COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 26 JUIN 2008
MZ
No 2008 / 482
Rôle No 07 / 04089
SARL PAYSAGE PROVENCE COTE D'AZUR
C /
Hervé X...
Roselyne Y... épouse X...
Michel Z...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 25 Janvier 2007 enregistré au répertoire général sous le no 03 / 05906.
APPELANTE
LA SARL PAYSAGE PROVENCE CÔTE D'AZUR-PPCA-
dont le siège est Avenue De Lattre de Tassigny-83100 TOULON CEDEX
représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY-LEVAIQUE, avoués à la Cour,
plaidant par Me Christian GIRARD, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Pierric MATHIEU, avocat au barreau de TOULON
INTIMÉS
Monsieur Hervé X...
né le 27 Septembre 1969 à BREST (29200), demeurant ...
Madame Roselyne Y... épouse X...
née le 12 Septembre 1972 à MARSEILLE (13000), demeurant ...
représentés par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
plaidant par Me Jean-Michel ROCHAS, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE substitué par Me Emmanuelle PLAN, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
Monsieur Michel Z...
demeurant ...
représenté par la SCP COHEN-GUEDJ, avoués à la Cour,
plaidant par la SELARL GARRY & ASSOCIES, substituée par Me Odile SIMONIN, avocats au barreau de TOULON
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 29 Mai 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Madame Catherine CHARPENTIER, Conseiller
Madame Martine ZENATI, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Juin 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Juin 2008,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement rendu le 25 janvier 2007 par le Tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Provence, qui a :
- débouté les époux X... de l'action en responsabilité diligentée à l'encontre de la S. A. R. L. SUN IMMOBILIER,
- condamné les époux X... à verser à la S. A. R. L. SUN IMMOBILIER une somme de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- jugé que la réticence de la S. A. R. L. P. P. C. A., qui a omis d'informer les époux X... des travaux de confortement réalisés dans l'immeuble situé à Toulon, 427 boulevard Clamour, et de l'existence de fissures, était dolosive,
- jugé que la S. A. R. L. P. P. C. A. sera tenue sur le fondement de l'article 1116 du Code civil d'indemniser les époux X... du préjudice en résultant,
- jugé que Maître Michel Z..., notaire, avait manqué à son obligation d'information, et sera tenu de relever et garantir la S. A. R. L. P. P. C. A. des condamnations prononcées à son encontre à concurrence d'un quart,
- débouté Maître Z... de l'action en garantie diligentée à l'encontre de la S. A. R. L. SUN IMMOBILIER,
- avant dire droit sur l'indemnisation du dommage, désigné un expert aux fins d'évaluer le prix qu'auraient pu négocier les époux X... s'ils avaient été informés de l'inadaptation des fondations à la structure du terrain, de la réalisation des travaux partiels de confortement et de la réapparition de fissures,
- condamné la S. A. R. L. P. P. C. A. à verser à titre provisionnel aux époux X... la somme de 30. 000 € à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice,
Vu l'appel régulièrement interjeté par la S. A. R. L. PAYSAGE PROVENCE COTE D'AZUR dite P. P. C. A.,
Vu les conclusions déposées le 9 juillet 2007 par l'appelante,
Vu les conclusions déposées le 30 octobre 2007 par Monsieur Hervé X... et son épouse née Roselyne Y...,
Vu les conclusions déposées le 5 février 2008 par Maître Michel Z..., notaire,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 28 février 2008.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'aux termes de l'article 783 du Code de Procédure Civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, après l'ordonnance de clôture, à peine d'irrecevabilité ; qu'en application de ces dispositions il convient de déclarer irrecevables comme tardives les écritures et pièces déposées les 20 et 21 mai 2008 par la S. A. R. L. P. P. C. A., alors que l'ordonnance de clôture était prononcée depuis le 28 février 2008 ;
Attendu que par acte en date du 26 juillet 2002 reçu par Maître Z..., notaire à Toulon, la S. A. R. L. P. P. C. A., réitérant une promesse de vente conclue le 2 février 2002 avec le concours de l'agence immobilière la S. A. R. L. SUN IMMOBILIER, a vendu aux époux X... une maison située à Toulon, 427 boulevard CLAMOUR, au prix de 251. 541 € ;
Attendu que les acquéreurs ont déclaré le 25 janvier 2003 à leur assureur un sinistre survenu la veille consistant en diverses fissures apparues en plusieurs endroits de la maison ; qu'il résulte des opérations de l'expert d'assurance, Madame Gisèle F..., que les dommages constatés relèvent de quatre catégories :
- des fissures de structure et leurs conséquences qui résultent de l'inadéquation des fondations de la villa à la nature du terrain d'assise,
- une aggravation des mouvements du bâtiment résultant de l'instabilité de la structure, ayant provoqué une fuite sur canalisation par rupture,
- des fautes d'exécution sur des ouvrages d'embellissements réalisés avant la vente,
- la vétusté d'ouvrages anciens et (ou) des défauts constructifs d'origine ;
Attendu que l'expert rappelle que divers désordres existaient avant la vente dont l'origine n'a pas été recherchée par le vendeur avant la réalisation de travaux d'embellissements et qui ne pouvaient dès lors que réapparaître ; que les pluies importantes de l'automne 2002 ont entraîné un gonflement du sol à l'origine de la réapparition rapide des dommages ; qu'en effet, des travaux en sous oeuvre par micro pieux avaient été réalisés en 1995 par les propriétaires d'alors, les époux G..., mais exclusivement sous refends, a priori seuls affectés à l'époque ;
Attendu qu'ensuite d'une nouvelle déclaration de sinistre à leur assureur, l'expert F... a constaté l'aggravation des désordres affectant l'immeuble, des mouvements de l'ensemble des éléments porteurs rendant le plafond à l'étage instable avec risque d'effondrement ; que les causes de cette aggravation de sinistre sont les mêmes que celles retenus pour le premier sinistre ; que la S. A. R. L. P. P. C. A. à qui les conclusions expertales ont été communiquées ne fournissent aucune démonstration technique à l'appui de leur contestation qui n'est dans ces conditions pas fondée ;
Attendu qu'il ressort des documents produits aux débats que la S. A. R. L. P. P. C. A., professionnelle de l'immobilier, avait elle-même acquis la maison litigieuse par acte reçu également par Maître Z... le 5 juillet 2001, des époux G... ; qu'audit acte il était précisé que les vendeurs avaient fait effectuer les travaux suivants, soumis à garantie décennale, mais sans avoir souscrit d'assurance dommage ouvrage, savoir :
- confortement, par micro pieux de refend de la villa et d'un mur maître à l'aplomb de l'escalier d'accès au rez de jardin,
- traitement de la charpente ;
que les vendeurs ont en outre reconnu avoir été informé de la garantie due et remis à l'acquéreur, les factures desdits travaux ainsi que l'étude géologique réalisée le 9 juin 1995 par le Cabinet MENARD au Pradet ;
Attendu que l'acte de vente reçu par le même notaire un an plus tard à l'occasion de la vente du même bien par la S. A. R. L. P. P. C. A. aux époux X... ne mentionne aucunement l'existence de ces travaux confortatifs de 1995 ; que la qualité de professionnel de l'immobilier du vendeur lui imposait une obligation d'informer les acquéreurs de l'existence de ces travaux, et de leur incidence sur la stabilité de l'immeuble que la simple remise des factures de ces travaux avec le rapport du géologue, même pendant le cours du rendez vous de signature de l'acte authentique ne mettait pas en mesure les acquéreurs, profanes, de comprendre le risque que représentait une réfection partielle par micro pieux de refend de la villa et des incidences de cette réfection sur l'évolution du bien acquis, alors qu'au surplus les lieux leur avait été présentés refaits à neuf mais pour ce qui est de l'esthétique et de la propreté et non de la structure de la construction ;
Attendu que la S. A. R. L. P. P. C. A. était présumée connaître les conséquences d'un confortement partiel de la construction compte tenu de la nature du terrain et de la période de sécheresse ayant affecté le sol au cours de l'année 2001, et donc antérieurement à la revente du bien ; que c'est dans ces conditions à juste titre que le premier juge a retenu qu'un dol avait été commis par réticence par le vendeur à l'égard des acquéreurs, et a retenu la responsabilité de la S. A. R. L. P. P. C. A., rappelant que l'apparition très rapide des désordres après l'acquisition démontrait la volonté du vendeur, professionnel de l'immobilier de camoufler les risques présentés par la structure par de simples travaux d'embellissement, et que la connaissance avant la vente de l'inadaptation des fondations à la structure du terrain aurait conduit les acquéreurs à ne pas contracter ou à un moindre prix, et constituait donc un élément substantiel de leur consentement ;
Attendu que l'article 1116 du Code civil n'exclut pas le droit pour la victime de manoeuvres dolosives d'obtenir de leur auteur réparation de son préjudice sur le fondement d'une action délictuelle, en sorte que la décision doit être infirmée en ce qu'elle a contraint les époux X... à solliciter une réduction du prix d'acquisition et désigné un expert à cette fin ;
Attendu qu'il ressort des deux rapports d'expertise une description des travaux à entreprendre pour remédier aux désordres ; que s'agissant de l'indemnisation d'un préjudice et non de condamnation à faire réaliser des travaux, ces pièces sont suffisantes pour permettre à la Cour d'évaluer l'indemnisation du préjudice financier et moral subi par les époux X... à la somme de 100. 000 €, au paiement de laquelle la S. A. R. L. P. P. C. A. doit être condamnée ;
Attendu que la S. A. R. L. P. P. C. A. demande à être relevée et garantie du montant de cette condamnation par Maître Z... à qui elle reproche de ne pas avoir fait mention dans l'acte de vente du 26 juillet 2002 des travaux de nature décennale figurant dans son propre acte d'acquisition ; que toutefois le défaut d'information qu'elle invoque ne pouvait être préjudiciable qu'à l'égard des acquéreurs, qui ne recherchent pas la responsabilité du notaire, et non à elle-même alors qu'elle était parfaitement informée de l'existence desdits travaux, et qu'il lui appartenait au même titre que le notaire de respecter sa propre obligation d'information à l'égard des acquéreurs, en sorte que la décision sera également infirmée en ce qu'elle a condamné Maître Z... à relever et garantir à concurrence d'un quart la S. A. R. L. P. P. C. A. de la condamnation prononcée à son encontre ;
Attendu que les parties n'ayant pas attrait dans l'instance en appel la S. A. R. L. SUN IMMOBILIER il n'y a pas lieu de statuer sur les dispositions de la décision la concernant ;
Attendu que l'équité commande de faire bénéficier les époux X... et Maître Z... des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe,
Déclare irrecevables les écritures et pièces déposées les 21 et 28 mai 2008 par la S. A. R. L. PAYSAGE PROVENCE COTE D'AZUR,
Infirme la décision entreprise sauf en ce qu'elle a retenu que la réticence de la S. A. R. L. P. P. C. A. qui a omis d'informer les époux X... des travaux de confortement réalisés dans l'immeuble vendu et de l'existence de fissures qu'elle a camouflées par la réalisation de travaux d'embellissements, était dolosive,
Statuant à nouveau pour le surplus,
Condamne la S. A. R. L. PAYSAGE PROVENCE COTE D'AZUR à payer à Monsieur Hervé X... et son épouse née Roselyne Y... la somme de 100. 000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation de leur préjudice,
Condamne la S. A. R. L. PAYSAGE PROVENCE COTE D'AZUR à verser à Monsieur Hervé X... et son épouse née Roselyne Y... la somme de 2. 000 € et à Maître Michel Z... celle de 2. 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples et contraires,
Condamne la S. A. R. L. PAYSAGE PROVENCE COTE D4AZUR aux dépens, distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT