exclusif d'entrepôt garde-meubles, enfin il n'aurait jamais revêtu un caractère indispensable pour l'exploitation du fonds de l'intimée.

Par ses dernières écritures signifiées le 16 avril 2007 et auxquelles il est renvoyé, Eliane Z... demande à la Cour :
- de recevoir en la forme l'appel interjeté et de l'en débouter,
- de recevoir l'appel incident de l'intimée et de condamner l'appelant au paiement de la somme de 3. 000 Euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire et préjudice moral,
- de le condamner au paiement de la somme de 3. 000 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens.

A l'appui de ses prétentions, l'intimée se fonde sur l'alinéa 2 de l'article L. 145-1 du Code de commerce, excipant ainsi que les locaux loués seraient accessoires aux locaux où est exploitée son activité principale ; Ils seraient, selon elle, indispensables à son activité principale de déménageur et leur privation compromettrait totalement l'exploitation de son fonds. Sébastien X... aurait été, selon elle, parfaitement au courant de la situation et de l'utilisation jointe des baux.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 4 juin 2008.

Sur ce, la Cour

Considérant que la recevabilité de l'appel n'est pas critiquée ;

Considérant que par un bail commercial du 23. 09. 1994, Christian B..., aux droits duquel se trouve Sébastien X..., a loué à " Eliane Z..., née Y..., enseigne déménagements les Collinettes ", ..., à compter du 01. 10. 1994 pour 9 ans, un local d'environ 900 m2, situé en sous-sol et un local indépendant à l'extérieur près de la porte, situés ... à LA TRINITE (06), " à usage exclusif d'entrepôt, garde meubles " ;

Considérant que Sébastien X... a délivré un congé à Eliane Z..., comportant dénégation du droit au statut le 11. 03. 2003 pour le 30. 09. 2003 pour défaut d'immatriculation des locaux loués au Registre du Commerce et des Sociétés de NICE ;

Considérant qu'en application de l'article L 145-1-10 du Code de Commerce, le statut des baux commerciaux s'applique aux baux des locaux accessoires à l'exploitation du fonds de commerce, à la double condition cumulative, que leur privation soit de nature à compromettre l'exploitation du fonds, peu important l'existence d'une solution de remplacement et que si les locaux principal et accessoire appartiennent à deux bailleurs différents, les locaux accessoires aient été loués, au vu et au su du bailleur du local accessoire en vue de leur utilisation jointe ;

Considérant qu'Eliane Z... se prévaut du caractère accessoire des locaux loués à Sébastien X..., qui la dispenserait de toute obligation d'immatriculation de ces locaux au Registre du Commerce et des Sociétés ;

Considérant, au contraire, que Sébastien X... soutient que les locaux loués sont un établissement secondaire, exploité commercialement par Eliane Z... et fréquenté par une clientèle, de sorte que ces locaux bénéficient du droit au renouvellement, sans preuve de leur caractère nécessaire, mais sont soumis aux conditions de ce droit et notamment à l'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés à la date du congé ;

Considérant que la charge de la preuve du caractère accessoire des locaux, loués à Sébastien X..., incombe à la locataire Eliane Z... ;

Considérant, tout d'abord, qu'il n'est pas formellement établi par les seules mentions au bail, que le bailleur ait eu au moment de la formation du bail (il s'agit donc uniquement de Christian B...), connaissance du caractère accessoire des lieux qu'il louait à Eliane Z... et de l'utilisation jointe qui en serait faite avec celle du local principal ;

Que cette connaissance n'est prouvée par aucune pièce, celles produites datant de 2003 et 2004 ; que dans le bail, il résulte des mentions portées que le bailleur a autorisé Eliane Z... " Enseigne Déménagements les Collinettes ", ..., donc exploitante déjà, à titre individuel, d'un fonds de commerce de déménagements, à exploiter une activité commerciale de garde meubles dans les locaux loués ; qu'il est difficile d'affirmer que de ces mentions, il se déduit que le bailleur savait que cette location était faite en vue de permettre l'utilisation jointe des locaux de la Trinité à celle du local principal à NICE ;

Que ce doute pourrait néanmoins profiter à l'obligée, Eliane Z... ;

Mais considérant ensuite, que pas davantage, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, Eliane Z... ne démontre que la privation des locaux litigieux à la Trinité est de nature à compromettre l'exploitation de son fonds de commerce de déménagement, cette condition s'appréciant à la date du congé, ce qui rend sans intérêt le fait de savoir que, de son immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés en 1964 jusqu'en 1983, Eliane Z... n'a pas exploité de garde meubles ;

Considérant, en effet, que l'extrait K-bis au 29. 09. 2003 de l'intimée, conforte simplement le fait que les locaux loués sont bien des locaux permanents, distincts du siège social et de l'établissement principal, lesquels ont des adresses différentes ;

Que les lettres de voiture produites et datant toutes de 2003, hormis une en date du 09. 02. 2004, sont à en tête de " Déménagements les Collinettes " ; qu'elles ne facturent d'abord que le transport du lieu de chargement au garde-meubles, mais non en outre la période passée au garde-meubles, qui doit donc donner lieu à une facturation séparée ; qu'au surplus, il est normal que l'exploitation du garde meubles étant dirigée par l'assujettie à l'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés, les lettres de voiture soient à en tête de son enseigne " Déménagements les Collinettes " ; que le caractère accessoire des locaux loués n'est pas prouvé par ces lettres de voiture ;

Que pour le motif précité et parce que le bail des locaux litigieux a été passé par " Eliane Z..., enseigne Déménagements les Collinettes ", ne sont pas non plus probants du caractère accessoire de ces locaux, les quittances de loyers, au nom d'Eliane Z... ; " déménagements Les Collinettes " et l'adresse du siège social figurant sur certaines en haut à droite, ni les relevés du compte professionnel d'Eliane Z... au Crédit du Nord, indiquant le paiement des loyers des locaux de la Trinité ;

Considérant surtout que d'une part, Eliane Z... reçoit de la clientèle dans les locaux de garde-meubles à la Trinité, comme le démontrent la lettre de la Société FK Express du 24. 11. 2005 et l'arrêté de fermeture au public desdits locaux pris par le Maire de la Trinité le 12. 07. 2005 ;

Que le courrier de la Société FK EXPRESS infirme l'argument de l'intimée, selon lequel elle ne ferait que déposer les meubles, qu'elle vient de déménager, dans les locaux litigieux, avant de les transporter dans un autre endroit déterminé par le client ; qu'il peut y avoir uniquement une activité de garde-meubles dans les locaux loués, nécessitant un transport mais pas obligatoirement un déménagement, ce que les lettres de voiture exprimaient déjà ; que par ailleurs, les clients eux-mêmes viennent au garde-meubles, soit déposer leurs meubles, soit les y retirer ;

Que s'agissant de l'arrêté municipal de fermeture au public des locaux loués à Sébastien X..., en date du 12. 07. 2005, il est établi que malgré la requête d'Eliane Z... et la réalisation de travaux pour mettre fin à des inondations récurrentes des locaux, l'arrêté, dont l'intitulé " fermeture au public " a été contesté par Eliane Z..., vainement, jusqu'à maintenant, n'a pas été retiré ;

Qu'Eliane Z... ne verse aux débats aucune pièce comptable établissant que la fermeture des locaux à usage de garde-meubles depuis juillet 2005, compromette l'exploitation du fonds de commerce de déménagement, mettant en péril l'existence du fonds lui-même ; que seul est invoqué, mais non justifié, un préjudice à la bonne marche et aux résultats de l'entreprise de déménagements ;

Considérant qu'au vu de ces éléments, Eliane Z... ne rapporte pas la preuve que les locaux loués à Sébastien X... sont indispensables au fonds de commerce de déménagements, qu'elle exploite ; que ces locaux constituent un établissement secondaire, dont l'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés était exigée à la date du congé délivré par Sébastien X... soit au 11. 03. 2003 ;

Considérant que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que le congé, avec refus. de renouvellement, comportant dénégation du droit au statut des baux commerciaux, délivré le 11. 03. 2003 pour le 30. 09. 2003, à Eliane Z..., sera déclaré valable ;

Que le bail du 23. 09. 1994 a pris fin ainsi le 30. 09. 2003 ; qu'Eliane Z... est occupante sans droit ni titre depuis cette date ;

Que son expulsion des locaux occupés, ... à LA TRINITE (06) sera ordonnée ;

Qu'Eliane Z... sera condamnée à payer à Sébastien X... une indemnité d'occupation mensuelle, égale au dernier loyer toutes taxes comprises en cours au 30. 09. 2003, charges et taxes en sus, rien ne justifiant une indemnité majorée, comme le demande le bailleur ;

Considérant que l'intimée, qui succombe en ses demandes reconventionnelles, sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure vexatoire et préjudice moral ;

Considérant, enfin, qu'il est équitable de condamner Eliane Z... à payer à Sébastien X... 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en audience publique, contradictoirement

-Reçoit l'appel.

- Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau :

- Déclare valable le congé avec dénégation du droit au statut et refus. de renouvellement, sans indemnité d'éviction délivrée le 11. 03. 2003 par Sébastien X... à Eliane Z..., avec effet au 30. 09. 2003, pour les locaux, sis ...à LA TRINITE (06).

- Dit que ces locaux constituaient des locaux secondaires et non accessoires à l'établissement principal exploité par Eliane Z....

- Déclare Eliane Z..., occupante sans droit ni titre des locaux susvisés depuis le 30. 09. 2003.

- Ordonne son expulsion et celle de tous occupants de son chef des locaux, sis ...à LA TRINITE (06), dans le mois suivant la date de signification du présent arrêt, au besoin avec le concours de la Force Publique.

- Condamne Eliane Z... à payer à Sébastien X... une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 30. 09. 2003 en deniers ou quittances, d'un montant égal à celui du dernier loyer en cours toutes taxes comprises au 30. 09. 2003, charges en sus, jusqu'à parfaite libération des lieux.

- Condamne Eliane Z... à payer à Sébastien X... 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel.

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

- Condamne Eliane Z... aux entiers dépens de première instance et d'appel. admet la SCP GIACOMETTI-DESOMBRE, avoués au bénéfice de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 06/17821
Date de la décision : 02/10/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nice


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-10-02;06.17821 ?
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