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26/06/2008 | FRANCE | N°07/02196

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 26 juin 2008, 07/02196


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8o Chambre C


ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
DU 26 JUIN 2008


No2008 / 394














Rôle No 07 / 02196






S. A. ID SUD




C /


Alphonse X...

AXA FRANCE IARD
































Grosse délivrée
le :
à : BLANC
ST FERREOL






réf


prononcé sur saisine de la Cour sui

te à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 4 juillet 2006, qui a cassé et annulé l'arrêt no04 / 668 rendu le 28 octobre 2004 par la Cour d'Appel d'Aix en Provence (2ème Chambre).




DEMANDEURS SUR RENVOI DE CASSATION


S. A. ID SUD, venant aux droits de la SA CHANGE DE LA BOURSE, prise en la personne de...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8o Chambre C

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
DU 26 JUIN 2008

No2008 / 394

Rôle No 07 / 02196

S. A. ID SUD

C /

Alphonse X...

AXA FRANCE IARD

Grosse délivrée
le :
à : BLANC
ST FERREOL

réf

prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 4 juillet 2006, qui a cassé et annulé l'arrêt no04 / 668 rendu le 28 octobre 2004 par la Cour d'Appel d'Aix en Provence (2ème Chambre).

DEMANDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

S. A. ID SUD, venant aux droits de la SA CHANGE DE LA BOURSE, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration, dont le siège est sis 3 Place du Général de Gaulle-13001 MARSEILLE
représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
plaidant par Me Mathieu BAFFERT, avocat au barreau de MARSEILLE et Me Massimo BIANCHI, avocat au barreau de MARSEILLE,

DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur Alphonse X...

né le 25 Mai 1940 à SFAX TUNISIE, demeurant ...

représenté par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, plaidant par Me Denis REBUFAT, avocat au barreau de MARSEILLE, et par Me Nadia LAIB, avocat au barreau de MARSEILLE

AXA FRANCE IARD, venant aux droits de la Cie AXA FRANCE, elle-même aux droits d'AXA COURTAGE, prise en la personne de son PDG en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis, 26, Rue Drouot-75009 PARIS
représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
plaidant par Me VILLA, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Avril 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président,
Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller
Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Juin 2008, date à laquelle le délibéré a été prorogé au 19 juin puis au 26 juin 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Juin 2008

Rédigé par Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller,

Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES

La société Change de la Bourse est un établissement de crédit au sens de la loi bancaire du 24 Janvier 1984, agrée en qualité de société financière dans la catégorie des maisons de titres, dont l'activité principale est de gérer, pour le compte de sa clientèle, des portefeuilles de valeurs mobilières, après versements de fonds à cet effet.

Mr X... Alphonse a ouvert les 22 Janvier et 4 Février 1993, trois comptes titres « ordinaire simple » auprès de la société Change de Bourse, à son nom personnel et au nom de la SA Somonet et de la Sarl France Nettoyage, dont il était le dirigeant.

Entre le 4 Février 1993 et le 15 Juin 1995, le montant des sommes placées s'est élevé à 12 179 989 Frs, soit 8 565 077 Frs à l'ouverture puis, 3 614 912 Frs.

Le 4 Décembre 1995, Mr X..., mécontent des services de la société Change de la Bourse, a transféré son portefeuille à la Barclay's France, et, constatant une diminution importante de la valeur de son portefeuille entre 1993 et 1995, a sollicité la désignation d'un expert devant le Juge des référés.

L'expert, Mr D..., a déposé son rapport, et à la lecture de celui-ci, Mr X... a sollicité la société A2C, dans le but de procéder à une analyse complémentaire, réalisée par Mr E....

Par acte du 24 Février 2000, Mr X... a assigné devant le Tribunal de Commerce de Marseille la SA Change de la Bourse en paiement de la somme de 6 389 856 Frs représentant le montant de pertes sur des opérations de bourse, et la société Change de Bourse a, par dénonce et assignation en garantie, cité devant ce même tribunal, la Cie Axa Courtage anciennement UAP, tendant au rejet de la demande de Mr X..., et subsidiairement, pour être relevée et garantie par son assureur, de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.

Par jugement en date du 19 Février 2001, le Tribunal a joint les deux procédures, a condamné la SA Change de la Bourse à payer à Mr X... la somme de 6 389 856 Frs avec intérêts légaux à compter du 15 Décembre 1995 outre 20 000 Frs d'article 700 du NCPC et a rejeté les demandes reconventionnelles de la SA Change de la Bourse.

Se fondant à la fois sur le rapport de l'expert judiciaire et de l'expert choisi par Mr X..., le tribunal a estimé que la société Change de la Bourse était responsable en partie des pertes subies par Mr X..., et que celui-ci avait également une part de responsabilité.

La société Change de la Bourse a relevé appel de cette décision, et, par arrêt en date du 28 Octobre 2004, la Cour a infirmé le jugement, a déclaré Mr X... irrecevable en ses demandes relatives à la tenue des comptes des sociétés Somonet et France Nettoyage (s'agissant de patrimoines distincts), l'a débouté de ses demandes concernant la tenue de son compte personnel, a débouté la société ID Sud venant aux droits de la société Change de la Bourse de sa demande de dommages et intérêts, et a condamné Mr X... à payer à ID Sud la somme de 3000 €, et à la Cie Axa, celle de 750 €, au titre de l'article 700 du NCPC.

La Cour a jugé qu'un simple mandat de gestion des écritures comptables, et non de portefeuille, avait été confié à la société Change de la Bourse et que Mr X..., spécialiste en la matière, entouré de conseils très qualifiés, était intervenu seul sur les marchés hautement spéculatifs au moyen d'ordres quotidiens.

Que, la société de bourse avait respecté son obligation d'information, chaque opération ayant fait l'objet d'avis d'opérer et d'états récapitulatifs permettant à Mr X... d'en suivre l'évolution et de réagir à leur lecture, et qu'elle n'avait pas à assurer un devoir de conseil à l'égard d'un spéculateur averti des risques encourus.

Sur pourvoi formé par Mr X..., la Cour de Cassation, par arrêt en date du 4 Juillet 2006, a cassé et annulé l'arrêt de la Cour et renvoyé la cause devant cette même Cour.

La Cour de Cassation a jugé, au visa de l'article 1147 du CC, que la Cour d'Appel n'avait pas donné de base légale à sa décision pour n'avoir pas recherché si les relevés de comptes adressés n'étaient pas affectés d'erreurs et de lacunes qui ont privé Mr X... d'une information exacte quant à la situation de son portefeuille, et pour n'avoir pas recherché si Mr X... avait, lors de l'ouverture de son compte, une connaissance des risques encourus dans les opérations spéculatives sur les marchés à terme dispensant la société de bourse de son obligation de mise en garde contre les risques ou si les opérations génératrices des pertes étaient intervenues après que ce dernier ait acquis une telle connaissance.

*************

Vu la saisine régulière de la Cour, après Cassation, en date du 27 Septembre 2006, et du 17 Octobre 2006 (saisine rectificative) ;

Vu les conclusions déposées le 15 Avril 2008, par la Sa ID Sud ;

Vu les conclusions déposées le 28 Mars 2008, par Mr X... Alphonse ;

Vu les conclusions déposées le 13 Août 2007, par Axa France Iard, venant aux droits de la Cie Axa France, elle-même aux droits d'Axa Courtage ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 16 Avril 2008 ;

MOTIFS

SUR LES DEMANDES RELATIVES AUX COMPTES DES SOCIETES SOMONET ET FRANCE NETTOYAGE

Attendu que l'arrêt de la Cour d'Aix frappé de pourvoi a déclaré Mr X... irrecevable en ses demandes relatives à la tenue des comptes des sociétés Somonet et France Nettoyage ouverts auprès de la société Change de la Bourse, aujourd'hui ID Sud, aux motifs que le patrimoine de ces sociétés ne pouvait se confondre avec le patrimoine personnel de M X... ;

Attendu que la Cour de Cassation dans son arrêt rendu le 4 Juillet 2006, ne s'est pas prononcée sur cette recevabilité ;

Attendu que l'arrêt a été cassé en toutes ses dispositions, de sorte que la juridiction de renvoi est investie de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit ;

Qu'il convient d'examiner le moyen soulevé par la société appelante quant à la recevabilité de l'action de Mr X... en réparation du préjudice causé aux sociétés Somonet et France Nettoyage, du fait de la responsabilité alléguée de la société de bourse ;

Attendu que deux comptes titres ont été ouverts, auprès de la société Change de la Bourse, au nom de la SA Somonet représentée par son Président Directeur Général, Mr X..., et la Sarl France Nettoyage représentée par son gérant, Mr X... ;

Mais attendu que Mr X... ne demande que la réparation du préjudice découlant de la diminution de son portefeuille personnel et n'agit pas pour le compte des deux autres sociétés, ayant indiqué au demeurant en première instance que ces deux sociétés n'entendaient pas intervenir en l'absence de tout grief formulé sur la gestion de leur portefeuille ;

Attendu que le litige ne concernant que les rapports entre Mr X... et la société de bourse, découlant du contrat d'ouverture du 4 février 1993, no 4979, aucune irrecevabilité ne saurait être constatée ;

SUR LES RELATIONS CONTRACTUELLES ENTRE MR X... ET LA SOCIETE CHANGE DE BOURSE ET LA GESTION DU PORTEFEUILLE DE MR X...

Attendu que le contrat souscrit, no 4979, de type convention d'ouverture de compte titres ne contenait pas de mandat de gestion, ni totale ni assistée.

Attendu qu'aux termes des modalités de fonctionnement des comptes titres ouverts sur les livres du Change de la Bourse, telles qu'elles figurent aux contrats d'ouverture de ces comptes, et dont le souscripteur a eu connaissance, il est indiqué que :

- les écritures passées font l'objet d'un envoi de relevés qui constitue pour le Change de la Bourse une demande d'approbation de l'écriture qui y figure ;
- cette approbation peut être tacite et résultera de l'absence de réclamation passé le délai d'un mois à dater de la réception du relevé ;
- le rôle du Change de la Bourse se limite à la tenue du compte titres, notamment comptabiliser les versements et les retraits, exécuter les ordres de bourse passés par le client, encaisser les coupons et les attributions et donner des relevés périodiques ;

Attendu qu'en l'absence de tout mandat de gestion écrit donné à la société Change de laBourse, il appartient à Mr X... d'apporter la preuve de l'existence d'une gestion de fait par la société de bourse ;

Attendu que Mr X... qui a reçu tous les avis d'opérer entre 1993 et 1995 à son domicile, les extraits de comptes réguliers, les relevés à vocation fiscale et les relevés de portefeuille, n'a jamais réagi à leur réception ni formé de réclamation ;

Attendu que l'expert judiciaire indique que dans le cas d'un établissement financier relevant de la loi bancaire, la transmission d'ordres ne nécessite pas un mandat spécifique, et qu'il est de pratique que les ordres soient passés par téléphone ;

Attendu que cette pratique est susceptible d'expliquer la raison pour laquelle la société ID Sud, condamnée par ordonnance du conseiller de la mise en état à communiquer les fiches retraçant les ordres de mouvements de titres, n'a pas communiqué de fiches d'ordres, de sorte que l'absence de matérialisation des ordres par un support papier n'est pas de nature à démontrer l'absence d'ordres donnés par le client de la société de bourse ;

Attendu, dans ces conditions, que l'approbation tacite des écritures laisse à penser que Mr X... ne contestait ni l'origine des ordres donnés, ni la conformité de ceux-ci avec les opérations exécutées ;

Attendu que celui-ci, dans aucun des courriers adressés à la société de Bourse, n'a prétendu ne jamais avoir donné d'ordres, et même sa lettre de rupture du 4 Décembre 1995, n'en fait pas état ;

Attendu, sur le fait qu'il était dans l'impossibilité de gérer son portefeuille en raison de son état de santé, que, Mr X... produit un certificat émanant du service de psychiatrie du CHU de Marseille daté du 7 Janvier 2008, faisant état de certificats « présentés » par l'intéressé notant l'existence d'un état dépressif avant 1991 ainsi que d'un accident vasculaire cérébral survenu en 1991, le médecin signataire de ce certificat en concluant que Mr X..., 15 ans auparavant, n'avait pas été en mesure de gérer judicieusement ses biens ;

Attendu que, ces indications, qui ne sont corroborées par aucun examen médical, ne permettent nullement d'affirmer qu'entre 1993 et 1995, Mr X..., né en 1940, était incapable de gérer un portefeuille boursier ;

Attendu, quant au rôle de Mr F..., que Mr X... qui soutient que celui-ci, salarié dans la société Change de la Bourse, a géré de sa propre initiative son portefeuille, n'apporte aucun élément probant de ses affirmations ;

Que, si Mr F... a été directeur commercial de cette société et s'est occupé du portefeuille de Mr X..., rien n'établit que les ordres qu'il exécutait n'émanaient pas du client du Change de la Bourse ;

Que, le licenciement de Mr F..., intervenu en 1998, interprété par l'intimé comme un élément de preuve d'une gestion de son portefeuille effectuée essentiellement par ce dernier, et de l'existence de fautes de gestion, est consécutif, selon l'attestation de deux commissaires aux comptes de la société ID Sud, à des motifs inhérents à son travail courant de l'année 1997, et dès lors, l'argumentation développée par Mr X... est inopérante ;

Attendu, d'autre part, que par télécopie adressée le 29 0ctobre 1993 à la société Change de la Bourse, à l'attention de Mr F..., par Mr X..., celui-ci avait autorisé un Sieur G... à traiter à sa place toute option devises à hauteur de 2 Millions de Frs de primes.

Attendu que Mr X... en déduit « qu'il ne pouvait s'occuper seul de tout », alors que l'existence de ce mandat donné, relatif à une partie des investissements effectués, n'établit pas l'inaptitude à gérer de Mr X... ;

Attendu que la gestion de fait, par la société de Bourse, du portefeuille de Mr X... n'est pas démontrée ;

SUR LES OPERATIONS EFFECTUEES ET LE PORTEFEUILLE DE MR X...

Attendu que l'expert judiciaire, dont le rapport, objectif et précis, réalisé au contradictoire des parties, doit être pris en considération, alors que le rapport officieux diligenté à la demande de l'intimé, constitue un simple élément d'information, a reconstitué le portefeuille de Mr X..., faisant ainsi apparaître les constatations suivantes :

- le portefeuille a fait l'objet de transactions sur 47 supports, soit 80 % de titres au règlement mensuel « RM », faisant l'objet de transactions à terme, les supports étant constitués de bons de souscriptions, d'actions et de warrants ;
- la structure même du portefeuille montre sa vocation spéculative ;
- le portefeuille a enregistré 682 mouvements sur un total de flux de 390 086 266 Frs, le compte personnel de Mr X..., (le seul concernant le présent litige) représentant 80 % du flux ;
- au 4 Février 1993, le portefeuille est constitué des titres de 8 sociétés pour un montant de 8 565 077 Frs dont 5 239 877 Frs de liquidités ;
- au 4 Décembre 1995, la valeur du portefeuille, composé de 13 supports, est de 8 129 940 Frs dont 762 987 Frs de liquidités ;
- la variation sur trois années, de – 5, 08 %, est une variation de faible amplitude ;

Attendu que selon l'expert judiciaire, la diminution de valeur du portefeuille est due aux facteurs suivants :

- l'intervention sur un marché des options de change, qui exige une technicité que manifestement les intervenants n'avaient pas (perte sur ce support : 2 405 487 Frs) ;
- la négligence dans le suivi des supports bons de souscription qui n'ont pas reçu de traitement avant leur échéance (perte : 1 108 566 Frs) ;
- la spéculation à la hausse sur les supports Rhône Poulenc et UAP, alors que la hausse ne s'est pas produite (perte : 4 478 941 Frs) ;

SUR L'OBLIGATION D'INFORMATION

Attendu qu'ID Sud était tenue à une obligation d'information aux termes de la loi du 4 Juillet 1984 qui exige des sociétés de bourse des obligations strictes en matière d'information envers les titulaires d'un compte ;

Attendu que les obligations contractuelles nées du contrat d'ouverture du compte imposaient à la société de bourse l'envoi de relevés périodiques pour chaque écriture passée ;

Attendu que l'information donnée doit être claire, précise et exacte, afin que le client soit parfaitement informé de l'état de son compte, des opérations effectuées, et de l'évolution de son portefeuille ;

Attendu que des avis d'opéré ainsi que des extraits de compte, des relevés à vocation fiscale et des relevés de portefeuille de Mr X... ont été adressés régulièrement à ce dernier, entre 1993 et 1995 ;

Attendu que l'expert a constaté que des erreurs ou écarts étaient contenus dans certains avis envoyés, dans les conditions suivantes :
- au 6 Février 1995 : 75 937 Frs de liquidités au lieu de 15 000 Frs, et un écart de 27 000 titres UAP, le portefeuille étant constitué en réalité de 20 supports pour un montant global de 10 917 296 Frs dont 75 937 Frs de liquidités au lieu de 7 265 359 Frs et 15 000 Frs de liquidités ;
- au 4 Mai 1995 : 7000 bons de souscriptions Lagardère et non aucun, 16 323 UAP au lieu de 2323, et 355 075 Frs de liquidités au lieu de 719 303 Frs, le portefeuille, composé de 20 supports étant évalué à 8 393 668 Frs dont 355 075 Frs de liquidités et non de 6 800 358 Frs et 719 303 Frs de liquidités ;
- au 17 Juillet 1995 : portefeuille de 7 685 841 Frs au lieu de 6 167 544 Frs ;
- au 15 Septembre 1995 : portefeuille de 8 613 511 Frs au lieu de 5 609 720 Frs ;
- au 4 Décembre 1995 : portefeuille de 8 129 940 Frs et non de 6 291 751 Frs ;

Attendu qu'il résulte de ces constatations, que les erreurs contenues dans les documents adressés à Mr X... ne lui ont pas permis de recevoir l'information exacte et précise à laquelle il avait droit, concernant la situation de son portefeuille ;

Attendu en conséquence que la faute de la SA ID Sud doit être retenue, pour information inexacte ;

SUR L OBLIGATION DE MISE EN GARDE

Attendu qu'en matière d'opérations spéculatives sur les marchés à terme, le professionnel doit informer le client profane des risques prévisibles encourus du fait des opérations projetées, et attirer son attention sur les aspects négatifs et les dangers potentiels de l'opération ;

Attendu qu'il appartient à la société de bourse de démontrer que Mr X..., était un spéculateur avisé des risques encourus, lors de l'ouverture de son compte titres et en cours d'exécution du contrat ;

Attendu que Mr X... était, pendant la période concernée, un chef d'entreprise dirigeant plusieurs sociétés de nettoyage, mais cette situation ne caractérise pas son habitude du marché boursier, ni ses compétences en matière d'opérations hautement spéculatives ;

Attendu qu'il résulte des pièces du dossier, que Mr X... détenait et avait apporté un important portefeuille lors de l'ouverture de son compte avec le Change de La Bourse, mais les conditions de gestion de ce portefeuille n'étant pas précisées, il ne peut en être déduit que celui ci était averti des méandres des marchés spéciaux à haut risque ;

Attendu que ni lors de l'ouverture de son compte en Février 1993, ni postérieurement aux opérations ayant entraîné les pertes litigieuses, il n'est acquis que l'intéressé ait été un client avisé ;

Qu'en conséquence, la société de Bourse était tenue de l'obligation de mise en garde, telle qu'elle est définie ci-dessus ;

Attendu qu'Id Sud ne démontre pas avoir informé, conseillé, averti et mis en garde Mr X... des risques encourus ;

Attendu que la faute de la société de Bourse aujourd'hui, ID Sud doit être retenue ;

LE PREJUDICE

Attendu que la demande chiffrée à la somme de 5 375 400 € formée par l'intimé, alors que celle formée en première instance s'élevait à 6 Millions de Francs, (1 178 000 €), ne constitue pas, ainsi que le soutient l'appelante, une demande nouvelle, dès lors qu'il s'agit de l'augmentation du montant de la demande, sur des bases de calcul différentes (actualisation par rapport à variation du CAC 40, et perte d'un patrimoine et des revenus de celui-ci) ;

Le préjudice causé directement par le défaut d'information

Attendu qu'eu égard aux constatations de l'expert, l'inexactitude dans l'information, telle qu'elle est retenue par la Cour, n'a occasionné à Mr X... aucun préjudice direct et certain, puisque après rectification, par l'expert, des erreurs ou écarts constatés, il s'avère que les chiffres dont l'intéressé avait eu connaissance, en Février, Mai, Juillet, Septembre et Décembre 1995, sur la valeur de son portefeuille, étaient chaque fois inférieurs à la réelle valeur de celui-ci ;

Qu'en conséquence, son titulaire ne peut valablement se prévaloir d'un préjudice qui en découlerait directement, dès lors que les erreurs dans l'évaluation de son portefeuille sont sans incidence sur le préjudice qu'il allègue, la diminution de la valeur de son portefeuille ;

Attendu qu'aucune somme ne lui sera donc allouée au titre de la faute retenue à l'encontre de la société ID Sud ;

Le préjudice causé directement par le manquement à l'obligation de mise en garde

Attendu que le préjudice qui ne porte que sur les pertes relatives aux opérations réalisées sur les marchés à caractère spéculatif, et qui doit s'apprécier au regard desdites opérations, en tenant compte à la fois des gains et des pertes, s'analyse comme une perte de chance pour Mr X..., d'avoir pu mieux orienter son épargne et ses investissements sur des supports moins risqués ;

Qu'en considération des éléments de la cause, le montant de ce préjudice, qui ne peut être égal au montant résultant de la diminution du portefeuille, et résultant de la perte de chance subie, apprécié au jour où la Cour statue, doit être fixé à la somme de 60 000 € ;

Attendu que la société ID Sud doit en conséquence, être condamnée à verser cette somme à Mr X..., outre les intérêts à compter de la présente décision ;

SUR LES AUTRES DEMANDES

Attendu que la société Change de la Bourse a fait assigner en garantie, son assureur la Compagnie Axa Courtage anciennement UAP, aujourd'hui Axa France Iard ;

Attendu qu'aux termes du contrat d'assurance liant ces parties, un plafond de garantie de 2 Millions de Francs a été stipulé, soit 304 898, 03 € ;

Attendu que la compagnie d'assurance, qui ne dénie pas sa garantie, doit être condamnée à relever et garantir la société ID Sud de sa condamnation ;

Attendu que le préjudice moral personnel allégué par Mr X..., chiffré à la somme de 300 000 €, n'est point établi ;

Qu'en conséquence, cette demande sera rejetée ;

Attendu que le caractère abusif de la procédure diligentée par Mr X... n'étant pas démontré, aucune somme ne sera allouée à la société ID Sud, de ce chef ;

Attendu que l'équité commande de condamner la société ID Sud à verser à Mr X... la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;

Attendu qu'aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du NCPC envers les autres parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour, contradictoirement et publiquement,

Confirme le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Marseille le 19 Février 2001, en toutes ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt,

Statuant à nouveau sur le surplus,

Condamne la société ID Sud à verser à Mr X... la somme de 60 000 € à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société Axa France Iard à relever et garantir la société ID Sud de la condamnation prononcée ci-dessus,

Déboute Mr X... et la société ID Sud du surplus de leurs demandes,

Condamne l'appelante à verser à Mr X... la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du NCPC,

Dit n ‘ y avoir lieu à application de l'article 700 du NCPC envers aucune autre partie,

Condamne la société ID Sud aux entiers dépens et accorde à la SCP De St Ferréol Touboul le bénéfice de l'article 699 du NCPC.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 07/02196
Date de la décision : 26/06/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-06-26;07.02196 ?
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