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06/05/2008 | FRANCE | N°07/01447

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 mai 2008, 07/01447


10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 06 MAI 2008

No 2008 /



Rôle No 07 / 01447



S. A. COVEA RISKS

C /

COMMUNE DES ADRETS
S. A PUGET POIDS LOURDS

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 21 Décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 09235.



APPELANTE

S. A. COVEA RISKS venant aux droits de S. A MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD RCS NANTERRE No B 378 716 419 poursuites et diligences de son représentan

t légal domicilié au siège sis, 19-21 allées de l'Europe-92616 CLICHY CEDEX
représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI,...

10o Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 06 MAI 2008

No 2008 /

Rôle No 07 / 01447

S. A. COVEA RISKS

C /

COMMUNE DES ADRETS
S. A PUGET POIDS LOURDS

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 21 Décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 09235.

APPELANTE

S. A. COVEA RISKS venant aux droits de S. A MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD RCS NANTERRE No B 378 716 419 poursuites et diligences de son représentant légal domicilié au siège sis, 19-21 allées de l'Europe-92616 CLICHY CEDEX
représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour,
assistée de Me Muriel MANENT, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

INTIMEES

COMMUNE DES ADRETS représentée par son Maire en exercice y domicilié en cette qualité, Place de la Mairie-83600 LES ADRETS DE L'ESTEREL
représentée par la SCP LATIL-PENARROYA-LATIL-ALLIGIER, avoués à la Cour,
assistée de Me Eric DE TRICAUD, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

S. A PUGET POIDS LOURDS prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, RN 7- Quartier les Plaines-83480 PUGET SUR ARGENS
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de la SCP BARTHELEMY-POTHET-DESANGES, avocats au barreau de DRAGUIGNAN

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 11 Mars 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2008,

Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 21 décembre 2006

Vu l'appel de la société Mutuelle du Mans assurances en date du 25 janvier 2007

Vu les conclusions de la société COVEA RISKS venant aux droits de la société Mutuelle du Mans assurances en date du 4 février 2008

Vu les conclusions de la commune des ADRETS de L'ESTEREL en date du 14 janvier 2008

Vu les conclusions de la société PUGET POIDS LOURDS en date du 13 juillet 2007

Vu l'ordonnance de clôture en date du 14 février 2008

***

Le 24 juin 2003, au cours d'une opération de remorquage du véhicule de collecte d'ordures ménagères de la commune des ADRETS de L'ESTEREL, le camion de la société PUGET POIDS LOURDS a endommagé le camion-benne de cette commune.

Saisi par la commune d'une action en responsabilité et en indemnisation pour les frais exposés en raison de l'impossibilité d'utiliser son véhicule de collecte, le tribunal de Draguignan a, après avoir écarté diverses exceptions de procédure, condamné la société PUGET POIDS LOURDS et son assureur à indemniser le préjudice subi par la commune des ADRETS fixé à la somme de 207 659, 94 €.

La société COVEA RISKS conteste le choix de la commune d'avoir sous-traité la prestation de ramassage des ordures à une société ne proposant que des prestations complètes avec benne à ordures et personnel de ramassage, estimant qu'il lui suffisait de louer un camion benne équivalent.

Par ailleurs, elle conteste la durée de l'indemnisation de privation de jouissance sur une période de plus de deux ans, observant que le camion était déjà en panne et indiquant que la commune, qui a voté l'achat d'une nouvelle benne en mars 2004, a fait preuve d'inertie dans la mise en œ uvre de la procédure de remplacement.

Elle demande donc que l'indemnisation de la privation de jouissance soit effectuée en considération du prix de location d'un véhicule équivalent et de la limite du délai nécessaire au remplacement de la benne.

Subsidiairement, elle sollicite une mesure d'expertise pour en chiffrer le coût.

La société PUGET POIDS LOURDS soulève d'abord deux moyens d'irrecevabilité des demandes de la commune, d'une part du fait que l'action a été introduite devant les juridictions de l'ordre judiciaire alors que le dommage a été subi par une puissance publique dans le cadre d'un service public, d'autre part du fait de l'absence de qualité à agir de la commune qui aurait dû diriger son action à l'encontre de son SIVOM, propriétaire du véhicule accidenté.

Elle conteste ensuite l'application de la loi du 5 juillet 1985 en indiquant que son dirigeant, M. X..., a été relaxé par le tribunal correctionnel et qu'il n'y a pas eu implication de son véhicule dont seule la partie étrangère à sa fonction de déplacement, en l'occurrence la grue, est en cause.

Elle invoque également des arguments relatifs à l'absence de prise en charge du sinistre de la commune par sa compagnie d'assurances ou par celle du SIVOM et à une immobilisation subie des véhicules placés sous séquestre au cours de l'enquête, estimant que la commune pouvait, comme elle-même, récupérer son camion-benne plus rapidement.

Enfin, s'agissant de l'indemnisation du préjudice, elle reprend à son compte les arguments développés par la société appelante.

La commune des ADRETS effectue divers développements sur la nature de son préjudice et sur son droit à indemnisation au regard des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 et réfute les moyens soulevés par la société PUGET POIDS LOURDS et son assureur.

Elle ramène sa demande à la somme de 201 652, 94 € outre intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2005 et sollicite 8 000 € de dommages et intérêts pour résistance abusive et 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

- Sur les moyens d'irrecevabilité :

Le premier juge a parfaitement répondu au moyen d incompétence des juridictions de l'ordre judiciaire en indiquant que le litige ne porte pas sur l'organisation d'un service public de ramassage des ordures ménagères mais sur la mise en œ uvre de la responsabilité civile d'une personne privée dans le cadre d'un accident et la réparation des dommages qui en sont résultés et que dès lors que, comme en l'espèce, le dommage dont la commune se déclare victime trouve son origine dans un accident impliquant une personne privée, la compétence judiciaire est consacrée de sorte que le tribunal de grande instance était compétent d'autant qu'aucune mise en cause de la puissance publique n'est intervenu dans le cadre de l'instance.

S'agissant de la qualité à agir de la commune des ADRETS, le compte-rendu de la réunion du SIVOM en date du 31 janvier 2003 fait ressortir que cet organisme n'assume plus le ramassage des ordures et des monstres à compter du lundi 3 février 2003 et que, dans l'attente d'une étude et d'une décision du conseil municipal, la commune des ADRETS de l'ESTEREL continuera à collecter les ordures ménagères et les monstres dans le cadre de sa régie municipale, le comité syndical donnant son accord pour l'utilisation par la commune de la benne appartenant au SIVOM.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a écarté le moyen d'irrecevabilité de la société PUGET en indiquant que la commune, qui ne sollicite pas l'indemnisation des dommages subis par le camion-benne mais la réparation du dommage résultant de l'impossibilité d'utiliser ce véhicule à la suite de l'accident, a un intérêt à agir, même si elle n'est pas propriétaire du véhicule, dès lors que ses prétentions ne sont pas fondées sur la propriété du véhicule mais sur le fait qu'ayant l'usage du véhicule pour assurer la collecte des ordures ménagères sur son territoire, elle subit un préjudice du fait de la dégradation du dit véhicule et de l'obligation de pourvoir à son remplacement.

En ce qui concerne l'application à la cause de la loi du 5 juillet 1985, le fait que le dirigeant de la société PUGET POIDS LOURDS n'ait pas été condamné pénalement est sans incidence sur la poursuite d'une action civile dirigée contre cette société.

Il ressort par ailleurs de l'enquête effectuée par la compagnie de gendarmerie de Fréjus que le dommage est intervenu au cours de la man œ uvre du traction du camion-benne de la commune par le camion-grue de la société PUGET, ce dernier ayant basculé sur le camion benne.
Ces faits, révélant que le dommage au camion benne résulte bien de l'action d'un accessoire nécessaire à la fonction de déplacement du camion-grue, suffisent à caractériser son implication dans le dommage de la commune, peu important que le moteur ait été à l'arrêt au moment des faits.

L'argument tiré de l'absence de prise en charge du sinistre par l'assureur de la commune est sans incidence dès lors qu'il apparaît, à la lecture du courrier adressé le 19 décembre 2005 par le cabinet d'expertise B. OTT au SIVOM que l'assurance ne prend en charge que les frais de remplacement du camion mais non le surcoût subi par la commune du fait de son absence d'utilisation.

Enfin, il ressort de ce même courrier que la valeur de remise en état du camion benne, soit 21 965 € avant démontage, avoisinant sa valeur à dire d'expert de 26 000 €, il était conseillé par l'assureur de ne pas procéder à la réparation.

En conséquence, l'argument relatif à l'" inertie " de la commune pour faire lever la mesure de séquestre est inopérant.

- Sur le préjudice :

Il ressort de l'attestation régulièrement délivrée par M. Frédéric Z..., directeur de branches du groupe PIZZORNO environnement, que la société PIZZORNO a assuré la collecte des ordures ménagères et des multimatériaux dans la commune des ADRETS du 23 juin 2003 au 12 août 2005. Le maire des ADRETS précise toutefois que la collecte en question a été reprise par la commune le 1er août 2005 suite à l'acquisition d'une nouvelle benne.

Si certes, ainsi que l'indique que le témoin Z..., cette société ne propose que des prestations de service complet avec une mise à disposition du personnel associé au véhicule, c'est de façon légitime que l'appelant soutient que la réparation ne peut porter que sur le coût du remplacement du véhicule camion-benne à l'exception des prestations de services auparavant assumées par le personnel municipal.

La cour estime donc devoir retenir comme base d'indemnisation la somme mensuelle de 3600 € hors taxes résultant du tarif mensuel de location d'un véhicule-benne sans chauffeur, de 19 tonnes indiquée sur l'" offre de prix " de la société BOM services, en date du mois d'octobre 2006, pièce communiquée par la société COVEA RISKS.

Cette somme sera allouée pour la période de 25 mois correspondant à la privation de jouissance du véhicule benne accidenté, et économiquement irréparable, aucun retard fautif dans ce remplacement ne pouvant être imputé à la commune des ADRETS qui a dû se soumettre pour l'acquisition d'un nouveau véhicule à la procédure d'appel d'offres dont les différentes phases n'ont pas permis une livraison antérieure au mois d'août 2005.

Il est donc dû à la commune des ADRETS la somme de : 3600 € x 25 = 90 000 €

Les intérêts au taux légal sur cette somme ne sont dus qu'à compter du présent arrêt déclaratif de droits.

Le caractère abusif de la résistance de l'appelante n'est pas établi. Il n'y a donc pas lieu à octroi de dommages et intérêts de ce chef.

Il est équitable de fixer à 2200 € la somme devant être allouée à la commune des ADRETS au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu en équité de faire application de ce dernier texte aux autres parties à la procédure.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les exceptions d'incompétence et fin de non-recevoir soulevées par la société PUGET POIDS LOURDS

Le confirme également en ce qu'il a dit que la société PUGET POIDS LOURDS et son assureur doivent indemniser l'intégralité du préjudice subi par la commune des ADRETS de l'ESTEREL du fait de l'accident du 23 juin 2003

Le réforme pour le surplus

Et statuant à nouveau

Condamne in solidum la société PUGET POIDS LOURDS et la société COVEA RISKS, venant aux droits de la société Mutuelle du Mans assurances à payer à la commune des ADRETS de l'ESTEREL la somme de 90 000 € en réparation de son préjudice avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt

Rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Condamne in solidum la société PUGET POIDS LOURDS et la société COVEA RISKS a payer à la commune des ADRETS de l'ESTEREL la somme de 2200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par les autres parties

Condamne in solidum la société PUGET POIDS LOURDS et la société COVEA RISKS aux dépens distraits au profit de la SCP LATIL – PENNNAROYA-LATIL – ALLIGIER, avoué

Magistrat Rédacteur : Mme KERHARO-CHALUMEAU

Madame JAUFFRES Madame SAUVAGE
GREFFIÈRE, PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 07/01447
Date de la décision : 06/05/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Draguignan


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-06;07.01447 ?
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