ARRET 5ème CH. No06 /
COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
ARRÊT AU FOND
5ème Chambre
Prononcé publiquement le MERCREDI 8 MARS 2006, par la 5ème chambre des appels correctionnels,
Sur appel d'un jugement du TRIBUNAL CORRECTIONNEL de NICE du 08 MARS 2004
J. F.
PRÉVENU
Z... Louis
GROSSE DÉLIVRÉE
LE :
à Maître :
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
Z... Louis Joseph Célestin
né le 28 Septembre 1941 à ROQUEBILLIERE (06)
de Z... et de X... Joséphine
de nationalité Française
demeurant : ...06000 NICE
jamais condamné
Comparant, assisté de Maître DUREUIL Christian, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
appelant
LE MINISTÈRE PUBLIC
appelant
Y... Solange épouse C...
Demeurant ...-06000 NICE
Non comparante
Représentée par Maître AGENIE Alain, avocat au barreau de NICE
Partie civile, non appelante
C... Roger
Demeurant ...-06000 NICE
Non comparant
Représenté par Maître AGENIE Alain, avocat au barreau de NICE
Partie civile, non appelant
ARRET 5ème CH. No06 /
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
L'affaire a été appelée à l'audience publique du MARDI 24 JANVIER 2006,
Monsieur le Président LACAN a constaté l'identité du prévenu,
Madame le Conseiller MICHEL a présenté le rapport de l'affaire,
Le prévenu a été entendu en ses observations et moyens de défense,
Maître AGENIE conseil des parties civiles indique avoir interjeté appel devant le tribunal correctionnel de Nice et s'étonne de l'absence de justificatif au dossier de la Cour,
La Cour l'invite à justifier de son appel en cours de délibéré,
Maître AGENIE conseil des parties civiles a été entendu en sa plaidoirie et a déposé des conclusions,
Le Ministère Public a pris ses réquisitions,
Maître DUREUIL, conseil du prévenu, a été entendu en sa plaidoirie et a déposé des conclusions,
Le prévenu ayant eu la parole en dernier,
Enfin, le Président a indiqué que l'arrêt serait prononcé à l'audience du MERCREDI 8 MARS 2006.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LA PRÉVENTION :
Z... Louis est prévenu d'avoir :
-à NICE (06) courant 1997 et 1999, altéré frauduleusement la vérité dans un écrit, ou tout autre support d'expression de la pensée, ayant pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, en l'espèce un procès-verbal de l'assemblée générale du 09. 06. 1997 des copropriétaires du " Clairval ", des mandats de copropriétaires et une liste de présence de l'assemblée générale, au préjudice de Roger C..., Solange C...
faits prévus par Art. 441-1 C. Pénal et réprimés par Art. 441-1 al. 2, Art. 441-10, ART. 441-11 C. Pénal
-à NICE (06) courant 1997 et 1999, fait usage dans un écrit ayant pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, en l'espèce un procès-verbal de l'assemblée générale du 09. 06. 1997 des copropriétaires du " Clairval ", des mandats de copropriétaires et une liste de présence de l'assemblée générale, au préjudice de Roger C..., Solange C...
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LE JUGEMENT :
Par jugement contradictoire du 8 mars 2004, le tribunal correctionnel de NICE a déclaré non établis les faits de faux et usage s'agissant des mandats des copropriétaires et de la liste de présence de l'assemblée générale, a déclaré Z... Louis coupable du surplus des faits qui lui sont reprochés et l'a condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis.
Statuant sur l'action civile, le tribunal a reçu C... Roger et C... Solange en leur constitution de partie civile, les a débouté de leur demande en réparation d'un préjudice matériel et a condamné Z... Louis à leur payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral et celle de1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale, ainsi qu'aux dépens.
LES APPELS :
Z... Louis a interjeté appel de ce jugement, en toutes ses dispositions, par déclaration au greffe du tribunal, le 9 mars 2004.
Le Ministère Public a relevé appel incident le même jour.
DECISION :
RAPPEL SUCCINCT DES FAITS :
Le 14 mars 2000 les époux C..., copropriétaires dans l'ensemble " Le Clairval " déposaient plainte avec constitution de partie civile pour faux et usage et exposaient qu'au cours de l'assemblée générale en date du 9 juin 1997, Louis Z..., qui devait être réélu en qualité de syndic, avait surchargé les pouvoirs qui lui avaient été remis, manipulé la feuille de présence et imité des signatures pour obtenir le quorum nécessaire à sa réélection.
-les mandats des copropriétaires :
Les époux C... disposaient du pouvoir de Madame D... et Monsieur E..., autre copropriétaire, de ceux de Monsieur F... et de Madame H.... Ces pouvoirs portaient la mention préimprimée " Je demande que sur les questions à l'ordre du jour no..., il soit voté à mon nom CONTRE ".
Or, sur ces trois pouvoirs, la partie devant être renseignée a été biffée, ce qui donnait à penser que les mandants souhaitaient que leurs mandataires respectifs ne votent contre aucune des résolutions soumises à l'assemblée.
-Monsieur F... a indiqué qu'il n'avait pas biffé la partie laissée en blanc ;
-Madame H... a fait les mêmes déclarations ;
-Monsieur E... a confirmé que son pouvoir ainsi que ceux de F... et H... étaient en blanc, sans consigne de vote.
Le tribunal a relaxé le prévenu de ce chef au motif que le mandant avait toute latitude pour le vote et que, de plus, rien ne permettait d'imputer les surcharges litigieuses à Z....
-la liste de présence :
Sur cette liste figure la mention " REP " en face de la SCI ALEX YVO qui signifie qu'elle était représentée, bien qu'aucun copropriétaire n'ait émargé pour elle ledit document.
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Le tribunal a de même relaxé le prévenu, considérant que le faux n'était pas constitué, dès lors qu'avait été produit un mandat de la SCI ALEX YVO, qui désignait M. E... comme mandataire et qui comportait sa signature.
-Le procès-verbal de l'assemblée générale :
Dans ce document, les copropriétaires ayant donné mandat à MM E... et C... ont été comptabilisés comme ayant voté pour les résolutions, notamment celle proposant la reconduction du syndic, bien que les mandataires n'aient pas exprimé un vote en ce sens.
Le tribunal correctionnel a retenu le faux intellectuel.
MOYENS DES PARTIES :
Z... Louis fait valoir qu'il n'y a aucune fausseté dans le compte-rendu du procès-verbal litigieux, qu'il doit par conséquent être relaxé.
Les parties civiles concluent à la réformation du jugement ayant relaxé Louis Z... des fins des poursuites pour faux et usage de faux s'agissant de la liste de présence et des mandats des copropriétaires et sa confirmation pour la condamnation du prévenu des chefs de faux et usage de faux du procès-verbal de l'assemblée générale. Elles demandent la condamnation de Louis Z... à leur payer la somme de 30. 500 euros à titre de dommages et intérêts pour les préjudices que leur ont causés les falsifications et celle de 7. 622,45 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
Le Ministère Public requiert la confirmation de la décision déférée.
MOTIFS DE LA DECISION :
EN LA FORME,
Attendu que Z... Louis, cité à personne, comparaît assisté de son conseil ;
Que les époux C..., parties civiles, sont représentés par leur conseil ;
Qu'il sera statué par arrêt contradictoire à l'égard de toutes les parties ;
Attendu que les appels formés par le prévenu et le Ministère Public sont recevables pour avoir été interjetés dans les formes et délais légaux.
AU FOND,
Sur l'action publique :
1-Sur la culpabilité,
Attendu qu'il convient, par adoption des motifs des premiers juges, de confirmer la relaxe intervenue sur les faits de faux et d'usage de faux concernant les pouvoirs et la feuille de présence.
Attendu que la majorité qualifiée pour renouveler le mandat du syndic était de 5001 dix-millièmes ; que le procès-verbal de l'assemblée générale indique que 5044 dix-millièmes ont voté " POUR " ; qu'il ressort des mentions même du procès-verbal, comme des témoignages,
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que le syndic a seulement appelé les votes " CONTRE " ou " ABSTENTION " à s'exprimer, considérant par déduction que les autres co-propriétaires présents ou représentés votaient " POUR " ; que seuls les tantièmes des époux C... et de M. E... ont été comptabilisés comme votant " CONTRE ", à l'exclusion des tantièmes de leurs mandants, comptabilisés comme votant " POUR " ; qu'à la suite du vote, le syndic a déclaré que la majorité qualifiée n'étant pas atteinte, une nouvelle assemblée générale serait convoquée ; que les époux C... et M. E... ont alors quitté l'assemblée ; qu'à la suite de leur départ, le calcul opéré sur la base sus-mentionnée a donné une majorité qualifiée de 5044 dix-millième pour le renouvellement du syndic ;
Attendu qu'en annonçant immédiatement après le vote qu'il ne disposait pas de la majorité qualifiée et qu'il faudrait convoquer une nouvelle assemblée, puis en comptabilisant les votes, après le départ de ses opposants, selon la méthode décrite ci-dessus, et en proclamant que la majorité était acquise, le syndic n'a pas mis les époux C... et M. E... en mesure de faire valoir leurs réserves et de faire procéder à un nouveau vote par appel nominatif de chaque copropriétaire présent ou représenté ; que la très faible majorité obtenue (43 dix-millièmes) comparée aux mandats dont disposaient les opposants (H..., F... et D..., soit 373 dix-millièmes) et à l'incertitude concernant la représentation de la SCI ALEX YVO (259 dix-millièmes) conduit à retenir, comme l'a fait le tribunal, que le procès-verbal de l'assemblée générale est un faux intellectuel ;
Que le jugement sera par conséquent confirmé sur la culpabilité ;
2-Sur la peine,
Attendu qu'il convient de faire une application plus modérée de la loi pénale en l'absence d'antécédents judiciaires et de prononcer une peine plus adaptée compte tenu de la poursuite de l'activité de syndic professionnel du prévenu ;
Que ce dernier sera en conséquence condamné, en application de l'article 131-6 du code de procédure pénale à une interdiction d'exercer l'activité de syndic de copropriété pendant une durée d'une année assortie du sursis simple ;
Sur l'action civile :
Attendu que les époux C..., copropriétaires du " Clairval " dont Louis Z... est le syndic, ont subi un préjudice personnel résultant de l'infraction ;
Attendu cependant, comme l'ont justement relevé les premiers juges, que le préjudice matériel n'est ni caractérisé ni justifié, mais que le préjudice moral résulte de la réélection du prévenu lors de l'assemblée générale litigieuse ;
Que le jugement sera également confirmé du chef de ses dispositions civiles ;
Attendu que l'équité commande l'application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale en cause d'appel à hauteur de 800 euros au bénéfice de la partie civile ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de toutes les parties, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi,
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En la forme,
Reçoit les appels formés par Z... Louis et le Ministère Public.
Au fond,
Confirme le jugement déféré sur la culpabilité,
Réforme sur la peine,
Condamne Louis Z... à la peine d'interdiction d'exercer l'activité de syndic de copropriété pendant une durée d'un an, assortie du sursis simple,
Compte tenu de l'absence du condamné au prononcé de la décision, le président n'a pu lui donner l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code Pénal ;
Confirme sur l'action civile,
Y ajoutant,
Condamne Z... Louis à payer aux époux C... la somme de 800 euros, par application des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale,
Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt, et aux articles 512 et suivants du code de procédure pénale.
COMPOSITION DE LA COUR :
PRÉSIDENT : Monsieur LACAN, désigné par ordonnance toujours en vigueur de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel d'Aix. en. provence, en remplacement du président titulaire empêché
ASSESSEURS : Madame SALVAN
Madame MICHEL
MINISTÈRE PUBLIC : Monsieur REYNAUD, Substitut Général
GREFFIER : Madame LAGARDE, lors des débats
Madame FIALAIX, lors du prononcé
Le Président et les assesseurs ont participé à l'intégralité des débats sur le fond et au délibéré.
L'arrêt a été lu par le Président conformément à l'article 485 dernier alinéa du Code de Procédure Pénale en présence du Ministère Public et du Greffier.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT
présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euros dont est redevable le condamné.