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24/01/2008 | FRANCE | N°06/13026

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 janvier 2008, 06/13026


COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
8o Chambre C


ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
DU 24 JANVIER 2008


No2008 / 38














Rôle No 06 / 13026






Armand X...

Lucette Y... épouse X...





C /


S. A. BNP PARIBAS
































Grosse délivrée
le :
à : BOTTAI
GIACOMETTI




réf


prononcé sur saisine

de la Cour suite à l' arrêt rendu par la Cour de Cassation le 12 juillet 2006, qui a cassé et annulé l' arrêt no 05 / 06 rendu le 6 janvier 2005 par la Cour d' Appel d' Aix en Provence (1ère Chambre B).




DEMANDEURS SUR RENVOI DE CASSATION


Monsieur Armand X...

né le 21 Mai 1952 à TUNIS TUNISIE, demeu...

COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
8o Chambre C

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
DU 24 JANVIER 2008

No2008 / 38

Rôle No 06 / 13026

Armand X...

Lucette Y... épouse X...

C /

S. A. BNP PARIBAS

Grosse délivrée
le :
à : BOTTAI
GIACOMETTI

réf

prononcé sur saisine de la Cour suite à l' arrêt rendu par la Cour de Cassation le 12 juillet 2006, qui a cassé et annulé l' arrêt no 05 / 06 rendu le 6 janvier 2005 par la Cour d' Appel d' Aix en Provence (1ère Chambre B).

DEMANDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur Armand X...

né le 21 Mai 1952 à TUNIS TUNISIE, demeurant ...- 13008 MARSEILLE
représenté par la SCP BOTTAI- GEREUX- BOULAN, avoués à la Cour,
plaidant par Me William ZOUAGHI, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame Lucette Y... épouse X...

née le 30 Mai 1955, demeurant ...- 13008 MARSEILLE
représentée par la SCP BOTTAI- GEREUX- BOULAN, avoués à la Cour,
plaidant par Me William ZOUAGHI, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

BNP PARIBAS, SA prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège est sis 16 Boulevard des Italiens- 75009 PARIS
représentée par la SCP GIACOMETTI- DESOMBRE, avoués à la Cour,
plaidant par Me Louis CABAYE, avocat au barreau de MARSEILLE

*- *- *- *- *

COMPOSITION DE LA COUR

L' affaire a été débattue le 27 Novembre 2007 en audience publique. Conformément à l' article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie- Claude CHIZAT, Conseiller a fait un rapport oral de l' affaire à l' audience avant les plaidoiries devant la Cour composée de :

Monsieur Jean- Louis BERGEZ, Président,,
Monsieur Jean- Noël ACQUAVIVA, Conseiller
Madame Marie- Claude CHIZAT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2008..

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2008

Rédigé par Madame Marie- Claude CHIZAT, Conseiller,

Signé par Monsieur Jean- Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES

La BNP Paribas a accordé à Mr Armand X... et son épouse née Lucette Y..., deux prêts immobiliers, l' un de 520 600 Frs en 1987, l' autre de 180 000 Frs en 1988 destinés à l' achat d' un terrain et à la construction d' une villa.

La déchéance du terme de ces prêts a été prononcée le 31 Mai 1996, compte tenu d' échéances impayées.

Les époux X... ont assigné la banque devant le Tribunal de Grande Instance de Marseille en responsabilité, (octroi de crédits excessifs) réclamant des dommages et intérêts venant en compensation des sommes qu' ils doivent à la banque.

Le Tribunal, par jugement en date du 19 Décembre 2002, a jugé, en ce qui concerne le premier prêt, qu' aucune faute n' avait été commise par la BNP, et a retenu la responsabilité de celle ci dans l' octroi du deuxième prêt, la banque n' ignorant pas l' endettement des époux X... en 1988, et les charges de ce dernier étant manifestement excessives au regard des ressources des emprunteurs.
Le Tribunal, estimant que la BNP avait failli à son devoir de conseil, l' a condamnée au paiement de la somme de 34 000 € à titre de dommages et intérêts.

Mr et Mme X... ont interjeté appel de cette décision, et par arrêt en date du 6 janvier 2005, la Cour a réformé le jugement, débouté les appelants de toutes leurs demandes, ceux- ci n' établissant aucune faute de la banque lors de l' octroi des prêts, d' autant que les échéances ont été remboursées jusqu' en 1993.

Mr et Mme X... ont formé un pourvoi à l' encontre de cet arrêt, et le 12 Juillet 2006, la Cour de Cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l' arrêt de la Cour d' Appel d' Aix en Provence et renvoyé l' affaire devant la Cour de céans.

Dans son arrêt, la Cour de Cassation, au visa de l' article 1147 du Code Civil, a
jugé que la Cour d' Appel avait mis en évidence la lourdeur des remboursements des prêts, faisant une comparaison entre les revenus des emprunteurs et le montant des remboursements, sans rechercher si les époux X... pouvaient ou non être regardés comme des emprunteurs profanes, et dans l' affirmative, si conformément au devoir de mise en garde auquel elle était tenue, la banque les avait alertés sur les risques découlant d' un tel endettement.

La procédure a été renvoyée régulièrement devant la Cour.

Par voie de conclusions déposées le 13 Novembre 2007, les époux X..., en réponse à la prescription de leur action soulevée par la banque, font valoir que le point de départ de celle- ci, (article L 110- 4 du Code de Commerce), est le jour où l' obligation du débiteur principal a été mise en exécution, et qu' en tout état de cause la prescription a été interrompue par les différentes décisions de justice.
Sur le fond du litige, ils soutiennent que la banque a manqué à son devoir de conseil en leur accordant des prêts hors de proportion avec leurs possibilités de remboursement, (salaire mensuel à deux de 1286 € et mensualités de 892 €) et à son devoir de mise en garde, car elle aurait du les alerter sur les risques découlant d' un tel endettement.

Ils réclament 365 800 € en réparation de leur préjudice matériel, faisant état de la vente aux enchères de leur villa, en 2004 (au prix 190 000 € et collocation de la banque pour 189 834 €), et de ce que l' indemnisation doit leur permettre d' acquérir une maison équivalente et égale à la valeur de remplacement, ainsi que la somme de 50 000 € au titre de leur préjudice moral.

Par voie de conclusions déposées le 21 Novembre 2007, la BNP Paribas soulève à titre principal la prescription de l' action des époux X...- assignation du 20 Juin 2001- alors que le fait générateur se situe à la date d' octroi des prêts, en 1987 et 1988.

A titre subsidiaire, elle conclut au débouté invoquant la mauvaise foi des époux X..., l' absence de toute disproportion entre le montant de ceux- ci et les revenus du couple à cette époque là, le paiement des échéances pendant plusieurs années.

L' intimée soutient également que Mr et Mme X... n' étaient pas des emprunteurs profanes, d' où l' absence de toute obligation de mise en garde à la charge du banquier prêteur.
Encore plus subsidiairement, la banque fait valoir que le non respect du devoir de mise en garde ne pourrait être retenu que pour le second prêt ;

Qu' en tout état de cause, les époux X... ne justifient ni de leur préjudice ni de son lien avec la faute alléguée.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 21 Novembre 2007.

MOTIFS

SUR LA PRESCRIPTION DE L ACTION DES EPOUX X...

Attendu que le point de départ de la prescription décennale de l' article L 110- 4 du Code de Commerce, est le jour où l' obligation des débiteurs principaux a été mise à exécution, et non le jour de l' octroi des prêts ;

Attendu que les prêts consentis en 1987 et 1988 par la BNP ont été honorés jusqu' en 1993 et la déchéance des termes prononcée le 31 mai 1996 ;

Attendu que l' action des époux X..., diligentée en 2001, est donc parfaitement recevable car non prescrite ;

SUR LA RESPONSABILITE DE LA BNP PARIBAS

Attendu que le banquier est tenu d' une obligation de mise en garde face à des emprunteurs profanes ou non avisés, consistant à alerter ceux- ci des risques de non remboursement des échéances auxquels les emprunteurs s' exposent en cas de crédit excessif, et sur les conséquences pouvant en découler, à savoir l' importance de l' endettement ;

Attendu que de ce fait, la banque a un devoir d' éclairer les emprunteurs sur les avantages mais également les inconvénients du crédit consenti ;

Attendu qu' il incombe au banquier qui conteste être tenu d' une obligation de mise en garde, de prouver qu' il a contracté avec un emprunteur averti ;

Attendu que la BNP Paribas, qui soutient ne pas être débitrice d' une obligation de mise en garde, ne démontre pas le caractère averti des époux X... ;

Attendu qu' en 1987 et 1988, Mr X..., qui exerçait la profession libérale de maquettiste et son épouse, employée au Conseil Général, étaient manifestement des emprunteurs profanes, non rompus aux affaires ;

Attendu que la BNP était donc tenue de l' obligation de mise en garde ci- dessus définie, à leur encontre ;

Attendu que les revenus mensuels des époux X... s' élevaient à la somme de 8 440 Frs, à la date de l' octroi des deux prêts ;

Qu' il convient de constater que la BNP, ni lors de l' octroi du prêt de 1987, d' un montant de 520 600 Frs, remboursable en 20 ans au moyen de mensualités de 3 975, 33 Frs, ni lors du prêt consenti en 1988, d' un montant de 180 000 Frs, faisant passer les remboursements mensuels à la somme de 5 851, 68 Frs, c' est- à- dire en présence d' un endettement lourd de plus de 45 % et 68 %, n' a pas alerté les emprunteurs des risques découlant d' un tel endettement, risques immédiats ou à venir ;

Attendu que la banque a donc commis une faute entraînant sa responsabilité, pour n' avoir pas respecté le devoir de mise en garde auquel elle était tenue ;

Attendu, sur le préjudice causé aux époux X..., que, ceux- ci n' établissent pas le lien de causalité entre la faute de la BNP et le préjudice matériel qu' ils allèguent, à savoir la perte de leur villa vendue aux enchères en 2004 pour la somme de 190 000 €, alors que les pièces du dossier permettent de constater que l' endettement de Mr X... était également lié à son activité professionnelle (nombreuses lettres de change impayées) et à la cessation de celle- ci en 1993, et que la Commission de Surendettement des particuliers avait laissé aux époux X..., la possibilité en 1997, de procéder à la vente amiable de leur bien immobilier dans un délai de douze mois ;

Attendu que le préjudice s' analyse en une perte de chance d' avoir contracté à de meilleures conditions les prêts qu' ils avaient sollicités ;
Qu' il convient de fixer ce préjudice à la somme de 80 000 € ;

Attendu que les époux X... ne démontrant pas que le préjudice moral allégué découle de la faute de la banque, ils doivent être déboutés de ce chef de demande ;

Attendu que le jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille doit être infirmé ;

Attendu que l' équité commande d' allouer aux appelants la somme de 2000 € sur le fondement de l' article 700 du NCPC.

PAR CES MOTIFS

La Cour, contradictoirement et publiquement,

Infirme le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 19 Décembre 2002,

Statuant à nouveau,

Déclare l' action des époux X... recevable,

Condamne la BNP Paribas à verser aux époux X... la somme de 80 000 € à titre de dommages et intérêts,

Déboute l' intimée de ses demandes,

Rejette le surplus des demandes des appelants,

Condamne la BNP Paribas au paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l' article 700 du NCPC ainsi qu' aux entiers dépens ceux d' appel distraits au profit de la SCP Bottai Géreux Boulan, en application de l' article 699 du NCPC.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 06/13026
Date de la décision : 24/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-24;06.13026 ?
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