COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1ère Chambre C
ARRÊT
DU 15 MAI 2008
No 2008 /
A. V.
Rôle No 07 / 05073
COMMUNE DE LA CADIÈRE D'AZUR
C /
ASSOCIATION DIOCÉSAINE FRÉJUS- TOULON
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BOISSONNET
SCP SIDER
réf 075073
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal d'Instance de TOULON en date du 14 Février 2007 enregistré au répertoire général sous le No 06 / 1590.
APPELANTE :
COMMUNE DE LA CADIÈRE D'AZUR,
dont le siège est Hôtel de Ville- 8, rue Gabriel Péri
83740 LA CADIERE D'AZUR
représentée par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Jérôme LEFORT, avocat au barreau de TOULON, substitué par Maître Grégory MARCHESINI, avocat au barreau de TOULON
INTIMÉE :
ASSOCIATION DIOCÉSAINE FRÉJUS- TOULON,
dont le siège est 68, Impasse Beaulieu- BP 302- 83000 TOULON
représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Jean- Bernard MONTIES, avocat au barreau de MARSEILLE
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COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 Avril 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Anne VIDAL, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Guy ROMAN, Président
Madame Anne VIDAL, Conseiller
Madame Nicole GIRONA, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Mai 2008.
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Mai 2008,
Signé par Monsieur Guy ROMAN, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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I. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Suivant acte d'huissier en date du 13 juillet 2006, l'Association Diocésaine Fréjus- Toulon a fait assigner la Commune de la Cadière devant le Juge des référés du Tribunal d'Instance de Toulon pour voir dire qu'elle occupe sans droit ni titre la maison attenante à l'Eglise Saint André et servant de sacristie et la voir condamner à lui restituer les clés sous astreinte.
Par ordonnance en date du 14 février 2007, le Juge des référés du Tribunal d'Instance de Toulon a rejeté la demande en nullité de l'assignation pour défaut de fondement juridique et la fin de non recevoir présentée par la défenderesse tirée du défaut de qualité à agir de l'Association Diocésaine. Il a constaté que la Commune de la Cadière occupait indûment cette maison en l'état de la mise à disposition de celle- ci au profit de l'Association Diocésaine résultant de l'inventaire publié aux Domaines. Il a donc condamné la Commune de la Cadière à libérer les lieux et à restituer les clés dans le délai de 15 jours de la décision, à défaut sous astreinte de 50 euros par jour de retard. Il l'a également condamnée à payer une somme de 300 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et à supporter les dépens de l'instance.
La Commune de la Cadière a interjeté appel de cette décision suivant déclaration au greffe en date du 22 mars 2007.
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La Commune de la Cadière, suivant conclusions déposées le 18 juillet 2007, après avoir présenté l'historique des relations entre la commune et l'Eglise sur le plan local, reconnaît qu'aux termes de la loi du 2 janvier 1907, tous les édifices cultuels édifiés avant 1905 sont la propriété de la commune, mais que l'immeuble servant de sacristie est inscrit sur la liste des biens ayant été affectés aux Etablissements de culte.
Elle soulève cependant les moyens suivants à l'appui de son appel :
• la nullité de l'assignation pour absence d'exposé des moyens de droit,
• la compétence exclusive de la juridiction administrative, le litige portant sur l'occupation d'un bien du domaine public,
• le défaut de qualité à agir de l'Association Diocésaine qui ne démontre pas que le bien revendiqué lui a été entièrement affecté,
• le rejet au fond de la demande en l'état d'une contestation sérieuse, seule une partie du bien ayant été inscrite sur la liste des biens affectés aux établissements de culte et l'examen des origines de propriété démontrant que l'une des parties seulement de celui- ci aurait été donnée par M. le Curé X... à la fabrique de l'Eglise en 1843.
Elle en conclut donc que l'ordonnance déférée doit être infirmée, qu'il n'y a pas lieu à référé et que l'Association Diocésaine Fréjus- Toulon doit être condamnée à lui verser une somme de 2. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L'Association Diocésaine Fréjus- Toulon, aux termes de ses écritures en date du 8 février 2008, conclut à la confirmation de la décision dont appel et demande à la Cour de lui donner acte de ce qu'elle reconnaît avoir reçu les clés du local et de lui allouer une somme de 1. 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel.
Elle répond comme suit aux moyens d'appel de la Commune de la Cadière :
• sur la nullité de l'assignation, que cette dernière mentionne comme fondement juridique la loi de 1905 et le Journal Officiel établissant la liste des biens affectés au diocèse,
• sur la compétence du Tribunal d'Instance, que l'occupation privative de l'Association Diocésaine Fréjus- Toulon sur le domaine public de la commune découle de la loi de 1905 et a donc été régulièrement autorisée et que le Président du Tribunal d'Instance est compétent pour statuer sur une occupation sans droit ni titre même en l'absence d'urgence,
• sur le défaut de qualité, que la loi du 9 décembre 1905 lui donne qualité pour revendiquer la mise en possession de l'immeuble,
• sur le fond, qu'il n'y a pas d'équivoque sur l'immeuble revendiqué ; qu'il importe peu ce qui a pu advenir à l'immeuble avant 1905 dès lors que la mise à disposition des biens au profit des établissements de culte est irréversible.
II. MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu qu'il est constant que l'immeuble en cause a été inventorié en 1906, conformément aux dispositions de la loi de 1905, sur la liste des biens appartenant à la commune mais dont la jouissance était laissée aux établissements de culte, s'agissant d'un bien à usage de sacristie ; qu'il s'agit, en raison de cette affectation au culte, d'un bien dépendant du domaine public ;
Qu'il est admis que les actions en expulsion pour occupation illégale des biens affectés au culte relèvent des tribunaux de l'ordre judiciaire lorsqu'elles concernent des litiges entre personnes privées, notamment entre ministres du culte ou associations se disant cultuelles ;
Que par contre, ne relève pas de la compétence judiciaire l'action engagée par l'Association Diocésaine à l'encontre de la personne publique, propriétaire de l'immeuble dont la libération est revendiquée, l'occupation, même illicite, d'un bien du domaine public par la personne publique qui en est propriétaire ne pouvant s'analyser comme une voie de fait susceptible de donner compétence au Juge judiciaire pour intervenir en référé ;
Qu'il convient dès lors de constater que c'est à tort que le premier Juge a retenu sa compétence ;
Qu'il y a lieu d'infirmer la décision déférée et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le Juge administratif compétent ;
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu l'article 696 du Code de Procédure Civile,
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,
en matière de référé et en dernier ressort,
Infirme la décision du Juge des référés du Tribunal d'Instance de Toulon déférée ;
Constate que les juridictions de l'ordre judiciaire sont incompétentes pour statuer sur la demande formée par l'Association Diocésaine Fréjus- Toulon contre la Commune de la Cadière ;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir devant les juridictions de l'ordre administratif ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamne l'Association Diocésaine Fréjus- Toulon aux entiers dépens de l'instance ;
En autorise le recouvrement direct pour ceux d'appel par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avoué, dans les formes et conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT