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06/03/2008 | FRANCE | N°06/18241

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 mars 2008, 06/18241


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE


1ère Chambre C


ARRÊT
DU 06 MARS 2008


No 2008 /
A. V.












Rôle No 06 / 18241






Kawther X...



C /


S. A. ECI COMMERCIAL






Grosse délivrée
le :
à :


SCP BOTTAÏ


SCP ERMENEUX








réf 0618241


Décision déférée à la Cour :


Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Inst

ance de NICE en date du 13 Octobre 2006 enregistré au répertoire général sous le No 06 / 415.




APPELANTE :


Madame Kawther X...

demeurant ...


...



représentée par la SCP BOTTAI- GEREUX- BOULAN, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Roland D'ORNANO, avocat...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1ère Chambre C

ARRÊT
DU 06 MARS 2008

No 2008 /
A. V.

Rôle No 06 / 18241

Kawther X...

C /

S. A. ECI COMMERCIAL

Grosse délivrée
le :
à :

SCP BOTTAÏ

SCP ERMENEUX

réf 0618241

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 13 Octobre 2006 enregistré au répertoire général sous le No 06 / 415.

APPELANTE :

Madame Kawther X...

demeurant ...

...

représentée par la SCP BOTTAI- GEREUX- BOULAN, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Roland D'ORNANO, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Maître Frédérique CAPITANI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉE :

S. A. ECI COMMERCIAL,
domiciliée chez AUDIT CONSULT
dont le siège est 15, rue du Cendrier-1211 GENEVE (SUISSE)

représentée par la SCP ERMENEUX- CHAMPLY- LEVAIQUE, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Erick BELZIC, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître Michaéla SCHREYER- SORIANO, avocat au barreau de NICE

*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Février 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Anne VIDAL, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Guy ROMAN, Président
Madame Anne VIDAL, Conseiller
Madame Nicole GIRONA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2008.

ARRÊT :

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2008,

Signé par Monsieur Guy ROMAN, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*- *- *- *- *- *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant acte d'huissier en date du 20 février 2006, la SA ECI Commercial, propriétaire de la villa TRIANON à Roquebrune Cap Martin, a fait assigner devant le Juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Nice Mme X..., propriétaire de la villa CYRNOS, voisine de la sienne, pour voir constater que les troubles causés par les opérations quasi- quotidiennes d'incinération de divers matériaux pratiquées sur sa propriété dépassaient les inconvénients normaux de voisinage et pour obtenir leur cessation sous astreinte, ainsi que le versement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par ordonnance en date du 13 octobre 2006, le Juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Nice a retenu que la SA ECI Commercial avait qualité pour agir comme propriétaire de la villa TRIANON et qu'elle avait intérêt à agir comme responsable des conditions de travail de ses salariés et afin de protéger son bien des risques d'incendie. Il a considéré que les opérations d'incinération relevées étaient importantes, répétées et dangereuses et qu'elles constituaient un trouble manifestement illicite et il a fait interdiction à Mme X... de procéder à toute opération d'incinération sur sa propriété Villa CYRNOS, sous astreinte de 1. 500 euros par infraction constatée. Il l'a également condamnée à payer à la SA ECI Commercial une somme de 1. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Mme X... a interjeté appel de cette décision suivant déclaration au greffe en date du 30 octobre 2006.

¤ ¤ ¤ ¤ ¤ ¤ ¤ ¤ ¤

Mme X..., aux termes de ses dernières conclusions en date du 1er février 2008, sollicite l'infirmation de la décision déférée et demande à la Cour :
• au principal, de dire que les troubles allégués ne sont pas illicites, qu'ils n'excédent pas les inconvénients normaux de voisinage et qu'il n'est pas rapporté la preuve d'un préjudice, de rejeter en conséquence les demandes de la SA ECI Commercial,
• subsidiairement, de réduire le montant de l'astreinte,
• de condamner la SA ECI Commercial à lui verser la somme de 2. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle explique que les villas sont très éloignées l'une de l'autre ; que la réglementation en matière d'incinération a été respectée ; qu'elle ne pratique pas l'écobuage mais a incinéré des plantes et matériaux dans un brûloir situé sur sa propriété, pendant une période limitée d'octobre 2006 à janvier 2007.

Elle soutient qu'il n'est démontré ni la fréquence des opérations, ni leur amplitude, ni les inconvénients pour le voisinage, ni la dangerosité des feux.

La SA ECI Commercial, suivant écritures déposées le 28 décembre 2007, conclut à la confirmation de la décision dont appel, sauf à porter le montant de l'astreinte à 5. 000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt, et sollicite la condamnation de Mme X... à lui verser une somme de 8. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle invoque les plaintes de ses salariés qui font état de gènes respiratoires et d'irritations des yeux dues aux fumées, ainsi que de dépôts de cendres dans sa propriété, et produit de nombreux constats d'huissier démontrant la multiplicité de ces opérations, entre octobre 2006 et janvier 2007, puis pendant l'hiver 2007 / 2008, mais également en plein mois de juillet.

Elle soutient que Mme X... ne respecte pas la réglementation en matière d'incinération, rappelant qu'est seul autorisé l'écobuage de petits végétaux en période verte, toute autre forme d'incinération étant interdite, notamment l'incinération de déchets de gros volume (matelas) ou d'ordures ménagères ; que Mme X... incinère ses déchets dans un local construit sans autorisation et qui ne répond pas à la réglementation en vigueur ; que son incinérateur est installé en bordure Nord Est de sa propriété, de sorte qu'elle n'en subit pas les inconvénients, alors que la Villa TRIANON est touchée.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que la SA ECI Commercial verse aux débats plusieurs constats d'huissier en date des 24 octobre et 30 novembre 2005 et du 10 octobre 2006 établissant l'existence de feux importants allumés sur la propriété de Mme X..., en bordure du jardin de la villa TRIANON, produisant des fumées denses et des projections de particules de cendres qui se répandent dans la cour, les annexes et les parties d'habitation ; que certains de ces constats mentionnent qu'à proximité du foyer se trouvent amoncelés divers matériaux hétéroclites et volumineux, déchets de chantier et plastiques en attente vraisemblable d'incinération, notamment un matelas (constats du 24 octobre 2005 et du 10 octobre 2006) ;

Que la SA ECI Commercial communique également en cause d'appel des constats des 22 et 24 janvier 2007, 14, 15, 21, 28, 29 novembre et 11 décembre 2007 ainsi que des 18, 22, 24, 25 et 28 janvier 2008 établissant que les opérations d'incinération sont fréquentes et persistantes ;

Que plusieurs salariés de la SA ECI Commercial attestent des inconvénients sur leur santé et sur leur activité des feux allumés par Mme X... sur sa propriété : gènes respiratoires, irritations des yeux, odeurs de brûlé, dépôts de cendres sur les voitures et dans le jardin ; qu'ils ajoutent avoir été témoins d'une opération d'écobuage dans la nuit du 9 au 10 juillet et dans la journée du 21 juillet 2006 ;

Attendu que, pour obtenir la réformation de l'ordonnance déférée, Mme X... prétend, d'une part, qu'elle ne pratique que des opérations d'incinération et non d'écobuage, rendues nécessaires par l'entretien de sa vaste propriété et respectant la réglementation en vigueur, d'autre part, que les feux allumés ne constituent ni un risque d'incendie, ni un trouble anormal de voisinage ;

Attendu que la réglementation en vue de prévenir les incendies de forêts telle qu'établie par l'arrêté préfectoral 2002-343 du 19 juin 2002 interdit strictement toute incinération, écobuage, feu de camp... en période rouge, c'est à dire entre le 1er juillet et le 30 septembre de chaque année et pendant des périodes mobiles édictées par arrêté préfectoral spécifique en fonction de conditions météorologiques exceptionnelles, et n'autorise l'incinération et l'écobuage en période verte que sous certaines conditions précises ;

Que l'incinération est admise uniquement pour les végétaux coupés par les propriétaires ou leurs ayants- droit et que les entassements de végétaux à brûler ne doivent pas dépasser 1, 5m de diamètre et 1m de hauteur, ce qui interdit l'incinération de gros végétaux ;

Que l'écobuage, constitué de l'incinération de petits végétaux sur pied, herbes et broussailles, ne peut avoir lieu qu'avec l'autorisation préalable du maire et après consultation du chef des sapeurs pompiers et de l'agent de l'office national des forêts ;

Qu'il en ressort que c'est en violation de la réglementation que Mme X... a procédé à des opérations d'écobuage en plein mois de juillet et à l'incinération de gros matériaux ou de déchets, même en période verte ;

Attendu qu'il est avéré, à la lecture des témoignages et à l'examen des constats d'huissier, que malgré la distance entre les villas TRIANON et CYRNOS, la SA ECI Commercial subit des désagréments importants et répétés résultant des foyers allumés de manière quasi- journalière en hiver en limite Nord Est de la propriété CYRNOS et en bordure de son fonds ;

Que, s'il entre dans les inconvénients normaux de voisinage de subir, de temps à autre, des fumées en provenance des opérations ponctuelles d'écobuage ou d'incinération de végétaux pratiquées sur le terrain limitrophe, tel n'est pas le cas des incinérations massives et fréquentes opérées par le personnel de Mme X... sur son fonds lesquelles provoquent des inconvénients pour la santé et des nuisances particulièrement désagréables dans ce secteur résidentiel de luxe, auxquels s'ajoute un danger potentiel d'incendie dans un environnement boisé ;

Attendu que c'est donc à juste titre que le premier Juge a constaté que les opérations d'incinération et d'écobuage reprochées à Mme X..., en ce qu'elles constituaient un trouble manifestement illicite et en ce qu'elles occasionnaient des nuisances excédant les inconvénients normaux de voisinage, devaient cesser ;

Que, toutefois, pour tenir compte de la nécessité, pour l'entretien de la propriété de la villa CYRNOS, de procéder au brûlage des végétaux, il y a lieu d'autoriser, pour l'avenir, Mme X... à faire procéder à l'incinération de végétaux exclusivement, un jour par mois en période verte, sous réserve de respecter la réglementation imposée par l'arrêté préfectoral du 19 juin 2002 ;

Que l'astreinte assortissant l'interdiction faite à Mme X... de procéder à des opérations d'incinération ou d'écobuage en dehors de cette prescription limitative, sera portée pour l'avenir à la somme de 5. 000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt, la Cour ayant noté que l'astreinte de 1. 500 euros fixée par le premier Juge n'avait pas été suffisamment dissuasive pour amener Mme X... à supprimer ou même à limiter ses opérations d'incinération au cours de l'année 2007 ;

Vu les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Vu l'article 696 du Code de Procédure Civile,

PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,
en matière de référé et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance déférée ;

Y ajoutant, pour l'avenir,

Fait interdiction à Mme X... de procéder ou faire procéder à des opérations d'incinération ou d'écobuage sur sa propriété, à l'exception d'une journée par mois calendaire, en période verte, destinée à l'incinération de végétaux exclusivement, et sous réserve de respecter la réglementation imposée par l'arrêté préfectoral du 19 juin 2002 ;

Porte l'astreinte assortissant l'interdiction faite à Mme X... à la somme de 5. 000 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision ;

Condamne Mme X... à payer à la SA ECI Commercial une somme de 1. 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel ;

La condamne aux dépens d'appel ;

En autorise le recouvrement direct par la SCP ERMENEUX CHAMPLY et LEVAIQUE, Avoués, dans les formes et conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 06/18241
Date de la décision : 06/03/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nice


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-06;06.18241 ?
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