ARRÊT AU FOND DU 28 FEVRIER 2008
No2008 /
Rôle No 07 / 07107
Ibrahim X...
C /
Aïcha Y...
Grosse délivrée le : à : SCP DE SAINT FERREOL SCP BOISSONNET (Réf. dossier)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 29 Janvier 2007 enregistré (e) au répertoire général sous le no 06 / 6951.
APPELANT
Monsieur Ibrahim X...
né le 31 Décembre 1976 à SEGUELA (COTE D'IVOIRE),
demeurant...-98124 MESSINA-99 ITALIE
représenté par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour,
assisté de Me Marie-Christiane KASSI, avocat au barreau de PARIS, Me Issa DIOMANDE, avocat au barreau de COTE D'IVOIRE
INTIMEE
Madame Aïcha Y...
née le 05 Octobre 1980 à BARGNY (60620),
demeurant...-13008 MARSEILLE
représentée par la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU, avoués à la Cour,
assistée de Me Sophie BOTTAI, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 Février 2008, en Chambre du Conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie Claire FALCONE, Président, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie Claire FALCONE, Président Monsieur François FILLERON, Conseiller Monsieur François BOISSEAU, Conseiller
Greffier présent lors des débats : Madame Marie-Sol ROBINET.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Février 2008
Signé par Madame Marie Claire FALCONE, Président et Madame Marie-Sol ROBINET Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ SUCCINCT DU LITIGE
M X... est appelant d'un jugement réputé contradictoire du 29 janvier 2007 rendu par le juge aux affaires familiales près le tribunal de grande instance de Toulon, qui a notamment fixé la résidence principale des enfants communs, Siami, née le 10 novembre 2000,7 ans et Nashata, née le 7 juillet 2002,5 ans, au domicile de la mère et réservé les droits du père ainsi que sa contribution à l'entretien des enfants.
Il a saisi le premier président prés la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour demander l'arrêt de l'exécution provisoire attachée à cette décision de droit.
Il a été débouté de sa demande par ordonnance du 29 juin 2007.
Dans ses dernières écritures du 4 février 2008, M X..., qui se domicilie en Italie,... à Messine, demande à la cour d'appel de prononcer la nullité de l'assignation délivrée le 29 novembre 2006 à Marseille, et par conséquent la nullité du jugement entrepris.
Subsidiairement, il demande à la cour d'appel de se déclarer incompétente pour connaître du litige au profit de la juridiction italienne, les enfants se trouvant avec leur père en Italie.
Plus subsidiairement, il demande à la cour d'appel de constater que la juridiction de Toulon n'était pas compétente mais celle de Marseille et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir.
Subsidiairement au fond, M X... demande l'infirmation de la décision, de fixer à son domicile la résidence principale des enfants, à défaut, de lui accorder un droit de visite et d'hébergement, usuel en la matière.
Mme Y..., domiciliée à Marseille, conclut le 1er février 2008 à la régularité de l'assignation et du jugement entrepris ; elle conteste la compétence de la juridiction italienne ; elle demande la confirmation du jugement et la condamnation de M X... au paiement de 50. 000 € à titre de dommages et intérêts par application de l'article 1382 du code civil en réparation du préjudice moral par elle subi ; elle demande que la contribution paternelle soit fixée à 1. 500 € par enfant et la suspension de tous droits pour le père tant qu'il n'aura pas remis les enfants à leur mère.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 6 février 2008.
MOTIFS DE LA DÉCISION
De l'union de M X... et de Mme Y... sont issues deux filles : Siami, née le 10 novembre 2000 et Nashata, née le 7 juillet 2002.
M X... est footballeur ;
Après avoir joué dans le club de la ville d'Istres, il a été transféré en Italie, à Livourne, à compter du mois d'août 2005.
Les parties sont convenues que Mme Y... et les enfants restaient en France ; M X... a loué un appartement à Marseille ... pour y loger sa famille ; il a également loué un appartement à Livourne ..., à compter du 17 octobre 2005 pour y résider et y recevoir sa famille.
Les parties se sont retrouvées au Sénégal au cours de l'été 2006, puis M X... qui se trouvait en Côte d'Ivoire avec les enfants communs, est retourné en Italie avec ces dernières. Depuis septembre 2006, Mme Y... n'a plus revu ses enfants ; elle soutient qu'ils ont été enlevés par leur père tandis que celui-ci fait valoir que Mme Y... n'a pas voulu rejoindre la nouvelle résidence de la famille fixée d'un commun accord selon lui, en Italie, à Livourne.
Par acte du 9 novembre 2006, Mme Y... qui s'est domiciliée chez son avocat,... à Toulon, a fait assigner M X... afin d'obtenir la fixation à son domicile, en France, de la résidence principale des enfants communs.
Elle a fait délivrer l'assignation en France, à Marseille ....
L'huissier de justice n'a pu signifier l'acte à personne, M X... étant absent et la personne présente ayant refusé l'acte ; il a constaté que le nom de M X... figurait bien sur le tableau des occupants et sur la boîte à lettres ; il a déposé l'acte en son étude après avoir laissé un avis de passage et adressé la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile.
M X... était absent et non représenté à l'audience du 11 décembre 2006 devant le juge aux affaires familiales de Toulon ; le jugement rendu par décision réputée contradictoire le 29 janvier 2007 lui a été signifié le 2 avril 2007 en Italie,... à Messine.
Aux termes des articles 654 et suivants du code de procédure civile, l'assignation doit être faite à personne et à défaut à résidence.
En l'espèce, il est établi par les pièces produites que si M X... était locataire de l'appartement situé à Marseille..., sa résidence se trouvait en Italie, à Livourne, lorsque l'assignation a été délivrée. Ainsi qu'il a été dit, M X... était locataire d'un appartement situé dans cette ville,..., selon le bail produit aux débats, depuis le mois d'octobre 2005.
Mme Y... connaissait parfaitement cette adresse, où elle admet s'être rendue avec les enfants au cours de l'année 2005-2006 ; elle avait d'ailleurs ouvert un compte bancaire à Livourne.
Elle ne conteste pas avoir reçu une lettre de M X..., datée du 7 octobre 2006, adressée en recommandé avec accusé de réception, signée par elle le 18 octobre 2006, faisant apparaître clairement l'adresse de l'expéditeur... à Livourne.
Cette lettre est ainsi rédigée : " (..) Tu sais bien que les enfants ont fait leur rentrée scolaire en Italie depuis le début du mois de septembre, mais tu ne m'as toujours pas dit quand tu comptes rejoindre ta famille à Livourne (Italie). Ici tout est prêt et si c'est la maison qui ne te plaît pas, on en trouvera une autre. Comme les filles vivent désormais en Italie, je ne vois plus la nécessité de garder l'appartement de Marseille. Je pense qu'on devrait résilier le bail à la fin du mois. J'attends de tes nouvelles rapidement ".
Dans ses écritures, en page 12, elle soutient que M X... a été avisé tant par elle que par sa famille de l'existence de l'assignation ; elle n'ignorait donc pas où il se trouvait et qu'en tout cas il ne résidait pas à Marseille ; bien plus elle a fait signifier la décision le 2 avril 2007 à Messine, à l'adresse du club pour lequel M X... exerçait son activité, de sorte que le lieu de travail de ce dernier était connu.
Ainsi, en faisant délivrer le 9 novembre 2006 l'assignation au domicile en France de M X..., alors qu'elle ne pouvait ignorer qu'il n'y demeurait pas et qu'il se trouvait à Livourne, en Italie, Mme Y... a procédé de façon déloyale, a violé le principe de la contradiction et privé M X... d'un procès équitable.
Pour justifier son comportement, Mme Y... ne peut valablement soutenir que M X... ne résidait plus à Livourne lorsqu'elle a fait délivrer l'assignation, alors qu'elle n'en justifie pas et que selon les pièces produites par l'appelant, il a été transféré dans le club de Messine, à compter du mois de janvier 2007.
C'est pourquoi il convient d'annuler l'acte introductif d'instance et par conséquent le jugement entrepris pour irrégularité de la saisine du premier juge.
Les parties sont renvoyées à mieux se pourvoir.
L'équité commande que M X... conserve à sa charge les sommes par lui exposées non comprises dans les dépens qui sont à la charge de Mme Y... qui succombe.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant en chambre du conseil, contradictoirement, après débats non publics.
Recevant l'appel,
Vu les articles 16 du code de procédure civile,6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950,
Prononce la nullité de l'assignation du 9 novembre 2006 et du jugement entrepris,
Ordonne le renvoi des parties à mieux se pourvoir,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme Y... aux dépens,
Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,