COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
2ème Chambre ARRÊT AU FOND
DU 2 MAI 2008
No 2008 / 179
Rôle No 05 / 18174
Jean- Paul X...
Christophe X...
S. A. R. L. LA SECURITE F
C /
S. A. ADT TELESURVEILLANCE
S. A. TYCO EUROPEAN SECURITY HOLDING
S. A. R. L. PROTECTION
Gilles Y...
Grosse délivrée
le :
à : BOISSONNET
MAGNAN
Décisions déférés à la Cour :
- Jugement du Tribunal de Commerce d'ANTIBES en date du 9 septembre 2005 enregistré au répertoire général sous le no 2004 03631
- Arrêt de renvoi de la 14ème Chambre (section A) de la Cour d'appel de PARIS en date du 28 avril 2004 enregistré au répertoire général sous le no 2003 / 21413- statuant sur appel de l'ordonnance de référé rendue le 3 novembre 2003 par le tribunal de Commerce de PARIS enregistrée sous le no RG 2003 / 75686-
- Jugement de la 15ème Chambre du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 15 septembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 2004063966
APPELANTS
Monsieur Jean- Paul X...
demeurant...-06570 SAINT PAUL
Monsieur Christophe X...
demeurant...-06570 SAINT PAUL
S. A. R. L. LA SECURITE
dont le siège est sis 2224 chemin des... 06570 SAINT PAUL
représentés par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour,
plaidant par Me Denis DEL RIO, avocat au barreau de NICE
INTIMES
S. A. ADT TELESURVEILLANCE
dont le siège est sis 10 rue Alphonse de Neuville-75017 PARIS
représentée par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
plaidant par Me Jérôme LETANG, avocat au barreau de LYON
S. A. TYCO EUROPEAN SECURITY HOLDING
dont le siège est sis 10 rue Alphonse de Neuville-75017 PARIS
représentée par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
plaidant par Me Jérôme LETANG, avocat au barreau de LYON
S. A. R. L. PROTECTION
dont le siège est sis...
... 06570 SAINT PAUL
défaillante
Maître Gilles Y... assigné en intervention forcée en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la S. A. R. L. LA PROTECTION
né le 8 mars 1963 à PARIS (75)
demeurant...-06560 VALBONNE SOPHIA ANTIPOLIS
défaillant
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 31 mars 2008 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Robert SIMON, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur André JACQUOT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Mireille MASTRANTUONO
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 2 mai 2008.
ARRÊT
Réputé contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 2 mai 2008
Signé par Monsieur Robert SIMON, Président, et Madame Mireille MASTRANTUONO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant protocole de cession en date du 18 janvier 2001, Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... ont cédé à la S. A. Tyco European Security Holding les parts sociales qu'ils détenaient avec d'autres dans deux S. A. R. L. (SPS et ACS) dont ils étaient les gérants, sociétés qui avaient pour activité l'installation / vente de systèmes d'alarme, la télésurveillance et l'intervention sur alarme. Le protocole de cession comportait une clause de non- concurrence impartie aux cédants. La S. A. ADT Télésurveillance, filiale de la S. A. Tyco European Security Holding, a absorbé les S. A. R. L. SPS et ACS à effet au 1er octobre 2001. Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... ont créé, le 5 septembre 2003, la S. A. R. L. « La Sécurité » ayant pour objet une activité de surveillance, de gardiennage et d'installation de tous systèmes d'alarme.
Par ordonnance de référé en date du 3 novembre 2003, Madame la Présidente du Tribunal de Commerce de PARIS, a ordonné à la S. A. R. L. « La Sécurité » de cesser le démarchage de la clientèle de la S. A. ADT Télésurveillance et a ordonné à Monsieur Jean- Paul B... et à Monsieur Christophe B... « de faire cesser à la S. A. R. L. « La Sécurité » toute activité de télésurveillance sur la région Provence- Alpes- Côte d'Azur ». Par arrêt en date du 28 avril 2004, la Cour d'Appel de PARIS, déniant la compétence territoriale du Tribunal de Commerce de Paris, a renvoyé la connaissance de l'affaire à la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE.
La S. A. R. L. « La Sécurité » a été « mise en sommeil » à compter du 7 novembre 2003. La S. A. R. L. « La Protection » ayant une activité identique à celle de la S. A. R. L. « La Sécurité » a été créée, le 10 novembre 2003. Par ordonnance de référé en date du 22 décembre 2003, Madame la Présidente du Tribunal de Commerce de PARIS a débouté la S. A. Tyco European Security Holding et la S. A. ADT Télésurveillance de leur demande tendant à la cessation d'activité de la S. A. R. L. « La Protection » qui aurait réalisé une concurrence déloyale. Cette ordonnance a été infirmée par un arrêt rendu, le 8 octobre 2004, par la Cour d'Appel de Paris, qui a ordonné à Monsieur Jean- Paul B... et à Monsieur Christophe B... de cesser les agissements déloyaux au préjudice de la S. A. ADT Télésurveillance par un démarchage systématique de ses clients et ordonné à Monsieur Jean- Paul B... et à Monsieur Christophe B... « de faire cesser à la S. A. R. L. « La Protection » toute activité de télésurveillance, de gardiennage ou d'intervention » (le pourvoi formé contre cet arrêt a été déclaré non- admis).
La S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul ayant une activité de « télésurveillance, d'installation, de maintenance et d'intervention, le tout dans le domaine de la sécurité en général » a été créée, le 30 juillet 2004. Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... sont devenus salariés de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul à compter du 2 août 2004, respectivement en qualité de « Responsable d'Agence » et de « Responsable Commercial ». Par ordonnance de référé en date du 25 octobre 2004, confirmée par un arrêt de la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE en date du 30 janvier 2006, il a été ordonné à Monsieur Jean- Paul B... et à Monsieur Christophe B... de cesser toute activité au sein de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul et plus généralement au sein d'une quelconque entreprise de télésurveillance dans la Région Provence- Alpes- Côte d'Azur jusqu'au 18 janvier 2006. Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... ont été licenciés ensuite du jugement.
Par jugement contradictoire en date du 9 septembre 2005, le Tribunal de Commerce d'Antibes, constatant que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... « s'étaient livrés à des actes de concurrence anti- contractuelle et à des actes de concurrence déloyale », les a condamnés solidairement avec la S. A. R. L. « La Sécurité » et la S. A. R. L. « La Protection » à payer à la S. A. ADT Télésurveillance la somme de 150. 000 € à titre de dommages- et- intérêts pour préjudice économique (perte de clientèle) et celle de 20. 000 € à titre de dommages- et- intérêts pour préjudice moral, outre une somme de 5. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, le jugement étant assorti de l'exécution provisoire à hauteur de 75. 000 €.
Monsieur Jean- Paul B..., Monsieur Christophe B... et la S. A. R. L. « La Sécurité » ont, le 20 septembre 2005, régulièrement fait appel de cette décision dans les formes et délai légaux.
Par jugement contradictoire en date du 15 septembre 2006, le Tribunal de Commerce de Paris a, sur la demande en indemnisation de son préjudice formée par la S. A. Tyco European Security Holding, constatant la connexité entre les deux affaires, s'est dessaisie au profit de la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE, saisie de l'appel du jugement rendu, le 9 septembre 2005, par le Tribunal de Commerce d'Antibes.
Les trois affaires (- l'arrêt rendu, le 28 avril 2004, par la Cour d'Appel de Paris,- le jugement rendu, le 9 septembre 2005, par le Tribunal de Commerce d'Antibes et- le jugement rendu, le 15 septembre 2006, par le Tribunal de Commerce de Paris) ont fait l'objet d'ordonnances de jonction rendues, le 18 janvier 2007, par le Conseiller chargé de la Mise en État auprès de la deuxième chambre de la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE. Monsieur Jean- Paul B..., Monsieur Christophe B... et la S. A. R. L. « La Sécurité » ont fait appeler en intervention forcée Maître Gilles Y... pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la S. A. R. L. « La Protection », suivant acte délivré, le 26 septembre 2006, à la « personne même du destinataire ».
Vu les dispositions des articles 455 et 954 du nouveau code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret No 98-1231 du 28 décembre 1998 ;
Vu les prétentions et moyens de Monsieur Jean- Paul B..., de Monsieur Christophe B... et de la S. A. R. L. « La Sécurité » dans leurs conclusions récapitulatives en date du 25 octobre 2007 tendant à faire juger :
- que la S. A. Tyco European Security Holding et la S. A. ADT Télésurveillance ont formé « des demandes nouvelles sur la base de faits non évoqués en première instance », à savoir les emplois salariés de Monsieur Jean- Paul B... et de Monsieur Christophe B... au sein de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul, qui constitueraient des agissements déloyaux,
- que « l'objet du litige consiste uniquement à déterminer si la S. A. Tyco European Security Holding et la S. A. ADT Télésurveillance disposent d'un agrément préfectoral sur le territoire du département des Alpes- Maritimes »,
- que selon un jugement prononcé, le 20 mars 2007, par le Tribunal Correctionnel de Grasse, le P. D. G. de la S. A. ADT France venant aux droits de la S. A. ADT Télésurveillance a été condamné du chef d'exercice, sans agrément d'activité de surveillance, gardiennage, transports de fonds ou protection de personnes, ce qui fait que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... « ne pouvaient se retrouver en situation de concurrence déloyale face à une société exerçant illégalement une activité de télésurveillance »,
- que l'agrément préfectoral était requis dès lors que la S. A. ADT Télésurveillance et la S. A. Tyco European Security Holding avaient un établissement secondaire dans le département des Alpes- Maritimes, l'activité exercée ne pouvant l'être uniquement à partir de centres opérationnels de sécurité (COS) implantés en région parisienne,
- subsidiairement, que la S. A. ADT Télésurveillance et la S. A. Tyco European Security Holding ne font pas la preuve d'actes de concurrence déloyale imputables à Monsieur Jean- Paul B..., à Monsieur Christophe B... et à la S. A. R. L. « La Sécurité » ou / et la S. A. R. L. « La Protection », cette dernière constituée par d'autres personnes physiques même si l'activité des deux sociétés a été exercée dans les mêmes locaux appartenant aux frères X...-...
... (06)- et au moyen de la même ligne téléphonique,
- que l'activité salariée des frères B... au sein de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul ne peut constituer une circonstance constitutive d'agissements déloyaux,
- que la preuve des résiliations des contrats de télésurveillance par des clients et de leur détournement au profit de l'une ou l'autre des entités successives la S. A. R. L. « La Sécurité », la S. A. R. L. « La Protection » ou / et la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul n'est pas avérée, « les lettres de résiliation étant totalement fantaisistes » ou motivées par le mécontentement des clients,
- que les procédures multiples, dilatoires et abusives conduites par la S. A. Tyco European Security Holding et par la S. A. ADT Télésurveillance ont causé à Monsieur Jean- Paul B... et à Monsieur Christophe B... un préjudice évaluable à 449. 480, 68 correspondant au chiffre d'affaires qu'ils ont manqué ;
Vu les prétentions et moyens de la S. A. ADT France et la S. A. Tyco European Security Holding dans leurs conclusions responsives et récapitulatives (? ! ! pour le second terme) en date du 28 novembre 2007 tendant à faire juger :
- que Monsieur Jean- Paul B..., Monsieur Christophe B..., la S. A. R. L. « La Sécurité » et la S. A. R. L. « La Protection » ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la S. A. ADT Télésurveillance aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la S. A. ADT France en détournant la clientèle au profit de la S. A. R. L. « La Sécurité », puis de la S. A. R. L. « La Protection » et en dénigrant la S. A. ADT Télésurveillance dans une lettre circulaire adressée à sa clientèle,
- que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... ont persisté dans leur comportement déloyal en se faisant embaucher par la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul qui exerçait une activité concurrente de celle de la S. A. ADT Télésurveillance et qui a profité des détournements de clients,
- que le préjudice qui en est résulté pour la S. A. ADT Télésurveillance doit être fixé à 224. 700 € correspondant aux redevances que la centaine de clients détournés auraient dû payer pendant trois années, outre un préjudice moral fixé à 50. 000 €,
- que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... ont commis vis- à- vis de la S. A. Tyco European Security Holding un manquement à leur obligation contractuelle de non- concurrence en constituant la S. A. R. L. « La Sécurité » au profit de laquelle un détournement de clientèle a été opéré, puis en participant à la constitution de la S. A. R. L. « La Protection » qui a bénéficié du transfert des clients détournés, enfin en se faisant embaucher par la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul qui a bénéficié, elle aussi et à son tour, des détournement de clientèle,
- que le préjudice subi par la S. A. Tyco European Security Holding doit être fixé à la somme de 224. 740, 34 € correspondant à la perte du quart de la clientèle cédée induisant une dépréciation de la même fraction de la valeur des parts cédées,
- que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... devront cesser leurs agissements déloyaux perpétrés sous couvert de la S. A. R. L. « La Sécurité » et avec sa complicité et consistant en le démarchage systématique de la cliente de la S. A. ADT Télésurveillance devenue la S. A. ADT France,
- que l'éventuel défaut d'agrément préfectoral qui relève de l'ordre public économique ne saurait autoriser Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... à se livrer à une concurrence contraire à leurs obligations contractuelles,
- qu'au surplus, 1- ni la S. A. Tyco European Security Holding, ni la S. A. ADT Télésurveillance ne sont concernées par la procédure pénale qui ne vaut que pour la S. A. ADT France (la S. A. ADT Télésurveillance et la S. A. ADT France étant des sociétés autonomes jusqu'à leur fusion- absorption à effet au 1er octobre 2006) et 2- que l'agrément préfectoral n'était pas requis en ce qui concerne la S. A. ADT Télésurveillance, société d'exploitation technique, pour son activité de télésurveillance et gardiennage, qui n'avait pas d'établissement secondaire dans le département des Alpes- Maritimes, mais seulement des centres opérationnels de sécurité basés en région parisienne,
- que la S. A. ADT France ayant une activité de prospection commerciale, administrative et d'installation et maintenance de systèmes de surveillance, n'était pas, non plus, astreinte à l'obtention d'un agrément préfectoral dès lors qu'elle n'effectuait pas des prestations de télésurveillance et gardiennage dans le département des Alpes- Maritimes (la partie d'activité « service gardiennage et ronde d'intervention » étant sous- traitée à une société ECSAS, pourvue elle d'un agrément),
- qu'aucune demande nouvelle n'a été formée en appel, seuls des faits nouveaux sont invoqués à l'appui d'une demande déjà formée devant les premiers juges ;
L'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire a été rendue le 31 janvier 2008.
MOTIFS ET DÉCISION
Attendu que selon l'article 563 du code de procédure civile les parties peuvent, pour justifier en appel les prétentions qu'elles ont soumises aux premiers juges, invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves ; que la S. A. Tyco European Security Holding et la S. A. ADT France ont proposé en appel des moyens nouveaux et des éléments factuels de preuve qui ne constituent pas des prétentions nouvelles en faisant état à l'appui de leurs prétentions initialement formées devant les premiers juges (actions en concurrence déloyale et en violation d'une clause de non- concurrence), d'agissements déloyaux que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... auraient commis par l'entremise de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul ;
Attendu que le dépôt de plainte concernant la non- obtention de l'agrément préfectoral par la S. A. ADT Télésurveillance, effectué le 23 octobre 2003 par Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... en qualité de co- gérants de la S. A. R. L. « La Sécurité » constituée, le 5 septembre 2003, révèle par sa formulation que les plaignants estimaient que la situation irrégulière du « Groupe TYCO » et la S. A. ADT Télésurveillance au regard de la réglementation de l'activité de sécurité et gardiennage les autorisait à s'affranchir de la clause de non- concurrence qu'ils avaient souscrite, et des règles d'une saine concurrence entre entreprises œ uvrant dans le même secteur d'activité ; que le déclenchement de poursuites pénales n'avait pas d'autre but que de « permettre » ou « de justifier » leur ré- installation en principe interdite, ce qui est exprimé clairement dans le dépôt de plainte de la manière suivante : « il s'est révélé que le Groupe TYCO ou ses filiales n'avaient aucune activité déclarée dans le département des Alpes- Maritimes, c'est la raison pour laquelle il a été procédé à la constitution de la S. A. R. L. « La Sécurité » ; que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... en tentant de justifier par avance leur ré- installation, ont reconnu qu'ils avaient conscience d'enfreindre pour le moins une obligation contractuelle et, le cas échéant, les règles normales de concurrence entre entreprises en effectuant un démarchage abusif de la clientèle d'un concurrent en situation « administrative » irrégulière, donc hors du jeu de la concurrence ;
Attendu que par jugement en date du 20 mars 2007 (frappé d'appel), le Tribunal Correctionnel de GRASSE a condamné Monsieur C..., pris en sa qualité indiquée de P. D. G. de la S. A. ADT France (alors qu'il détenait en 2003 et 2004 le mandat social de P. D. G. de la S. A. ADT Télésurveillance- le mandat de président du conseil d'administration de la S. A. ADT France étant détenu alors par Monsieur D...), du chef d'exercice d'activité de surveillance, gardiennage … sans agrément courant 2003 et 2004 à SAINT PAUL (06) et à FRANCHEVILLE (69) ; que c'est bien la S. A. ADT France qui assumait à partir de son établissement de SAINT PAUL DE VENCE, route de la Colle, pour le compte de la S. A. ADT Télésurveillance, certaines prestations de gardiennage et de surveillance de maisons d'habitation ou villas situées dans le département des Alpes- Maritimes et appartenant à d'anciens clients de la société SPS dont la S. A. Tyco European Security Holding avait pris le contrôle, le 18 janvier 2001 ; que selon la convention de prestation de services en date du mois de décembre 2001 passée entre la S. A. ADT Télésurveillance et la S. A. ADT France, cette dernière était chargée d'effectuer certaines « prestations techniques », dont « un centre d'appel, l'assistance technique clients, la réalisation des installations de télésurveillance, la réalisation des interventions SAV, des prestations de suivi des clients … » ;
Attendu que selon les articles 1, 1o et 7 de la loi No 83-629 du 12 juillet 1983 nul ne peut, s'il n'est titulaire d'un agrément délivré par l'autorité préfectorale compétente, diriger une personne morale exerçant une activité consistant à « fournir des services ayant pour objet la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage des biens immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles » ; qu'une autorisation distincte pour l'établissement principal et pour chaque établissement secondaire est requise pour l'exercice de l'activité définie supra ; que Monsieur C... a été condamné pénalement sur le fondement de l'article 15 I 5ode ladite loi réprimant le fait de diriger une personne morale (semble- t- il la S. A. ADT France, prestataire de services ou sous- traitant de la S. A. ADT Télésurveillance) qui a exercé l'activité définie supra dans le département des Alpes- Maritimes ; que le jugement correctionnel a bien relevé à partir d'attestations et d'autres éléments de preuve que les salariés de la S. A. ADT France à Saint Paul de Vence exerçaient une activité relevant de l'article 1, 1o de ladite loi (activité de télésurveillance proprement dite en procédant à des contre- appels, en disposant de locaux équipés d'appareils de télésurveillance qui fonctionnaient pour les immeubles relevant « localement » de l'agence, en faisant intervenir des agents de surveillance dans les locaux, outre en faisant remettre par leur propriétaire à des salariés de l'agence des clefs d'immeubles …) ; qu'au demeurant, le fait de sous- traiter l'exercice d'une activité de surveillance à une entreprise dépourvue de l'agrément préfectoral constitue également une infraction selon l'article 14 I, 7o de ladite loi, (la S. A. ADT Télésurveillance ayant consenti une sous- traitance à la S. A. ADT France pour l'exécution de prestations de surveillance par des systèmes électroniques) ; qu'il appartiendra à la Cour d'Appel saisie de l'appel du jugement correctionnel de déterminer si la partie d'activité exercée par la S. A. ADT France dans le département des Alpes- Maritimes pour le compte de la S. A. ADT Télésurveillance en 2003 / 2004 relève ou non de la loi règlementant les activités privées de sécurité ;
Attendu en toute hypothèse et indépendamment de la solution qui sera donnée sur un plan pénal que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... ne peuvent prétendre s'affranchir de leurs obligations contractuelles vis- à- vis de la S. A. Tyco European Security Holding en matière de non- concurrence et prétendre qu'ils en sont déliés par le fait que la S. A. ADT France, sous- traitante liée à la S. A. ADT Télésurveillance, elle- même appartenant au « Groupe TYCO » n'est pas titulaire de l'agrément préfectoral exigé et exerçait au moment de leur première ré- installation par suite de la constitution de la S. A. R. L. « La Sécurité », une activité privée de sécurité dans des conditions réglementaires irrégulières ; que l'éventuel non- respect par la S. A. ADT France d'une prescription réglementaire d'ordre public ne permettrait pas aux frères B... et / ou à des sociétés auxquelles ils sont « intéressés », de se soustraire aux obligations contractuelles qu'ils ont souscrites et d'enfreindre les règles de loyauté devant exister entre entrepreneurs concurrents du même secteur d'activité ;
Attendu que la S. A. ADT France venant aux droits de la S. A. ADT Télésurveillance depuis une fusion- absorption à effet au 1er octobre 2006 est recevable à agir sur le fondement de la responsabilité quasi- délictuelle en réparation du préjudice subi du fait des agissements déloyaux de Monsieur Jean- Paul B..., de Monsieur Christophe B..., de la S. A. R. L. « La Sécurité » et de la S. A. R. L. « La Protection » ; que la S. A. ADT France fait la preuve que la S. A. R. L. « La Sécurité » constituée par les frères B..., ses co- gérants, dans l'intention avouée de reprendre une partie de la clientèle qu'ils connaissaient bien pour avoir été en relation d'affaires avec elle, au motif qu'il n'existe aucun frein à concurrencer une entreprise en situation réglementaire irrégulière, a suscité par un démarchage pressant, incitatif et systématique de clients de la S. A. ADT Télésurveillance la résiliation de nombreux contrats en cours d'exécution de télésurveillance ou de surveillance ; qu'au cours du mois de septembre 2003, une centaine de clients sur les 375 clients ayant contracté initialement avec la société SPS ont résilié leur contrat de télésurveillance en cours d'exécution à effet au 1er janvier 2004 et en ont souscrit d'autres au profit de la S. A. R. L. « La Sécurité », constituée par Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B..., le 5 septembre 2003 ; que de très nombreuses lettres de résiliation présentent la même formulation et certaines ont les mêmes caractères typographiques, comme étant issues du même auteur ; qu'ensuite de la mise en sommeil de la S. A. R. L. « La Sécurité », le 7 novembre 2003, suite à une décision judicaire rendue en référé, le 3 novembre 2003, la S. A. R. L. « La Protection », créée à l'initiative des frères B..., le 10 novembre 2003, exerçant dans les mêmes locaux que la S. A. R. L. « La Sécurité » appartenant aux frères B... et dotée du même numéro de téléphone s'est vue transférer la plupart des contrats détournés au profit de la S. A. R. L. « La Sécurité » ; que, enfin, une seconde « vague » de résiliation de contrats de télésurveillance est intervenue, en fin d'année 2004, « au profit » de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul, créée, le 30 juillet 2004, et ayant embauché les frères X... à des fonctions de responsabilité, le 2 août 2004 ; qu'un procès- verbal d'huissier en date du 16 avril 2005 établit que 78 anciens clients de la S. A. ADT Télésurveillance se retrouvent dans le fichier clients de la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul ; que la S. A. ADT France établit également le rôle de Monsieur Robert E... se présentant comme mandataire de propriétaires de villas qui, agissant de concert avec les frères B..., est intervenu à l'occasion des résiliations de contrats de télésurveillance et gardiennage en fin d'année 2003 et en fin d'année 2004 ;
Attendu que la S. A. ADT Télésurveillance aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la S. A. ADT France est fondé à obtenir sur le fondement de la responsabilité quasi- délictuelle réparation de son préjudice résultant des agissements déloyaux de Monsieur Jean- Paul B..., de Monsieur Christophe B... et de la S. A. R. L. « La Sécurité » qui n'ont pas respecté les règles devant régir une saine concurrence entre entrepreneurs du même secteur d'activité ; que ce préjudice doit s'analyser en un gain manqué (perte de marge brute) provenant de la résiliation des contrats de télésurveillance et de gardiennage, provoquée par les agissements déloyaux et doit être calculé en fonction du nombre de résiliations provoquées- une centaine-, du montant de la redevance annuelle par contrat-750 € environ- et de la durée prévisible ou moyenne de tels contrats-3 années- et enfin de la marge brute estimée pour l'activité considérée ; que les premiers juges ne pouvaient apprécier l'importance du préjudice économique (fixé à 150. 000 €) par référence à une perte du chiffre d'affaires ; qu'il convient de la fixer à 100. 000 € par référence à une perte de marge brute, outre de confirmer l'évaluation du préjudice moral (20. 000 €) consistant en l'atteinte portée à la réputation de la S. A. ADT Télésurveillance malmenée par les frères B... qui ne se sont pas embarrassés de scrupules notamment en la dénigrant auprès de sa clientèle ;
Attendu que la S. A. ADT France venant aux droits de la S. A. ADT Télésurveillance ne justifie pas avoir effectué de déclaration de créance entre les mains du liquidateur judiciaire de la S. A. R. L. « La Protection » ; qu'aucune condamnation ne pourra la concerner ;
Attendu que Monsieur Jean- Paul B... et Monsieur Christophe B... qui ont cédé à la S. A. Tyco European Security Holding la totalité des parts qu'ils détenaient dans le capital social des sociétés SPS et ACS et qui ont perçu 4. 434. 522, 20 francs sur les 8. 300. 430 francs tirés de la cession de parts sociales, s'étaient personnellement engagés pendant cinq années dans la région Provence- Alpes- Côte d'Azur 1- à ne pas « faire concurrence, directement ou indirectement aux Sociétés et au Groupe TYCO entendu comme formé de toutes Les Sociétés sous contrôle commun avec, ou contrôlées par, ou contrôlant TESH (la S. A. Tyco European Security Holding), que ce soit en qualité de propriétaire, d'associé, de mandataire, de représentant, d'employé, de consultant, et conseiller à un quelconque autre titre » et 2- à ne pas « agir d'une quelconque manière qui puisse avoir pour conséquence de détacher de l'une quelconque des Sociétés du Groupe, la clientèle ou les fournisseurs qui lui sont attachés » ; que la violation de la clause de « non- concurrence » insérée dans l'acte de cession du 18 janvier 2001 résulte à l'évidence des faits qualifiés ci- dessus d'actes de concurrence déloyale (la constitution par les frères B... d'une société concurrente : la S. A. R. L. « La Sécurité », leur embauche par une société concurrente : la S. A. R. L. IRIS Sûreté Saint Paul, l'intérêt qu'ils ont eu au fonctionnement d'une société concurrente : la S. A. R. L. « La Protection ») ; que la S. A. Tyco European Security Holding qui subit la violation de la clause de non- concurrence est en droit d'obtenir la réparation de son préjudice qui peut être évalué à la dépréciation de la valeur économique de l'entreprise dont elle a pris le contrôle en acquérant les parts sociales de la société SPS pour un prix total de 5. 896. 800 francs ; que cette dépréciation affectant la valorisation de l'entreprise doit s'apprécier par rapport à la déperdition de clients et par rapport à la valeur totale de cession ; que le protocole de cession mentionnait expressément que la société SPS comptait 375 connexions clients (une liste des contrats de télésurveillance mentionnant le nom de chaque client avec le montant annuel de la redevance étant annexée au Protocole) ; qu'il y a lieu de fixer à 200. 000 € (ou 1. 311. 914 francs) le montant des dommages- et- intérêts réparant le préjudice résultant de la violation de la clause de non- concurrence qui a eu pour effet en détournant une centaine de clients d'amoindrir la valeur économique de l'entreprise et donc des parts sociales de la société SPS ; qu'en allouant une indemnisation distincte à la S. A. ADT France venant aux droits de la S. A. ADT Télésurveillance et à la S. A. Tyco European Security Holding, il n'est pas réparé deux fois le même préjudice ; qu'un préjudice distinct dans ses éléments constitutifs est né dans le patrimoine de la S. A. ADT Télésurveillance et dans celui de la S. A. Tyco European Security Holding ; que la S. A. ADT Télésurveillance, filiale de la S. A. Tyco European Security Holding, qui a absorbé à effet au 1er octobre 2001 la société SPS, aurait pu réclamer réparation au titre de la violation de la clause de non- concurrence dont elle bénéficiait, l'engagement étant souscrit au profit des Sociétés du Groupe TYCO, contrôlées par la S. A. Tyco European Security Holding et donc de la S. A. ADT Télésurveillance ;
Attendu qu'une mesure de publication contribuera à assurer la pleine réparation du préjudice subi par la S. A. Tyco European Security Holding et par la S. A. ADT Télésurveillance aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la S. A. ADT France, en ce qu'elle informera la clientèle concernée des agissements déloyaux de Monsieur Jean- Paul B..., de Monsieur Christophe B... et de la S. A. R. L. « La Sécurité » ;
Attendu que l'ordonnance de référé rendue, le 3 novembre 2003, par la Présidente du Tribunal de Commerce de Paris ne peut être confirmée, comme il est demandé par la S. A. ADT France et par la S. A. Tyco European Security Holding dès lors qu'elle visait au respect de la clause de non- concurrence qui est expirée, le 18 janvier 2006 ; que l'instance est devenue sans objet ; qu'au demeurant il n'était pas possible de confirmer une décision rendue par une juridiction déclarée incompétente territorialement ;
Attendu que l'équité commande de faire application de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile ; que les parties tenues aux dépens devront payer à chacune des sociétés intimées la somme de 6. 000 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, pour l'ensemble des trois procédures jointes ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE à la date indiquée à l'issue des débats, conformément aux articles 474 alinéa 1 et 450 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile,
Vu les deux ordonnances de jonction d'instances en date du 18 janvier 2007.
Reçoit l'appel de Monsieur Jean- Paul B..., de Monsieur Christophe B... et de la S. A. R. L. « La Sécurité » à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal de Commerce d'Antibes, le 9 septembre 2005 comme régulier en la forme.
Au fond, réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau, constate que la S. A. Tyco European Security Holding et la S. A. ADT France venant aux droits de la S. A. ADT Télésurveillance n'ont pas justifié de déclarations de créance entre les mains du liquidateur judiciaire de la S. A. R. L. « La Protection ».
Met hors de la cause Maître Gilles Y..., ès- qualités.
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande formée par la S. A. Tyco European Security Holding et par la S. A. ADT Télésurveillance qui est devenue sans objet et qui tendait au respect de la clause de non- concurrence expirée le 18 janvier 2006.
Condamne in solidum Monsieur Jean- Paul B..., Monsieur Christophe B... et la S. A. R. L. « La Sécurité » à porter et payer à la S. A. ADT France venant aux droits de la S. A. ADT Télésurveillance la somme de 100. 000 € et celle de 20. 000 € à titre de dommages- et- intérêts avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement en date du 9 septembre 2005 et celle de 6. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour l'ensemble de la procédure des trois instances jointes.
Condamne in solidum Monsieur Jean- Paul B..., Monsieur Christophe B... et la S. A. R. L. « La Sécurité » à porter et payer à la S. A. Tyco European Security Holding la somme de 200. 000 € à titre de dommages- et- intérêts avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt et celle de 6. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour l'ensemble de la procédure des trois instances jointes.
Ordonne la publication du présent arrêt aux frais de Monsieur Jean- Paul B..., de Monsieur Christophe B... et de la S. A. R. L. « La Sécurité » dans deux journaux ou périodiques au choix conjoint de la S. A. ADT France et de la S. A. Tyco European Security Holding, sans que le coût d'une insertion puisse dépasser 2. 000 €.
Condamne in solidum Monsieur Jean- Paul B..., Monsieur Christophe B... et la S. A. R. L. « La Sécurité » aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Paul MAGNAN, sur son affirmation de droit, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT