COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
4o Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 28 FEVRIER 2008
No 2008 / 88
Rôle No 05 / 17811
Sauveur X...
Elsa Y... épouse X...
C /
Olga Z... épouse A...
Irène- décédée A... épouse B...
Herman Nicolas B...
Rachelle Jeanne B... épouse C...
Herman B...
Géraldina Olga Margaretha B... épouse D...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 19 Mai 2005 enregistré au répertoire général sous le no 03 / 5815.
APPELANTS
Monsieur Sauveur X...
demeurant...- 06300 NICE
représenté par Maître Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
assisté de la SCP PARIS A. L., SEYBALD G. ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de NICE
Madame Elsa Y... épouse X...
demeurant...- 06300 NICE
représentée par Maître Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
assistée de la SCP PARIS A. L., SEYBALD G. ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de NICE
INTIMEES
Madame Olga Z... épouse A...
demeurant...- 83300 DRAGUIGNAN
représentée par la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués à la Cour,
assistée de Maître Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame Irène- A... épouse B... décédée
demeurant...- 83300 DRAGUIGNAN
représentée par la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués à la Cour
PARTIES INTERVENANTES
Monsieur Herman Nicolas B...
né le 14 Mars 1933 à ZWOLLE- HOLLANDE,
demeurant...- 83600 FREJUS
représenté par la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués à la Cour,
assisté de Maître Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame Rachelle Jeanne B... épouse C...
née le 10 Octobre 1958 à GRONINGEN (PAYS BAS),
demeurant...- 99135 PAYS BAS
représentée par la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués à la Cour,
assistée de Maître Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Monsieur Herman B...
né le 23 Juin 1967 à KINSHASSA,
demeurant...- 13000 HOLLANDE
représenté par la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués à la Cour,
assisté de Maître Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame Géraldina Olga Margaretha B... épouse D...
née le 27 Mai 1969 à CAGNES SUR MER (06800),
demeurant...- MINATO- KU
(JAPON)
représentée par la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués à la Cour,
assistée de Maître Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
L' affaire a été débattue le 27 Novembre 2007 en audience publique. Conformément à l' article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Brigitte BERNARD, Président, a fait un rapport oral de l' affaire à l' audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Brigitte BERNARD, Président
Madame Marie- Françoise BREJOUX, Conseiller
Monsieur Michel NAGET, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marie- Christine RAGGINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Février 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Février 2008,
Signé par Madame Brigitte BERNARD, Président et Madame Marie- Christine RAGGINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte authentique de donation- partage du 29 décembre 1978, Olga A... a donné la nue- propriété d' un magasin et d' une cave entrepôt au 41, Rue de la République à NICE (Alpes Maritimes) à sa fille Irène A... épouse B....
Par acte sous seing privé du 1er octobre 1987, Olga A..., agissant en son nom et pour le compte des hoirs A..., a donné à bail commercial une cave entrepôt à Elsa X.... Le bail devait alors être " complémentaire " d' un bail signé le 1er juillet 1983 pour un commerce de chaussures à l' enseigne " Chaussures Marc Olivier ".
Ce bail principal a été renouvelé le 13 novembre 1992 par Olga A... à compter du 01. 07. 1992. Par acte du 29 juin 2001, les époux X... ont demandé le renouvellement du bail. Ils ont alors reçu un acte d' huissier émanant d' Irène B... et refusant le renouvellement pour motifs graves et légitimes sans indemnité d' éviction.
Par acte du 26 septembre 2003, les époux X... ont assigné Olga Z... Veuve A... et Irène B... devant le Tribunal de Grande Instance de NICE pour juger :
- nul et non avenu le refus de renouvellement, prononcer le renouvellement du bail du 13. 11. 1992 à compter du 01. 07. 2001 et constater le renouvellement du bail du 1. 10. 1987 à compter du 01. 07. 2001.
Par acte du 20 avril 2004, Irène A... épouse B... a assigné les époux X... aux fins de faire juger que le bail du 1er octobre 1987 est entaché de nullité pour n' avoir été signé que par Olga A... et non par toute l' hoirie A..., ordonner l' expulsion des locataires et les condamner au paiement d' indemnités.
Par jugement du 19 mai 2005, le Tribunal de Grande Instance de NICE a :
- déclaré nuls les baux commerciaux et leur renouvellement,
- ordonné l' expulsion des époux X... et de tous occupants de leur chef des locaux litigieux, un mois à compter de la signification de la décision,
- condamné " in solidum " les locataires au paiement d' une indemnité d' occupation égale au montant du dernier loyer jusqu' à complète libération des lieux,
- débouté les époux X... de leur demande principale,
- condamné " in solidum " les époux X... à payer à Irène B... la somme de 1. 000 Euros au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- débouté Irène B... de sa demande de dommages- intérêts,
- dit n' y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné " in solidum " les époux X... aux entiers dépens.
Par acte du 09 septembre 2005, les époux X... ont fait appel de ce jugement.
Irène B... est décédée le 11 septembre 2006. Herman Nicolas B..., Rachel B... épouse C..., Herman B... et Géraldina B... épouse D... sont intervenus volontairement aux débats.
Par leurs dernières conclusions signifiées le 26 novembre 2007 et auxquelles il est renvoyé, les époux X... demandent à la Cour :
- de réformer le jugement en toutes ses dispositions,
- de déclarer prescrite la demande de nullité portant sur le bail du 1er octobre 1987 et sur celui du 13 novembre 1992 et leurs renouvellements,
- à titre subsidiaire :
- de juger que les appelants sont fondés à considérer Olga A... comme mandataire des Hoirs A..., à ce titre habilitée à signer les baux précités,
- concernant le magasin et arrière magasin
- de juger la réponse de Irène B... nulle et non avenue et de juger le bail renouvelé moyennant un loyer annuel égal au montant de l' ancien loyer avant ledit renouvellement,
- à titre subsidiaire :
- de juger que la réponse refusant le renouvellement est injustifiée et abusive,
- de juger que les appelants ont droit à une indemnité d' éviction égale au préjudice résultant de la perte de leur fonds de commerce ou droit au bail,
- d' ordonner une expertise supportée par les intimés,
- de juger que l' indemnité d' occupation due à compter du 1er juillet 2001 sera égale au montant de l' ancien loyer,
- concernant la cave entrepôt :
- de juger que les appelants bénéficient d' un bail renouvelé à compter du 1er juillet 2001,
- de condamner " in solidum " les intimés au paiement de la somme de 30. 000 Euros de dommages- intérêts en réparation du préjudice subi, celle de 3. 000 Euros au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.
A l' appui de leurs demandes, les appelants exposent que l' action est prescrite. Le droit du nu- propriétaire d' agir en nullité du bail, conclu sans son concours, serait prescrit si sa connaissance du bail remontait à plus de 5 ans. Or, Irène B... aurait donné dès 1972, une procuration générale à sa mère pour gérer les biens de l' indivision.
En outre, les deux renouvellements réalisés auraient été provoqués à l' initiative d' Olga A..., précisant agir en son nom personnel mais également pour le compte des hoirs A.... Celle- ci habitait d' ailleurs dans le même immeuble et sa fille n' aurait pu ignorer la présence des appelants.
Par ailleurs, Olga A... se serait toujours comportée comme unique interlocuteur agissant pour le compte de toute l' indivision. Les appelants, se fondant sur la théorie du mandat apparent, exposent être fondés à croire qu' elle était le mandataire commun de l' indivision. Les mandats de gestion confiés à des professionnels n' auraient d' ailleurs pas posé de problème, bien que conclus dans les mêmes conditions.
Les appelants rappellent que le seul motif grave et légitime invoqué concernait le second renouvellement. Le refus de renouvellement n' aurait été opposé que par Irène B... et non également par sa mère. Plus loin, le motif grave et légitime ne pourrait être retenu au vu de la nullité du bail.
Aucun refus de renouvellement n' aurait été opposé concernant la cave entrepôt.
Les prédécesseurs des appelants n' auraient pas conclu un bail à usage limité mais à usage tous commerces.
Olga A... ne pouvait ignorer, selon les appelants, l' existence des baux, ayant été assistée et ayant pu s' en rendre compte à de nombreuses reprises, notamment lors de la donation- partage.
Enfin, l' annulation n' emporterait pas que les appelants soient dépourvus de tout titre d' occupation.
Dans leurs dernières écritures signifiées le 07 novembre 2007 et auxquelles il est renvoyé, les consorts B... demandent à la Cour :
- de leur donner acte de leur intervention volontaire, de confirmer le jugement entrepris et de condamner solidairement les époux X... au paiement de la somme forfaitaire de 10. 000 Euros à titre de dommages- intérêts pour appel abusif, celle de 3. 500 Euros au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens.
A l' appui de leurs demandes, les intimés exposent que la sanction prévue par l' article 595, al. 4 du Code civil est bien la nullité. Le même raisonnement s' appliquerait alors aux baux commerciaux.
Ce serait aux preneurs, et non au bailleur disposant d' un titre de propriété authentique publié, de faire le nécessaire à l' encontre du rédacteur des baux. Les appelants auraient connu, de surcroît l' existence des hoirs A.... Un arrêt de la 3ème chambre civile en date du 4 février 1998 précise que " l' ignorance de la qualité d' usufruitier du cocontractant ne permet pas au preneur d' un fonds d' invoquer la théorie de l' apparence... ".
Irène B... aurait pris connaissance du bail du 1er octobre 1987 lors de l' assignation. En substituant à des baux notariés les 2 baux sous seing privés de 1987 et 1992, les preneurs auraient fait perdre aux bailleurs indivis le bénéfice de la copie exécutoire que confère un acte authentique.
Les appelants ne justifieraient d' aucun préjudice. Il s n' auraient pas procédé à la cession du droit au bail sachant que les deux baux commerciaux ont été signés en raison d' une précédente despécialisation.
L' instruction de l' affaire a été déclarée close le 27 novembre 2007.
En cours de délibéré, l' avoué des époux X..., Me MAGNAN, a adressé à la Cour le 30. 11. 2007, des pièces " qui se seraient échappées du dossier de plaidoirie de son avocat " soit des conclusions en réplique, signifiées le 19. 04. 2004, par les Consorts A... en première instance, et une jurisprudence de la Cour de Cassation 3 ème Chambre Civile du 12. 02. 1986 ;
La SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoué des Consorts B..., par courrier du 11. 12. 2007, a accepté que ces pièces soient versées aux débats, bien que non communiquées antérieurement, selon ses allégations et a produit elle- même les conclusions des Consorts A...- B... du 4. 02. 2005 devant le tribunal de grande instance de NICE ;
Il convient, en raison de l' accord des parties, d' admettre aux débats les pièces susvisées, communiquées par les parties à leur seule initiative, en cours de délibéré ;
Sur ce, la Cour
Considérant que la recevabilité de l' appel n' est pas critiquée ;
Considérant qu' Irène A... épouse B... était nue- propriétaire des biens immobiliers, sis à NICE, 41 avenue de la République, donnés à baux commerciaux à Elsa X... par Olga Z... veuve A..., en vertu d' un acte authentique de donation- partage du 29. 12. 1978, publié au Bureau des Hypothèques de GRASSE le 19. 03. 1979 et donc opposable aux tiers ;
Qu' avant le 29. 12. 1978, Irène A... épouse B... faisait partie avec sa mère Olga Z... veuve A... et son frère Jean- Baptiste A... d' une indivision successorale, à la suite du décès de son père en 1972, propriétaire, notamment des biens susvisés, comprenant un magasin, un arrière magasin et une cave- entrepôt ; qu' après le décès de sa mère le 21. 04. 2006, Irène A... épouse B... est devenue pleine propriétaire desdits biens mais est décédée, elle- même, le 11. 09. 2006 ;
Considérant qu' il y a lieu de recevoir l' intervention volontaire en appel d' Herman B..., de Rachelle C... née B..., de Herman B... et de Géraldine D... née B..., es- qualités d' héritiers d' Irène A... épouse B... ;
Sur la prescription des demandes en nullité du bail commercial du 13. 11. 1992 par voie d' exception, par conclusions du 19. 04. 2004 et du bail commercial du 1. 10. 1987 par voie d' assignation du 20. 04. 2004
Considérant que le nu- propriétaire d' un bien immobilier ne peut poursuivre la nullité du bail, qui a été consenti sur ce bien sans son accord par l' usufruitier, même en agissant par voie d' exception, si ce bail a été exécuté et que plus de cinq ans se sont écoulés depuis le jour où il a eu connaissance du contrat ;
Qu' il appartient au preneur, qui invoque cette prescription quinquennale, d' établir que le nu- propriétaire a eu connaissance de ce bail depuis plus de cinq ans, à la date de l' assignation, le point de départ de la prescription étant la date à laquelle le nu- propriétaire a eu connaissance du contrat ;
Considérant qu' il résulte des pièces versées aux débats que si Irène A... épouse B... n' a pu ignorer la situation locative des locaux, donnés à bail à Elsa X..., jusqu' à l' acte de donation- partage du 29. 12. 1978 et même au delà jusqu' au 30. 06. 1983, rien ne permet d' affirmer qu' elle ait été informée par sa mère, ni qu' elle ait eu connaissance d' une manière quelconque, des baux dont la nullité est demandée et de leur exécution, avant la demande de renouvellement du bail du 13. 11. 1992, présentée le 29. 06. 2001 et avant l' assignation, délivrée par les époux X... le 26. 09. 2003, pour le bail du 1. 10. 1987, comme les consorts B... le soutiennent ;
Considérant, en effet, qu' Irène A... épouse B... et son frère ont donné une procuration générale de gestion et de disposition des biens, de l' indivision successorale à leur mère le 2. 02. 1972 ; que cette procuration est visée dans le bail notarié initial du 8. 04. 1974, relatif au magasin et à l' arrière magasin, 41 avenue de la République à NICE, comme ayant été reçue aux minutes de l' Office Notarial de la SCP JACQUES ET CHANTAL PASQUALINI ;
Que cette procuration n' est pas produite aux débats mais que son énonciation, dans un acte authentique, vaut jusqu' à inscription de faux, s' agissant d' un fait que l' Officier Public a énoncé comme l' ayant accompli lui- même ;
Qu' Irène A... épouse B... savait ainsi que sa mère allait gérer notamment, pour son compte, les biens dépendant de la succession de son père et en particulier les locaux commerciaux, sis 41 rue de la République, où son père, puis sa mère, jusqu' en 1974, avaient exploité un commerce de chemiserie- confection- bonneterie ; qu' en 1972, Irène A... épouse B... avait 38 ans et vivait aux PAYS BAS, s' étant mariée en 1955 ;
Considérant que, par bail commercial notarié du 8. 04. 1974, Olga Z... veuve A... a loué aux époux E... le magasin et ses annexes, au 41 rue de la République à NICE, et a signé ce bail, qui expirait le 30. 06. 1983, en son nom et au nom des hoirs A..., en se prévalant donc de la procuration générale de 1972 ;
Considérant que les époux E... ont cédé leur fonds de commerce à Elsa Y... épouse X... par acte notarié du 26. 11. 1975, auquel est intervenue Olga Z... veuve A..., agissant tant en son nom personnel qu' au nom et comme mandataire de ses enfants, mention étant faite dans l' acte notarié, valant jusqu' à inscription de faux, que l' original des pouvoirs, délivrés par les enfants et notamment par Irène A... épouse B... le 27. 10. 1975 était annexé à l' acte ;
Qu' ainsi, Irène A... épouse B... n' ignorait pas que les époux X... étaient devenus titulaires de droits locatifs sur les locaux, sis 41 rue de la République à NICE, pour le temps restant à courir, soit jusqu' au 30. 06. 1983 ;
Considérant, par ailleurs, qu' Olga Z... veuve A... a consenti à Elsa X... un bail commercial sur un local cave entrepôt, par acte sous seing privé du 1. 10. 1978 ; que ce bail qualifié de " complémentaire du bail authentique du 8. 04. 1974 " est signé par Olga Z... veuve A..., agissant en son nom et pour le compte des hoirs A... ;
Que la nullité de ce bail n' est pas requise et qu' il est vraisemblable qu' Irène A... épouse B... en a eu connaissance, dans la mesure où, par acte notarié du 29. 12. 1978, elle est devenue seule nue- propriétaire des locaux commerciaux, magasin, arrière magasin, cave entrepôt du 41 avenue de la République, sa mère en demeurant usufruitière ;
Considérant que les époux X... ne démontrent pas que, postérieurement à cette donation partage, Irène A... épouse B..., laquelle, mariée à un pasteur aux PAYS BAS, n' avait aucune connaissance des affaires commerciales, ait été tenue informée par sa mère de l' exécution des baux passés et du renouvellement de ces baux ;
Qu' il est significatif, à cet égard, de relever que le bail principal de 1974 a été renouvelé le 1. 07. 1983 par Olga Z... veuve A..., agissant toujours en son nom et pour le compte des hoirs A..., malgré l' acte de donation- partage du 29. 12. 1978, puis le 30. 060. 1992, à la suite d' un congé avec offre de renouvellement délivré le 12. 12. 1991, par Olga Z... veuve A... à son seul nom ; que parallèlement, le bail du 30. 06. 1992 est signé par Olga Z... veuve A..., sans indication des hoirs ou de la nue- propriétaire, la bailleresse étant représentée par la SARL OFREP II IMMOBILIER ;
Que de même, le bail concernant l' entrepôt, arrivé à expiration le 30. 09. 1987, a été renouvelé, par acte sous seing privé le 1. 10. 1987 par Olga Z... veuve A..., agissant en son nom et pour le compte des hoirs A..., après un congé avec offre de renouvellement délivré par l' usufruitière seule ;
Que la mention que ce bail était " complémentaire du bail renouvelé le 1. 07. 1983 " ne constitue pas un indice de la connaissance par Irène A... épouse B... de ce bail, au vu de ce qui a été dit ci- avant, sur le renouvellement du bail du 1. 07. 1983 ;
Qu' enfin, il n' est pas établi qu' Irène A... épouse B... était jusqu' en 2001 proche de sa mère, dont elle aurait eu la confiance, malgré l' éloignement géographique, dans la mesure où, les baux et les congés ont été signés par Olga Z... veuve A..., sans référence même à l' acte de donation partage, après 1978 ;
Considérant, en conséquence, que les demandes en nullité des baux des 1. 10. 197 et 13. 11. 1992, ne sont pas prescrites, l' affirmation d' Irène A... épouse B..., selon laquelle elle n' a eu connaissance du bail du 13. 11. 1992 que par la demande de renouvellement, signifiée au mandataire de sa mère dont elle était devenue tutrice, et du bail du 1. 10. 1987, par l' assignation du 26. 09. 2003 délivrée par les époux X..., n' étant combattue par aucune pièce ;
Sur la nullité des baux des 13. 11. 1992 et 1. 10. 1987
Considérant que l' usufruitier ne peut, sauf autorisation de justice, sans le concours du nu- propriétaire, donner à bail un fonds ou un immeuble à usage commercial ; que l' infraction à cette règle de l' article 595 alinéa 4 du Code Civil n' est pas une inopposabilité mais la nullité du bail à l' égard du nu- propriétaire, qui peut invoquer celle- ci sans attendre la fin de l' usufruit ;
Considérant que c' est à juste titre, que le Tribunal a retenu que dans l' acte sous seing privé du 1. 10. 1987, portant sur la location de la cave entrepôt et expressément intitulé " bail complémentaire au bail (principal) renouvelé le 1. 07. 1983 ", Elsa X... était informée de ce qu' Olga Z... veuve A... n' était pas seule propriétaire des biens immobiliers, objets des baux litigieux, puisqu' elle agissait en son nom et pour le compte des hoirs A... ;
Que néanmoins, comme l' a souligné le Tribunal avec pertinence, Elsa X... a signé un nouveau bail concernant le local magasin pour 9 ans, à compter du 10. 7. 1992 jusqu' au 30. 06. 2001, avec Olga Z... veuve A..., représentée par son mandataire, la SARL OFREP II IMMOBILIER, et en outre, comme l' a dit le Tribunal, " au mépris de l' acte de donation partage du 29. 12. 1978, dûment publié le 19. 03. 1979 " ;
Considérant que c' est donc, à bon droit, que le Tribunal a estimé qu' Elsa X... " ne pouvait invoquer la croyance légitime à avoir traité avec la véritable propriétaire, alors qu' elle savait que la signataire du bail n' était pas seule propriétaire et qu' elle avait, dès lors, l' obligation de vérifier l' étendue de ses pouvoirs ", les premiers juges ajoutant, toujours justement, qu' il est constant que le fait que l' usufruitière se soit comportée, aux yeux d' Elsa X..., comme seule et unique propriétaire et ait perçu les loyers durant des années, ne caractérise pas la qualité de propriétaire apparent de l' usufruitier ;
Considérant, encore, que les époux X... ne sauraient se prévaloir de la procuration générale donnée le 2. 02. 1972 par Irène A... épouse B..., pour soutenir qu' Olga Z... veuve A... agissait, à leur yeux, comme mandataire apparente de sa fille, plus de 10 ans après ;
Que compte tenu de l' âge d' Olga Z... veuve A... en 1983 et encore plus en 1992, et de ce que cette dernière avait produit des mandats spéciaux de ses enfants pour agréer la cession du droit au bail à Elsa X... en 1975, cette dernière devait vérifier l' évolution des droits d' Olga Z... veuve A... et si elle pouvait toujours signer les baux au nom de ses enfants ;
Que la situation d' Olga Z... veuve A... était, au surplus, aisément vérifiable, par des recherches élémentaires, à la Conservation des Hypothèques et ce, d' autant qu' Elsa X... était assistée d' un Conseil lors du renouvellement du bail principal en 1992 ;
Considérant, ainsi, que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu' il a déclaré nuls les baux commerciaux des 1. 10. 1987 et 13. 11. 1992 à l' égard d' Irène A... épouse B... ;
Considérant que les demandes de renouvellement de ces baux ne peuvent produire d' effets, n' ayant pas été notifiées à la nue- propriétaire ;
Considérant que la nullité des baux des 1. 10. 1987 et 13. 11. 1992 ne saurait faire revivre les baux antérieurs ;
Qu' un bail renouvelé est un nouveau bail et qu' il n' y a pas de novation du bail à renouveler ;
Considérant, en conséquence, que les époux X..., communs en biens, seront déclarés occupants sans droit ni titre des locaux commerciaux, objets des baux annulés, à compter de la date de signification du présent arrêt ;
Que leur expulsion sera, à nouveau, ordonnée, et que les époux X... seront condamnés " in solidum " à payer aux consorts B... une indemnité d' occupation, égale au montant du dernier loyer mensuel, jusqu' à libération des lieux ;
Considérant qu' Olga Z... veuve A... n' a commis aucune faute en relation avec le préjudice dont se plaignent les époux X... ;
Qu' en revanche, les époux X... auraient pu être indemnisés par l' usufruitière, laquelle a concouru à la nullité des baux, en signant seule ces derniers, si cette dernière n' était pas décédée ;
Considérant que les consorts B... seront déboutés de leur demande de dommages intérêts pour appel abusif, le droit d' appel par les époux X... ayant été exercé de bonne foi, sans intention de nuire ;
Qu' enfin, les époux X... seront condamnés, " in solidum ", à payer aux consorts B..., 2 000 euros en application des dispositions de l' article 700 du Code de Procédure Civile en appel, la condamnation prononcée au même titre en première instance étant confirmée ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant en audience publique, contradictoirement
- Reçoit l' appel.
- Déclare recevable l' intervention volontaire d' Hermann Nicolas B..., de Rachelle C..., née B..., d' Herman B... et de Géraldine D..., née B..., ci- après les consorts B..., aux droits d' Irène A... épouse B..., décédée le 11. 09. 2006.
- Déclare non prescrites les demandes en nullité des baux commerciaux des 1. 10. 1987 et 13. 11019921 signés entre Olga Z... veuve A... et Elsa X....
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions non contraires au présent arrêt.
L' infirmant de ces seuls chefs et statuant à nouveau :
- Déclare irrégulières les demandes de renouvellement des baux des 1. 10. 1987 et 13. 11. 1992, annulés à l' égard de la nue- propriétaire, Irène A... épouse B..., cette dernière n' ayant pas été destinataire de ces demandes.
- Déclare Sauveur X... et Elsa X..., occupants sans droit ni titre des locaux commerciaux, magasin, arrière magasin et cave entrepôt, sis 41 avenue de la République à NICE, appartenant aux consorts B..., à compter de la date de signification du présent arrêt.
- Ordonne leur expulsion, ainsi que celles de tous occupants de leur chef, des locaux susvisés, deux mois après la date de la signification du présent arrêt, au besoin avec l' assistance de la Force Publique.
- Condamne " in solidum " les époux X... à payer aux consorts B... une indemnité mensuelle d' occupation égale au montant du dernier loyer mensuel, à compter de la date du présent arrêt jusqu' à complète libération des lieux.
- Condamne " in solidum " les époux X... à payer aux consorts B... 2 000 euros, en application des dispositions de l' article 700 du Code de Procédure Civile en cause d' appel.
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
- Condamne " in solidum " les époux X... aux dépens d' appel. Admet la SCP PRIMOUT- FAIVRE, avoués, au bénéfice de l' article 699. du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT