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03/09/2008 | FRANCE | N°07/01680

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0023, 03 septembre 2008, 07/01680


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10o Chambre
ARRÊT AU FOND DU 03 SEPTEMBRE 2008
No 2008 /

Rôle No 07 / 01680

S. A. ULADE INTERMARCHE Sa GAN EUROCOURTAGE IARD

C /
Victorine X... épouse DI Y... CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES

Grosse délivrée le : à :

réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 06 / 129.

APPELANTES
S. A. ULADE INTERMARCHE RCS PARIS DE GRASSE No 423 567 650 agiss

ant par son PDG en exercice audit siège, 9551 Route de Saint Laurent-06610 LA GAUDE représentée par la SCP JOURDAN-WAT...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10o Chambre
ARRÊT AU FOND DU 03 SEPTEMBRE 2008
No 2008 /

Rôle No 07 / 01680

S. A. ULADE INTERMARCHE Sa GAN EUROCOURTAGE IARD

C /
Victorine X... épouse DI Y... CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES

Grosse délivrée le : à :

réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 06 / 129.

APPELANTES
S. A. ULADE INTERMARCHE RCS PARIS DE GRASSE No 423 567 650 agissant par son PDG en exercice audit siège, 9551 Route de Saint Laurent-06610 LA GAUDE représentée par la SCP JOURDAN-WATTECAMPS, avoués à la Cour, ayant Me Emmanuel VOISIN-MONCHO, avocat au barreau de GRASSE
Sa GAN EUROCOURTAGE IARD prise en la personne de son rerpésentant légal en exercice, 8-10 rue d'Astorg-75383 PARIS CEDEX 8 représentée par la SCP JOURDAN-WATTECAMPS, avoués à la Cour, ayant Me Emmanuel VOISIN-MONCHO, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES
Madame Victorine X... épouse DI Y... née le 05 Mai 1925 à SOUSSE / TUNISIE, demeurant... représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, ayant Me Philippe MARIA, avocat au barreau de GRASSE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis, 48 Rue Roi Robert de Provence-Service contentieux-06180 NICE CEDEX 2 représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, assistée de Me Philippe BORRA, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 21 Mai 2008, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller, chargée du rapport,
Madame KERHARO-CHALUMEAU a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2008.

ARRÊT
Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2008
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

E X P O S É D U L I T I G E

Mme Victorine X... épouse DI Y... a été victime d'une chute, le 16 septembre 2003 dans le supermarché INTERMARCHE de LA GAUDE (Alpes-Maritimes).
Par jugement contradictoire du 18 décembre 2006, le Tribunal de Grande Instance de GRASSE a :
- Condamné solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la compagnie d'assurances S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD à payer en deniers ou quittances avec intérêts au taux légal à compter de sa décision, les sommes suivantes à Mme Victorine X... épouse DI Y... :
-25. 179 € 57 c. en réparation de son préjudice soumis à recours,-10. 900 € en réparation de son préjudice personnel,- une rente mensuelle sur la base de deux heures d'aide ménagère par semaine au tarif horaire de 16 € 68 c.,
- Condamné solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD à payer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE (ci-après C. P. A. M.) des Alpes-Maritimes les sommes suivantes :
-10. 369 € 57 c. au titre de ses débours provisoires,-762 € 25 c. au titre de l'indemnité prévue par l'ordonnance du 24 janvier 1996,
- Ordonné l'exécution provisoire de sa décision,
- Condamné solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD à payer à Mme Victorine X... épouse DI Y... la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Rejeté toutes les autres demandes des parties,
- Condamné solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD aux entiers dépens comprenant la procédure de référé et d'expertise.
La S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD ont régulièrement interjeté appel de ce jugement le 30 janvier 2007.
Vu les conclusions de Mme Victorine X... épouse DI Y... en date du 8 octobre 2007.
Vu les conclusions de la C. P. A. M. des Alpes-Maritimes en date du 26 novembre 2007.
Vu les conclusions de la S. A. ULADE INTERMARCHE et de la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD en date du 22 avril 2008.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 mai 2008.

M O T I F S D E L'A R R Ê T

I : SUR LA PROCÉDURE :
Attendu qu'en premier lieu les appelants sollicitent " bien évidemment " (sic) l'annulation du jugement déféré au motif que celui-ci a été rendu sous le visa de la loi du 5 juillet 1985 alors que l'action de la demanderesse était engagée sur le fondement des dispositions de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil.
Attendu que s'il est exact que le dispositif du jugement déféré vise à tort la loi du 5 juillet 1985, il ne s'agit " bien évidemment " que d'une simple erreur matérielle étant observé que les motifs du jugement se réfèrent bien à l'article 1384 alinéa 1er du Code civil et que la responsabilité de la S. A. ULADE INTERMARCHE est bien retenue par le premier juge sur le fondement de cet article et non pas sur celui de la loi du 5 juillet 1985, inapplicable aux faits de la cause.
Attendu en outre que dans la mesure où il n'y a jamais eu la moindre ambiguïté quant au fondement juridique de l'action en responsabilité de Mme Victorine X... épouse DI Y..., les appelants ne justifient pas du préjudice qui leur aurait été causé par cette erreur matérielle.
Attendu que la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD seront donc déboutés de leur demande d'annulation du jugement déféré.
II : SUR LA RESPONSABILITÉ DE LA S. A. ULADE INTERMARCHE :
Attendu, sur le fond, que s'il est incontestable que Mme Victorine X... épouse DI Y... a fait une chute le 16 septembre 2003 à l'intérieur du supermarché INTERMARCHE de LA GAUDE, la S. A. ULADE INTERMARCHE demande sa mise hors de cause au motif que la cause de cette chute demeurerait incertaine en l'absence de tout témoin oculaire venant confirmer un quelconque lien causal entre le carton litigieux et la chute.
Attendu que la Cour observera tout d'abord que contrairement à ce qu'affirment les appelants (page 4, 2ème paragraphe de leurs conclusions) il n'y a aucun intérêt à constater que la victime a attendu une année avant de demander en référé une mesure d'expertise médicale alors surtout que pendant cette période elle n'était pas restée inactive comme en témoignent les nombreux échanges de correspondances entre son assurance " protection juridique " et l'assureur de la S. A. ULADE INTERMARCHE et que l'action en justice n'a été engagée qu'en raison du refus persistant de cet assureur d'indemniser la victime.
Attendu que Mme Victorine X... épouse DI Y... produit l'attestation d'un témoin, M. Nicolas C..., en date du 26 février 2004 et qui n'a fait l'objet d'aucune plainte pénale en faux, que cette attestation est ainsi rédigée :
" Le 16 septembre 2003, je faisais la queue à la caisse no 2, avec le regard orienté vers la sortie, vers 12 h 15, lorsque j'ai entendu derrière moi Madame DI Y... chuter lourdement vers le sol après avoir heurté un petit carton posé à même le sol au niveau du rayon " salade en sachets ", produits frais. Je n'ai pas pu amortir sa chute. Après, je me suis mis à genoux pour maintenir Mme DI Y... sur le sol de telle sorte à la maintenir immobile jusqu'à l'arrivée des pompiers de CAGNES-SUR-MER (déjà + /-20'), et de la rassurer. Aux alentours de 12 h 30, Mme DI Y... était évacuée sur l'hôpital le plus proche. Tout ceci, en présence des employés du magasin (caissières, etc...). "
Attendu que contrairement à ce qu'affirment les appelants, ce témoin ne s'est pas contenté de reprendre à son compte les affirmations de la victime mais a bien été présent au moment de sa chute qu'il a entendue, que s'il n'a pas vu la chute elle-même se produire, il est néanmoins immédiatement intervenu pour maintenir et rassurer la victime jusqu'à l'arrivée des secours, que ce témoin fait clairement état de la présence, sur les lieux de la chute, d'un carton posé à même le sol devant les rayons.
Attendu surtout que la S. A. ULADE INTERMARCHE a elle-même spontanément et immédiatement reconnu le rôle causal de ce carton dans la chute de Mme Victorine X... épouse DI Y... puisque dès le 18 septembre 2003 (alors qu'à cette date la victime était encore hospitalisée) un responsable de l'INTERMARCHE de LA GAUDE écrivait la lettre suivante à la société SECOIA :

" Veuillez noter que Mardi 16 septembre une de nos clientes a fait une chute dans notre établissement. Elle a en effet buté sur un carton, et a été prise en charge par les pompiers. Vous trouverez ci-dessous ses coordonnées :- Mme DI Y... Victorine,.... Tél. : .... A toutes fins utiles. "

Attendu qu'il est donc suffisamment établi que Mme Victorine X... épouse DI Y... a chuté le 16 septembre 2003 en heurtant un carton posé sur le sol d'une des allées du supermarché INTERMARCHE de LA GAUDE.
Attendu qu'il n'est pas contestable que la S. A. ULADE INTERMARCHE avait la garde de ce carton.
Attendu qu'une chose inerte est l'instrument du dommage dès lors qu'elle occupait une position anormale, que tel est le cas pour la présence d'un carton posé à même le sol dans l'allée d'un supermarché en libre-service ouvert à la circulation de la clientèle, ces allées ne devant pas présenter d'obstacle à une progression normale des clients et ce d'autant plus que tout est fait dans les présentoirs pour capter leur attention.
Attendu qu'il est donc établi que ce carton, chose inerte dont la position était anormale, a joué un rôle causal et a été l'instrument du dommage subi par Mme Victorine X... épouse DI Y....
Attendu que c'est donc à juste titre que le premier juge a retenu la responsabilité de la S. A. ULADE INTERMARCHE sur le fondement des dispositions de l'article 1384, alinéa 1er du Code civil en sa qualité de gardienne de ce carton.
Attendu qu'il ne peut sérieusement pas être allégué une quelconque faute de la victime présentant les caractéristiques de la force majeure, seule susceptible d'exonérer le gardien de sa présomption de responsabilité, qu'en particulier le fait (à le supposer exact) que la victime était une cliente habituelle du magasin est sans incidence sur les circonstances de l'accident qui ne mettent pas en cause la disposition des rayons mais concernent la présence anormale d'un carton dans une allée du magasin.
Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a solidairement condamné la S. A. ULADE INTERMARCHE et son assureur, la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD à réparer l'entier préjudice subi par la victime.
III : SUR L'ÉVALUATION ET LA LIQUIDATION DU PRÉJUDICE CORPOREL DE MME VICTORINE X... ÉPOUSE DI Y... :
Attendu que Mme Victorine X... épouse DI Y..., née le 5 mai 1925, sans profession, a été examinée par le Dr Hervé D..., expert commis par ordonnance de référé du 13 décembre 2004 et qui a déposé son rapport définitif le 16 avril 2005.
Attendu que cette expertise a été menée dans le respect du principe du contradictoire, que l'expert a adressé un pré-rapport aux parties le 16 mars 2005 avant de l'adresser, en tant que rapport définitif, au Tribunal le 16 avril 2005 sans avoir reçu de dires des parties.
Attendu que ce rapport, complet et documenté, n'est pas sérieusement critiqué, qu'il sera donc entériné par la Cour pour l'évaluation et la liquidation du préjudice corporel de la victime.
Attendu qu'il en ressort qu'à la suite de l'accident du 16 septembre 2003 Mme Victorine X... épouse DI Y... a été victime d'une fracture de la tête humérale gauche et d'une fracture du col du fémur gauche imputables à sa chute, qu'elle a été opérée le 19 septembre 2003 sous anesthésie générale pour la pose d'une prothèse totale avec implant définitif, qu'à la suite de son hospitalisation elle est partie en convalescence du 1er au 28 octobre 2003 avant de regagner son domicile, qu'elle a subi au total cent séances de rééducation kinésithérapique de son épaule et de sa hanche gauches et une injection quotidienne d'anticoagulant avec un dosage sanguin bi-hebdomadaire des plaquettes.
Attendu que Mme Victorine X... épouse DI Y... est rentrée chez elle avec l'aide d'une canne anglaise pour déambuler et a dû être aidée par une aide soignante, qu'elle est en effet gênée par la diminution de la cinétique de son épaule gauche dans les actes habituels de la vie courante.
Attendu que l'expert conclut à une I. T. T. de 43 jours suivie d'une I. T. P. à 50 % pendant quatre mois pour l'assistance partielle à domicile d'une aide soignante, avec une date de consolidation au 16 septembre 2004, que l'expert fixe le taux d'I. P. P. à 15 % (déficits physiologiques de l'épaule et de la hanche gauches en tenant compte de l'état antérieur) et évalue le pretium doloris à 3, 5 / 7 et le préjudice esthétique à 2 / 7 (cicatrice chirurgicale, boiterie, aide d'une canne), qu'il retient l'existence d'un préjudice d'agrément définitif pour les sorties hors de son domicile.
Attendu enfin que l'expert indique que la victime n'est plus au plan médical physiquement apte à reprendre les activités qu'elle exerçait lors de l'accident (alors qu'elle menait une existence normale pour son âge) et qu'elle a besoin de deux heures supplémentaires d'aide ménagère à domicile, par semaine, pour pallier l'accélération, imputable à la chute, du processus naturel et inexorable du vieillissement.
Les dépenses de santé :
Attendu que ce poste de préjudice est constitué par les frais d'hospitalisation, médicaux et pharmaceutiques, de radiologie, infirmiers, de massages, de transport et futurs pour un montant global et définitif de 12. 841 € 57 c. entièrement pris en charge par la C. P. A. M. des Alpes-Maritimes ainsi que cet organisme le détaille dans son décompte définitif de créance non critiqué dans son principe et dans son montant par les autres parties.
Attendu que Mme Victorine X... épouse DI Y... ne fait pas état de dépenses qui seraient restées à sa charge, qu'il ne lui revient donc rien sur ce poste de préjudice.
Le déficit fonctionnel temporaire :
Attendu que le premier juge a accordé une somme de 860 € pour la période d'I. T. T. de 43 jours et une somme de 1. 200 € pour la période d'I. T. P. à 50 % de quatre mois.
Attendu que les appelants offrent respectivement les sommes de 800 € et de 717 € 24 c. tandis que Mme Victorine X... épouse DI Y..., appelante incidente, réclame les sommes respectives de 1. 800 € et de 2. 400 €.
Attendu que ce poste de préjudice, constitué par la gêne dans les actes de la vie courante pendant ces périodes d'I. T. T. et d'I. T. P. sera indemnisé sur une base mensuelle de 700 € pour l'I. T. T. et de 350 € pour l'I. T. P. à 50 %, soit respectivement à 1. 050 € pour l'I. T. T. (700 x 1, 5) et 1. 400 € pour l'I. T. P. (350 x 4).
Attendu que ce poste de préjudice sera donc évalué à la somme globale de 2. 450 €.
Le déficit fonctionnel séquellaire :
Attendu que le premier juge a accordé une somme de 12. 750 € de ce chef sur la base d'une valeur du point d'incapacité de 850 €, que les appelants offrent la somme de 10. 000 € tandis que la victime réclame la somme de 17. 700 € sur la base d'une valeur du point d'incapacité de 1. 180 €.
Attendu que ce poste de préjudice sera indemnisé sur la base d'une valeur du point d'incapacité de 1. 110 € compte tenu de l'âge de la victime à la date de consolidation (79 ans) et de son taux d'I. P. P. (15 %), soit à la somme de 16. 650 €.
L'aide ménagère :
Attendu que Mme Victorine X... épouse DI Y... bénéficiait avant son accident d'une aide ménagère à raison de quatre heures par semaine, que l'expert judiciaire a reconnu la nécessité de deux heures supplémentaires par semaine du fait des conséquences de l'accident pour pallier l'accélération, imputable à la chute, du processus naturel et inexorable du vieillissement.
Attendu que le premier juge a alloué de ce chef de préjudice une rente mensuelle sur la base de deux heures par semaine à 16 € 68 c. de l'heure.
Attendu que Mme Victorine X... épouse DI Y... demande à ce titre une rente mensuelle correspondant à deux heures hebdomadaires d'aide ménagère sur la base du salaire horaire actualisé au 1er septembre 2007 de 17 € 46 c.
Attendu que les appelants s'opposent à l'octroi de cette rente au motif que ces deux heures supplémentaires seraient sans lien avec l'accident.
Mais attendu, ainsi qu'il l'a été analysé plus haut, que l'expert judiciaire a clairement indiqué dans son rapport que ces deux heures hebdomadaires supplémentaires d'aide ménagère étaient bien imputables à l'accident.
Attendu que sur une année cette aide ménagère est de 104 heures (52 x 2) et son coût, sur une base horaire réactualisée de 17 € 46 c., est de 1. 815 € 84 c. (17, 46 x 104).
Attendu que compte tenu de son faible montant il apparaît plus approprié à la Cour de liquider ce poste de préjudice en capitalisant cette somme sur la base d'un Euro de rente viager de 7, 076 correspondant à une femme de 83 ans (âge au jour de l'arrêt) en fonction des tables d'espérance de vie INSEE 2001 et d'un taux d'intérêt de 3, 20 %, soit à la somme de 12. 848 € 88 c. (1. 815, 84 x 7, 076).
Le préjudice au titre des souffrances endurées :
Attendu que le premier juge a alloué à la victime une somme de 4. 000 €, que celle-ci réclame 5. 000 € tandis que les appelants offrent 3. 000 €.
Attendu qu'en fonction de l'évaluation qui en a été faite par l'expert judiciaire à 3, 5 / 7, la Cour évalue ce poste de préjudice à la somme demandée de 5. 000 €.
Le préjudice esthétique :
Attendu que le premier juge a alloué à la victime une somme de 1. 900 €, que celle-ci réclame 3. 000 € tandis que les appelants offrent 1. 530 €.
Attendu qu'en fonction de l'évaluation qui en a été faite par l'expert judiciaire à 2 / 7, la Cour évalue ce poste de préjudice à la somme demandée de 3. 000 €.
Le préjudice d'agrément :
Attendu que le premier juge a alloué à la victime une somme de 5. 000 € dont le montant est accepté par la victime tandis que les appelants offrent 2. 000 €.
Attendu que ce poste de préjudice a été objectivé par l'expert judiciaire qui relève par ailleurs qu'avant l'accident la victime menait une existence normale pour son âge alors que désormais elle subit une diminution de sa qualité de vie, n'étant plus physiquement apte à reprendre les activités qu'elle exerçait au moment de son accident.
Attendu qu'en fonction de ces éléments la Cour évalue ce poste de préjudice à la somme demandée de 5. 000 €.
Attendu que le jugement déféré sera donc partiellement infirmé sur l'évaluation et la liquidation du préjudice corporel de Mme Victorine X... épouse DI Y... et que, statuant à nouveau de ces chefs, son préjudice corporel global sera évalué, après déduction poste par poste de la créance de l'organisme social tiers payeur, à la somme de 44. 948 € 88 c. (2. 450 + 16. 650 + 12. 848, 88 + 5. 000 + 3. 000 + 5. 000) comprenant la capitalisation de l'aide ménagère par elle demandée sous forme de rente.
Attendu qu'il est constant que Mme Victorine X... épouse DI Y... a déjà perçu une provision de 2. 000 € par l'ordonnance de référé du 13 décembre 2004, qu'en conséquence la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD seront solidairement condamnées à payer à Mme Victorine X... épouse DI Y..., en deniers ou quittances compte tenu des sommes pouvant déjà avoir été versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement déféré, la somme de 42. 948 € 88 c. au titre de son préjudice corporel, provision déduite.
Attendu de même que la créance de la C. P. A. M. des Alpes-Maritimes sera fixée à la somme de 12. 841 € 57 c. que la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD seront solidairement condamnées à lui payer en deniers ou quittances compte tenu des sommes pouvant déjà avoir été versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement déféré.
Attendu qu'il est équitable, compte tenu au surplus de la situation économique des parties condamnées, d'allouer à Mme Victorine X... épouse DI Y... la somme de 2. 000 € au titre des frais par elle exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement déféré étant par ailleurs confirmé en ce qu'il lui a alloué, en équité, la somme de 2. 000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance.

Attendu que la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD, parties perdantes, seront solidairement condamnées au paiement des dépens d'appel, le jugement déféré étant par ailleurs confirmé en ce qu'il les a solidairement condamnées au paiement des dépens de première instance (incluant la procédure de référé et les frais d'expertise).

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.
Déboute la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD de leur demande d'annulation du jugement déféré.
Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne l'évaluation et la liquidation du préjudice de Mme Victorine X... épouse DI Y... et, infirmant partiellement de ce chef et statuant à nouveau :
Évalue le préjudice corporel global de Mme Victorine X... épouse DI Y... après déduction, poste par poste, de la créance de l'organisme social, tiers payeur, à la somme de QUARANTE QUATRE MILLE NEUF CENT QUARANTE HUIT EUROS QUATRE VINGT HUIT CENTS (44. 948 € 88 c.) comprenant la capitalisation de l'aide ménagère par elle demandée sous forme de rente.
Fixe la créance de la C. P. A. M. des Alpes-Maritimes à la somme de DOUZE MILLE HUIT CENT QUARANTE ET UN EUROS CINQUANTE SEPT CENTS (12. 841 € 57 c.).
Condamne solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD à payer les sommes suivantes, en deniers ou quittances compte tenu des sommes pouvant déjà avoir été versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement déféré :
- À Mme Victorine X... épouse DI Y... : QUARANTE DEUX MILLE NEUF CENT QUARANTE HUIT EUROS QUATRE VINGT HUIT CENTS (42. 948 € 88 c.) au titre de son préjudice corporel, provision de DEUX MILLE EUROS (2. 000 €) déduite.
- À la C. P. A. M. des Alpes-Maritimes : DOUZE MILLE HUIT CENT QUARANTE ET UN EUROS CINQUANTE SEPT CENTS (12. 841 € 57 c.) en remboursement de ses débours.
Y ajoutant :
Condamne solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD à payer à Mme Victorine X... épouse DI Y... la somme de DEUX MILLE EUROS (2. 000 €) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens.
Condamne solidairement la S. A. ULADE INTERMARCHE et la S. A. G. A. N. EUROCOURTAGE IARD aux dépens de la procédure d'appel et autorise la S. C. P. de SAINT-FERREOL, TOUBOUL, Avouées associées et la S. C. P. SIDER, Avoués associés, à recouvrer directement ceux des dépens dont elles auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Rédacteur : Monsieur RAJBAUT

Madame JAUFFRES Madame SAUVAGE Greffière Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0023
Numéro d'arrêt : 07/01680
Date de la décision : 03/09/2008

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Choses dont on a la garde (article 1384, alinéa 1er, du Code civil) - Garde - Chose gardée - /JDF

Une chose inerte est l'instrument du dommage dès lors qu'elle occupait une position anormale, tel est le cas pour la présence d'un carton posé à même le sol dans l'allée d'un supermarché en libre-service ouvert à la circulation de la clientèle, ces allées ne devant pas présenter d'obstacle à une progression normale des clients et ce d'autant plus que tout est fait dans les présentoirs pour capter leur attention. Ce carton, chose inerte dont la position était anormale, a donc joué un rôle causal et a été l'instrument du dommage subi par la victime. C'est donc à juste titre que le premier juge a retenu la responsabilité du supermarché sur le fondement des dispositions de l'article 1384, alinéa 1er du Code civil en sa qualité de gardien de ce carton. Il ne peut en outre sérieusement pas être allégué une quelconque faute de la victime présentant les caractéristiques de la force majeure, seule susceptible d'exonérer le gardien de sa présomption de responsabilité ; en particulier le fait (à le supposer exact) que la victime était une cliente habituelle du magasin est sans incidence sur les circonstances de l'accident qui ne mettent pas en cause la disposition des rayons mais concernent la présence anormale d'un carton dans une allée du magasin.


Références :

article 1384, alinéa 1er du Code civil

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Grasse, 08 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2008-09-03;07.01680 ?
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