COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
1o Chambre B
ARRÊT EN MATIÈRE RÉGLEMENTAIRE
DU 21 MARS 2008
No 2008 / 7D
Rôle No 07 / 20363
Jean- Louis X...
C /
L' ordre des avocats au barreau de Toulon
En présence du Procureur Général
Grosse délivrée le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Décision rendue par le conseil de l' ordre des avocats au barreau de Toulon en date du 26 novembre 2007.
APPELANT
Monsieur Jean- Louis X...
né le 13 juin 1958 à Toulon, demeurant ...
représenté par Me Vincent PENARD, avocat au barreau d' Aix- en- Provence
INTIMÉ
L' ordre des avocats au barreau de Toulon
Palais de Justice- BP 508- 83041 Toulon cedex 9
représenté par Me Jean- Pierre Z..., avocat au barreau de Toulon
En présence du Procureur Général
près la cour d' appel- Palais Monclar-
13616 Aix- en- Provence Cédex
représenté par Monsieur Achille KIRIAKIDÈS Substitut général
COMPOSITION DE LA COUR
L' affaire a été débattue en audience solennelle le 29 février 2008 tenue dans les conditions prévues par l' article R 212- 5 du code de l' organisation judiciaire devant la Cour composée de :
Monsieur Jean- Pierre ATTHENONT, Premier Président
Monsieur François GROSJEAN, Président
Madame Marie- Annick VARLAMOFF, Conseiller
Madame Marie- Françoise BREJOUX, Conseiller
Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT
Ministère Public : présent uniquement lors des débats
ARRÊT
Contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 mars 2008.
Signé par Monsieur Jean- Pierre ATTHENONT, Premier Président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Monsieur GROSJEAN, Président, est entendu en son rapport,
Maître PENARD est entendu en sa plaidoirie aux intérêts de Monsieur Jean- Louis X...,
Maître Z..., représentant l' ordre des avocats au barreau de Toulon, est entendu en ses observations,
Monsieur KIRIAKIDÈS, Substitut général, est entendu en ses conclusions,
Sur quoi, les débats sont déclarés clos et l' affaire mise en délibéré.
Les parties sont avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 mars 2008.
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M. Jean- Louis X... a déposé le 17 septembre 2007 auprès du bâtonnier de l' ordre des avocats du barreau de Toulon une demande d' inscription au tableau des avocats de ce barreau avec dispense de formation théorique et pratique et du certificat d' aptitude à la profession d' avocat
en tant que juriste d' entreprise.
Par décision en date du 26 novembre 2007, le conseil de l' ordre des avocats du barreau de Toulon a rejeté cette demande.
Par lettre recommandée avec avis de réception postée le 11 décembre 2007 à l' adresse de la cour d' appel, M. X... a formé recours contre cette décision qui lui avait été notifiée le 30 novembre 2007.
M. X... a comparu devant la cour, assisté de M. PENARD, avocat, par lequel il a fait valoir sa qualité de juriste d' entreprise au sens de l' article 98- 3o du décret du 27 novembre 1991.
Il se prévaut de douze années d' exercice professionnel de juriste en tant que directeur de contentieux au sein de la société marseillaise de crédit S. M. C., groupe de Saint Tropez représentant plusieurs agences, et ce de 1987 à 1998
Il estime remplir les conditions requises pour être inscrit au barreau, même si son expérience professionnelle de juriste est antérieure à l' obtention de sa maîtrise en droit.
M. le procureur général a conclu à la confirmation de la décision, faisant observer que M. X... était employé de banque et non juriste d' entreprise, et ce quand bien même son employeur le considérait comme juriste au sein de son entreprise.
M. le procureur général estime qu' un juriste d' entreprise doit être titulaire d' un diplôme universitaire de droit et que la pratique professionnelle de M. X... antérieure à son inscription en faculté et à l' obtention de sa maîtrise ne peut pas être prise en considération à ce titre.
M. le bâtonnier des avocats de Toulon, représenté par M. Z..., ancien bâtonnier et membre du conseil de l' ordre, a présenté ses observations, étant d' avis que la dérogation de formation et de certificat d' aptitude à la profession d' avocat accordée à un juriste d' entreprise suppose une expérience pratiquée sur la base d' un niveau d' études juridiques suffisant et préalable.
MOTIFS,
L' article 98 du décret no91- 1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d' avocat prévoit au nombre des cas de dispenses de formation théorique et pratique et du certificat d' aptitude à la profession d' avocat pour être inscrit au barreau : 3o les juristes d' entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d' une ou de plusieurs entreprises.
La pratique professionnelle dont se prévaut M. Jean- Louis X... est antérieure à ses études juridiques universitaires et à sa maîtrise en droit, obtenue en 2006.
Le texte de l' article 98- 3o du décret du 27 novembre 1991 n' impose pas que cette pratique professionnelle au sein du service juridique d' une ou de plusieurs entreprises soit antérieure à l' obtention du diplôme visé à l' article 11- 2o de la loi du 31 décembre 1971.
Il suffit que le requérant soit titulaire d' un tel diplôme lorsqu' il présente sa demande de dispense de formation théorique et pratique et du certificat d' aptitude à la profession d' avocat.
Le dossier présenté par M. X... permet de retracer sa carrière au sein de cet établissement bancaire.
M. X... a été recruté le 20 septembre 1978 par la Société Marseillaise de Crédit, alors qu' il n' avait pas de qualification particulière. Il a obtenu le 10 juillet 1980 le certificat d' aptitude professionnelle de banque, puis le 19 octobre 1984 le brevet professionnel d' employé de banque, et c' est sur la base de ce niveau d' études de brevet professionnel d' employé de banque, sans aucun niveau juridique universitaire, qu' il a été nommé au service contentieux de la Société Marseillaise de Crédit.
M. X... a été affecté le 20 octobre 1986 au service contentieux de l' agence de Toulouse et le 14 septembre 1987 au service contentieux du groupe de Saint Tropez.
D' après la lettre de Mme Y..., sous- directrice adjointe à la direction générale de la Société Marseillaise de Crédit, M. X... a exercé les fonctions de chef de service contentieux du 1er janvier 1990 au 19 juin 1998.
Les bulletins mensuels de salaires produits, pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1995 mentionnent les activités suivantes :
- chef de section du contentieux, agence de Toulouse, de janvier à août 1987, puis agence de Draguignan, de septembre 1987 à décembre 1988,
- sous chef de service du contentieux, agence mère de Draguignan, de janvier à décembre 1989,
- chef de service du contentieux, agence mère de Draguignan, de janvier 1990 à juillet 1995,
- sous- chef de service du contentieux, agence mère de Draguignan en août 1995, puis Toulon de septembre à décembre 1995.
La rémunération mensuelle moyenne de M. X... a varié de 8. 500 F à 14. 500 F au cours de ces années.
La durée de pratique professionnelle de M. Jean- Louis X... au sein du service du contentieux d' agence de la Société Marseillaise de Crédit est de plus de huit ans, comprenant quatre ans et demi, de janvier 1990 à juillet 1995, comme chef de service.
L' attestation de la direction juridique de la Société Marseillaise de Crédit du 12 septembre 2007
précise que l' activité de M. X... service contentieux consistait à " mener à bien des actions juridiques de recouvrement auprès des débiteurs (contentieux et pré- contentieux) et assurer la responsabilité dudit service ".
Un avocat au barreau de Draguignan, M. GRANIER a, par courrier du 18 septembre 2007, attesté avoir été en relations professionnelles avec M. X... du mois d' août 1987 au mois de septembre 1995 lorsqu' il était chef de contentieux à la société Marseillaise de Crédit à Draguignan, précisant " qu' il me donnait toutes instructions nécessaires au suivi des dossiers qu' il me transmettait ".
Le service contentieux d' agence était chargé des actions de recouvrement soit amiables, dites pré- contentieux, soit judiciaires. Pour les actions judiciaires, M. X... était en liaison avec un avocat.
La pratique professionnelle de M. X... correspond à une activité de recouvrement de créances au profit de l' entreprise, la Société Marseillaise de Crédit, avec un degré variable de responsabilité d' organisation du service.
Le service juridique de l' entreprise ou des entreprises au sein duquel le juriste d' entreprise doit avoir effectué huit ans au moins de pratique professionnelle, pour être dispensé de la formation théorique et pratique et du certificat d' aptitude à la profession d' avocat, doit être un service spécialisé dans l' étude des problèmes juridiques posés par l' activité de l' entreprise.
Un service de recouvrement de créances d' une entreprise n' est pas un service spécialisé dans l' étude des problèmes juridiques posés par l' activité de l' entreprise ; une pratique professionnelle au sein d' un tel service n' est pas une pratique professionnelle de juriste d' entreprise au sens de l' article 98- 3o du décret du 27 novembre 1991.
M. X... ne peut bénéficier à ce titre d' une dispense de formation théorique et pratique et du certificat d' aptitude à la profession d' avocat pour être inscrit au barreau.
PAR CES MOTIFS,
Statuant en audience solennelle, par arrêt contradictoire, en chambre du conseil, prononcé par mise à disposition au greffe,
Confirme la décision du conseil de l' ordre des avocats du barreau de Toulon en date du 26 novembre 2007.
LE GREFFIER LE PREMIER PRÉSIDENT