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07/02/2008 | FRANCE | N°06/21913

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 07 février 2008, 06/21913


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1o Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 07 FÉVRIER 2008

FG

No 2008/88













Rôle No 06/21913







SCP Rose Marie X... et Antoine X...








C/



SARL MONTE E MARE

Jean-Michel Y...






















Grosse délivrée

le :

à :













réf



Décision déférÃ

©e à la Cour :



Arrêt de renvoi de la Cour d'appel de Bastia en date du 20 décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 06/378C-BW, sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de Bastia en date du 14 mars 2006.





APPELANTS



LA SCP Rose Marie X... et Antoine X...


dont le siège est ...




Maître Antoine X.....

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1o Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 07 FÉVRIER 2008

FG

No 2008/88

Rôle No 06/21913

SCP Rose Marie X... et Antoine X...

C/

SARL MONTE E MARE

Jean-Michel Y...

Grosse délivrée

le :

à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de renvoi de la Cour d'appel de Bastia en date du 20 décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 06/378C-BW, sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de Bastia en date du 14 mars 2006.

APPELANTS

LA SCP Rose Marie X... et Antoine X...

dont le siège est ...

Maître Antoine X...

demeurant ...

représentés par la SCP COHEN - GUEDJ, avoués à la Cour,

plaidant par Me Antoine RETALI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMÉS

LA SARL MONTE E MARE

dont le siège est Lieu dit Pineto - 20290 LUCCIANA

représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour,

plaidant par Me Jean-Paul EON, avocat au barreau de BASTIA

Monsieur Jean-Michel Y...

né le 17 Décembre 1962 à BASTIA (20200), demeurant ...

représenté par Me Jean-Marie JAUFFRES, avoué à la Cour

plaidant par Me CAPOROSSI-POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 20 Décembre 2007 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Madame Catherine CHARPENTIER, Conseiller

Madame Martine ZENATI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Février 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Février 2008,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte reçu le 30 juillet 1998 MoAntoine X..., notaire associé de la SCP Antoine X... et Rose-Marie X..., titulaire d'un office notarial à Bastia, la société MONTE E MARE SARL a vendu à M.Jean-Michel Y..., en l'état futur d'achèvement, une maison individuelle sise parcelles AO 65 et 80 commune de LUCCIANA (Haute-Corse) dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté de LUCCIANA moyennant le prix de 1.050.000 francs ( 160.071,47 €). Le délai d'achèvement prévu au contrat était le 30 octobre 1998. Une somme de 892.500 francs (136.060,75 €), correspondant à 85% du prix de vente, était payée le jour de la signature de l'acte, dont 840.000 francs (128.057,17 €) provenant d'un prêt par la Société Générale.

Le 21 juin 2000 M.Jean-Michel Y... a fait assigner la société MONTE E MARE SARL et la Société Générale devant le tribunal de grande instance de Bastia pour voir prononcer la résolution de la vente pour inexécution par la venderesse de ses obligations, ordonner la restitution des sommes versées, le remboursement des frais liés au crédit, condamner la venderesse à lui payer 100.000 francs à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, déclarer le jugement commun à la Société Générale.

Le 26 novembre 2001 la société MONTE E MARE SARL a fait appeler en l'instance SCP Antoine X... et Rose-Marie X... et MoAntoine X..., notaire à Bastia, pour les voir condamner à la garantir de toutes condamnations.

Dans ses dernières conclusions devant le tribunal M.Jean-Michel Y... a demandé à titre principal l'annulation et non plus la résolution de la vente, pour défaut de qualité de la venderesse et violation des dispositions d'ordre public sur la vente en l'état futur d'achèvement, subsidiairement sa résolution, et la condamnation de la société venderesse à l'indemniser de divers postes de préjudices.

Par jugement en date du 14 mars 2006, le tribunal de grande instance de Bastia a :

-annulé l'acte authentique de vente du 30 juillet 1998 entre M.Jean-Michel Y... et la société MONTE E MARE SARL,

-déclaré la SCP X... et MoAntoine X... responsables de cette annulation,

-condamné la SCP X... et MoPOGGI ou la société MONTE E MARE SARL, selon que l'un ou l'autre est en possession du prix de vente, à rembourser à M.Jean-Michel Y... ce prix de 160.071,46 €,

-condamné la SCP X... et MoPOGGI à rembourser à M.Jean-Michel Y... la somme de 1.081,93 € au titre des frais notariés,

-condamné la SCP X... et MoPOGGI à payer à M.Jean-Michel Y...:

-la somme de 94.559,80 € au titre des charges de l'emprunt Société Générale,

-la somme de 30.000 € en réparation de la perte locative et du préjudice moral,

-la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

-renvoyé M.Jean-Michel Y... à l'exécution de son obligation de remboursement envers la Société Générale,

-condamné la SCP X... et MoPOGGI à payer à la société MONTE E MARE SARL la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

-débouté les parties du surplus de leurs demandes,

-condamné la SCP X... et MoPOGGI aux dépens.

Par déclaration de la SCP RIBAUT et BATTAGLINI, avoués près la cour d'appel de Bastia, en date du 5 avril 2006, la SCP X... et MoAntoine X... ont relevé appel de ce jugement, mais en intimant M.Jean-Michel Y... et la société MARE MONTE SARL mais sans intimer la Société Générale, qui n'est plus partie en cause d'appel.

Les appelants ont demandé à la cour d'appel de Bastia de se dessaisir du dossier au profit d'une cour d'appel limitrophe, par application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile, compte tenu de la qualité d'avocat au barreau de Bastia de M.Jean-Michel Y....

Par arrêt en date du 20 décembre 2006 la cour d'appel de Bastia a renvoyé l'affaire devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence en application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile.

Par leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 11 décembre 2007, MoAntoine X... et la SCP Rose Marie X... et Antoine X... demandent à la cour de :

-constater que l'action en nullité introduite par M.Jean-Michel Y... a pour conséquence de replacer les parties dans l'état où elles étaient avant la convention litigieuse,

-dire qu'en conséquence, les sommes réclamées ne peuvent être mises à la charge des appelants,

-débouter M.Jean-Michel Y... de sa demande en ce qu'elle est dirigée à son encontre,

-le condamner à leur payer la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens,

-subsidiairement, si la cour estimait que le paiement des sommes réclamées ne relevait pas de la restitution mais de l'indemnisation, dire que l'opération et les dommages qui en ont résulté pour M.Jean-Micehl Y... ne sont pas en relation certaine et adéquate avec le manquement reproché et que son intervention n'aurait pu de toute façon les éviter,

-le débouter, ainsi que la SARL MONTE E MARE et les condamner chacune à leur payer 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens,

-plus subsidiairement surseoir à statuer jusqu'à l'arrêt à intervenir dans la cause les opposant à la société MONTE E MARE SARL, et en ce cas réserver les dépens.

Les appelants font valoir qu'il n'a pas été définitivement jugé que MoAntoine X... aurait commis une faute qui serait à l'origine du litige.

MoAntoine X... rappelle que le choix d'une société civile d'attribution pour conduire le projet de ZAC a été fait en dehors de lui et qu'il s'agissait d'un choix incompatible avec une commercialisation. Il observe que si la forme juridique adaptée avait été trouvée par les réalisateurs de cette opération, il n'aurait pas eu à intervenir dans ce domaine. Il fait observer que son conseil de créer une société commerciale était judicieux , que cette société a été ensuite constituée sans son intervention et qu'il appartenait à ses associés de la gérer de manière à permettre la réalisation de l'opération.

MoAntoine X... et la SCP X... estiment que la SARL MONTE E MARE a commis de nombreuses erreurs, en ne respectant pas une réalisation par tranches, en ne prenant pas en compte les spécificités de la procédure publique.

Ils font observer que la question de l'absence de liaison entre la SCI et la SARL avait été posée dès le 29 juin 1999 avant le jugement du tribunal administratif du 28 juin 2001 et que la SARL n'a rien fait pour tenter de résoudre la difficulté. Ils estiment qu'il ne peut être tiré de ce jugement la conséquence que l'échec de l'opération n'aurait pas d'autre cause que le défaut de transfert d'attributions de la SCI à la SARL en matière d'aménagement. Ils font observer que la SARL MONTE E MARE a confondu toutes les missions, aménagement, promotion, construction, aurait procédé à une commercialisation inadéquate, avec une trésorerie insuffisante.

Ils notent que la SARL MONTE E MARE a arrêté le chantier en décembre 1998 et que pourtant elle avait indemnisé les acquéreurs dès le 1er août 1998 et a décidé d'abandonner alors que rien n'était compromis. Ils font observer que c'est l'arrêt des constructions, dû aux erreurs de la société MONTE E MARE qui a provoqué la saisine du tribunal administratif et non le jugement du tribunal administratif qui a provoqué l'arrêt du chantier. Ils considèrent que ce jugement est utilisé comme prétexte par les associés de la société pour justifier leurs propres erreurs.

Ils notent que les fonds correspondant à l'acquisition de M.Jean-Michel Y... n'ont été débloqués que grâce à l'attestation de la société Architectures Services dont le gérant est le frère de M.Jean-Michel Y..., au profit de la SARL MONTE E MARE dont le gérant est un autre frère de M.Jean-Michel Y....

Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 7 mai 2007, M.Jean-Michel Y... demande à la cour de confirmer purement et simplement le jugement, condamner la SCP X... GRIMALDI et MoPOGGI à payer à M.Jean-Michel Y... la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens.

M.Jean-Michel Y... fait observer que les appelants ont intégralement indemnisé les autres acquéreurs des préjudices subis et qu'il n'y a en conséquence pas lieu de surseoir à statuer.

Il estime que la création de la SARL MONTE E MARE à la suite de la SCI est à l'origine de l'échec de l'opération immobilière, que de surcroît l'acte de vente ne prévoyait pas de délai de livraison, pas de cahier des charges, pas de descriptif annexé, pas d'attestation d'achèvement des fondations de l'immeuble. Il considère que la SARL MONTE E MARE s'est trouvée dans l'impossibilité de livrer le lot objet de la vente, pour des motifs relevant de la responsabilité du notaire.

Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées 12 novembre 2007, la société MONTE E MARE SARL demande à la cour, sur le fondement des dispositions des articles 1147, 1171, 1382, 1383, 1108, 1109, 1110, 1131, 1599, 1601-1, 1601-2, 1601-3, 1601-4 et 1615 du code civil , L.261-9 à L.261-22 et R.261-1 à R.261-33 du code de la construction et de l'habitation, de:

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

-dire que MoPOGGI et la SCP X... sont responsables envers la SARL MONTE E MARE de l'échec de l'opération de la ZAC de PINETO,

-dire que MoPOGGI et la SCP X... assumeront les entières conséquences d'une annulation ou d'une résolution du contrat de vente du 30 juillet 1998 passé entre la SARL MONTE E MARE et M.Jean-Michel Y...,

-au principal, prononcer l'annulation du contrat de vente du 30 juillet 1998,

-subsidiairement prononcer la résolution du contrat de vente du 30 juillet 1998,

-en toutes hypothèses, dire que MoPOGGI et la SCP X... indemniseront la SARL MONTE E MARE des conséquences dommageables de l'annulation ou de la résiliation du contrat de vente,

-débouter M.Jean-Michel Y... de ses demandes,

-condamner MoPOGGI et la SCP X... à payer à la SARL Monte E Mare la somme de 10.000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

-les condamner aux dépens, avec distraction au profit de la SCP TOLLINCHI, PERRET-VIGNERON et BARADAT -BUJOLI-TOLLINCHI, avoués;

Sur le fond , la société MARE E MONTE expose que Mme Elise C... et M.Antoine Y... étaient propriétaires à LUCCIANA deux terrains contigus qui ne pouvaient être construits que par le biais d'une opération d'aménagement, sous la forme d'une zone d'aménagement concerté. Elle précise que ceux-ci ont constitué le 7 février 1996 entre eux une société civile immobilière pour aménager une ZAC, la SCI Monte E Mare société civile d'attribution et que cette société a passé le 12 février 1997 une convention avec la commune de LUCCIANA pour la réalisation de la ZAC de PINETO. Elle ajoute que, sur les conseils de MoAntoine X..., M.Antoine Y... et son épouse Marie D... ont constitué le 3 octobre 1997 une société commerciale la SARL Monte E Mare pour l'acquisition et l'aménagement de terrains et la construction d'immeubles dans cette ZAC, que des transferts de parcelles ont été opérés de la société civile à la SARL, et des apports de parcelles ont été faits à la SARL Monte E Mare, qui est ainsi devenue propriétaire de l'assiette foncière, a commencé à construire et à vendre.

Elle expose que MoAntoine X... a reçu les 28 et 29 octobre 1997 l'acte de vente par Mme C... à la société Monte E Mare SARL d'une parcelle de 1020 m² dans le périmètre de la ZAC et qu'ainsi la propriété a été retirée de la SCI Monte E Mare signataire de la convention de ZAC. Elle précise que MoAntoine X... a le 29 octobre 1997 reçu un acte d'apport par les époux Y... d'une autre parcelle, de sorte que la SCI n'était plus propriétaire du moindre mètre carré dans le périmètre de la ZAC en contradiction avec la convention passée avec la commune. Elle expose qu'un litige est apparu avec la commune de LUCCIANA du fait de la non réalisation d'équipements publics, avoir saisi le tribunal administratif de Bastia qui, par jugement du 28 juin 2001, a déclaré irrecevable la demande de la SARL Mare E Monte alors que rien n'indiquait au dossier qu'elle avait succédé à la société d'attribution ou aux droits que celle-ci détenait en qualité d'aménageur de la ZAC de PINETO.

Elle estime que la conséquence en a été la ruine de l'opération de ZAC alors que la convention d'aménagement est une convention intuitu personae et que seule la société civile à transparence fiscale pouvait s'en prévaloir et que cette erreur de personne a eu pour conséquences d'anéantir les effets juridiques de la convention de ZAC.

Elle considère que le notaire a eu la maîtrise totale de l'opération dans toutes ses composantes et a réalisés tous les actes nécessaires à celle-ci. Elle estime qu'il appartenait au notaire d'assurer l'efficacité juridique de l'opération

Sur la vente, elle considère que l'acheteur a eu son consentement vicié par erreur, alors que la SARL MONTE E MARE ne disposait pas du droit de diviser le terrain et de le vendre et qu'elle n'avait pas la qualité d'aménageur, qu'il y a erreur sur la personne de la venderesse qui n'était pas aménageur. Elle relève aussi une absence de cause ou cause illicite, la cause du contrat, la réalisation de la ZAC, ne pouvant se réaliser. Elle relève les inobservations des règles relatives aux ventes à construire.

La société MONTE E MARE SARL estime avoir respecté toutes les règles applicables de la procédure d'aménagement et de la vente à construire, n'avoir commis aucune erreur, aucune confusion des rôles, tenu une comptabilité adéquate, respecté une parfaite gestion financière, commercialisé correctement les biens, tenu à mener à terme le projet;

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 13 décembre 2007.

MOTIFS,

-I) Sur la demande de sursis à statuer :

Les appelants demandent à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de la décision définitive à intervenir dans la procédure parallèle en responsabilité dirigée par la société MONTE E MARE SARL contre eux.

La présente action a trait au principal à la validité et subsidiairement la résolution de l'acte de vente du 30 juillet 1998, et secondairement à l'action en garantie contre les appelants.

Cette procédure est totalement distincte de celle diligentée par la société MONTE E MARE SARL, dans laquelle M.Jean-Michel Y... n'est pas partie et qui ne lui est pas opposable.

La cour n'a pas à surseoir à statuer.

-II) Sur l'action de M.Jean-Michel Y... à l'encontre de la société MARE E MONTE SARL

Il y a lieu d'observer que la société MONTE E MARE SARL, co-contractante de M.Jean-Michel Y... ne s'oppose pas aux demandes de ce dernier, de sorte qu'un accord amiable aurait pu intervenir mais n'a pas été possible dans la mesure où les co-contractants veulent faire payer les conséquences de leur accord éventuel par le notaire rédacteur de l'acte.

M.Jean-Michel Y... demande à titre principal l'annulation de l'acte de vente du 30 juillet 1998 et à titre subsidiaire, sa résolution.

-Sur l'action en annulation de la convention:

M.Jean-Michel Y... demande de prononcer l'annulation de cet acte pour vice du consentement, absence de cause et pour violation des dispositions de la vente en l'état futur d'achèvement.

Au titre du vice du consentement, M.Jean-Michel Y... estime avoir été victime d'une erreur, d'une erreur sur une qualité substantielle et d'une erreur sur la personne.

La qualité substantielle doit concerner la chose objet de la vente.

L'acte désigne la chose objet de la vente comme : "sur le territoire de la commune de LUCCIANA, la construction qui sera édifiée consistant une fois terminée en une maison inidviduelle de type F 5 élevé d'un étage mansardé sur rez-de-chaussée, comprenant au rez-de-chaussée un séjour, une cuisine, une salle de bains, un wc, 2 chambres, un escalier, une terrasse devant le séjour et à l'étage mansardé deux chambres, une salle de bains d'appoint, une terrasse d'une superficie de figurant au plan cadastral sous les références de la zone UD 2 îlot 2 2 C et 2D, section AO no 65 pour une contenance de 02a 76 ca, section AO no 80 pour une contenance de 84 ca, ledit bien provenant de la division d'un tènement plus important inclus dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté ZAC de LUCCIANA, créée par arrêté municipal du 10 février 1997 et dont le programme d'aménagement et des équipements ont été approuvés".

Le fait que la société venderesse, non bénéficiaire de la convention d'aménagement, n'était pas en réalité en mesure de réaliser les opérations de cette zone d'aménagement concertée et ne pouvait pas aller jusqu'au bout de cet engagement de vente, ne signifie pas qu'il y a eu erreur sur la chose au moment de le conclusion de cet acte de vente. La société MONTE E MARE SARL s'est bien engagée à fournir ce que demandait M.Jean-Michel Y... lorsqu'il a signé cet acte. Il n'y a pas eu au moment de la formation du contrat d'erreur de la part de l'acquéreur sur une qualité substantielle de la chose, même s'il s'avérera plus tard que la venderesse sera dans l'incapacité d'honorer ce contrat.

L'article 1110 du code civil dispose en son alinéa deux que l'erreur n'est point une cause de nullité, lorsqu'elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a l'intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention.

La personne mentionnée à l'acte comme étant la venderesse est : "la société SARL MONTE E MARTE société à responsabilité limitée à capital variable ayant son siège à LUCCIANA 20290 lieudit Pineto, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Bastia sous le numéro B 414 094 185 numéro de gestion numéro de gestion 97 B 191, constituée aux termes de ses statuts dressés par acte sous seing privé en date à LUCCIANA du 3 octobre 1997, enregistré à Bastia le 3 octobre 1997 folio no 43 bordereau 939/3 ".

La personne venderesse était la propriétaire des parcelles vendues et le constructeur de la maison d'habitation.

La vérification des statuts de la SARL MONTE E MARE indiquent que cette société a pour objet: " l'acquisition d'un terrain à bâtir sis sur la commune de LUCCIANA (Haute-Corse) cadastré sous le numéro 1424 de la section C pour une superficie d'un hectare et sous le numéro 1425 de la section C pour une superficie de 60 a 51ca ..la création et l'aménagement d'une zone d'aménagement concerté..toutes opérations quelconques mobilières, immobilières ou financières ..".

Il appartenait à cette société de faire le nécessaire pour honorer ses engagements.

Il n'y a pas eu d'erreur sur la personne.

La cause du contrat est la réalisation d'une maison décrite sur une parcelle déterminée.

Ce contrat est causé.

Au titre des violations des règles de la vente en l'état futur d'achèvement, M.Jean-Michel Y... note l'absence de précision sur la date de livraison, le cahier des charges, la notice descriptive, l'attestation d'achèvement des fondations de l'immeuble.

L'article L.261-10 du code de la construction et de l'habitation dispose que tout contrat ayant pour objet le transfert de propriété d'un immeuble ou d'une partie d'immeuble à usage d'habitation ..et comportant l'obligation pour l'acheteur d'effectuer des versements ou dépôts de fonds avant l'achèvement de la construction doit, à peine de nullité, revêtir la forme de l'un des contrats prévus aux articles 1601-2 et 1601-3 du code civil, reproduits aux articles L.261-2 et L.261-3.

L'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 30 juillet 1998 revêt bien la forme prévue aux articles 1601-2 et 1601-3 du code civil.

L'article L.261-10 susvisé précise que le contrat doit, en outre être conforme aux dispositions des articles L.261-11 à L.261-14 du code de la construction et de l'habitation.

L'acte précise que le vendeur doit achever la construction au 30 octobre 1998, la livraison intervenant dès signature du procès-verbal de livraison immédiatement après cet achèvement. Le cahier des charges est visé à l'acte. Les documents sont annexés sur le descriptif . L'acte précise l'achèvement des fondations.

L'acte de vente n'est pas nul de plein droit.

-Sur l'action en résolution de la convention :

L'article 1184 du code civil dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

Il n'est pas contesté que la maison acquise n'a jamais été livrée et que la société MONTE E MARE n'a pas honoré la convention.

La résolution de la vente sera prononcée, aux torts de la venderesse, et la société venderesse sera condamnée à restituer les sommes versées par l'acquéreur au titre du paiement du prix.

-Sur les dommages et intérêts résultant de la résolution de la vente:

M.Jean-Michel Y... demande la confirmation du jugement qui a alloué à M.Jean-Michel Y... 94.559,80 € au titre des charges de l'emprunt Société Générale et 30.000 € en réparation de la perte locative et du préjudice moral. Mais il demande la condamnation non pas de la société venderesse mais du notaire à lui payer cette somme. Il s'agit dès lors d'une action en responsabilité civile professionnelle contre le notaire, pour faute délictuelle, distincte de l'action en responsabilité contractuelle contre son co-contractant, la société MONTE E MARE SARL.

Aucune demande de dommages et intérêts pour inexécution de la convention n'est formée par M.Jean-Michel Y....

III) Sur les actions dirigées contre MoAntoine X... et la SCP X... :

M.Jean-Michel Y... ainsi que la société MONTE E MARE SARL ont formé une action contre le notaire.

Cependant la société MONTE E MARE ne demande que la condamnation du notaire à payer les conséquences dommageables de l'annulation ou de la résolution du contrat de vente, qu'elle devrait elles-même supporter.

Or aucune demande de condamnation à paiement de dommages et intérêts n'a été formée contre la société MONTE E MARE SARL par M.Jean-MICHEL Y.... En conséquence, aucune condamnation du notaire à paiement de dommages et intérêts ne sera prononcée en faveur de la société MONTE E MARE SARL.

La condamnation à restitution du prix ne concerne que la venderesse. Le notaire n'est pas le bénéficiaire du prix de vente. Il ne peut en aucune façon être condamné à payer une somme correspondant à la restitution du prix.

M.CANAZZI reproche au notaire d'avoir manqué à son obligation de veiller à l'efficacité de l'acte qu'il a établi et de s'être prêté à l'établissement d'un acte dont l'exécution par la société venderesse s'est avéré impossible.

En effet MoAntoine X... n'a pas vérifié que la société MONTE E MARE SARL était bénéficiaire de la convention d'aménagement de la zone d'aménagement concertée.

Il n'est pas contesté que cette convention d'aménagement, passée par la commune de LUCCIANA avec la société civile MONTE E MARE n'avait pas été transférée au profit de la société MONTE E MARE SARL, de sorte que cette dernière société s'est trouvée dans l'impossibilité d'honorer ses engagements vis à vis de M.Jean-Michel Y....

Ce manquement a fait perdre à M.Jean-Michel Y... la chance de renoncer à ce contrat.

M.Jean-Michel Y... a dépensé inutilement des frais liés au dossier d'emprunt et des frais liés à l'acte lui-même. Il a subi un préjudice moral . Le préjudice locatif n'est pas établi. Le préjudice global de M.Jean-Michel Y... lié à la faute du notaire sera évalué à 15.000 €.

-IV) Sur les dépens et les frais irrépétibles:

MoAntoine X... et la SCP X... supporteront les dépens.

La présente procédure a causé à M.Jean-Michel Y... des frais irrépétibles qui lui seront indemnisés par MoAntoine X... et la SCP X....

La société MONTE E MARE a supporté des dépens et des frais irrépétibles liés à cette procédure qu'une plus grande diligence du notaire aurait pu éviter, ses dépens seront assumés par MoAntoine X... et la SCP X..., qui l'indemniseront, au moins en partie de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, entre la SCP Antoine X... & Rose-Marie X..., MoAntoine X..., M.Jean-Michel Y... et la société MARE E MONTE SARL, parties en cause d'appel,

Vu l'arrêt de la cour d'appel de Bastia en date du 20 décembre 2006, ayant renvoyé l'affaire devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence en application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile,

Réforme le jugement rendu le 14 mars 2006 par le tribunal de grande instance de Bastia,

Statuant à nouveau,

Prononce la résolution de l'acte de vente reçu le 30 juillet 1998 MoAntoine X..., notaire associé de la SCP Antoine X... et Rose-Marie X..., titulaire d'un office notarial à Bastia, entre M.Jean-Michel Y... et la société MONTE E MARE SARL portant sur une maison individuelle en l'état futur d'achèvement, sise parcelles AO 65 et 80 commune de LUCCIANA (Haute-Corse) dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté de LUCCIANA moyennant le prix de 1.050.000 francs ( 160.071,47 €), et ce aux torts de la société venderesse,

Condamne la société MONTE E MARE SARL à restituer à M.Jean-Michel Y... la somme reçue en paiement du prix de 160.071,47 €,

Dit que MoAntoine X..., notaire associé de la SCP Antoine X... et Rose-Marie X..., titulaire d'un office notarial à Bastia, a commis une faute vis à vis de M.Jean-Michel Y... et condamne MoAntoine X... et la SCP Antoine X... et Rose-Marie X... à payer à M.Jean-Michel Y... une somme de quinze mille euros (15.000 €) à titre de dommages et intérêts,

Condamne MoAntoine X... et la SCP Antoine X... et Rose-Marie X... à payer en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus, les sommes de:

-cinq mille euros (5.000 €) à M.Jean-Michel Y...,

-cinq mille euros (5.000 €) à la société MONTE E MARE SARL,

Condamne MoAntoine X... et la SCP Antoine X... et Rose-Marie X... aux dépens, et autorise MoJAUFFRES et de la SCP TOLLINCHI, PERRET-VIGNERON et BARADAT -BUJOLI-TOLLINCHI, avoués, à recouvrer directement sur eux, par application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile, les dépens dont ces avoués affirment avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 06/21913
Date de la décision : 07/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-07;06.21913 ?
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