COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre A
ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
ARRÊT AU FOND
DU 27 MAI 2008
M. A. V
No2008 /
Rôle No 07 / 12118
France X...
C /
René X...
Marthe X...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Arrêt en date du 27 Mai 2008 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 24 mai 2007, qui a cassé et annulé l'arrêt no 261 rendu le 23 mars 2006 par la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE (1ère Chambre B).
DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION
Madame France X...
née le 14 Décembre 1943 à FERRYVILLE (TUNISIE) (99), demeurant...
représentée par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
assistée par Me Christian ATIAS, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION
Monsieur René X...
né le 28 Mai 1945 à TOULON (83000), demeurant...
représenté par la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me J. P. GOUTX, avocat au barreau de TOULON
Madame Marthe X...
née le 19 Juillet 1937 à HANOI (VIETNAM) (99), demeurant...
représentée par Me Jean-Marie JAUFFRES, avoué à la Cour,
assistée par Me Michel PATUREAU, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 28 Avril 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme VARLAMOFF, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries devant la Cour composée de :
Monsieur Gérard LAMBREY, Président,
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2008
Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
Vu le jugement rendu contradictoirement le 12 février 2004 par le tribunal de grande instance de TOULON dans le litige opposant France X... à Marthe X... et René X... ;
Vu la déclaration d'appel déposée par France X... ;
Vu l'arrêt infirmatif de cette cour en date du 23 mars 2006 ;
Vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 25 avril 2006 rendu sur le pourvoi formé par Marthe X... ;
Vu la déclaration de saisine de la cour d'appel après cassation déposée par France X... le 13 juillet 2007 ;
Vu la déclaration de saisine de la cour d'appel après cassation déposée par Marthe X... le 30 juillet 2007 ;
Vu les conclusions déposées par Marthe X... le 4 avril 2008 ;
Vu les conclusions déposées par France X... le 10 avril 2008 ;
Vu les conclusions déposées par René X... le 17 avril 2008 ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 28 avril 2008 ;
SUR CE :
Sur la genèse du litige
Angèle B... veuve C... est décédée le 19 octobre 1987 en laissant à succession ses trois neveux, René X..., France X... et Marthe X..., suivant testament olographe en date du 3 novembre 1982.
Marthe X... et René X... reprochent à France X... un recel de succession à hauteur de la somme de 53 086, 25 euros, correspondant à des prélèvements effectués entre le 20 août et le 19 octobre 1987, sur les comptes bancaires de Angèle B... veuve C... qui était alors hospitalisée, et qu'elle a pu réaliser grâce à la procuration dont elle bénéficiait.
Madame D..., désigné en qualité d'expert, par jugement du 13 mars 1989, pour rechercher l'état des comptes, droits et avoirs de Angèle B... veuve C... à compter du 20 août 1987 et leur évolution jusqu'à son décès, a déposé son rapport en concluant que des retraits avaient été effectués à hauteur de la somme de 388 222, 98 francs pendant cette période, sans pouvoir préciser leur destination.
En l'état de l'imprécision de ses conclusions, Monsieur E... remplacé ensuite par Monsieur F..., a été désigné par un nouveau jugement en date du 20 janvier 1994, avec la mission précise de « dire qui a effectué les retraits et pour le compte de qui ». Il a déposé un rapport de carence en indiquant « Il est, au sens précis du terme strictement impossible de dire « QUI » a effectué les retraits, mais ce qui est certain c'est que ce ne pouvait être que France X..., laquelle avait procuration sur les comptes, soit que cette dernière ait signé elle-même, soit qu'elle ait fait au préalable, signer sa tante ».
Le premier juge, dans le cadre de la décision déférée, après avoir ordonné le partage de la succession, et en se fondant notamment sur le fait « que France X... avait toujours reconnu avoir effectué des retraits sur le compte de sa tante à son profit », a condamné cette dernière à payer à Marthe X... et René X... la somme de 53 086, 25 euros en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 1987.
Sur appel de France X..., la présente cour a infirmé le jugement sur ce point en estimant qu'aucune circonstance ne permettait d'établir qu'elle avait reçu tout ou partie des fonds retirés des comptes.
Sur pourvoi formé par Marthe X..., la Cour de cassation a cassé cet arrêt en toutes ses dispositions au motif que la cour d'appel en statuant ainsi « sans réfuter le motif du jugement selon lequel France X... avait toujours reconnu avoir effectué des retraits sur le compte de sa tante à son profit avait violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ».
France X... et Marthe X... ont saisi la cour de ce siège, respectivement le 13 et le 30 juillet 2007.
A titre liminaire, il convient de relever que les parties n'ont pas entendu remettre en cause le jugement déféré en ce qu'il a ordonné le partage de l'indivision. Il sera immédiatement confirmé de ce chef.
Sur la péremption d'instance
France X... soulève la péremption de l'instance pour absence de diligences entre le 25 février 1997 et le 25 février 1999 et pendant les deux années ayant précédé le 14 octobre 2002, date à laquelle les intimés ont conclu
Pour la période du 25 février 1997 et le 25 février 1999, il convient d'observer que le tribunal de grande instance de TOULON dans son jugement du 8 juin 2000, définitif sur ce point, a d'ores et déjà rejeté cette exception.
Pendant la période du 14 octobre 2000 au 14 octobre 2002, il a été procédé par René X... au versement de la consignation préalable aux opérations de l'expert Monsieur F..., désigné dans le cadre du jugement du 8 juin 2000, diligence interruptive de péremption puisqu'elle a permis à ce dernier de mener à bien sa mission.
Ainsi, il n'y a pas eu péremption de l'instance et cette exception sera rejetée.
Sur le recel
Il appartient aux intimés d'établir que France X... a diverti les sommes prélevées pour se les approprier dans l'intention de rompre les effets du partage.
Ceux-ci admettent à présent dans leurs écritures que c'est de façon erronée que le premier juge a pu retenir que « France X... avait toujours reconnu avoir effectué des retraits sur le compte de sa tante à son profit » en se fondant sur les mentions faites par l'expert D... dans son rapport, alors même que l'appelante, tout en reconnaissant avoir procédé à des prélèvements à l'aide de sa procuration, avait précisé que des remboursements corrélatifs avaient été effectués. D'ailleurs dans le jugement en date du 20 janvier 1994 ordonnant une expertise complémentaire, il avait bien été indiqué « contrairement à ce qui est soutenu par les demandeurs, Dame France X... n'a jamais avoué avoir commis un recel successoral sur l'ensemble des sommes litigieuses ».
Dès lors, aucun aveu ne peut être retenu à la charge de l'appelante pour établir la réalité du recel.
Des investigations réalisées, il ressort à l'évidence que des retraits importants ont été effectués à partir des comptes de Angèle B... veuve C... dans les deux mois ayant précédé son décès alors qu'elle était hospitalisée et atteinte de paralysie, et qu'au moins une partie de ces retraits ont été effectués par France X.... Cependant il est justifié de façon corrélative que malgré son infirmité, Angèle B... veuve C... avait conservé toutes ses facultés mentales (cf. certificat médical du praticien de la clinique en date du 14 septembre 1987) et qu'elle continuait à s'occuper de ses affaires puisqu'elle a elle-même donné l'ordre de vendre des titres qu'elle détenait au Crédit Agricole et demandé qu'un employé de cet établissement se déplace à la clinique au moins à deux reprises, pour lui faire signer des bordereaux de retraits d'espèces en date du 30 septembre et du 1er octobre 1987 (cf. attestations Mrs Y...et Z...).
Dès lors, il apparaît que le seul fait que France X... ait été titulaire d'une procuration sur les comptes de sa tante qu'elle a utilisée à cette période ne peut permettre de retenir qu'elle a conservé à l'insu de celle-ci les sommes prélevées alors même que rien ne permet d'exclure qu'elle ait agi sur les instructions de celle-ci qui était libre de disposer comme elle souhaitait des sommes retirées.
Ainsi, il convient de constater que Marthe X... et René X... ne rapportent pas la preuve du recel successoral invoqué à l'encontre de France X.... Ils seront déboutés de leur demande à ce titre, le jugement étant infirmé en ce sens.
En conséquence, il sera ordonné la main-levée de la saisie-arrêt opérée le 8 août 1988 pour un montant de 15 244, 90 euros entre les mains de Maître G..., notaire à BRIGNOLES, et de l'hypothèque provisoire dont l'inscription a été autorisée le 29 octobre 2002.
Sur la demande en dommages et intérêts formée par France X...
Dans la mesure où le premier juge avait fait droit à leur demande, France X... ne justifie pas d'une faute ayant dégénéré en abus commise par les intimés dans l'exercice légitime de celle-ci. Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.
Il convient de lui allouer la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Marthe X... et René X... qui succombent supporteront in solidum les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et en matière civile,
En la forme,
Reçoit France X... en son appel et Marthe X... et René X... en leur appel incident,
Au fond,
Déboute France X... de son exception relative à la péremption de l'instance,
Confirme le jugement du 12 février 2004 en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de partage de la succession de Angèle B... veuve C...,
L'infirme en toutes ses autres dispositions,
Statuant à nouveau,
Déboute Marthe X... et René X... de leur demande au titre d'un recel de succession à l'encontre de France X...,
Ordonne la main-levée de la saisie-arrêt opérée le 8 août 1988 pour un montant de 15 244, 90 euros entre les mains de Maître G..., notaire à BRIGNOLES, et de l'hypothèque provisoire dont l'inscription a été autorisée le 29 octobre 2002,
Déboute France X... de sa demande en dommages et intérêts,
Condamne in solidum Marthe X... et René X... à verser à France X... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne in solidum Marthe X... et René X... aux entiers dépens exposés devant les juridictions du fond y compris ceux afférents à la décision cassée qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT