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24/01/2008 | FRANCE | N°07/3263

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 janvier 2008, 07/3263


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4o Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 24 JANVIER 2008



No 2008/ 38













Rôle No 07/03263







S.A.R.L. LA VENCOISE





C/



S.A.R.L. VILLA ROSERAIE





















Grosse délivrée

le :

à :













réf



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal

de Commerce de GRASSE en date du 18 Décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 06/161.





APPELANTE



S.A.R.L. LA VENCOISE, représentée en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité au siège social sis,



demeurant 357, Ancien Chemin de Saint Paul - 06140 VENCE



représentée par la SCP MAYNARD - SIMON...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4o Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 24 JANVIER 2008

No 2008/ 38

Rôle No 07/03263

S.A.R.L. LA VENCOISE

C/

S.A.R.L. VILLA ROSERAIE

Grosse délivrée

le :

à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 18 Décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 06/161.

APPELANTE

S.A.R.L. LA VENCOISE, représentée en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité au siège social sis,

demeurant 357, Ancien Chemin de Saint Paul - 06140 VENCE

représentée par la SCP MAYNARD - SIMONI, avoués à la Cour,

assistée de Maître Céline CECCANTINI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

S.A.R.L. VILLA ROSERAIE,

demeurant Avenue Henri Giraud - 06140 VENCE

représentée par la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués à la Cour,

assistée de la KAIGL-ANGELOZZI, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2007 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Françoise BREJOUX, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Brigitte BERNARD, Président

Madame Marie-Françoise BREJOUX, Conseiller

Monsieur Michel NAGET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Christine RAGGINI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2008,

Signé par Madame Brigitte BERNARD, Président et Madame Marie-Christine RAGGINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte sous seing privé en date du 5.02.2006 , la SARL VILLA ROSERAIE a fait l'acquisition d'un fonds de commerce d'hôtel et restaurant exploité à VENCE 51 avenue Henri Giraud sous l'enseigne "la Roseraie" vendu par la SARL LA VENCOISE moyennant le prix de 525 000 euros payé comptant, précédé d'un compromis de vente du 7.11.2005 ;

La VILLA ROSERAIE a fait constater par huissier et par expert que la toiture de l'extension de la façade est sinistrée en raison d'une charpente en bois.vétuste et dangereuse ;

Estimant que la SARL LA VENCOISE a volontairement dissimulé les problèmes de charpente, par assignation du 6.04.2006, la SARL VILLA ROSERAIE a fait citer la SARL LA VENCOISE aux fins de se prévaloir de la garantie des vices cachés, de garder le fond de commerce acheté et de se faire rendre une partie du prix d'achat ;

En conséquence, de voir :

- condamner la SARL LA VENCOISE à rembourser à la SARL VILLA ROSERAIE la somme de 187 500 euros sur le prix d'achat, sauf à parfaire à dire d'expert ;

- condamner la SARL LA VENCOISE à payer à la SARL VILLA ROSERAIE la somme de 69782,76 euros, sauf à parfaire, au titre du manque à gagner sur le bénéfice d'exploitation, outre le remboursement des charges indues, à raison de 25 641 euros par an au titre de la surcapacité en personnel et 50 730 euros par an au titre du surdimensionnement des autres charges fixes , le tout sauf à parfaire ;

Par jugement du 18.12.2006, le tribunal de commerce de GRASSE a :

- dit que la SARL VILLA ROSERAIE est bien fondée à se prévaloir de la garantie des vices cachés

- déclaré la SARL VILLA ROSERAIE bien fondée à garder le fonds de commerce et à se faire rendre une partie du prix d'achat

Le Tribunal a, en outre, ordonné une expertise.portant sur la nature des désordres affectant les locaux , et sur les préjudicee subis par la SARL VILLA ROSERAIE et les responsabilités encourues ;

La SARL LA VENCOISE a interjeté appel par déclaration faite le 23.02.2007 ;

Elle demande la réformation du jugement entrepris, le débouté de toutes les demandes formées par la SARL VILLA ROSERAIE ;

Elle sollicite que soit ordonnée la main levée de la saisie-conservatoire autorisée par le tribunal de commerce, à hauteur de 70 000 euros et réclame la condamnation de la SARL VILLA ROSERAIE au paiement d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, outre la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Elle soutient que l'article 1641 du Code Civil, relatif à la garantie des vices cachés ne peut s'appliquer car, la SARL LA VENCOISE n'a pas vendu des murs affectés de désordres, mais le fonds de commerce et que la charpente ne fait pas partie des éléments cédés par elle ;

Elle ajoute que la SARL VILLA ROSERAIE a déclaré dans le compromis de vente le 7.11.2005 parfaitement connaître le fonds de commerce acquis, et le prendre en l'état où il se trouve, et qu'elle n'ignorait pas, lors de la signature de l'acte définitif de cession du fonds de commerce le 5.02.2006, l'existence des désordres affectant la toiture ;

La SARL VILLA ROSERAIE demande la confirmation de jugement entrepris, s'estimant bien fondée à se prévaloir de la garantie des vices cachés, à garder le fonds de commerce acheté et à se faire rendre une partie du prix d'achat ;

En conséquence, elle réclame la condamnation de la SARL LA VENCOISE à lui rembourser la somme de 187 500 euros sur le prix d'achat, sauf à parfaire à dire d'expert, outre la somme de 5 000 euros en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Elle soutient que la garantie des vices cachés peut s'appliquer à la vente d'un fonds de commerce, lorsque les désordres interdisent l'exploitation du commerce, qu'elle ne pouvait se rétracter, qu'elle s'est trouvée dans l'obligation d'acheter le fonds, la promesse de vente valant vente, l'état de la charpente ne faisant pas partie des conditions suspensives de la promesse;

Elle fait observer que la clause de vente en l'état invoquée par le vendeur, ne l'exonère pas de la garantie des vices cachés dont il avait parfaitement connaissance depuis 2004 ; qu'au surplus, elle ne saurait se retrancher derrière la responsabilité de la bailleresse propriétaire des murs ;

Par ordonnance en date du 2.06.2007, le Conseiller de la Mise en Etat a débouté la SARL LA VENCOISE de sa demande d'exécution provisoire de la mesure d'expertise ordonnée ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Considérant que la SARL VILLA ROSERAIE expose qu'elle a fait l'acquisition d'un fonds de commerce d'hôtel et restaurant exploité à VENCE, et qu'elle a découvert postérieurement qu'en l'état de la vétusté, la toiture menaçait de s'effondrer, ce qui n'est pas discuté et est attesté par un procès verbal de constat en date du 11.01.2006 et un rapport d'expertise officieux de monsieur Y..., daté du 24.01.2006 à la requête de la SARL VILLA ROSERAIE ;

Considérant aini que la SARL VILLA ROSERAIE se prévaut à l'encontre de sa vendeuse la SARL LA VENCOISE de la garantie des vices cachés, au visa de l'article 1641 du Code Civil qui dispose que "le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus" ;

Considérant que concernant la chose vendue, aux termes du compromis synallagmatique de vente du fonds de commerce en date du 7.11.2005 et de l'acte de cession du fonds de commerce en date du 05.02.2006, le vendeur vend à l'acquéreur, un fonds de commerce d'hôtel, gestion d'hôtel et restaurant comprenant "l'enseigne, le nom commercial, la clientèle... le droit d'occupation du local où se trouve exploitée l'activité objet des présentes tel que le dit droit au bail.... le mobilier commercial......." ;

Considérant en premier lieu que force est de constater que la SARL LA VENCOISE n'a pas vendu à la SARL VILLA ROSERAIE les murs ; que la toiture affectée de désordres ne fait partie des éléments cités dans le cadre de la vente du fonds de commerce ;

Considérant en deuxième lieu toutefois qu'il est vrai que le droit au bail constitue un élément du fonds de commerce objet de la vente et que les désordres affectant une partie des locaux, soumis au droit au bail, rendent impossible l'hébergement de la clientèle ; qu'en admettant qu'un vice touchant ainsi le droit au bail puisse constituer un vice caché, encore faut-il que soit établie l'existence du caractère caché du vice invoqué ;

Considérant que la SARL LA VENCOISE a déclaré dans le compromis synallagmatique de vente, parfaitement connaître le fonds de commerce pour avoir visité préalablement les locaux et en prendre jouissance en l'état où ils se trouvent ;

Que la signature de l'acte définitif de cession du fonds de commerce du 5.02.2006 est intervenue après la constatation des désordres ;

Considérant que dans cet acte, les parties ont pris le soin de préciser que "l'acquéreur déclare et reconnaît avoir entamé des travaux d'aménagement depuis le 9.01.2006 dans le fonds, objet de la vente, en accord avec le vendeur.

" Ces travaux ont mis à jour l'existence d'un dommage survenu sur la poutre maîtresse de la toiture du bâtiment de droit, qui se trouve brisée :

"Une expertise.privée établie par le Cabinet de NADAI concernant ces dépôts est demeurée ci-annexée.

L'acquéreur et le vendeur se rapprocheront du bailleur pour les réparations à y effectuer" ;

Considérant que la SARL VILLA ROSERAIE ne peut sérieusement soutenir ne pas avoir eu connaissance des désordres affectant la toiture et ne démontre pas que la venderesse la SARL LA VENCOISE, au courant des défectuosités de la charpente de l'immeuble comme l'atteste les courriers qu'elle a adressé à sa bailleresse en avril et mai 2004, lui ait dissimulé cet état de vétusté ;

Considérant que l'article 1642 du Code Civil précise que "le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui même" ;

Considérant, que la SARL VILLA ROSERAIE, ayant connu l'existence des défauts de la chose acquise à la date de la signature de l'acte de cession du fonds de commerce, soutient qu'elle ne pouvait se rétracter, comme le prétend sa venderesse, au motif que la promesse de vente vaut vente, conformément à l'article 1589 du Code Civil ; qu'elle opère transfert de propriété, dès qu'il y a consentement réciproque sur la chose et sur le prix ;

Considérant que ce principe juridique est exact, sauf dans l'hypothèse où le consentement n'est pas valable, ayant été donné que par erreur, ou, s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol ;

Considérant aussi, que la SARL VILLA ROSERAIE, qui a engagé postérieurement une action estimatoire, fondée sur la garantie des vices cachés, avait la possibilité d'invoquer la nullité de la promesse de vente signée le 7.11.2005, pour erreur sur la chose vendue ;

Considérant que de surcroît, la SARL VILLA ROSERAIE s'est obligée, dans l'acte définitif de cession, qui reprend les termes du compromis de vente du 7.11.2005, à "prendre le fonds vendu, avec les objets, mobilier, matériel et marchandises le garnissant, dans l'état où le tout se trouve, sans pouvoir réclamer aucune indemnité, ni diminution du prix ci-après fixé, pour quelque cause que ce soit" ;

Considérant qu'il est écrit page 2 : " le dit fonds existe..... et que l'acquéreur déclare parfaitement connaître pour l'avoir vu et visité en vue des présentes" ;

Que, page 3, il est mentionné "le cessionnaire déclare avoir visité préalablement les locaux et en prendre jouissance en l'état où ils se trouvent" ;

Considérant que dans cet acte, le problème de la toiture a été évoqué par les parties qui étaient parfaitement d'accord pour admettre que cette question concernait les obligations de la bailleresse, et qu'ils envisageaient de se rapprocher du bailleur pour les réparations à y effectuer;

Considérant que les termes du bail commercial liant la SARL VILLA ROSERAIE et Mademoiselle Z..., bailleresse, stipule d'ailleurs que "le preneur prendra les locaux dans l'état où ils se trouveront au moment de l'entrée en jouissance, sans pouvoir exiger du bailleur aucune réparation ni remise en état, autre que celles qui seraient nécessaires , afin que les lieux soient clos et couverts" ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les réparations afférentes à la toiture doivent être prises en charge par le bailleur ;

Que la SARL VILLA ROSERAIE a, par exploit du 16.03.2006, saisi le Juge des Référés près le tribunal de grande instance de GRASSE d'une demande tendant à la condamnation de Mademoiselle Z... à entreprendre les travaux de réfection de la charpente, qui a donné lieu à une ordonnance de référé en date du 14.06.2006, condamnant Mademoiselle Z... à payer à la SARL VILLA ROSERAIE la somme de 69 782,76 euros, au titre des travaux de reprise de charpente, de la toiture et de la structure, outre la somme de 150 000 euros au titre du manque à gagner sur le bénéfice d'exploitation et autres sommes en réparation du préjudice subi ;

Considérant ainsi, que c'est à tort que la SARL VILLA ROSERAIE a initié la procédure en garantie des vices cachés à l'encontre de la SARL LA VENCOISE, et en condamnation au paiement des travaux de réparation de la charpente ;

Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera infirmé et toutes les demandes formées par la SARL VILLA ROSERAIE rejetées ;

Considérant qu'il convient d'ordonner la main-levée de la saisie-conservatoire, qui n'est pas justifiée, ordonnée par le Tribunal de Commerce de GRASSE à hauteur de la somme de 70 000 euros suivant ordonnance du 3.03.2006 ;

Considérant que l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages intérêts dans le cas où il est relevé à la charge de plaideur la preuve de la mauvaise foi ;

Considérant qu'en l'espèce, la SARL VILLA ROSERAIE a cru bon, alors qu'elle avait connaissance des lieux, de signer un acte de cession, puis d'engager à l'encontre de sa venderesse une action en garantie des vices cachés et en paiement des réparations de la charpente alors que cette obligation incombe à la bailleresse, à l'encontre de laquelle, elle a engagé une procédure ;

Considérant qu'elle a fait preuve de malice et de légèreté, ce qui justifie sa condamnation à payer à la SARL LA VENCOISE la somme de 1 600 euros à titre de dommages intérêts ;

Considérant qu'elle devra lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en audience publique, contradictoirement

- Reçoit l'appel en la forme.

- Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

- Déboute la SARL VILLA ROSERAIE de toutes ses demandes.

Y ajoutant,

- Ordonne la main-levée de la saisie-conservatoire ordonnée par le tribunal de commerce de GRASSE, suivant ordonnance du 03. 03. 2006.

- Condamne la SARL VILLA ROSERAIE à payer à la SARL LA VENCOISE la somme de 1600 euros à titre de dommages intérêts.

- La Condamne à payer à la SARL LA VENCOISE la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en cause d'appel.

- Condamne la SARL VILLA ROSERAIE aux dépens de première instance et d'appel et pour ceux-ci, admet la SCP MAYNARD-SIMONI, avoués, au bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 07/3263
Date de la décision : 24/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Grasse


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-24;07.3263 ?
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