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17/01/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006948639

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0023, 17 janvier 2006, JURITEXT000006948639


M. Pascal X... a été hospitalisé au Centre Hospitalier d'AIX-EN-PROVENCE à la suite d'un accident de la circulation dont il a été victime le 6 décembre 1986 et dont M. Pierre Y..., assuré auprès de la S.A. A.G.F. IART, a été déclaré responsable selon jugement correctionnel du 23 juin 1987 ; au cours de cette hospitalisation M. Pascal X... a subi des transfusions sanguines et, le 6 juin 1996, il a été médicalement constaté une contamination par le virus de l'hépatite C. L'article 102 de la loi no 02-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du systè

me de soins est applicable aux instances n'ayant pas donné lieu à un...

M. Pascal X... a été hospitalisé au Centre Hospitalier d'AIX-EN-PROVENCE à la suite d'un accident de la circulation dont il a été victime le 6 décembre 1986 et dont M. Pierre Y..., assuré auprès de la S.A. A.G.F. IART, a été déclaré responsable selon jugement correctionnel du 23 juin 1987 ; au cours de cette hospitalisation M. Pascal X... a subi des transfusions sanguines et, le 6 juin 1996, il a été médicalement constaté une contamination par le virus de l'hépatite C. L'article 102 de la loi no 02-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins est applicable aux instances n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. Selon ce texte, en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination ; le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles et que le doute profite au demandeur. En l'espèce l'enquête transfusionnelle a établi que l'un des donneurs à l'origine de la poche no 391 975 a été contrôlé positif au V.H.C. le 25 mars 1990 et le 25 mars 1999 et l'analyse des bases A.R.N. des deux souches virales du donneur et du patient a montré qu'il n'existait pas de différence significative et que, d'un point de vue médico-légal, ces deux souches virales proviennent d'un virus unique contaminant et qu'en conséquence on peut imputer de façon quasi-certaine, aux erreurs statistiques près, la contamination par le V.H.C. de M. Pascal X... à la transfusion de la poche no 391 975 effectuée le 6

La S.A. AXA FRANCE IARD a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 18 novembre 2003 (enrôlé le 30 décembre 2003).

Vu les conclusions récapitulatives de M. Pascal X... en date du 11 octobre 2004.

Vu les conclusions de la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône en date du 10 novembre 2004.

Vu les conclusions récapitulatives de l'E.F.S. en date du 2 septembre 2005.

Vu les conclusions récapitulatives de la S.A. AXA FRANCE IARD en date du 24 octobre 2005.

Vu les conclusions de M. Pierre Y... et de la S.A. A.G.F. IART en date du 9 novembre 2005.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 16 novembre 2005.

M O T I F S D E L ' A R R Ê T I : SUR L'ORIGINE DE LA CONTAMINATION PAR LE V.H.C. :

Attendu que l'article 102 de la loi no 02-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins est applicable aux instances n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.

Attendu que selon ce texte, en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusioneure à la date d'entrée en vigueur de la loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination ; que le juge

décembre 1986. En conséquence l'origine transfusionnelle de la contamination de M. Pascal X... par le V.H.C. est établie avec certitude Est donc rapportée la preuve de la seule origine transfusionnelle de la contamination par le V.H.C., ce qui démontre la causalité certaine, directe et unique entre la transfusion et le dommage causé à la victime du seul fait de la défectuosité du produit transfusé ; en conséquence la responsabilité de ce dommage incombe au seul E.F.S. à l'exclusion du responsable de l'accident. COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10 Chambre ARRÊT AU FOND DU 17 JANVIER 2006 No 2005/ Rôle No 03/21657 AXA FRANCE IARD C/ Pascal X... L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG - EFS CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE Pierre Y... COMPAGNIE ASSURANCES GENERALES DE FRANCE IART " AGF IART" Grosse délivrée le : à : réf Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 06 Novembre 2003 enregistré au répertoire général sous le no 01/00203. APPELANTE AXA FRANCE IARD, anciennement dénommée AXA ASSURANCES IARD, entreprise régie par le Code des assurances, S.A au capi .0.0 .0tal de 214.799.030 euros, inscrite au RCS de PARIS sous le n 722 057 460, prise en la personne de son Président Directeur Général en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis, 26 rue Drouot - 75009 PARIS représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour, assistée de la SCP DAUMAS - WILSON - BERGE-ROSSI (ASS), avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Jean-Mathieu LASALARIE, avocat au barreau de MARSEILLE INTIMES Monsieur Pascal X... né le 17 Juin 1960 à PARIS, demeurant 1880 chemin de la Barre Saint Jean - 13290 LES MILLES représenté par la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER, avoués à la Cour, assisté de la SCP CAMPESTRE JL - CAMPESTRE O, avocats au barreau d'AIX EN PROVENCE L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG - EFS Etablissement Public de l'Etat créé au 01.07 2000 par la loi n

forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles et que le doute profite au demandeur.

Attendu qu'en l'espèce une expertise a été confiée au Pr. Robert Z..., par ordonnance de référé du 4 avril 1997, qui a déposé deux pré-rapports les 7 octobre 1997 et 16 mars 1999 et son rapport définitif le 24 février 2000, que ces rapports sont particulièrement complets et documentés et ne sont pas sérieusement critiqués par les parties.

Attendu qu'il en résulte que M. Pascal X... a été victime, le 6 décembre 1986, d'un accident de la circulation à la suite duquel il a été hospitalisé jusqu'au 1er juin 1987, qu'au cours des différentes hospitalisations il a été largement transfusé, qu'en juin 1996, devant la présence d'une asthénie, il a fait procéder à un bilan biologique qui, le 6 juin 1996, a mis en évidence une contamination par le virus de l'hépatite C.

Attendu que M. Pascal X... avait reçu 43 produits sanguins (dont la poche no 391 975) dont la matérialité de la transfusion a pu être établie, que ces produits étaient fournis par le Centre Régional de Transfusions Sanguine (ci-après C.R.T.S.) de MARSEILLE, aux droits duquel intervient désormais l'E.F.S.

Attendu que l'enquête transfusionnelle a établi que l'un des donneurs à l'origine de la poche no 391 975 a été contrôlé positif au V.H.C. le 25 mars 1990 et le 25 mars 1999.

Attendu que l'analyse des bases A.R.N. des deux souches virales du donneur et du patient a montré qu'il n'existait pas de différence

significative et que, d'un point de vue médico-légal, ces deux souches virales proviennent d'un virus unique contaminant et qu'en conséquence on peut imputer de façon quasi-certaine, aux erreurs statistiques près, la contamination par le V.H.C. de M. Pascal X... 98/545 du 01.07.1998, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, 100 Avenue de Suffren - 75015 PARIS représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour, assisté de la SELARL BAFFERT - FRUCTUS ET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Julie MOREAU, avocat au barreau de MARSEILLE CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE , prise en la personne de son Directeur en exercice domicilié en cette qualité au siège sis, 8 rue Jules Moulet - 13006 MARSEILLE représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, ayant Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE Monsieur Pierre Y... né le 03 Janvier 1952 à MASCARA / ALGERIE, demeurant Les Alpilles n 5 - Le Val Saint André - 13100 AIX EN PROVENCE représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour, assisté de Me Jean DECHEZLEPRETRE, avocat au barreau de PARIS COMPAGNIE ASSURANCES GENERALES DE FRANCE IART " AGF IART", prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, 87 rue de Richelieu - 75002 PARIS représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour, assistée de Me Jean DECHEZLEPRETRE, avocat au barreau de PARIS *-*-*-*-* COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 16 Novembre 2005 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Elisabeth VIEUX, Présidente Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller Madame Dominique KLOTZ, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève A... Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2006. ARRÊT Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2006, Signé par Madame Elisabeth VIEUX, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffière présente lors de la mise à disposition au greffe de la décision. *** E X P O S É D U L I T I G E

à la transfusion de la poche no 391 975 effectuée le 6 décembre 1986. Attendu qu'en conséquence l'origine transfusionnelle de la contamination de M. Pascal X... par le V.H.C. est établie avec certitude et n'est d'ailleurs pas sérieusement contestée par l'E.F.S. qui, sur ce point, s'en rapporte à justice. II : SUR LES RESPONSABILITÉS :

Attendu que l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD estiment que c'est à la S.A. A.G.F. IART, assureur du responsable de l'accident de la circulation initial, de prendre entièrement à sa charge la réparation du préjudice subi par M. Pascal X... en application de la théorie de l'équivalence des conditions.

Attendu qu'à l'inverse, M. Pierre Y... et la S.A. A.G.F. IART concluent à leur mise hors de cause et que, pour sa part, M. Pascal X... demande, comme en première instance, la condamnation solidaire de l'E.F.S., de M. Pierre Y... et de leurs assureurs respectifs, la S.A. AXA FRANCE IARD et la S.A. A.G.F. IART.

Attendu qu'il convient de rappeler que l'expertise du Pr. Robert Z... a établi sans équivoque que le

donneur à l'origine de la poche no 391 975 transfusée à la victime avait été contrôlé positif au V.H.C. et que les deux souches virales de ce donneur et de la victime provenaient d'un virus unique contaminant.

Attendu qu'est donc rapportée la preuve de la seule origine transfusionnelle de la contamination par le V.H.C., ce qui démontre la causalité certaine, directe et unique entre la transfusion et le dommage causé à la victime du seul fait de la défectuosité du produit transfusé ; qu'en conséquence la responsabilité de ce dommage incombe au seul E.F.S. à l'exclusion du responsable de l'accident.

Attendu dès lors que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a considéré que le responsable de l'accident et l'E.F.S. avaient M. Pascal X... a été hospitalisé au Centre Hospitalier d'AIX-EN-PROVENCE à la suite d'un accident de la circulation dont il a été victime le 6 décembre 1986 et dont M. Pierre Y..., assuré auprès de la S.A. A.G.F. IART, a été déclaré responsable selon jugement correctionnel du 23 juin 1987 ; au cours de cette hospitalisation M. Pascal

X... a subi des transfusions sanguines et, le 6 juin 1996, il a été médicalement constaté une contamination par le virus de l'hépatite C.

Par jugement réputé contradictoire du 6 novembre 2003, le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a : - Déclaré l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG (ci-après E.F.S.) et M. Pierre Y... tenus d'indemniser chacun pour moitié le préjudice subi par M. Pascal X... à la suite de sa contamination par le virus de l'hépatite C, - Fixé à 16.000 ç le préjudice subi par M. Pascal X... à la suite de cette contamination, - Condamné solidairement M. Pierre Y... et son assureur, la S.A. A.G.F. IART, à payer à M. Pascal X... la somme de 8.000 ç, - Condamné l'E.F.S. à payer à M. Pascal X... la somme de 8.000 ç au titre de son préjudice corporel et moral, - Condamné la S.A. AXA FRANCE IARD à garantir l'E.F.S. dans les limites de son plafond de garantie de 381.122 ç 54 c. pour l'année 1986, - Rejeté les demandes de la S.A. AXA FRANCE IARD, - Ordonné l'exécution provisoire de sa décision à concurrence des quatre cinquièmes des sommes allouées, - Condamné M. Pierre Y... et la S.A. A.G.F. IART solidairement d'une part et l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD solidairement d'autre part, chacun pour moitié, à payer à M. Pascal X... la somme globale de 1.500 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

concouru, à proportions égales, à la contamination de M. Pascal X... par le V.H.C. et en ce qu'il a déclaré l'E.F.S. et M. Pierre Y..., solidairement avec leurs assureurs respectifs, tenus d'indemniser chacun pour moitié le préjudice subi par M. Pascal X... à la suite de sa contamination par le virus de l'hépatite C et que, statuant à nouveau de ce chef, M. Pierre Y... et la S.A. A.G.F. IART seront mis hors de cause et M. Pascal X... de première part, la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône de deuxième part et l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD de troisième part, seront déboutés de leurs demandes à leur encontre.

Attendu qu'il est constant qu'à l'époque des faits le C.R.T.S. (aux droits duquel intervient désormais l'E.F.S.) était assuré par la Compagnie U.A.P.(aux droits de laquelle intervient désormais la S.A. AXA FRANCE IARD) selon police 3.1385 0428.332B en vigueur à compter du 1er janvier 1985 et résiliée au 31 décembre 1989.

Attendu que dans ses conclusions récapitulatives d'appel la S.A. AXA FRANCE IARD renonce à invoquer le bénéfice de la clause dite de "garantie subséquente" de la police d'assurance subordonnant sa

garantie à ce que la réclamation soit portée à la connaissance de l'assuré pendant un délai maximum de cinq ans après la date d'expiration ou de résiliation du contrat, qu'en conséquence elle ne dénie plus devoir sa garantie à l'E.F.S. au titre de cette police d'assurance.

Attendu toutefois que la S.A. AXA FRANCE IARD demande, en cas de condamnation, l'application du plafond contractuel de garantie fixé à 2.500.000 F. (381.122,54 ç) pour l'année 1986, qu'en effet ce plafond de la garantie fixé par le contrat d'assurance constitue la limite de l'indemnisation due par l'assureur pour une même année d'assurance quel que soit le nombre de sinistres ou de victimes.

Attendu dès lors que la condamnation solidaire de l'E.F.S. et de la A. AXA FRANCE IARD sera prononcée, en ce qui concerne la compagnie d'assurance, dans la limite de son plafond de garantie de 381.122 ç 54 c. pour l'année 1986, qu'il appartiendra à la compagnie d'assurance de justifier de ce que ce plafond est effectivement dépassé pour l'année 1986, au besoin devant le Juge de l'Exécution en cas de difficulté d'exécution du présent arrêt, étant observé que le seul document produit dans le cadre de la présente instance (liste des dossiers concernant le C.R.T.S. de Marseille ayant abouti à un règlement de sinistre en 1986) ne fait état de règlements qu'à hauteur de 136.807 ç, la somme supplémentaire de 307.790 ç 80 c. ayant été rajoutée manuscritement sans aucune certitude quant à son authenticité. III : SUR L'ÉVALUATION ET LA LIQUIDATION DES PRÉJUDICES DE M. PASCAL X... :

Attendu que l'expert judiciaire a relevé des troubles objectifs consistant en un syndrome anxio-dépressif léger, traité par Prozac" et des manifestations fonctionnelles, essentiellement subjectives, faites d'asthénie et d'hypersomnie, qu'il estime toutefois que si l'ensemble de ces manifestations est en liaison directe et certaine avec la contamination, elle ne l'est pas exclusivement pour le syndrome anxio-dépressif, sans pouvoir préciser la part des séquelles somatiques due au fait accidentel lui-même.

Attendu que pour ce qui concerne les séquelles considérées comme directement imputables à la contamination par le V.H.C. et ses conséquences somatiques et psychiques, l'expert retient une I.T.T. cumulée de neuf jours (2 jours pour la biopsie hépatique du 15 décembre 1997 et 7 jours pour la mise en place du traitement par Interféron" Alpha du 6 avril 1998), une I.T.P. à 33 % pendant les quatre mois du traitement par Interféron" Alpha du 6 avril au 8 août 1998 avec une date de consolidation au 24 février 2000, qu'il fixe le taux d'I.P.P. à 5 % et évalue le pretium doloris à 2,3/7 au titre de la biopsie hépatique et du retentissement immédiat du traitement par Interféron" Alpha, qu'il ne retient ni préjudice esthétique ni préjudice d'agrément. Le préjudice corporel économique soumis au recours des tiers payeurs :

Attendu que les premiers juges ont évalué le préjudice subi au titre de l'I.T.T. et de l'I.T.P. à 33 % à la somme globale de 1.000 ç et le préjudice subi au titre du déficit fonctionnel séquellaire à la somme de 5.000 ç, que l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD ne contestent pas ces évaluations, concluant, à titre subsidiaire, à la confirmation

sur ce point du jugement déféré.

Attendu que pour sa part M. Pascal X... ne fait, dans ces conclusions d'appel, aucune critique particulière de l'évaluation de ces chefs de préjudice, son appel incident portant sur les postes de préjudice à caractère personnel (préjudice au titre des souffrances endurées, préjudice esthétique et préjudice spécifique de contamination), que dès lors ces évaluations seront maintenues.

Attendu cependant qu'en première instance la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône n'avait pas fait valoir sa créance, qu'en cause d'appel elle justifie de ce que sa créance correspond bien aux débours engagés au titre des conséquences de la contamination par le V.H.C. puisque les frais d'hospitalisation du 15 au 16 décembre 1997 pour 3.254 F. (496,07 ç) correspondent à la biopsie hépatique du 15 décembre 1997 et que les frais médicaux et pharmaceutiques du 6 avril au 8 août 1998 pour 4.002 F. 20 c. (610,13 ç) correspondent au traitement par Interféron", que sa créance globale non contestable est donc de 1.106 ç 20 c.

Attendu dès lors que l'entier préjudice corporel de M. Pascal X..., soumis au recours des tiers payeurs, sera évalué ainsi qu'il suit : - Frais d'hospitalisation : 496 ç 07 c. pris en charge par la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône, - Frais médicaux et pharmaceutiques : 610 ç 13

c. pris en charge par la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône, - I.T.T. et I.T.P. : 1.000 ç, - Déficit fonctionnel séquellaire : 5.000 ç. TOTAL : 7.106 ç 20 c. dont il convient de déduire la créance de la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône (1.106 ç 20 c.), il revient à ce titre à la victime la somme de 6.000 ç. Le préjudice corporel à caractère personnel :

Attendu que les premiers juges ont évalué le préjudice au titre des souffrances endurées à 3.000 ç, que l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD ne contestent pas cette évaluation, concluant, à titre subsidiaire, à la confirmation sur ce point du jugement déféré.

Attendu que pour sa part M. Pascal X... réclame la somme de 8.000 ç en réparation de ce poste de préjudice et réclame en outre la somme de 8.000 ç en réparation de son préjudice esthétique.

Attendu que le préjudice au titre des souffrances endurées a été évalué à 2,3/7 par l'expert judiciaire au titre de la biopsie hépatique et du retentissement immédiat du traitement par Interféron" Alpha, qu'en fonction de ces conclusions, non démenties par d'autres pièces d'ordre médical, il apparaît que les premiers juges ont fait une exacte évaluation de ce poste de préjudice à la somme de 3.000 ç. Attendu d'autre part que l'expert judiciaire n'a pas retenu de préjudice esthétique, que M. Pascal X... ne motive sa demande de ce chef qu'en alléguant qu'à la suite du traitement par Interféron" "une chute de cheveux, un vieillissement prématuré et des rougeurs au visage peuvent apparaître", ce qui ne constitue qu'un préjudice purement hypothétique et que c'est donc à juste titre que les premiers juges l'ont débouté de ce chef de demande.

Attendu en conséquence que le préjudice corporel à caractère personnel de M. Pascal X... sera évalué à la somme de 3.000 ç. Le préjudice moral spécifique de

contamination :

Attendu que les premiers juges ont évalué ce chef de préjudice à la somme de 7.000 ç, que l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD ne contestent pas l'existence de ce préjudice et son évaluation, concluant également, à titre subsidiaire, à la confirmation sur ce point du jugement déféré.

Attendu que pour sa part M. Pascal X... réclame la somme de 228.673 ç 53 c. en réparation de ce poste de préjudice.

Attendu qu'il existe bien un préjudice spécifique de contamination par le V.H.C. tenant aux souffrances morales endurées à la suite des traitements nécessaires ainsi qu'à l'anxiété générée par le fait de se savoir porteur du virus de l'hépatite C.

Attendu que l'expert rappelle en effet que la contamination par le V.H.C. connaît une évolution lente et sournoise, dans 80 % des cas vers une forme chronique, que 20 % des malades atteints d'hépatite chronique C développent, après dix ans d'évolution, une cirrhose et 5 % évoluent vers un cancer primitif du foie.

Attendu qu'en l'espèce M. Pascal X... présente une hépatite chronique C, de faible activité, avec une fibrose nette (score de Knodell à 8) et une réplication virale modérée associée à une cytolyse d'intensité modérée, qu'une tentative de traitement spécifique par Interféron" Alpha a dû être interrompue après un mois pour effets secondaires marqués et non réponse au traitement, les transaminases étant toujours très élevées, qu'une deuxième thérapie par association de l'Interféron" Retard et de la Ribavirine" est envisagée mais ne pourra être programmée que dès que l'Interféron" Retard sera disponible sur le marché, sans qu'on puisse savoir, à ce jour, si cette bithérapie sera susceptible d'améliorer son état.

Attendu en conséquence que M. Pascal X..., âgé de 26 ans au moment de sa contamination, est atteint d'une hépatite C chronique et est confronté au risque non négligeable de développer à plus ou moins

long terme une cirrhose, elle-même susceptible d'évoluer vers un cancer du foie au pronostic mortel, qu'il devra donc encore subir dans les années à venir des examens médicaux nombreux, tant en ville qu'en milieu hospitalier, réactivant la confrontation psychologique avec son état de contamination, sans aucune certitude quant à l'efficacité des traitements envisagés.

Attendu en outre qu'en ce qui concerne particulièrement le syndrome anxio-dépressif présenté par la victime, la Cour constate que le rapport d'expertise médicale de M. Pascal X..., établi le 19 juin 1989 par le Dr. Armand ARROUAS pour évaluer les préjudices résultant de l'accident de la circulation du 6 décembre 1986, ne fait mention d'aucun syndrome anxio-dépressif consécutif à cet accident et que ce syndrome n'est apparu qu'après que M. Pascal X... a eu connaissance de sa contamination par le V.H.C. ainsi que cela ressort du certificat médical de son médecin traitant, le Dr. Marc GHNASSIA, repris par l'expert judiciaire dans son rapport.

Attendu qu'en l'état de l'ensemble de ces éléments, la Cour évalue ce préjudice moral spécifique de contamination à la somme de 50.000 ç. IV : SUR LES CONDAMNATIONS :

Attendu que le jugement déféré sera en conséquence infirmé sur l'évaluation et la liquidation des préjudices corporel et moral de M. Pascal X... et que, statuant à nouveau de ces chefs, l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD seront solidairement condamnés (dans la limite de son plafond annuel de garantie de 381.122 ç 54 c. pour l'année 1986 pour la compagnie d'assurance) à payer à M. Pascal X..., en deniers ou quittance compte tenu des sommes pouvant avoir été versées en vertu de l'exécution provisoire partielle du jugement déféré, la somme de

9.000 ç au titre de son préjudice corporel et la somme de 50.000 ç au titre de son préjudice moral spécifique de contamination. Attendu d'autre part que l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE seront solidairement condamnés (dans la limite de son plafond annuel de garantie de 381.122 ç 54 c. pour l'année 1986 pour la compagnie d'assurance) à payer à la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône la somme de 1.106 ç 20 c. au titre de ses débours.

Attendu qu'il est équitable, compte tenu au surplus de la situation économique des parties condamnées, d'allouer à M. Pascal X... la somme de 4.000 ç au titre des frais par lui exposés tant en première instance qu'en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement déféré étant infirmé de ce chef, qu'aucune raison tirée de l'équité ou de la situation économique des parties ne commande le prononcé d'autres condamnations au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens.

Attendu que l'E.F.S. et la S.A. AXA FRANCE IARD, parties perdantes, seront solidairement condamnés au paiement des dépens de la procédure de première instance (le jugement déféré étant infirmé de ce chef) et

d'appel. P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a retenu l'origine transfusionnelle de la contamination de M. Pascal X... par le virus de l'hépatite C.

L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau et y ajoutant :

Dit que l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG est l'unique responsable de la contamination de M. Pascal X... par le virus de l'hépatite C.

Met hors de cause en conséquence M. Pierre Y... et la S.A. A.G.F. IART et déboute M. Pascal X..., la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône, l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG et la S.A. AXA FRANCE IARD de l'ensemble de

Met hors de cause en conséquence M. Pierre Y... et la S.A. A.G.F. IART et déboute M. Pascal X..., la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône,

l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG et la S.A. AXA FRANCE IARD de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de M. Pierre Y... et de la S.A. A.G.F. IART.

Évalue le préjudice corporel économique de M. Pascal X... soumis au recours des tiers payeurs à la somme de SEPT MILLE CENT SIX EUROS VINGT CENTS (7.106 ç 20 c.).

Fixe la créance de la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône à la somme de MILLE CENT SIX EUROS VINGT CENTS (1.106 ç 20 c.).

Évalue le préjudice corporel à caractère personnel de M. Pascal X... à la somme de TROIS MILLE EUROS (3.000 ç).

Évalue le préjudice moral spécifique de contamination de M. Pascal X... à la somme de CINQUANTE MILLE EUROS (50.000 ç).

Condamne solidairement l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG et la S.A. AXA FRANCE IARD (dans la limite de son plafond annuel de garantie de TROIS CENT QUATRE VINGT UN MILLE CENT VINGT DEUX EUROS

CINQUANTE QUATRE CENTS 381.122 ç 54 c. pour l'année 1986) à payer les sommes suivantes : - À M. Pascal X..., en deniers ou quittance compte tenu des sommes pouvant avoir été versées en vertu de l'exécution provisoire partielle du jugement déféré : NEUF MILLE EUROS (9.000 ç) au titre de son préjudice corporel et CINQUANTE MILLE EUROS (50.000 ç) au titre de son préjudice moral spécifique de contamination. - À la C.P.A.M. des Bouches-du-Rhône : MILLE CENT SIX EUROS VINGT CENTS (1.106 ç 20 c.) au titre de ses débours.

Dit qu'il appartiendra à la S.A. AXA FRANCE IARD de justifier de ce que ce plafond est dépassé pour l'année 1986, au besoin devant le Juge de l'Exécution en cas de difficulté d'exécution sur ce point du présent arrêt.

Déboute M. Pascal X... du surplus de ses demandes.

Condamne solidairement l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG et la S.A. AXA FRANCE IARD à payer à M. Pascal

X... la somme de QUATRE MILLE EUROS (4.000 ç) au titre des frais exposés en première instance et en cause d'appel et non compris dans les dépens.

Dit n'y avoir lieu à prononcer d'autres condamnations au titre des frais irrépétibles.

Condamne solidairement l'ÉTABLISSEMENT FRANOEAIS DU SANG et la S.A. AXA FRANCE IARD aux dépens de la procédure de première instance et d'appel et autorise la S.C.P. LATIL, PENARROYA-LATIL, ALLIGIER, Avoués associés, la S.C.P. SIDER, Avoués associés et la S.C.P. ERMENEUX-CHAMPLY, LEVAIQUE, Avouées associées, à recouvrer directement ceux des dépens dont elles auraient fait l'avance sans avoir reçu provision. Magistrat rédacteur : Monsieur RAJBAUT Madame JAUFFRES

Madame VIEUX GREFFIÈRE

PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0023
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006948639
Date de la décision : 17/01/2006

Analyses

SANTE PUBLIQUE

Attendu que l'article 102 de la loi n 02-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité su système de soins est applicable aux instances n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. Que selon ce texte, en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles et que le doute profite à l'accusé. Qu'en l'espèce, l'enquête transfusionnelle ayant établi que l'un des donneurs à l'origine d'une poche transfusée a été contrôlé positif au VHC, et l'analyse des bases A.R.N. des deux souches virales du donneur et du patient montrant qu'il n'existait pas de différence significative et qu'ainsi, d'un point de vue médico-légal, ces deux souches proviennent d'un virus unique contaminant, il peut être imputé de façon quasi-certaine, aux erreurs statistiques près, la contamination par le VHC du demandeur à la transfusion de la poche litigieuse au cours d'une hospitalisation. Qu'ainsi, la preuve rapportée de la seule origine transfusionnelle de la contamination par le VHC démontrant la causalité certaine, directe et unique entre la transfusion et le dommage causé à la victime du seul fait de la défectuosité du produit transfusé, seul l'EFS, à l'exclusion du responsable de l'accident, doit être tenu responsable du dommage.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2006-01-17;juritext000006948639 ?
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