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20/05/2008 | FRANCE | N°07/04879

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0023, 20 mai 2008, 07/04879


COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 20 MAI 2008

No 2008 /

Rôle No 07 / 04879

Jean- Jacques X...
Denise X...
Ingrid Y...
Ludovic Y...

C /

S. A. R. L. PORTE NEUVE

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Février 2007 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 3031.

APPELANTS

Monsieur Jean- Jacques X...
né le 06 Juin 1962 à BULLY LES MINES (6

2160), demeurant ...- 83440 TOURRETTES
représenté par la SCP MAYNARD- SIMONI, avoués à la Cour,
assisté de Me Pierre COGUYEC, avocat au barreau de NICE

Madam...

COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 20 MAI 2008

No 2008 /

Rôle No 07 / 04879

Jean- Jacques X...
Denise X...
Ingrid Y...
Ludovic Y...

C /

S. A. R. L. PORTE NEUVE

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Février 2007 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 3031.

APPELANTS

Monsieur Jean- Jacques X...
né le 06 Juin 1962 à BULLY LES MINES (62160), demeurant ...- 83440 TOURRETTES
représenté par la SCP MAYNARD- SIMONI, avoués à la Cour,
assisté de Me Pierre COGUYEC, avocat au barreau de NICE

Madame Denise X...
née le 01 Octobre 1952 à BULLY LES MINES (62160), demeurant ...- 27120 BRAY
représentée par la SCP MAYNARD- SIMONI, avoués à la Cour,
assistée de Me Pierre COGUYEC, avocat au barreau de NICE

Mademoiselle Ingrid Y...
née le 18 Mars 1973 à LIEVIN (62800), demeurant ...
représentée par la SCP MAYNARD- SIMONI, avoués à la Cour,
assistée de Me Pierre COGUYEC, avocat au barreau de NICE

Monsieur Ludovic Y...
né le 10 Novembre 1979 à ARRACHES, demeurant ...
représenté par la SCP MAYNARD- SIMONI, avoués à la Cour,
assisté de Me Pierre COGUYEC, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

S. A. R. L. PORTE NEUVE, RCS MARSEILLE B 391 079 043 agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège sis, Hermès Park- BP 204- Avenue d' Haïfa- 13008 MARSEILLE 08
représentée par la SCP BOTTAI- GEREUX- BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de Me Alain CARISSIMI, avocat au barreau de MARSEILLE

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L' affaire a été débattue le 25 Mars 2008 en audience publique. Conformément à l' article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller a fait un rapport oral de l' affaire à l' audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO- CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2008,

Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

E X P O S É D U L I T I G E

Le jeune Kévin X..., alors âgé de 14 ans, a été victime, le 21 février 2001 à GRASSE (Alpes- Maritimes), d' une chute mortelle dans les locaux désaffectés d' une ancienne usine de parfums, propriété de la S. A. R. L. PORTE NEUVE.

Par jugement contradictoire du 22 février 2007, le Tribunal de Grande Instance de GRASSE a :

- Dit n' y avoir lieu à donner acte à la S. A. R. L. PORTE NEUVE de ce qu' elle accepte le désistement d' instance de M. Ernest A..., de Mme Paulette B... épouse A... et de M. Jimmy X... en l' état de l' ordonnance de désistement partiel d' instance et d' action du 21 novembre 2005,

- Rejeté l' ensemble des demandes de Mlle Ingrid Y..., M. Ludovic Y..., Mme Denise X... et M. Jean- Jacques X...,

- Rejeté la demande tendant à dire et juger que la S. A. R. L. PORTE NEUVE a commis une faute sur le fondement de l' article 1383 du Code civil,

- Dit et jugé que la S. A. R. L. PORTE NEUVE n' est pas responsable des fautes que lui imputent les demandeurs,

- Rejeté les demandes de dommages et intérêts de M. Jean- Jacques X..., Mme Denise X..., Mlle Ingrid Y... et M. Ludovic Y...,

- Dit n' y avoir lieu à application des dispositions de l' article 700 du Nouveau code de procédure civile (aujourd' hui Code de procédure civile),

- Condamné M. Jean- Jacques X..., Mme Denise X..., Mlle Ingrid Y... et M. Ludovic Y... aux entiers dépens de l' instance,

- Dit n' y avoir lieu à exécution provisoire de sa décision.

M. Jean- Jacques X..., Mme Denise X..., Mlle Ingrid Y... et M. Ludovic Y... ont régulièrement interjeté appel de ce jugement le 20 mars 2007.

Vu les conclusions de M. Jean- Jacques X..., Mme Denise X..., Mlle Ingrid Y... et M. Ludovic Y... en date du 29 juin 2007.

Vu l' ordonnance en date du 7 janvier 2008 de Mme la Présidente de la Dixième Chambre Civile de la Cour de céans fixant l' affaire à l' audience du Mardi 25 mars 2008 à 8 h. 50 mn. en application des dispositions de l' article 910 du Code de procédure civile.

Vu les conclusions de la S. A. R. L. PORTE NEUVE en date du 27 février 2008.

Vu l' ordonnance de clôture en date du 25 mars 2008.

M O T I F S D E L' A R R Ê T

Attendu qu' il résulte des éléments de la cause, en particulier de la procédure d' instruction pénale qui a été diligentée, que le 21 février 2001 le jeune Kévin X..., en compagnie de son frère et d' un camarade du même âge, le jeune Christopher C..., s' est rendu dans les locaux partiellement désaffectés de l' ancienne usine Lautier à GRASSE, propriété de la S. A. R. L. PORTE NEUVE, pour s' y amuser.

Attendu qu' après avoir cassé quelques vitres, les enfants se sont séparés, Kévin X... passant d' un bâtiment à un autre par les toits, que mettant le pied sur une partie de la toiture revêtue d' un plastique ondulé translucide, celui- ci a cédé sous son poids, faisant chuter l' enfant d' une hauteur de 4, 50 mètres, qu' atteint d' une grave blessure à la tête il est décédé presque aussitôt.

Attendu que si l' usine était à l' abandon depuis plusieurs années, un projet de Z. A. C. étant prévu par la ville de GRASSE sur ce terrain, une convention d' occupation d' une partie des locaux avait été signée avec la mairie de GRASSE en 1996 pour prendre fin en juin 1998, la mairie continuant néanmoins d' occuper ces locaux postérieurement à cette dernière date, les mettant notamment à disposition d' associations culturelles et de l' association des musulmans de France.

Attendu toutefois que l' accident n' a pas eu lieu dans les locaux ainsi occupés par la mairie de GRASSE mais dans la partie de l' ancienne usine laissée à l' abandon, étant précisé que l' ensemble des lieux ne dispose que d' un seul et unique accès.

Attendu que l' instruction pénale ouverte contre X du chef d' homicide involontaire par manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence a été clôturée le 9 juillet 2004 par une ordonnance de non lieu rendue par le juge d' instruction du Tribunal de Grande Instance de GRASSE.

Attendu que les consorts X...- Y... ont engagé la présente action en responsabilité civile contre la S. A. R. L. PORTE NEUVE tant sur le fondement des dispositions de l' article 1386 du Code civil que sur celui des dispositions de l' article 1383 du dit code.

Attendu que l' article 1386 du Code civil dispose que le propriétaire d' un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu' elle est arrivée par une suite du défaut d' entretien ou par le vice de sa construction.

Attendu que la ruine s' entendant de la destruction totale ou de la dégradation partielle de tout ou partie de la construction ou de tout élément mobilier ou immobilier qui y est incorporé de façon indissoluble, l' application de cet article suppose la chute d' un élément de la construction du bâtiment à défaut de laquelle les dommages ne sont pas imputables à une ruine du bâtiment au sens de l' article 1386 sus visé.

Attendu qu' en l' espèce l' accident s' est produit alors que la victime, selon le témoignage de son frère et de son camarade, avait enjambé une fenêtre brisée pour monter sur le toit et marcher sur la toiture composée de tôles ondulées, la plupart en fibrociment et certaines en matière plastique opaque pour laisser passer la lumière du jour, qu' il a ainsi mis le pied sur une des tôles ondulées en matière plastique opaque qui n' était pas destinée à supporter le poids d' un personne, fût- ce un adolescent, et qui a cédé sous son poids, entraînant sa chute mortelle.

Attendu qu' il apparaît donc que cet accident n' est pas imputable à une ruine du bâtiment et qu' en conséquence les dispositions de l' article 1386 précité ne sont pas applicables aux faits de la cause.

Attendu par ailleurs, sur l' application des dispositions de l' article 1383 du Code civil, que si la déclaration par le juge répressif de l' absence de faute pénale non intentionnelle ne fait pas obstacle à ce que le juge civil retienne une faute civile d' imprudence ou de négligence sur le fondement des dispositions de cet article, il est nécessaire, dans cette hypothèse, d' établir à l' encontre de la S. A. R. L. PORTE NEUVE l' existence d' une faute d' imprudence ou de négligence susceptible d' engager sa responsabilité civile.

Attendu que les consorts X...- Y... reprochent à la S. A. R. L. PORTE NEUVE de ne pas avoir clôturé le site et l' accès aux toits de ses immeubles compte tenu de leur caractère dangereux du fait de leur état de délabrement et d' abandon et de leur absence d' entretien.

Attendu toutefois que le terrain occupé par l' ancienne usine Lautier ne disposait que d' un seul portail d' entrée, avenue Alphonse- Morel, alors qu' une partie des locaux, normalement entretenus, avait fait l' objet d' une convention d' occupation avec la mairie de GRASSE qui les avait notamment mis à disposition de l' association des musulmans de France, laquelle y avait établi une mosquée, qu' ainsi il n' était pas particulièrement fautif de laisser cet accès ouvert en permanence puisque les membres des diverses associations occupant légitimement une partie des locaux devaient pouvoir y accéder, la cour de l' usine servant d' ailleurs de parking pour les automobiles.

Attendu en outre que l' accès à la partie des locaux de l' ancienne usine laissés à l' abandon était expressément interdit par un panneau situé sur la droite mentionnant : " Entrée strictement interdite, produits dangereux ", que ce panneau, suffisamment visible puisque sa présence a été immédiatement constatée par les services de police qui se sont rendus sur les lieux au moment de l' accident, interdisait formellement l' accès à ces locaux en raison de leur dangerosité sans avoir à détailler davantage la nature particulière de ces dangers.

Attendu qu' il en résulte donc qu' aucune faute d' imprudence ou de négligence n' est établie à l' encontre de la S. A. R. L. PORTE NEUVE et que c' est à juste titre que le premier juge a débouté les consorts X...- Y... de l' ensemble de leurs demandes à son encontre.

Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Attendu qu' aucune raison tirée de l' équité ou de la situation économique des parties ne commande le prononcé d' une condamnation au paiement des frais exposés en cause d' appel et non compris dans les dépens.

Attendu que les consorts X...- Y..., parties perdantes en leur appel, seront solidairement condamnés au paiement des dépens d' appel.

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré.

Y ajoutant :

Dit n' y avoir lieu à prononcer de condamnation au titre des frais exposés en cause d' appel et non compris dans les dépens.

Condamne solidairement M. Jean- Jacques X..., Mme Denise X..., Mlle Ingrid Y... et M. Ludovic Y... aux dépens de la procédure d' appel et autorise la S. C. P. BOTTAÏ, GEREUX, BOULAN, Avoués associés, à recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l' avance sans avoir reçu provision.

Rédacteur : M. RAJBAUT

Madame JAUFFRES Madame SAUVAGE
GREFFIÈRE PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0023
Numéro d'arrêt : 07/04879
Date de la décision : 20/05/2008

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Bâtiments - Article 1386 du Code civil - Application - Défaut d'entretien ou vice de construction - /

L'article 1386 du Code civil dispose que le propriétaire d'un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu'elle est arrivée par une suite du défaut d'entretien ou par le vice de sa construction. La ruine s'entendant de la destruction totale ou de la dégradation partielle de tout ou partie de la construction ou de tout élément mobilier ou immobilier qui y est incorporé de façon indissoluble, l'application de cet article suppose la chute d'un élément de la construction du bâtiment à défaut de laquelle les dommages ne sont pas imputables à une ruine du bâtiment au sens de l'article 1386 sus visé. En l'espèce l'accident s'est produit alors que la victime, selon le témoignage de son frère et de son camarade, avait enjambé une fenêtre brisée pour monter sur le toit et marcher sur la toiture composée de tôles ondulées, la plupart en fibrociment et certaines en matière plastique opaque pour laisser passer la lumière du jour, il a ainsi mis le pied sur une des tôles ondulées en matière plastique opaque qui n'était pas destinée à supporter le poids d'une personne, fût-ce un adolescent, et qui a cédé sous son poids, entraînant sa chute mortelle. Cet accident n'est donc pas imputable à une ruine du bâtiment et en conséquence les dispositions de l'article 1386 précité ne sont pas applicables aux faits de la cause.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Grasse, 22 février 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2008-05-20;07.04879 ?
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