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07/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949369

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0097, 07 mars 2006, JURITEXT000006949369


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ARRÊT N /06

20 Chambre

ARRÊT DE LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION Du 07 MARS 2006 EP La Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, réunie en Chambre du Conseil, à l'audience du VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE SIX, Monsieur, le Président POUSSIN,

a été entendu en son rapport sur la procédure suivie contre : X DES CHEFS DE : Violences volontaires avec ITT inférieure à 8 jours - Agressions sexuelles sur personne vulnérable

PARTIE CIVILE POURSUIVANTE X... Nora Demeurant :

6 rue de l'Ange - 84120 PERTUIS Ayant pour avocat : Me SERVAIS, Résidence Signoret - 1 Allée ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ARRÊT N /06

20 Chambre

ARRÊT DE LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION Du 07 MARS 2006 EP La Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, réunie en Chambre du Conseil, à l'audience du VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE SIX, Monsieur, le Président POUSSIN,

a été entendu en son rapport sur la procédure suivie contre : X DES CHEFS DE : Violences volontaires avec ITT inférieure à 8 jours - Agressions sexuelles sur personne vulnérable

PARTIE CIVILE POURSUIVANTE X... Nora Demeurant : 6 rue de l'Ange - 84120 PERTUIS Ayant pour avocat : Me SERVAIS, Résidence Signoret - 1 Allée Rufinus - 13100 AIX EN PROVENCE

Le Ministère Public a été entendu en ses réquisitions ; Maître SERVAIS, avocat de la partie civile, présent à la barre, a sur sa demande présenté des observations sommaires, conformément à la loi ; Puis le Ministère Public, le greffier, se sont retirés ainsi que l'avocat présent à la barre; Les débats étant terminés, la Chambre de l'Instruction, en Chambre du Conseil, en a délibéré hors la présence du Ministère Public, du Greffier, des parties et de leurs avocats après que Monsieur le Président eut déclaré que l'arrêt serait rendu à l'audience du SEPT MARS DEUX MILLE SIX;

Monsieur le Président a prononcé l'arrêt suivant, en Chambre du Conseil à l'audience de ce jour, le SEPT MARS DEUX MILLE SIX, la Cour étant composée comme à l'audience du VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE SIX ;

* * * * *

Vu la plainte avec constitution civile déposée le 23 juin 2004 par Nora X... contre X ;

Vu l'ordonnance de non-lieu rendue le 12 janvier 2006 par le juge d'instruction d'AIX EN PROVENCE (Mme Y...) et notifiée par lettres recommandées adressées le 12 janvier 2006 à la partie civile et à son conseil ;

Vu l'appel interjeté le 20 janvier 2006 par le conseil de la partie civile suivant déclaration au greffe du Tribunal de Grande Instance

d'AIX EN PROVENCE ;

Attendu que cet appel est régulier en la forme et a été interjeté dans le délai légal ; *

Vu les pièces de la procédure ;

Vu le réquisitoire écrit de Monsieur le Procureur Général en date du 27 janvier 2006 ;

Vu les pièces desquelles il résulte que Monsieur le Procureur Général a donné avis par lettres recommandées en date du 27 janvier 2006 envoyées aux parties intéressées et à leurs avocats, conformément à l'article 197 du Code de Procédure Pénale ;

Attendu qu'il a été satisfait aux formes et délais prescrits par ledit article ;

* * * * *

Vu le mémoire déposé au greffe de la Chambre de l'Instruction par Maître SERVAIS le 20 février 2006 à 14h00, et visé par le Greffier ; * * * * * SUR LES FAITS :

Le 23 juin 2004, Nora X... déposait plainte avec constitution de partie civile pour des faits de violences commis au préjudice de son frère Akim X... (24 ans).

Elle expliquait que son frère atteint de trisomie 21 était incapable majeur et admis d'abord en tant qu'interne puis en tant qu'externe dans le CAT/ Foyer de vie "Louis Philibert" au Puy Sainte Réparade (D1).

Celui-ci s'était plaint envers sa famille, à plusieurs reprises, d'avoir été frappé par des éducateurs.

Le centre hospitalier de Pertuis avait établi un premier certificat médical indiquant qu'Akim X... avait été admis le 26 décembre 2003 pour une douleur spontanée de la cuisse gauche et un second certifiant qu'il avait été admis le 22 juin 2003 pourdes dorso-lombalgies et une ecchymose au niveau intercostal (ITT de 1

jour) (D3, D17, D42).

Elle dénonçait également, en tant que tutrice légale (D21), des irrégularités dans les comptes de cet établissement concernant les dépenses de son frère (D1, D4). *

Nora X... avait demandé des explications à Claude AUTIER, le directeur de cet établissement concernant les problèmes de mauvais traitements et les irrégularités financières (D4).

Elle avait obtenu une réponse de Marie-France Z..., Chef de Service du Foyer Occupationnel (D5). Mais, elle estimait n'avoir pas reçu tous les justificatifs attendus.

Le 29 juillet 2004, elle faisait parvenir au doyen des juges d'instruction de nombreuses pièces en complément de sa plainte (D3 à 22). *

Une information judiciaire était ouverte le 23 février 2005 du chef de violences volontaires aggravées ayant entraînéune incapacité temporaire de travail inférieure ou égale à huit jours (D26). *

Lors de son audition le 1er avril 2005, Nora X... indiquait que son frère avait été admis en qualité d'interne de janvier 0995 à juin 1998 puis en qualité d'externe jusqu'au 25 mars 2004.

Son frère lui avait fait état de mauvais traitements qui lui avaient été infligés par un éducateur, Robert A...

Il reproduisait certains gestes, comme des gifles, des coups de poing, coups de pied et oreilles tirées.

Elle se souvenait que son frère ayant bu de l'essence, il avait été hospitalisé à Pertuis et qu'il avait déclaré qu'il voulait mourir à cause de cet éducateur.

Helen LEBLANC, éducateur, était aussi visé et son frère avait refait des gestes de fessées en ce qui le concernait.

Nora X... affirmait avoir toute confiance dans les propos tenus

par son frère (D28).

Elle remettait au juge un courrirer du psychiatre suivant son frère, le docteur Christian B..., qui attestait que son patient se plaignait régulièrement, spontanément et avec beaucoup d'émotion d'avoir subi des mauvais traitement ainsi que des abus sexuels de la part de ses anciens éducateurs.

Le psychiatre jugeait nécessaire de prendre sa plainte en considération (D29).

Elle ajoutait que son frère disait des choses comme "accroupi, fait cela comme il faut et aspire", "Helen m'a niqué, il m'a touché, il m'a léché" (D28).

*

Le 5 avril 2005, l'information judiciaire était alors étendue au faits d'agressions sexuelles imposées à une personne vulnérable (D31). *

Une enquête était diligentée sur commission rogatoire (D33). *

Les membres de la famille d'Akim X... entendus s'accordaient à dire que son comportement était particulier depuis qu'il se trouvait dans ce centre. Il était plus triste, plus renfermé et était sous anti-dépresseurs.

Akim aurait évoqué à plusieurs reprises des violences subies.

Tous le croyaient incapable d'inventer de telles histoires.

Akim confiait souvent à sa famille qu'il ne voulait plus aller au centre (D35, D36, D37, D38).

Christiane X... rapportait aux enquêteurs des conversations

téléphoniques avec son frère alors qu'il se trouvait au centre et au cours desquelles il se plaignait de son éducateur Helen qui le grondait, lui tirait l'oreille et le tapait.

Alors, elle entendait selon les cas un éducateur ou une éducatrice présent à ce moment là dire à son frère que s'il ne s'arrêtait pas de dire des bêtises, il devrait raccrocher (D38).

Saliha X... affirmait que son frère Akim se portait des coups à Pertuis alors qu'il était interne dans le CAT et même après (D35).

Salem X... indiquait qu'au cours des années 1999 et 2000, son frère Akim aurait déjà été victime de coups portés par Robert C..., éducateur au CAT.

La directrice de l'établissement aurait affirmé à ce moment là qu'elle ferait le nécessaire (D37).

Akim X... était entendu en présence de sa soeur.

Il évoquait le fait d'avoir été embrassé sur la bouche, d'avoir reçu des fessées de la part de ses profs Helen et Robert qui lui auraient également imposésdes attouchements sur le corps et notamment son sexe le faisant "bander". Il mimait des gestes de masturbation.

Il précisait que faire l'amour était le fait d'embrasser et d'être embrassé sur la bouche (D39).

*

Marie France Z..., chef de service au CAT était de même entendue (D43).

Elle avait déjà fait l'objet d'une audition dans une précédente plainte (D42, D45) de Nora X... contre Helen BLANC pour des coups portés à son frère.

Elle maintenait que cela n'avait pu arriver et que les accusations d'agressions sexuelles étaient en contradiction avec le fait que

personne ne pouvait approcher ni toucher Akim (D43).

Claude AUTIER, chef d'établissement (D44) se disait abasourdi d'une nouvelle plainte. Selon lui, Nora X... serait une personne qui "se sent coupable vis à vis de son frère et qui cherche à tout prix un exutoire pour pouvoir se rassurer et exister".

Il ajoutait que le dossier d'Akim faisait état de violences subies par lui et sa mère de la part d'un frère Ali résidant à Marseille.

Il reconnaissait qu'il était arrivé qu'Akim ait eu les oreilles tirées mais qu'après consultation de sa famille, le personnel s'était vu interdire d'avoir recours à ce geste pour se faire écouter.

S'agissant des premiers faits dénoncés, il ressortait des auditions qu'Akim avait parfois un comportement violent envers le personnel féminin et envers lui-même. L'enquête ne permettait pas d'établir la véracité des dires de Nora X... (D45).

Il était, en outre, une procédure datant du 6 mars 2001 pour des faits de viol sur une résidente externe du CAT contre un éducateur du centre.

Helen BLANC était entendu sans l'assistance d'un avocat (D47).

Il continuait à nier ces faits de violences. Pour lui, il exerçait sa fonction d'aide médico-psychologique sans recourir à la violence.

Il affirmait que "tous les éducateurs qui avaient travaillé avec Akim pourraient dire qu'il était un résident qui se masturbait fréquemment dans sa chambre avec bruit et gestes qui pouvaient être perçus du couloir devant sa porte de chambre. Il mimait l'acte d'amour en tapant sur le matelas, et lorsqu'il faisait trop de bruit, on lui demandait de s'arrêter et il le faisait.

Il tenait à préciser que les proches d'Akim du sexe féminin l'embrassaient sur la bouche en guise de bonjour.

Il pensait qu'Akim inventait ses accusations pour pouvoir rentrer chez lui, acceptant mal son internat.

Parlant d'un autre résident qui selon Akim aurait été également victime de violences physiques de sa part, il déclarait "Reidar est une personne totalement différente d'Akim dans sa maladie...qui a donc besoin d'un "coup de pied au derrière pour lui remettre les esprits en place, il ne s'agit pas de violences".

Robert C..., le second éducateur mis en cause (D48), niait également à son tour avoircommis des violences physiques ou sexuelles sur la personne d'Akim X....

Il expliquait les accusations d'Akim par le fait qu'il était son référent comme Helen BLANC et que cela créait des liens particuliers. IIs.

II évoquait des faits de violences de la part d'Akim sur des camarades. [*

Akim X... était examiné par un psychiatre, le docteur D.... L'expert estimait que les faits évoqués par Akim ont un caractère de vécu traumatique en tant que ressentisubjectif exprimé de manière émotionnelle. *]

Nora X... sollicitait ou faisait solliciter à trois reprises des mesures d'instruction complémentaires qui étaient rejetées. Aucun appel n'était interjeté.

[*

Le Ministère Public a requis la confirmation de l'ordonnance déférée. *]

Par mémoire, le conseil de Nora X... fait valoir :

- la crédibilité des déclarations de son frère, se référant notamment aux considérations du docteur E...,

- que les déclarations seraient corroborées par des éléments objectifs du dossier (existence de violences anciennes de Robert C... sur Akim, recours à la violence sur des pensionnaires par Helen BLANC). * * * * *

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu qu'en l'état de la procédure, les faits allégués ne peuvent être objectivés par aucun élément matériel, l'analyse devant porter pour l'essentiel sur des déclarations contredites par les divers intéressés ;

que si les déclarations d'Akim X... et celles de sa famille se confortent, celles des éducateurs mis en cause et des responsables du CAT s'accordent à les contester ;

Attendu que les faits ici évoqués et tels qu'exposés dans la déclarations d'Akim X..., à les supposer établis, consisteraient en des violences commises à l'occasion d'actes à connotation sexuelle ;

qu'il ne peut être extrapolé, comme le propose la partie civile dans son mémoire à partir de situations qui n'ont pas conduit à des déclarations de responsabilité pénale en leur temps et qui ne présentent pas d'identité avec ceux aujourd'hui explicités par la victime ;

Attendu qu'il est possible d'aller au delà du ressenti d'Akim X... exprimé dans ses déclarations, en se référant aux rapports psychiatriques déposés par les docteurs E... et D...;

que le premier jugeait nécessaire de prendre la plainte en considération (D29) et que pour le second, les faits évoqués ont un caractère de vécu traumatique en tant que ressenti subjectif exprimé

de manière émotionnelle ;

Mais attendu, cependant, que nonobstant les appréciations ainsi portées, Akim X... apparaît au second psychiatre comme un sujet suggestible, influençable, passif et qui entretient des relations contenues dans un milieu de tolérance et d'affectivité souple ;

que cet expert estime encore que son insuffisance intellectuelle affecte la crédibilité d'Akim X... empêchant le sujet d'avoir les moyens de bien rendre compte de ce qui lui est arrivé et d'en donner une contextualisation et que celui-ci est aussi capable d'emprunter aux récits des autres pour construire sa propre vision" ; *

Attendu, dans ces conditions, que c'est à juste titre que le magistrat instructeur a pu estimer qu'à défaut d'éléments matériels, il ne ressortait pas des différents éléments du dossier la certitude que les faits dénoncés aient eu lieu, les déclarations de la prétendue victime, atteinte de trisomie 21, ne pouvant suffire en raison de son insuffisance intellectuelle affectant sa crédibilité ; qu'en conséquence, l'ordonnance querellée ne peut qu'être confirmée ; PAR CES MOTIFS

Vu les articles 177, 184, 186, 194 et suivants et notamment 212 et 216 du Code de Procédure Pénale,

LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION : EN LA FORME,

Déclare l'appel recevable, AU FOND,

Confirme l'ordonnance déférée.

Ordonne que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de Monsieur le Procureur général ; FAIT A AIX EN PROVENCE, au Palais de Justice en Chambre du conseil, à l'audience du SEPT MARS DEUX MILLE SIX la Cour étant composée comme à l'audience du VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE SIX où siégeaient : Monsieur POUSSIN, Président de la Chambre de l'Instruction Madame ROBIN, Conseiller Madame GAUDY, Conseiller qui en ont délibéré le jour même, Tous trois désignés à ces fonctions, conformément aux dispositions de l'article 191 du code de Procédure Pénale, Monsieur F..., Avocat Général Madame G..., Greffier Tous composant la Chambre de l'Instruction et ont signé le présent arrêt, LE GREFFIER

LE PRESIDENT

Les Conseils des parties ont été avisés du présent arrêt, par lettre recommandée. LE GREFFIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0097
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949369
Date de la décision : 07/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2006-03-07;juritext000006949369 ?
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