COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
4o Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 20 SEPTEMBRE 2007
No 2007 /
Rôle No 05 / 07835
SARL AU REGAL
C /
Nicolas X...
Françoise X... épouse Y...
Chantal X... épouse Z...
Marie- Thérèse A... épouse X...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 09 Mars 2005 enregistré au répertoire général sous le no 01 / 0003.
APPELANTE
SARL AU REGAL agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicili, prise en la personne de Me B... désigné en qualité d' Administrateur provisoire domicilié... 06000 NICE,
demeurant 407 Route de Bellet- 06200 NICE
représentée par la SCP BOTTAI- GEREUX- BOULAN, avoués à la Cour
ayant la SCP ANDREI et ZUELGARAY, avocats au barreau de NICE
INTIMES
Monsieur Nicolas X... agissant en sa qualité d' héritier de Gérard X...
né le 28 Mai 1971 à NICE (06000),
demeurant...- 06200 NICE
représenté par la SCP DE SAINT FERREOL- TOUBOUL, avoués à la Cour,
assisté de la SCP ROUILLOT GAMBINI, avocats au barreau de NICE
Madame Françoise X... épouse Y... agissant en sa qualité d' héritière de Gérard X...
née le 30 Juillet 1957 à NICE (06000),
demeurant...- 06000 NICE
représentée par la SCP DE SAINT FERREOL- TOUBOUL, avoués à la Cour,
assistée de la SCP ROUILLOT GAMBINI, avocats au barreau de NICE
Madame Chantal X... épouse Z... agissant en sa qualité d' héritière de Gérard X...
née le 07 Janvier 1951 à NICE (06000), demeurant...- 06510 CARROS
représentée par la SCP DE SAINT FERREOL- TOUBOUL, avoués à la Cour,
assistée de la SCP ROUILLOT GAMBINI, avocats au barreau de NICE
Madame Marie- Thérèse A... épouse X... agissant en sa qualité d' héritière de Gérard X...
née le 05 Décembre 1930 à NICE (06000),
demeurant...- 06200 NICE
représentée par la SCP DE SAINT FERREOL- TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de la SCP ROUILLOT GAMBINI, avocats au barreau de NICE
COMPOSITION DE LA COUR
L' affaire a été débattue le 29 Mai 2007 en audience publique. Conformément à l' article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur Michel NAGET, Conseiller, a fait un rapport oral de l' affaire à l' audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Brigitte BERNARD, Président
Madame Marie- Françoise BREJOUX, Conseiller
Monsieur Michel NAGET, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marie- Christine RAGGINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2007.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2007,
Signé par Madame Brigitte BERNARD, Président et Madame Marie- Christine RAGGINI, greffier présent lors du prononcé.
***
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Par acte sous seing privé du premier janvier 1988, Monsieur Gérard X... et son épouse née A... Marie- Thérèse ont donné à bail à Monsieur Jean- Marie C... un local commercial à usage exclusif de bar restaurant situé à Nice, 403 route du Bellet (en fait, à l' extérieur de l' agglomération), pour une durée de neuf ans, au loyer annuel de 36. 000, 00 francs.
Le fonds de commerce a été cédé le premier août 1996 à la société AU RÉGAL.
Le 28 juin 1996, les bailleurs ont fait donner congé à cette dernière pour le 31 décembre 1996, avec offre de renouvellement, moyennant un loyer annuel de 72. 000, 00 francs, soit 10. 976, 32 euros. Par acte du 11 août 1998, la société AU RÉGAL a accepté le principe d' un renouvellement du bail, mais refusé le loyer proposé, demandant que celui- ci soit ramené à 41. 670, 00 francs par an (ce qui représente aujourd' hui 6. 352, 55 euros).
Le 23 novembre 1998, la Commission Départementale de conciliation, à l' arbitrage de laquelle ce litige avait été soumis, a émis l' avis qu' il n' y avait pas matière à déplafonnement, en l' absence de toute modification des facteurs locaux de commercialité, et que le loyer plafonné s' établissait à 41. 471, 00 francs par an.
Par la suite, des pourparlers ont été échangés, en vue de l' acquisition de l' immeuble, pour lequel un compromis de vente a même été signé le 4 mai 1999. Cette vente n' a toutefois pas eu lieu, mais une autorisation d' effectuer des travaux d' aménagement avait été donnée par les consorts X....
La procédure en vue de la fixation du nouveau prix du loyer a donc repris son cours, par la notification du mémoire de la preneuse en date du 21 septembre 2000, proposant un loyer de 41. 670 francs par an, et par l' assignation délivrée aux bailleurs le 17 novembre 2000 devant le Juge des loyers commerciaux du Tribunal de Grande Instance de Nice.
Par jugement du premier juin 2001, ce magistrat a constaté l' accord des parties sur le principe du renouvellement du bail pour une durée de neuf ans, à compter du premier décembre 1997. Puis une expertise a été ordonnée et confiée à Monsieur Eric D....
L' expert a, le 6 février 2004, déposé son rapport dont il convient de retenir :
- que les locaux sont monovalents,
- que la valeur locative au premier décembre 1997 s' établit à 24. 386, 82 euros, soit 160. 000, 00 francs.
Ce prix a été obtenu sur la base d' une surface pondérée de 242, 00 mètres carrés, (la surface utile étant de 266, 46 m ²), auquel l' expert a appliqué un correctif d' ensemble de 1, 4 soit 339 m ².
Les locaux, situés à la périphérie de Nice, disposent d' une grande superficie adaptée à son activité. Une terrasse couverte a été installée, à l' époque où les parties étaient en pourparlers en vue d' une vente.
Le prix du mètre carré a été estimé à 48, 78 euros, soit 389 x 48, 78 = 18. 975, 42 euros.
Il existe aussi un appartement, donc réservé à un usage d' habitation dont le loyer a été estimé à 5. 411, 40 euros.
Par jugement du 9 mars 2005, le Juge des loyers commerciaux a rectifié une erreur matérielle entachant la précédente décision du premier juin 2002, en ce sens que le point de départ du nouveau bail se situe au premier janvier 1997, et non au premier décembre.
D' autre part, le prix du nouveau loyer a été fixé à 24. 386, 82 euros, par an, à compter du premier janvier 1997, auquel il convient d' ajouter les intérêts moratoires échus, calculés sur la différence entre ce nouveau prix et celui effectivement payé.
Les dépens ont été partagés par moitié entre les parties.
La S. A. R. L. AU RÉGAL a relevé appel de cette décision, suivant déclaration reçue au Greffe de la Cour le 8 avril 2005. Elle est désormais représentée par un administrateur provisoire, Maître B..., désigné par une ordonnance de référé du Président du Tribunal de Commerce de Nice en date du 23 octobre 2001.
D' autre part, les intimés sont les héritiers venant à la succession de Gérard X... décédé le 29 février 2004.
Par conclusions du 4 août 2005, la société AU RÉGAL sollicite l' infirmation du jugement frappé d' appel et la fixation du prix du loyer du bail renouvelé à la somme de 6. 543, 81 euros au premier décembre 1997, soit 42. 924, 58 francs. Elle réclame en outre, aux consorts X... la somme de 3. 000, 00 euros en application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par conclusions des 11 juillet 2006 et 29 janvier 2007, les consorts X... ont conclu à la confirmation du jugement entrepris, et à la condamnation de l' appelante à leur payer la somme de 5. 000, 00 euros à titre d' indemnité réclamée en application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
M O T I F S :
La Cour constate d' abord que l' irrecevabilité de l' appel n' est pas soulevée, et qu' elle n' a pas lieu d' être relevée d' office.
Puis, sur les mérites du recours, les motifs de sa décision sont les suivants :
A l' appui de son appel, la société AU RÉGAL explique (à la cinquième page de ses conclusions du 4 août 2005), qu' elle "... n' entend pas contester le caractère monovalent des locaux... au sens de l' article 23- 8 du décret du 30 septembre 1953 ", et elle ajoute, avec juste raison, qu' en conséquence, " il convient de déterminer la valeur locative au premier décembre 1997, notamment en fonction des usages observés dans la branche d' activité considérée, et les loyers pratiqués dans le voisinage, ainsi que des critères édictés par l' article L 145- 33 du code de commerce ".
Cependant, son raisonnement la conduit, après divers critiques à l' égard du travail de l' expert,
à solliciter la fixation du prix du loyer renouvelé à la somme de 6. 543, 81 euros, qui n' est autre que le montant auquel on aboutit en appliquant au loyer de 1988, un calcul basé sur la variation de l' indice légal entre le second trimestre 1987 et le second trimestre 1997.
Il ne peut donc être accédé à sa demande sur ce point. En effet, le plafonnement du loyer ne pouvant être appliqué au cas d' espèce, ainsi que l' admet l' appelante elle- même, la Cour ne saurait rechercher la valeur locative de l' immeuble par un tel calcul, dont la seule utilité est de déterminer la limite légale de l' augmentation du loyer, lorsqu' une telle limitation trouve à s' appliquer.
En second lieu, les critiques adressées par l' appelant au rapport de l' expert, porte sur le fait que celui- ci aurait pris en considération des travaux relatifs à des modifications des caractéristiques des locaux, effectués avec l' accord de la bailleresse, alors qu' elle a financé seule et elle même l' exécution des dits travaux.
Elle fait valoir également que l' expert aurait admis à tort, l' idée de l' adjonction d' une activité nouvelle (celle de cabaret ou d' organisation de dîners dansants) dont elle conteste en fait la nouveauté, pour justifier une augmentation de loyers.
En définitive, elle fait valoir que ces éléments ne sauraient justifier " une augmentation du loyer ", alors que par ailleurs, et toujours selon elle, il n' y a pas eu d' évolution favorable des facteurs locaux de commercialité.
Cependant, la Cour constate à la lecture du rapport d' expertise, que l' expert, répondant à ses observations sur tous ces différents points (page 8, 9 et 10 de son rapport), a commis la même erreur, et n' a fait porter son analyse que sur la question de savoir s' ils pouvaient ou non justifier le " déplafonnement " du loyer. Or, on sait par ailleurs, que le plafonnement du loyer devait être écarté, de toutes façons, par application de l' article 23- 8 du décret du 30 septembre 1953, en sorte qu' il ne peut être tirer de cette expertise la conséquence que l' estimation aurait été faite sur le fondement de ces critères.
En fait, Monsieur D..., après avoir affirmé qu' il n' existait pas d' usages propres à la branche d' activité considérée, et que par ailleurs, il ne disposait pas non plus de points de comparaison pertinents dans l' environnement proche de l' établissement, a retenu une valeur au mètre carré de 48, 78 euros (soit 320 francs) comme un minimum lui paraissant applicable, lorsqu' il s' agit de locaux étendus, loués à un prix au mètre carré d' autant plus faible que la surface est plus étendue.
Or, cette relative imprécision ne fait pas l' objet de critiques particulières de la part de l' appelante, non plus que le coefficient correctif d' ensemble de 1. 4 retenu, et appliqué à la surface mesurée, en fonction des différents critères de commodité énoncés par le rapport.
A la vérité, l' expert a proposé un prix faible, pour des locaux étendus et ne manquant pas d' un certain charme, mais, compte- tenu du prix du loyer annuel de 36. 000, 00 francs tel qu' il avait été fixé, même en 1988, l' augmentation est importante. Mais elle signifie seulement que le loyer est devenu normal, par rapport à son faible montant d' origine, pour un bar- restaurant de 242 m ² au sol, exploité dans un cadre agréable à proximité d' une grande ville.
En l' absence de toute autre critique pertinente de l' appelante, cette estimation, telle qu' elle a été entérinée par le premier juge sera donc confirmée. La société appelante sera en outre condamnée aux dépens d' appel, ainsi qu' au payement d' une indemnité de 1. 500, 00 euros allouée en application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour,
Statuant en audience publique et contradictoirement,
Déclare la S. A. R. L. AU RÉGAL recevable, mais mal fondée en son appel du jugement rendu le 9 mars 2005, par le Juge des Loyers Commerciaux du Tribunal de Grande Instance de Nice.
Confirme, en conséquence le dit jugement en toutes ses dispositions.
Condamne la société AU RÉGAL à payer aux consorts X... la somme de 1500, 00 euros (mille cinq cents euros) à titre d' indemnité allouée en application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
Rejette toute autre demande.
Condamne la société AU RÉGAL aux dépens d' appel, et pour leur recouvrement, accorde à la société d' Avoués Saint Férréol & Touboul le bénéfice des dispositions de l' article 699 du nouveau code de procédure civile.
La Greffière : La Présidente :