COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
6o Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 27 MARS 2008
No 2008 /
Rôle No 07 / 02713
Clément Honoré X...
C /
Thierry Y...
Louis Y...
Françoise Z...
MINISTERE PUBLIC
Grosse délivrée
le :
à : SCP ERMENEUX
SCP MAYNARD
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 17 Mai 2005 enregistré (e) au répertoire général sous le no 03 / 6087.
APPELANT
Monsieur Clément Honoré X...
né le 11 Mars 1935 à CAGNES SUR MER (06800),
demeurant ...
représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY-LEVAIQUE, avoués à la Cour,
assisté par Me VANZO D'ORTOLI et REBIBOU, avocat au barreau de
INTIMES
Monsieur Thierry Y...
né le 10 Février 1964 à MARSEILLE (13000),
demeurant Chez M. B... Olivier-...
représenté par la SCP MAYNARD-SIMONI, avoués à la Cour,
assisté par Me Bernard SIVAN, avocat au barreau de NICE
Monsieur Louis Y...
demeurant ...
représenté par la SCP MAYNARD-SIMONI, avoués à la Cour
Madame Françoise Z...
née le 27 Février 1947 à NICE (06000),
demeurant ...
représentée par la SCP MAYNARD-SIMONI, avoués à la Cour
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée
*- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2008 en Chambre du Conseil. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Claire FALCONE, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Marie Claire FALCONE, Président
Monsieur François FILLERON, Conseiller
Monsieur François BOISSEAU, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Marie-Sol ROBINET.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2008.
Signé par Madame Marie Claire FALCONE, Président et Madame Marie-Sol ROBINET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ SUCCINCT DU LITIGE
M Thierry Y..., né le 10 février 1964, a été légitimé par le mariage de sa mère avec M Louis Y..., le 29 octobre 1964 qui l'a reconnu le même jour.
Par actes des 12 et 16 septembre 2003, il a contesté sa filiation légitime à l'égard de ce dernier et a engagé une action en recherche de paternité à l'égard de M Clément X....
Par jugement du 17 mai 2005, le tribunal de grande instance de Grasse a déclaré l'action recevable par application de l'article 334-9 du code civil interprété à contrario ; sur le fond, le tribunal a ordonné une expertise comparée des sangs des parties.
M X... a fait appel de ce jugement.
Son recours immédiat a été déclaré irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 décembre 2005.
M X... a ensuite refusé de se soumettre à l'expertise de sorte que l'expert a déposé un rapport de carence le 12 avril 2006.
Par jugement du 16 janvier 2007, le tribunal de grande instance de Grasse a annulé la reconnaissance de paternité faite par M Louis Y... lors de son mariage avec la mère de l'enfant, Mme Françoise Z..., le 29 octobre 1964, a dit que M Clément X... était le père naturel de M Thierry Y..., que ce dernier porterait désormais le nom de son père, X....
M X... est appelant de ce jugement et de celui rendu le 17 mai 2005.
Dans ses dernières écritures du 13 juin 2007, il demande à la cour d'appel d'infirmer les jugements, de déclarer les demandes irrecevables car prescrites pour avoir été engagées plus de deux ans à compter de la majorité de M Thierry Y... ; subsidiairement il conteste sa paternité et l'existence d'une possession d'état d'enfant naturel à son égard de l'appelant ; il conclut au rejet des demandes ; il sollicite des dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par conclusions du 29 octobre 2007, M Thierry Y..., demande la confirmation des décisions dans toutes leurs dispositions.
Il demande l'allocation de dommages et intérêts de 15. 000 € pour résistance abusive.
M Louis Y..., qui ne conteste pas sa non paternité, Mme Françoise Z..., concluent le 24 décembre 2007 à la confirmation des décisions, comme le ministère public.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 31 janvier 2008.
MOTIFS DE LA DÉCISION
M Thierry Y... a été reconnu par M Louis Y... le jour du mariage de ce dernier avec sa mère, Mme Z... et il a été légitimé par le mariage de ces derniers.
Aux termes de l'article 338 ancien applicable au litige engagé par actes des 12 et 16 septembre 2003, tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, une reconnaissance rend irrecevable l'établissement d'une autre filiation naturelle qui la contredirait.
M Thierry Y... a engagé dans le même temps une action en contestation de reconnaissance et de légitimation et une action en recherche de paternité.
Selon l'article 334-9 ancien du code civil, si l'action en contestation de paternité peut être engagée dans le délai de trente ans en application de l'article 311-7, toute demande en recherche est irrecevable quand l'enfant a une filiation légitime déjà établie par la possession d'état.
Ces dispositions invoquées par M X... pour s'opposer à la demande ne sont pas applicables en l'espèce.
L'article 334-9 suppose en effet que l'enfant a une filiation légitime déjà établie ; or la filiation légitime implique que l'enfant ait été conçu ou soit né pendant le mariage ce qui n'est pas le cas d'un enfant naturel légitimé comme en l'espèce.
Ainsi M Thierry Y... dont la filiation légitime résulte uniquement de son acte de naissance pouvait, par application de l'article 334-9 du code civil interprété à contrario, engager une action en recherche de paternité, après avoir demandé l'annulation de la reconnaissance faite par M Louis Y..., dans le respect de l'article 338 du code civil.
Pour prononcer l'annulation de la reconnaissance de paternité faite par M Louis Y..., le tribunal a relevé que ce dernier a connu la mère de l'enfant, en juillet 1964, après la naissance de ce dernier, qu'il a épousé Mme Z... et légitimé son enfant, alors âgé de plus de huit mois en toute connaissance de cause.
De ce chef la demande doit être accueillie.
Mais l'action en recherche de paternité fondée sur les dispositions des articles 340 et suivants du code civil, terrain sur lequel s'est placé M Y... Thierry, est enfermée dans un délai de deux ans qui suivent la majorité de l'enfant, si comme en l'espèce elle n'a pas été exercée pendant sa minorité par application de l'article 340-4 du code civil.
Or, M Y... Thierry a engagé son action par actes des 12 et 16 septembre 2003, alors qu'il est devenu majeur le 10 février 1982.
Elle est donc prescrite et la demande, irrecevable, ne peut être accueillie.
Le jugement est infirmé de ce chef.
L'action engagée par M Thierry Y... à l'égard de M X... ne revêt pas un caractère abusif et ne peut donner lieu à l'octroi de dommages et intérêts.
L'équité commande que M X... conserve à sa charge les sommes par lui exposées non comprises dans les dépens qui sont à la charge de M Y... Thierry qui succombe.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant en audience publique, contradictoirement, après débats non publics.
Recevant l'appel,
Au fond,
Confirme le jugement en ce qu'il a annulé la reconnaissance de M Thierry Y..., né le 10 février 1964, faite le 29 octobre 1964 par M Louis Y... et la légitimation par mariage célébré le même jour qui s'en est suivie,
Ordonne la transcription du dispositif de l'arrêt sur les registres de l'état civil,
Infirme pour le surplus le jugement,
Déclare irrecevable l'action en recherche de paternité,
Dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts et à application, en première instance et en cause d'appel, de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M Thierry Y... aux entiers dépens, de première instance et d'appel,
Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,