ARRÊT DU
07 Juin 2023
JYS / NC
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N° RG 22/00255
N° Portalis DBVO-V-B7G -C7NO
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[S] [J] née [N]
C/
[P] [Y] épouse [R]
[T] [R]
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GROSSES le
aux avocats
ARRÊT n° 249-23
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Madame [S] [J] née [N]
née le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 12]
de nationalité française
domiciliée : [Adresse 5]
[Localité 7]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/00536 du 04/03/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN)
représentée par Me Sandrine FOURNIER, SELARL JL MARCHI CONSULTANTS, avocate au barreau d'AGEN
APPELANTE d'un jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de VILLENEUVE-SUR-LOT en date du 07 janvier 2022, RG 11-21-000182
D'une part,
ET :
Monsieur [T] [R]
né le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 13] (Sicile)
de nationalité italienne, restaurateur
Madame [P] [Y] épouse [R]
née le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 10]
de nationalité française, restauratrice
domiciliés ensemble : [Adresse 11]
[Localité 6]
représentés par Me Erwan VIMONT, substitué à l'audience par Me Jobic VIMONT, membre de la SCP LEX ALLIANCE, avocat au barreau d'AGEN
INTIMÉS
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 11 janvier 2023 devant la cour composée de :
Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Jean-Yves SEGONNES, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience
Greffière : Lors des débats : Charlotte ROSA , adjointe administrative faisant fonction
Lors de la mise à disposition : Nathalie CAILHETON
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] ont mandaté le cabinet immobilier [U] du groupe Foncia à [Localité 7] pour donner à bail par contrat-type avec clause résolutoire au § VIII, sous seing privé le 26 juillet 2019, à Mme [S] [J] née [N], un logement de type 5 d'une superficie de 113 m² à [Localité 7], (L. et G.), moyennant un loyer mensuel de 666 € indexés et une provision mensuelle pour charges de 25 euros.
Me [X], huissier à [Localité 7], a délivré commandement de payer 3 758 euros de reliquat de loyers et charges impayés le 30 mars 2021 dans les deux mois en visant la clause résolutoire.
Le compte à l'agence Foncia était débiteur de 2 081,72 euros au 1er janvier 2021, 3 472,44 euros, 3 758,80 euros au 2 mars 2021 et à - 4 796,83 euros le 4 juin 2021, la Caisse d'allocations familiales ayant réglé pour la locataire 4 x 409 euros au titre des loyers et charges sur le semestre.
Suivant acte d'huissier délivré le 27 juillet 2021, Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] ont fait assigner Mme [L] [J] née [N] devant le juge du contentieux de la protection de Villeneuve-sur-Lot pour, au principal, résilier sur le fondement de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 et des articles 1103 et 1227 à 1229 du code civil, son bail d'habitation, l'expulser et la condamner à payer 4 796,83 euros au titre des loyers échus impayés outre une indemnité d'occupation mensuelle de 695,36 euros jusqu'à son départ des lieux.
Reconventionnellement, la défenderesse a sollicité la suspension des loyers jusqu'à justification de la réalisation de tous les travaux préconisés au rapport de visite du pôle urbanisme et habitat de la mairie de [Localité 7] du 9 février 2021 et l'allocation de 5 000 euros au titre de son préjudice de jouissance complète et paisible du logement depuis son emménagement.
Par jugement contradictoire du 7 janvier 2022, le tribunal a :
- constaté la recevabilité de la demande en constat de la résiliation du contrat de bail,
- constaté la résiliation à la date du 30 mai 2021 du bail conclu le 26 juillet 2019,
- ordonné l'expulsion de Mme [L] [J] née [N] et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, des locaux à usage d'habitation situés au [Adresse 2] à [Localité 7] par toutes voies de droit, passé le délai de deux mois après la signification du commandement d'avoir à quitter les lieux,
- condamné [L] [J] née [N] à payer à Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] la somme de 9 100,09 euros correspondant au montant des arriérés de loyers et charges arrêté au 1er novembre 2021, terme de novembre inclus, et déduction faite des frais annexes, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement,
- condamné Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] à payer à [L] [J] née [N] la somme de 800 euros en réparation de son préjudice de jouissance,
- débouté Mme [L] [J] née [N] de l'ensemble de ses autres demandes,
- condamné [L] [J] née [N] à payer à Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [L] [J] née [N] aux entiers dépens de l'instance,
- rejeté l'ensemble des autres demandes,
- dit que l'exécution provisoire est de droit,
- dit que copie de la présente décision sera transmise au préfet.
Le tribunal a jugé :
- pour résilier le bail, qu'en la forme, le commandement de payer a été délivré plus de deux mois avant l'audience, l'assignation a été notifiée au préfet et la commission de prévention des expulsions locatives était saisie ; qu'au fond, le solde locatif étant resté débiteur plus de 2 mois, la résiliation est acquise au 30 mai 2021,
- pour condamner sur les arriérés et l'indemnité d'occupation sur la base du loyer plus charges, que ce solde s'élevait au 30 novembre 2021 à 9 100,09 euros,
- pour rejeter les demandes reconventionnelles, que s'il peut être relevé des constats d'indécence et insécurité dans le logement au rapport du 24 février 2021 des services municipaux, la locataire a participé aux dommages de moisissures qu'elle a subis en ne permettant pas l'intervention des entreprises devant remédier aux fuites, de manière à utiliser convenablement le chauffage électrique, de sorte que la réduction de loyers n'est pas justifiée et la réparation du préjudice de jouissance doit être limitée.
PROCÉDURE
Suivant déclaration au greffe, Mme [L] [J] née [N] a fait appel de tous les chefs de ce dispositif sauf le signalement au préfet de département de Lot-et-Garonne.
Selon dernières conclusions visées au greffe le 26 septembre 2022, Mme [L] [J] née [N] demande, en infirmant le jugement, de :
- débouter Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] de leur appel incident,
- réduire le montant du loyer à 300 euros mensuels à compter du 1er août 2019,
- suspendre les paiements jusqu'à fourniture d'une attestation d'un électricien de mise en conformité de l'installation électrique aux normes et réalisation des travaux mettant un terme à l'infiltration dans la chambre dressing et à l'apparition et la présence de moisissures dans le logement,
- condamner Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] à lui payer 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamner Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] à lui payer 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] aux entiers dépens.
L'appelante expose que la cause des moisissures n'est pas le chauffage insuffisant mais une infiltration d'eau provenant de la salle de bains qu'elle a immédiatement signalée après son entrée dans les lieux et le logement est mal isolé ; au demeurant, il ressort de l'enquête administrative que tous les radiateurs ne peuvent pas chauffer en même temps en raison de la faible puissance du compteur électrique et elle a passé trois hivers dans l'humidité avec ses deux fillettes ; elle dénie avoir fait obstacle au passage des entreprises dont elle n'a pas été avisée et nuls travaux n'ont été faits jusqu'à son déménagement.
Elle fait valoir que la location ne satisfait pas aux critères du décret du 30 janvier 2002 sur l'obligation de délivrer un local décent sans risque d'atteinte à la santé et la sécurité des locataires et il s'ensuit que les loyers ne peuvent plus lui être réclamés depuis le compte rendu de ces constatations, soit mars 2021 ; les bailleurs doivent au moins déduire de leur demande le montant de l'allocation personnalisée au logement de 411 euros par mois suspendue jusqu'à l'exécution des travaux d'amélioration du logement ainsi qu'ils doivent faire état des sommes perçues au titre de leur assurance de garantie des loyers à hauteur desquelles ils sont désintéressés.
Selon conclusions visées au greffe le 22 novembre 2022, Mme [P] [R] née [Y] et M. [T] [R] demandent de :
- prononcer l'irrecevabilité des conclusions de Mme [L] [J] née [N] notifiées le 26 septembre 2022,
- constater que Mme [L] [J] née [N] ayant quitté le logement et restitué les clés, il n'y a plus lieu d'ordonner son expulsion,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [L] [J] née [N] au paiement des arriérés de loyers et charges, dont le montant sera actualisé à 15 099,66 euros à la restitution le 2 août 2022 et à une indemnité d'occupation égale aux montants des loyers et charges outre à une indemnité de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [L] [J] née [N] de ses demandes visant à réduire le loyer à 300 euros par mois et le suspendre jusqu'à justification de tous les travaux préconisés par le rapport de visite du pôle municipal urbanisme et habitat du 9 février 2021, à résilier le bail pour manquement grave à l'obligation de délivrer un bien en location à usage d'habitation décent et à être autorisée à quitter la maison louée sans préavis, à lui payer 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique,
- réformer le jugement en ce qu'il les a condamnés à payer à Mme [L] [J] née [N] 800 euros de préjudice de jouissance,
et faisant droit à leur appel incident, de :
- débouter Mme [L] [J] née [N] de sa demande en dommages et intérêts en réparation de ce soit-disant préjudice,
- condamner Mme [L] [J] née [N] à leur payer 4.943,05 euros au titre des travaux de remise en état et nettoyage,
et en tout état de cause, de :
- condamner Mme [L] [J] née [N] au paiement de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Les intimés soulèvent que les dernières conclusions de l'appelante n'indiquent pas sa nouvelle adresse personnelle.
Ils exposent que la locataire avait cessé de payer le loyer et les charges depuis novembre 2020, était débitrice de 9 100,09 euros au 1er novembre 2021 et sa dette atteignait 9 968,17 euros avec les frais sur son compte Foncia le 2 décembre 2021 et 15 099,36 euros sans les frais le 15 août 2022 ; elle a quitté la location au 2 précédant en rendant les clés ; Le rapport de visite municipale du 24 février 2021 dit que l'installation électrique est en sécurité et constate des moisissures et infiltrations dans la chambre dressing sur le mur mitoyen à la salle de bains, les radiateurs fonctionnent mais sont éteints par la locataire qui a été avisée d'avoir à utiliser convenablement le chauffage à sa disposition pour éviter le développement des champignons et il lui appartenait de changer son contrat de fourniture d'électricité et faire remplacer son compteur.
Ils font valoir que le logement n'est donc pas indécent ni insécure et la locataire ne peut jamais interrompre le paiement des loyers sauf péril ou insalubrité ; ils n'ont aucune somme à déduire de leur décompte du fait que la locataire a par trois fois empêché l'accès de l'électricien et du plombier à l'appartement pour faire les travaux préconisés par le service municipal de l'habitat. A défaut d'état des lieux d'entrée, le logement est réputé livré en bon état, la locataire sortante ne s'est pas présentée à l'état des lieux du 17 août 2022 par huissier mentionnant le mauvais état général de la location, le défaut d'entretien et les ordures dans le jardin ; les travaux de nettoiement s'élèvent 900 euros ttc et ceux de reprise des peintures s'élèvent à 4 043 euros ttc.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
La clôture de la procédure a été ordonnée le 14 décembre 2022.
Par acte reçu au greffe le 21 décembre 2022, Me [Z] [I] s'est constituée l'avocate de l'appelante aux lieu et place de Me [Z] [K].
Suivant conclusions visées au greffe le 2 janvier 2023, Me [I] demande la révocation de la clôture de la procédure, la défixation de l'affaire du rôle des plaidoiries du 11 janvier 2023 et le renvoi à une date de plaidoiries ; et ce aux motifs, de droit que le principe du contradictoire doit être respecté et de fait, que les conclusions récapitulatives des intimés contiennent de nouvelles demandes financières auxquelles Me [K] n'a pas été en mesure de répliquer, ne convenant plus à Mme [L] [J] née [N] qu'il a représentée.
Suivant conclusions visées au greffe le 3 janvier 2023, Me Vimont, pour les intimés, appelants incidents, demande de rejeter la révocation et de maintenir la présente date d'audience, conformément à l'article 771 du code de procédure civile.
MOTIFS
1/ Sur la procédure :
L'article 803 du code de procédure civile dispose :
" L'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation. "
En l'espèce, la nouvelle constitution d'avocat de Me [I] est postérieure à l'ordonnance du conseiller de la mise en état alors que Me [K] a disposé de trois semaines jusqu'à la clôture pour répondre aux dernières conclusions des intimés.
Le renvoi à la mise en état n'est pas justifié.
2/ Sur le fond des appels :
Les articles 6 et 7 de la loi du 6 juillet 1989 disposent :
" Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Un décret en Conseil d'Etat définit le critère de performance énergétique minimale à respecter et un calendrier de mise en 'uvre échelonnée.
Les caractéristiques correspondantes sont définies par décret en Conseil d'Etat pour les locaux à usage de résidence principale ou à usage mixte mentionnés au deuxième alinéa de l'article 2 et les locaux visés aux 1° à 3° du même article, à l'exception des logements-foyers et des logements destinés aux travailleurs agricoles qui sont soumis à des règlements spécifiques.
Le bailleur est obligé :
a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées ; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas ;
b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus ;
c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ;
d) De ne pas s'opposer aux aménagements réalisés par le locataire, dès lors que ceux-ci ne constituent pas une transformation de la chose louée. "
et
" Le locataire est obligé :
a) De payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ; le paiement mensuel est de droit lorsque le locataire en fait la demande. Le paiement partiel du loyer par le locataire réalisé en application de l'article L. 843-1 du code de la construction et de l'habitation ne peut être considéré comme un défaut de paiement du locataire ;
b) D'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location ;
c) De répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement ;
d) De prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d'Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure. Les modalités de prise en compte de la vétusté de la chose louée sont déterminées par décret en Conseil d'Etat, après avis de la Commission nationale de concertation. Lorsque les organismes bailleurs mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ont conclu avec les représentants de leurs locataires des accords locaux portant sur les modalités de prise en compte de la vétusté et établissant des grilles de vétusté applicables lors de l'état des lieux, le locataire peut demander à ce que les stipulations prévues par lesdits accords soient appliquées ;
e) De permettre l'accès aux lieux loués pour la préparation et l'exécution de travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, de travaux nécessaires au maintien en état ou à l'entretien normal des locaux loués, de travaux d'amélioration de la performance énergétique à réaliser dans ces locaux et de travaux qui permettent de remplir les obligations mentionnées au premier alinéa de l'article 6. Les deux derniers alinéas de l'article 1724 du code civil sont applicables à ces travaux sous réserve du respect de la loi n° 67-561 du 12 juillet 1967 relative à l'amélioration de l'habitat. Avant le début des travaux, le locataire est informé par le bailleur de leur nature et des modalités de leur exécution par une notification de travaux qui lui est remise en main propre ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Aucuns travaux ne peuvent être réalisés les samedis, dimanches et jours fériés sans l'accord exprès du locataire. Si les travaux entrepris dans un local d'habitation occupé, ou leurs conditions de réalisation, présentent un caractère abusif ou vexatoire ou ne respectent pas les conditions définies dans la notification de préavis de travaux ou si leur exécution a pour effet de rendre l'utilisation du local impossible ou dangereuse, le juge peut prescrire, sur demande du locataire, l'interdiction ou l'interruption des travaux entrepris ;
f) De ne pas transformer les locaux et équipements loués sans l'accord écrit du propriétaire ; à défaut de cet accord, ce dernier peut exiger du locataire, à son départ des lieux, leur remise en l'état ou conserver à son bénéfice les transformations effectuées sans que le locataire puisse réclamer une indemnisation des frais engagés ;
le bailleur a toutefois la faculté d'exiger aux frais du locataire la remise immédiate des lieux en l'état lorsque les transformations mettent en péril le bon fonctionnement des équipements ou la sécurité du local. Toutefois, des travaux d'adaptation du logement aux personnes en situation de handicap ou de perte d'autonomie peuvent être réalisés aux frais du locataire.
Ces travaux font l'objet d'une demande écrite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception auprès du bailleur. L'absence de réponse dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande vaut décision d'acceptation du bailleur. Au départ du locataire, le bailleur ne peut pas exiger la remise des lieux en l'état. La liste des travaux ainsi que les modalités de mise en 'uvre sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
g) De s'assurer contre les risques dont il doit répondre en sa qualité de locataire et d'en justifier lors de la remise des clés puis, chaque année, à la demande du bailleur. La justification de cette assurance résulte de la remise au bailleur d'une attestation de l'assureur ou de son représentant.
Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut d'assurance du locataire ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Ce commandement reproduit, à peine de nullité, les dispositions du présent alinéa.
A défaut de la remise de l'attestation d'assurance et après un délai d'un mois à compter d'une mise en demeure non suivie d'effet, le bailleur peut souscrire une assurance pour compte du locataire, récupérable auprès de celui-ci.
Cette mise en demeure doit informer le locataire de la volonté du bailleur de souscrire une assurance pour compte du locataire et vaut renoncement à la mise en 'uvre de la clause prévoyant, le cas échéant, la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut d'assurance du locataire.
Cette assurance constitue une assurance pour compte au sens de l'article L. 112-21 Du code des assurances. Elle est limitée à la couverture de la responsabilité locative mentionnée au premier alinéa du présent g. Le montant total de la prime d'assurance annuelle, éventuellement majoré dans la limite d'un montant fixé par décret en Conseil d'Etat, est récupérable par le bailleur par douzième à chaque paiement du loyer. Il est inscrit sur l'avis d'échéance et porté sur la quittance remise au locataire.
Une copie du contrat d'assurance est transmise au locataire lors de la souscription et à chaque renouvellement du contrat.
Lorsque le locataire remet au bailleur une attestation d'assurance ou en cas de départ du locataire avant le terme du contrat d'assurance, le bailleur résilie le contrat souscrit pour le compte du locataire dans le délai le plus bref permis par la législation en vigueur. La prime ou la fraction de prime exigible dans ce délai au titre de la garantie souscrite par le bailleur demeure récupérable auprès du locataire. "
C'est par des motifs adaptés que la cour approuve que le premier juge a fait droit aux fins de l'assignation concernant les loyers et la valorisation du préjudice de jouissance pour la première année de la location.
Il convient seulement de rappeler que :
En l'espèce, l'état des lieux d'entrée n'est pas connu et le logement est ainsi présumé délivré en bon état ; toutefois cette présomption n'est pas irréfragable.
Elle est combattue par :
- l'attestation de témoin de M. [H], autoentrepreneur, qui dit avoir emménagé les meubles de Mme [J] et constaté une moisissure très importante sur le mur de la chambre mitoyenne de la salle de bains ; également, que plusieurs gonds et vis manquaient sur la porte d'entrée qu'il a remplacées afin que la porte ne tombe pas ;
- le courriel de Mme [J] du 27 août 2019 selon qu'elle a constaté de la moisissure dans la pièce collée à la salle de bains. Le 3 avril 2020, elle écrit à la secrétaire de l'agence immobilière que la moisissure est toujours présente malgré les travaux de 'bricolage' (javellisation et peinture) effectués par les propriétaires, les cloques montrant que le mur est humide et qu'il faut le reprendre avec la tuyauterie de la salle de bain ; elle ajoute que l'entrepreneur qui s'est déplacé pour installer son nouveau four a dit que le système électrique n'est clairement pas aux normes et que c'est un 'grand n'importe quoi là-dedans'. Seulement le 22 juin 2020, la mandataire s'enquiert de la persistance de moisissure à Mme [J] qui lui précise qu'elle fait intervenir la garantie défense-recours de son assureur multirisque habitation. Le 28 août 2020, Mme [J] met en demeure les bailleurs et leur mandataire d'avoir à réaliser sous quinze jours : les travaux contre les moisissures, la remédiation du système électrique dangereux et d'une fissure importante au plafond de la salle à manger et ajoute le refus d'installer un système de réception tv fonctionnel.
Même si M. [H] n'est pas électricien, ses observations sur le câblage électrique notamment, ont été confirmées comme ci-après ; il ressort de tout ce qui précède que ces désordres locatifs préexistaient à la prise à bail par Mme [J].
Le rapport du 24 février 2021 de la visite du 9 précédent du pole municipal habitat conclut -outre la charnière de porte d'entrée cassée- que les deux parties doivent prendre les mesures, d'une part le propriétaire, de faire vérifier la totalité de l'installation électrique par un professionnel qualifié et vérifier le bon fonctionnement des radiateurs électriques de manière que la locataire puisse les utiliser conjointement et d'autre part le locataire, d'utiliser convenablement le moyen de chauffage mis à sa disposition de manière à éviter le développement des moisissures. Le rédacteur ne reprenait pas sa propre constatation de l'infiltration causale de moisissure.
Il ressort de tout ce qui précède que le logement n'était pas délivré conforme depuis l'entrée dans les lieux. La préfecture de Lot-et-Garonne a notifié aux parties le 15 mars 2021 l'indécence au sens du décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques des logements avec ses conséquences en termes de suspension du versement au bailleur de l'allocation personnalisée de logement durant 18 mois et sa disparition au-delà sans les travaux requis.
Néanmoins Mme [J] -qui connaissait des difficultés financières, payant toujours en numéraire et ayant échoué à faire prendre en charge les loyers à partir de septembre 2020 par le fonds de solidarité du logement en préfecture d'[Localité 8]- n'a montré aucune motivation au contraire pour remédier dès avant l'intervention des services municipaux qu'elle a sollicités ni ensuite, en ce qui la concerne, aux désordres dont elle s'est plainte, assurer sa jouissance pleine et entière du bien loué et éviter la caducité du droit à l'allocation personnalisée au logement.
Par ailleurs, il ressort d'un échange entre les bailleurs et leur mandataire que l'assurance de perte des loyers n'avait pas été renouvelée à la sortie du locataire précédent.
La mise aux normes a été entreprise par les bailleurs avant l'enquête municipale puisque le 25 août 2020, M. [R] écrivait à sa mandataire : " Vous m'avez informé que la locataire refuse l'intervention des entreprises (Comin [plombier] et [V]) et qu'elle a fait appel aux services d'urbanisme pour vérifier l'état de mon bien' ". Il était à noter la prévision du plombier au-delà des injonctions du rapport de visite et que le 6 octobre 2020, M. [V], électricien, attestait que Mme [J] n'a pas répondu à ses appels et messages.
Au 10 avril 2021, l'électricien M. [B] à [C] devisait à M. et Mme [R] la réfection de l'installation électrique conforme aux normes actuelles au prix total de 1 024 euros hors taxe ; il précise : " d'abord, vous rapprocher d'EDF pour le remplacement du disjoncteur intérieur par un monophasé et faire augmenter l'abonnement à au moins 9000 W car à 6000 W c'est trop faible pour une maison avec un chauffage tout électrique ".
Au 15 juillet 2021, le secrétaire du groupe Comin à [Localité 9] écrit à l'agence immobilière : " Comme convenu avec vous, un de nos techniciens s'est présenté ce matin au logement de Mme [J] pour une recherche de fuite. Après plusieurs tentatives pour prévenir la locataire de leur présence (il y avait aussi un électricien d'une autre entreprise) en sonnant personne ne leur a ouvert. (volets fermés mais voiture présente sur le logement). Notre technicien est donc reparti sans pouvoir constater la potentielle fuite."
L'électricien M. [B] écrit le 4 avril 2022 à l'agence : " Je serai chez Mme [J] le 11 et j'aimerai qu'il y ai quelqu'un de l'agence qui soit présent au moins quand elle va ouvrir la porte car de la manière qu'elle m'a parlé au téléphone, je ne voudrai pas quelle recommence son agressivité verbale car sinon je m'en vais. " et le 11 suivant : " Ce matin, j'étais présent à 8h chez Mme [J] j'ai sonné 3 fois, j'ai laissé un message que s'il n'y avait personne à 8h15 je partirais. A 8h18, je suis parti donc maintenant, je classe ce chantier et il faudra trouver quelqu'un d'autre pour les travaux. "
Le 11, le groupe Comin écrit à la mandataire : " Le plombier s'est présenté au domicile de Mme [J] ce matin à 8h20. Celle-ci a refusé de le laisser entrer et lui a dit que le devis a été établi par un autre plombier.". En effet, le 5 avril 2022, le plombier M. [A] à [Localité 14] devisait (tardivement à Mme [J]) son intervention sur " fuite de douche, carrelage fendu joint poreux, fuite sous bac à la bonde entraînant de la moisissure et des champignons dans la chambre " au prix total de 4 362 euros hors taxe.
Enfin et encore plus gravement pour les lieux loués, M. [D] diagnostiqueur en performance énergétique, atteste que le 16 février 2021 et le 9 juin 2022, Mme [J] n'a pas souhaité le recevoir pour réaliser les diagnostics.
Le jugement sera confirmé, sauf à constater que le dispositif sur l'expulsion locative est périmé.
3/ Sur les demandes nouvelles :
L'article 566 du code de procédure civile dispose :
" Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. "
Il convient de rappeler que Mme [J] a quitté les lieux sans avoir repris le paiement d'aucun loyer au 2 août 2022, départ suivi le 17 courant d'un état des lieux de sortie par commissaire de justice concluant : " Maison en mauvais état général. Absence d'entretien avec dommages sur les murs de toutes les pièces de vie. "
Toutes ces demandes ne sont pas irrecevables en ce qu'elles tendent, conformément aux dispositions de l'article suscité, à compléter les demandes reconventionnelles de Mme [J] et des époux [R].
Elles sont manifestement infondées de la part de l'occupante, concernant :
- d'une part, la réduction de loyers, compte tenu de la réduction de fait par la réparation du préjudice de jouissance à la première année du bail,
- d'autre part, les dommages et intérêts, de par la transgression par la locataire de son interdiction au e) de l'article 7 de la loi sur les rapports locatifs de s'opposer aux travaux nécessaires et de sa propre faute ayant presque exclusivement participé à son propre préjudice et à celui de ses enfants, comme en avertissait le rapport de visite le 24 février 2022 : " Les conséquences de ces non respects des prescriptions réglementaires pourraient à court terme générer des risques pour la santé et/ou la sécurité des occupants ".
Les deux demandes seront rejetées.
Elles sont fondées de la part des bailleurs :
- d'une part, suivant l'arrêté de compte de loyers, charges et indemnités d'occupation de Mme [J] à l'agence Foncia au 1er août 2022, à 15 099,36 euros, dont à déduire 546,18 euros de frais de justice, soit 5 453,09 euros d'indemnités d'occupation du 1er décembre 2021 au 1er août 2022,
- d'autre part, sur les factures de travaux de nettoyage des intérieurs par l'entreprise 'Monclar nettoyage' du 19 octobre 2022 pour 900 euros ttc et de réparations, avec abattement pour vétusté du tiers en raison de la durée d'un bail triennal de la location résiliée, de l'entreprise 'PradiéRénov' du 27 septembre 2022 de travaux généraux du bâtiment dont peintures, sur les seuls postes listés à hauteur des deux tiers de la demande, de 2 695,63 euros ttc.
La demande, pour 3 595,63 euros, est justifiée.
Le jugement sera complété de ces deux chefs.
4/ Sur les demandes accessoires :
[S] [J] née [N] succombe, elle supporte les dépens d'appel augmentés d'une somme au bénéfice de [P] [R] née [Y] et [T] [R] de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
Dit n'y avoir lieu au renvoi de l'affaire devant le conseiller de la mise en état des causes,
Constate que la demande d'expulsion locative est sans objet,
Confirme le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
Rejette les demandes nouvelles de [S] [J] née [N] en préjudices de jouissance et dommages-et-intérêts,
Condamne [S] [J] née [N] à payer aux époux [P] [R] née [Y] et [T] [R] 5 453,09 euros d'indemnités d'occupation du 1er décembre 2021 au 1er août 2022,
Condamne [S] [J] née [N], à payer aux époux [P] [R] née [Y] et [T] [R] 3 595,63 euros de nettoyages et réparations locatives,
Condamne [S] [J] née [N] aux dépens d'appel et à payer à [P] [R] née [Y] et [T] [R] pris dans leur ensemble la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,