COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 06 MARS 2008
MZ
No 2008 / 185
Rôle No 07 / 02539
Bernard X...
C /
Jean- François Y...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 27 Octobre 2005 enregistré au répertoire général sous le no 02 / 03785.
APPELANT
Maître Bernard X...
membre de la SCP X...- ROLLAND
demeurant...- 83412 HYÈRES CEDEX
représenté par la SCP COHEN- GUEDJ, avoués à la Cour,
plaidant par Me Michel CLEMENT, avocat au barreau de TOULON
INTIMÉ
Monsieur Jean- François Y...
né le 18 Janvier 1939 à PARIS (75014), demeurant ...- 34090 MONTPELLIER
représenté par la SCP LATIL- PENARROYA- LATIL- ALLIGIER, avoués à la Cour,
plaidant par Me Alain SCHEUER substitué par Me Claire LEFEBVRE avocats au barreau de MONTPELLIER
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 30 Janvier 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Madame Catherine CHARPENTIER, Conseiller
Madame Martine ZENATI, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2008,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement rendu le 27 octobre 2005 par le Tribunal de Grande Instance de Toulon, qui a :
- mis hors de cause la S. A. SOTAL,
- dit que Monsieur Jean- François Y... avait qualité pour agir,
- déclaré recevable l'action de Monsieur Y... exercée à l'encontre de Maître X...,
- constaté la violation par Maître X... de l'obligation de conseil qui lui incombe,
- déclaré Maître X... responsable du préjudice causé à Monsieur Y..., et condamné à réparer l'entier préjudice subi par celui- ci,
- avant dire droit, ordonné une expertise aux fins de l'évaluer,
- débouté Maître X... de sa demande de dommages et intérêts,
- condamné Maître X... à payer à la S. A. SOTAL la somme de 500 €, et à Monsieur Y..., la somme de 1. 000 €, en application de dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- réservé les dépens,
Vu l'appel régulièrement interjeté par Maître Bernard X..., notaire associé,
Vu les conclusions déposées le 8 juin 2007 par l'appelant,
Vu les conclusions déposées le 27 novembre 2007 par Monsieur Jean- François Y...,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 janvier 2008.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que par acte reçu par Maître X... en date du 20 octobre 1987, la SNC LE TOPAZE a été constituée entre Messieurs Yves, Jean- François et Gaston Y... ayant pour objet l'achat de terrains, la vente par lots sous forme de lotissements, la construction et la vente d'immeubles ou la location d'immeubles qu'elle construira sur certains lots du lotissement ;
Attendu que pour le financement d'une opération de lotissement sur la commune de Hyères, la SNC LE TOPAZE a contracté un prêt auprès de la KANSALLIS BANK suivant acte reçu par Maître X... en date du 27 octobre 1987, d'un montant de 720. 000 écus, soit 5. 000. 000 fr, moyennant une inscription d'hypothèque sur les parcelles lui appartenant ;
Que par acte reçu par ce notaire en date du 16 février 1989, la SNC LE TOPAZE a signé une reconnaissance de dette au profit de la S. A. SOTTAL, pour un montant de 653. 000 fr représentant le montant des travaux de viabilité VRD et autres effectués sur le terrain sur lequel le lotissement devait être réalisé ; qu'audit acte, Monsieur Yves Y... représentant la société débitrice, s'est engagé à rembourser ladite somme de la manière suivante :
" 1o) Dans le cas où la KANSALLIS BANK maintient ses accords actuels avec la SNC LE TOPAZE après purge de la créance de la KANSALLIS BANK, la S. A. SOTTAL touchera 70 % du prix de vente des lots.
2o) Dans le cas où la KANSALLIS accepterait le nouveau tableau d'amortissement de sa créance proposé par la SNC LE TOPAZE, la S. A. SOTTAL touchera 80. 000 fr sur la vente de chaque lot jusqu'au remboursement de sa créance en principal et intérêts.
En tout état de cause, la totalité de la créance de la S. A. SOTTAL devra lui être remboursée avant 18 mois. "
Attendu que cette reconnaissance de dette était assortie d'une convention d'hypothèque en deuxième rang sur les mêmes parcelles affectées à la garantie du remboursement du prêt consenti par la KANSALLIS BANK ;
Attendu que par acte du 27 avril 1990 reçu par Maître X..., un avenant à la convention de crédit consenti le 27 octobre 1987 était signé entre la KANSALLIS BANK et la SNC LE TOPAZE, aux termes duquel l'échéance finale du prêt était fixée au 23 octobre 1991, et les modalités de remboursement définies en fonction des ventes des lots à intervenir ; qu'il y était notamment stipulé que sur chacune des trois prochaines ventes de lot du lotissement LE TOPAZE, KANSALLIS BANK consentirait mainlevée partielle de l'inscription d'hypothèque dont elle bénéficie à la condition notamment que la débitrice justifie de l'apport en compte courant de la société S. C. I. LES RESIDENCES DU TOPAZE de la somme de 150. 000 FR, ainsi que du paiement à la S. A. SOTTAL de 80. 000 fr et des intérêts courus par lot vendu ;
Attendu que Monsieur Jean- François Y..., agissant en qualité d'associé de la SNC LE TOPAZE, condamné par jugement définitif du Tribunal de Commerce de Toulon en date du 29 novembre 2000 à rembourser à la S. A. SOTTAL les sommes lui restant dues au titre de la reconnaissance de dette du 16 février 1989, fait grief à Maître X... de ne pas avoir respecté les engagements pris en se dispensant de remettre à la S. A. SOTTAL la somme de 80. 000 fr sur le prix de vente des trois derniers lots, en sorte que les poursuites ont pu être engagées à son encontre ;
Attendu qu'il ressort des pièces produites aux débats que par courrier en date du 30 octobre 1991, Maître X... écrivait au représentant SOTTAL qu'ensuite de la vente des lots no29, 36 et 37, un accord était intervenu en ce qui concerne la répartition les prix de vente à raison de 500. 000 fr à la KANSALLIS BANK et de 224. 800 fr à sa société ; que le 24 novembre 1991, la S. A. SOTTAL, entérinait cet accord par mention en marge du courrier du notaire, et le 26 novembre 1991 signait un acte de mainlevée de son inscription hypothécaire ; qu'ensuite de la vente du lot no30, le 20 mai 1992, la S. A. SOTTAL a consenti à la mainlevée de son inscription sur ce lot sans paiement le 5 octobre 1992, l'intégralité du prix ayant été adressé à la KANSALLIS BANK ; qu'il en a été de même à l'issue de la vente du lot no25, la S. A. SOTTAL acceptant par courrier du 9 juillet 1993 de donner mainlevée de son inscription sur ce lot alors que l'intégralité du prix a été versé au premier créancier inscrit, et de la vente du lot no24, dont la mainlevée a été consentie par la S. A. SOTTAL dans les mêmes conditions le 6 septembre 1993 ;
Attendu qu'il ressort d'un courrier émanant de Monsieur Yves Y... représentant la SNC LE TOPAZE que les termes de la répartition du prix du lot no25 était connu de lui ; que par courriers des 18 juin et 6 décembre 1993, il demandait à Maître X... de conserver les fonds provenant de la vente du lot no24 jusqu'à ce qu'il obtienne son accord sur les modalités du reversement à adopter ; que le 2 mars 1995, il donnait instruction au notaire de reverser le prix de vente du lot no24 à la KANSALLIS BANK ;
Attendu qu'il ressort de ces éléments que, si aucun acte authentique n'est venu postérieurement à l'avenant conclu entre la SNC LE TOPAZE et la KANSALLIS BANK le 27 avril 1990, authentifiant une nouvelle répartition des prix de vente des lots entre les deux créanciers, de nature à suspendre le recours envers le débiteur du créancier de second rang dans l'attente du règlement de sa dette, il n'en demeure pas moins qu'à l'issue de nombreuses interventions écrites du notaire, le remboursement des dettes à la SNC SOTTAL est intervenu en accord entre les deux créanciers inscrits, dans l'intérêt de la débitrice dès lors que la mainlevée des inscriptions hypothécaires était déterminante pour la réalisation des ventes et la libération des prix ; qu'à cet accord entre les créanciers s'est ajouté celui de Monsieur Yves Y..., dont la qualité de gérant au même titre de Monsieur Jean- François Y... aux termes des statuts de la société, lui conférait pouvoir pour représenter la SNC dans des opérations de gestion de ses finances et de l'apurement de ses dettes ;
Attendu qu'enfin, les éléments versés aux débats, tels que rappelés ci- dessus, ne permettent pas de caractériser que des retards dans le versement des sommes dues aux créanciers soient imputables au notaire, alors que chaque étape dans l'avancement de l'opération d'apurement des dettes était tributaire de la date de libération des fonds et de la formalisation des accords entre les représentants des deux créanciers sur leur répartition ;
Attendu dans ces conditions, qu'infirmant la décision entreprise, aucune faute ne peut être imputée dans la situation subie par Monsieur Jean- François Y..., associé et gérant d'une SNC dont le projet de lotissement a connu des vicissitudes suite au redressement judiciaire prononcé à l'encontre de Monsieur Yves Y... le 27 février 1995, converti en liquidation judiciaire le 6 novembre 1995 ; que par voie de conséquence, l'intimé sera débouté de l'ensemble de ses prétentions ;
Attendu qu'à défaut de démontrer que Monsieur Jean- François Y... ait agi à son encontre avec l'intention de nuire ou avec une légèreté blâmable assimilable au dol, Maître X... doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
Attendu que l'équité commande de faire bénéficier l'appelant des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe,
Infirme en toutes ses dispositions la décision entreprise,
Statuant à nouveau,
Déboute Monsieur Jean- François Y... de l'ensemble de ses demandes,
Condamne Monsieur Jean- François Y... à payer à Maître Bernard X... la somme de 3. 000 a en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Le condamne aux dépens, distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT