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09/05/2023 | FRANCE | N°22/00242

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre sociale, 09 mai 2023, 22/00242


ARRÊT DU

09 MAI 2023



NE/CO*



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N° RG 22/00242 -

N° Portalis DBVO-V-B7G-C7MS

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[I] [D] épouse [V]





C/





SASU ISS FACILITY SERVICES





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Grosse délivrée

le :



à

ARRÊT n° 84 /2023







COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale







Prononcé par mise à

disposition au greffe de la cour d'appel d'Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le neuf mai deux mille vingt trois par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre assistée de Chloé ORRIERE, greffier



La COUR d'APPEL D'AG...

ARRÊT DU

09 MAI 2023

NE/CO*

-----------------------

N° RG 22/00242 -

N° Portalis DBVO-V-B7G-C7MS

-----------------------

[I] [D] épouse [V]

C/

SASU ISS FACILITY SERVICES

-----------------------

Grosse délivrée

le :

à

ARRÊT n° 84 /2023

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d'appel d'Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le neuf mai deux mille vingt trois par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre assistée de Chloé ORRIERE, greffier

La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire

ENTRE :

[I] [D] épouse [V]

née le 30 juin 1966 à TOURCOING (59200)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Julie CELERIER, avocat inscrit au barreau d'AGEN

APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes - formation paritaire de MARMANDE en date du 03 février 2022 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. 21/00006

d'une part,

ET :

La SASU ISS FACILITY SERVICES prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Hélène GUILHOT, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN et par Me Chloé TARBOURIECH substituant à l'audience Me Karim CHEBBANI, avocat plaidant inscrit au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 14 mars 2023 sans opposition des parties devant Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre et Pascale FOUQUET, conseiller, assistées de Chloé ORRIERE, greffier. Les magistrats en ont, dans leur délibéré rendu compte à la cour composée, outre eux-mêmes, de Hélène GERHARDS, conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 805 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

* *

*

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 1er novembre 2015, Mme [I] [D], épouse [V], a été embauchée par la société ISS PROPRETÉ, en qualité d'agent de propreté. Elle a bénéficié d'une reprise d'ancienneté au 22 décembre 2005.

Par avenant du 1er août 2018, le contrat de travail de Mme [I] [D], épouse [V] a évolué en qualité d'agent de propreté niveau AS, échelon 2.1, avec un horaire mensuel de 119,16 heures et un salaire de 1 209,47 euros.

La convention collective applicable est celle des entreprises de propreté et services associés.

Mme [I] [V] était affectée au SDIS de [Localité 11] du lundi au vendredi de 6 heures 30 à 9 heures, et à la poste de [Localité 8] du mardi au vendredi de 9 heures à 10 heures.

A compter du 1er mars 2019, la société ISS PROPRETÉ a perdu le chantier du SDIS de [Localité 11]. Un avenant au contrat de travail a été soumis à Mme [I] [V], prévoyant une affectation au siège de la société, à [Localité 9], ce que la salarié a refusé.

Mme [I] [V] a ensuite été affectée à la gendarmerie de Tonneins et à l'établissement Orange de [Localité 11], pour la matinée du jeudi.

La salariée a de nouveau refusé un avenant au contrat de travail, prévoyant son affectation tous les matins de 6 heures 30 à 9 heures sur un site EDF au [Localité 10]. Elle a indiqué à M. [K] [G], son supérieur hiérarchique, que ces nouveaux horaires n'étaient pas compatibles avec ceux réalisés à [Localité 8] puisque les deux sites étaient séparés de 27 kilomètres.

Par courrier du 10 décembre 2019, la société ISS PROPRETÉ a notifié à la salariée sa nouvelle affectation sur le site EDF du [Localité 10] à compter du 19 décembre 2019.

Par courrier du 20 janvier 2020, la société ISS PROPRETÉ a reproché à Mme [I] [V] de ne pas avoir assumé ses fonctions et de ne pas avoir justifié son absence sur le site EDF du [Localité 10] depuis le 19 décembre 2019.

Mme [I] [V] a répondu par lettre du 21 janvier 2020 en expliquant la situation selon laquelle elle ne pouvait se rendre au site du [Localité 10] de 6 heures 30 à 9 heures pour ensuite être sur le site de [Localité 8], distant de 35 kilomètres, également à 9 heures. Elle a indiqué qu'aucun avenant au contrat de travail n'avait été signé pour cette nouvelle affectation et a demandé que lui soient trouvées des heures de remplacement pour le SDIS 47, dans son secteur d'activité, «le Tonneinquais».

La salariée a fait intervenir sa protection juridique qui a indiqué, par courriers des 25 février, 11 mars et 1er avril 2020, que Mme [I] [D], épouse [V] restait dans l'attente de la régularisation de sa situation.

Par courrier du 23 juillet 2020, la société ISS PROPRETÉ a reproché à Mme [I] [V] son absence injustifiée, la mettant en demeure de reprendre son poste et lui indiquant qu'à défaut, une mesure pouvant aller jusqu'au licenciement serait prise.

Le 14 août 2020, Mme [I] [V] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Marmande afin de demander, notamment, qu'il soit ordonné à la société de proposer un nouveau chantier à la salariée, compatible avec ses horaires de travail, et qu'il lui soit ordonné de reprendre le versement de l'entier salaire de la salariée.

Le 14 septembre 2020, l'employeur a de nouveau mis en demeure Mme [I] [V] de prendre ses fonctions sur le site EDF du [Localité 10].

Par ordonnance du 12 octobre 2020, le bureau des référés a jugé ne pas être compétent dans cette affaire, puisqu'il était constaté une demande sérieusement contestée.

Par courrier du 17 novembre 2020, Mme [I] [V] a été convoquée à un entretien préalable fixé le 27 novembre 2020.

Par courrier du 15 décembre 2020, la société ISS PROPRETÉ a notifie à Mme [I] [V] son licenciement pour cause réelle et sérieuse, aux motifs suivants :

« (') A la suite de l'entretien du 27 novembre 2020 avec Monsieur [E] [J], Directeur des Opérations, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement.

Cette décision est motivée par les faits suivants :

Suite à la perte du marché « SDIS à [Localité 11] (47)» sur lequel vous étiez affectée et conformément à la clause de mobilité géographique prévue par votre contrat de travail, nous vous avons notifié votre nouvelle affectation sur le site « EDF ' UE 2523 ' [Localité 3] » par courrier du 10 décembre 2019.

Cette affectation prenait effet le 19 décembre 2019. Or, constatant que vous ne vous étiez jamais présentée sur ce chantier, nous vous avons adressé un courrier de mise en demeure pour absence injustifiée en date du 22 janvier 2020 puis un second courrier en date du 23 juillet 2020 et un troisième courrier en date du 14 septembre 2020.

Vous ne vous être jamais présentée sur votre site ; Or, cette mutation justifiée par la perte du site « SDIS ' [Localité 11] (47) », était conforme aux clauses de mobilité géographique et dans la mesure où les horaires demandés sur « EDF LE TEMPLE SUR LOT » étaient strictement identiques à ceux que vous réalisiez sur le site SDIS à [Localité 11].

Vous avez expliqué lors de l'entretien que vous ne pouviez pas vous rendre sur votre nouvelle affectation car vous travaillez à nouveau sur le site « SDIS [Localité 11] » pour le compte de la société ONET, et que par ailleurs, vous aviez d'autres engagements.

Aussi votre refus de vous présenter sur votre nouvelle affectation, constitue un manquement à vos obligations contractuelles que nous ne saurions tolérer.

Dans de telles conditions, nous ne pouvons poursuivre davantage notre collaboration.

Votre préavis de deux mois débutera à la date de présentation de ce courrier et devra être exécuté sur le site « EDF ' UE 2523 ' [Localité 3] ». »

Mme [I] [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Marmande le 22 février 2021.

Par jugement du 3 février 2022, le conseil de prud'hommes de Marmande, section commerce, a :

- débouté Mme [I] [V] de sa demande de dommages-intérêts de la somme de 14.532,15 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [I] [V] de sa demande de 7.466,91 euros au titre de rappel de salaire,

- condamné la société ISS FACILITY SERVICES venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ à payer à Mme [I] [V] la somme de 2.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- débouté Mme [I] [V] de la somme de 1.878,05 euros au titre du reliquat de l'indemnité de licenciement,

- débouté la société ISS FACILITY SERVICES venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société ISS FACILITY SERVICES venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ à payer à Mme [I] [V] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société ISS FACILITY SERVICES venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 25 mars 2022, Mme [I] [V] a régulièrement déclaré former appel du jugement, en désignant la société ISS FACILITY SERVICES en qualité de partie intimée et en indiquant que l'appel porte sur les dispositions du jugement qui l'ont débouté de sa demande de dommages-intérêts de la somme de 14.532,15 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'ont déboutée de sa demande de 7.466,91 euros de rappel de salaire, l'ont déboutée de la somme de 1.878,95 euros au titre du reliquat de l'indemnité de licenciement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 janvier 2023 et l'affaire fixée pour plaider à l'audience du 14 mars 2023.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

I. Moyens et prétentions de Mme [I] [D], épouse [V] appelante principale

Dans ses uniques conclusions, enregistrées au greffe le 16 mai 2022, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelant, Mme [I] [D], épouse [V] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marmande du 3 février 2022 en ce qu'il a :

- condamné la société ISS FACILITY SERVICES venant aux droits de la société ISS propreté à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- débouté la société ISS FACILITY SERVICES de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société ISS FACILITY SERVICES à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société ISS FACILITY SERVICES aux entiers dépens,

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marmande du 3 février 2022 en ce qu'il a :

- l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts de la somme de 14.532,15 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- l'a déboutée de sa demande de 7.466,91 euros au titre du rappel de salaires,

- l'a déboutée de la somme de 1.878,05 euros au titre du reliquat de l'indemnité de licenciement,

Par conséquent, statuant à nouveau,

- condamner la société ISS FACILITY SERVICES à lui verser les sommes suivantes :

- 14.532,15 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 7.466,91 euros à titre de rappel de salaires,

- 2.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- condamner la société ISS FACILITY SERVICES à lui verser la somme de 1.878,05 euros au titre du reliquat de l'indemnité de licenciement,

- condamner la société ISS FACILITY SERVICES à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société ISS FACILITY SERVICES aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [I] [V] fait valoir que :

1. Sur la contestation du bien-fondé du licenciement

Sur la prescription des faits fautifs :

- Elle a fait part de son impossibilité de se rendre sur son nouveau lieu d'affectation et ce dès le mois de décembre 2019. Elle a de nouveau expliqué sa situation par courrier du 21 janvier 2020. Ce refus est un fait ponctuel et définitif qui a fait courir le délai de prescription de deux mois. Le licenciement intervenu le 15 décembre 2020 reposait donc sur des faits prescrits.

- L'employeur tente de se défendre en affirmant l'avoir licenciée, non pas pour son refus d'affectation, mais pour une période d'absence injustifiée. Cela est inexact et confirmé par la lettre de licenciement qui précise : « Aussi votre refus de vous présenter sur votre nouvelle affectation constitue un manquement à vos obligations contractuelles que nous ne saurions tolérer ».

En tout état de cause, sur le caractère injustifié des griefs reprochés :

- Par avenant du 1er août 2018, elle a été affectée de 6 heures 30 à 9 heures au chantier du SDIS de [Localité 11], situé Place Zoppola à [Localité 11], et non à [Localité 7] comme cela est précisé dans l'avenant. Puis elle était affectée de 9 heures à 10 heures au chantier de la Poste de [Localité 8]. Ces deux lieux étaient distants d'environ 13 minutes de route.

- Suite à la perte du chantier SDIS de [Localité 11] par l'employeur, celui-ci l'a affectée sur un chantier EDF situé à [Localité 10] à compter du 19 décembre 2019. Le chantier de la Poste de [Localité 8] était maintenu. Or, ces deux chantiers se trouvaient à près de 30 minutes de distance l'un de l'autre. Elle était donc dans l'impossibilité matérielle de finir le premier chantier à 9 heures et de commencer le second à la même heure.

- Elle a alerté ses supérieurs hiérarchiques sur la situation, mais ils n'ont pas répondu à sa requête. Bien au contraire, l'employeur s'est contenté de la mettre en demeure de prendre ses fonctions sur le site EDF du [Localité 10].

- Le conseil de prud'hommes s'est contenté d'affirmer « Vu que Mme [V] ne s'est pas présenté à son poste au Temple sur Lot et s'est placée en absence injustifiée, qu'en conséquence, le licenciement pour cause réelle et sérieuse est justifiée (') ». Il n'a pas analysé les arguments formulés. Elle n'a commis aucun manquement.

Sur les demandes afférentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse :

- Son salaire moyen est de 968,81 euros. Elle a subi un préjudice important puisque son salaire a diminué pendant de nombreux mois, sans raison justifiée, dû au retrait opéré par l'employeur.

- Elle avait une ancienneté de plus de 15 ans. Elle n'a pas retrouvé d'emploi depuis son licenciement et les chances d'en retrouver un sont minimes. Elle sollicite ainsi une indemnité égale à 15 mois de salaire, soit la somme de 14.532,15 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2. Sur le rappel de salaire

- L'employeur a procédé à des retenues injustifiées et systématiques depuis le mois de décembre 2019. De plus, à compter du mois de novembre 2020, la société ISS PROPRETÉ a perdu le chantier de la gendarmerie de [Localité 11] et a ainsi retiré les sommes correspondantes sur ses bulletins de paie. Les sommes retenues représentent un montant total de 7.466,91 euros.

3. Sur l'exécution déloyale du contrat de travail pendant la période de préavis

- Depuis le 1er mars 2019, elle était affectée sur le chantier « Orange » situé à [Localité 11] les mardis et jeudis de 9 heures à 9 heures 45. Or, suite à la notification de son licenciement, son badge permettant d'accéder au lieu a été désactivé, l'empêchant ainsi de se rendre sur le chantier. Elle a prévenu à plusieurs reprises son supérieur hiérarchique qui ne lui a jamais répondu. L'employeur l'a placée en absence injustifiée pour ces faits et lui a retiré des heures sur son bulletin de paie. La société ISS PROPRETÉ a manqué à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail.

4. Sur le reliquat de l'indemnité de licenciement

- Elle a perçu une indemnité de licenciement de 2.212,48 euros qui a été calculée sur un salaire de référence erroné. Le salaire de référence, après reconstitution, est de 968,81 euros. L'indemnité de licenciement doit donc être égale à 4.090,53 euros, (¿) x 968,81€ x 10 + (1/3) x 968,18€ x (5+(2/12)). Il reste ainsi un reliquat d'indemnité de licenciement à hauteur de 1.878,05 euros.

**************

II. Moyens et prétentions de la société ISS FACILITY SERVICES intimée sur appel principal

Dans ses uniques conclusions enregistrées au greffe le 25 juillet 2022, auxquelles il est renvoyé pour une parfaite connaissance des moyens et prétentions, la société ISS FACILITY SERVICES, venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ, demande à la cour de :

- confirmer partiellement le jugement rendu le 3 février 2022 par le conseil de prud'hommes de Marmande en ce qu'il a :

- débouté Mme [I] [V] de sa demande de dommages-intérêts de la somme de 14.532,15 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [I] [V] de sa demande de 7.466,91 euros au titre de rappel de salaire,

- l'a condamnée à payer à Mme [I] [V] la somme de 2.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- débouté Mme [I] [V] de la somme de 1.878,05 euros au titre du reliquat de l'indemnité de licenciement,

En conséquence,

- juger les demandes formées par Mme [I] [V] infondées,

- débouter Mme [I] [V] de l'intégralité de ses demandes,

Reconventionnellement :

- infirmer partiellement le jugement rendu le 3 février 2022 par le conseil de prud'hommes de Marmande en ce qu'il a :

- l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée à payer à Mme [I] [V] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux entiers dépens,

Y ajoutant :

- condamner Mme [I] [V] à lui payer la somme de 3.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [I] [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, la société ISS FACILITY SERVICES fait valoir que :

1. Sur la prescription alléguée

- La prescription ne joue pas si le comportement fautif du salarié a persisté. Mme [I] [V] ne s'est jamais présentée sur le lieu de sa nouvelle affectation. Son absence injustifiée est un fait continu et persistant qui écarte donc le jeu de la prescription.

- La nouvelle affectation a été notifiée le 10 décembre 2019 à Mme [I] [V] qui a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes le 14 août 2020 pour demander, notamment, qu'il soit ordonné à la société de proposer un nouveau chantier à la salariée, compatible avec ses horaires de travail. Par ordonnance du 12 octobre 2020, Mme [I] [V] a été déboutée de ses demandes, mais elle ne s'est cependant pas conformée à sa nouvelle affectation. Un mois après l'ordonnance rendue, l'employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable.

2. Sur le bien-fondé du licenciement

- Mme [I] [V] a été licenciée pour absence injustifiée. Celle-ci conteste son licenciement, mais s'abstient de produire des éléments justifiant de son absence sur sa nouvelle affectation.

- Dès lors que la clause de mobilité a été mise en 'uvre dans l'intérêt de l'entreprise, le refus du salarié de rejoindre sa nouvelle affectation a un caractère fautif et ce refus constitue un motif réel et sérieux de licenciement.

Sur la régularité de la mise en 'uvre de la clause de mobilité :

- Mme [I] [V] a été informée de la faculté de modifier ses horaires et lieu de travail dans certaines circonstances. Celle-ci a acceptée cette possibilité en signant son contrat de travail.

- La clause de mobilité inscrite précisait : « Compte tenu de la nature de ses fonctions, des usages de la profession et pour des raisons liées à l'organisation et au bon fonctionnement des chantiers, la société se réserve la possibilité de muter le salarié dans le département où est implanté l'établissement dont le salarié dépend ou dans les départements limitrophes.

La société se réserve également la possibilité de muter le salarié dans le département où est situé son domicile, tel que désigné dans le présent contrat ou dans les départements limitrophes. »

- Suite à la perte du site « SDIS 47 » de [Localité 7], elle a affecté Mme [I] [V] sur le site EDF situé au [Localité 10], distant de 26 kilomètres. Cette mutation est régulière au regard de la clause de mobilité.

- Les horaires de travail de Mme [I] [V] comprenaient systématiquement le temps de trajet. La salariée ne devait pas finir à 9 heures sur le site « SDIS 47 » et débuter à la fois à 9 heures sur le site « La Poste [Localité 8] », mais elle devait partir plus tôt du premier site pour arriver en avance sur le second. Mme [I] [V] connaissait pertinemment ce fonctionnement qui lui a été rappelé par courrier du 14 septembre 2020 : « Il va de soi que, de la même manière que votre temps de trajet était inclus dans votre première prestation dans le cadre de votre ancienne situation contractuelle, il l'est également dans le cadre de votre nouvel avenant ».

- Le « SDIS 47 » ne se situe pas à [Localité 11] comme l'indique Mme [I] [V], mais bien à [Localité 7], au [Adresse 5]. Le temps de trajet entre le « SDIS 47 » et le site « La Poste [Localité 8] » était d'une heure.

- Suite à la perte du site « SDIS 47 », une nouvelle affectation a été trouvée à la salariée, celle du site EDF au [Localité 10]. Les horaires de travail étaient identiques à ceux que Mme [I] [V] effectuait sur le site « SDIS 47 ». Le temps de trajet entre ces deux lieux était en revanche de 25 minutes. Ainsi la nouvelle affectation était largement plus proche que la précédente.

Sur l'absence de démonstration d'une mise en 'uvre fautive de la clause de mobilité :

- La salariée a refusé sans motif valable la nouvelle affectation et ne conteste par ailleurs par s'être placée en absence injustifiée. Mme [I] [V] n'a jamais voulu se rendre sur sa nouvelle affectation, certainement pour des raisons personnelles, car le chantier était probablement incompatible avec un autre emploi.

3. Sur les demandes financières formées par Mme [I] [V]

- Mme [I] [V] sollicite une indemnité correspondante à 15 mois de salaires « reconstitués ». Cependant, pour une ancienneté de 15 ans, l'indemnité maximale est de 13 mois de salaires bruts. La moyenne des trois derniers mois bruts de salarié correspond à 275,11 euros. Ainsi si la cour devait considérer le licenciement de Mme [I] [V] comme ne reposant pas sur une cause réelle et sérieuse, l'indemnité devra être égale à 825,22 euros, correspondante à trois mois de salaire.

4. Sur la demande de rappel de salaires

- La salariée sollicite un rappel de salaires pour une période débutant à compter du mois de décembre 2019, au moment de la notification de sa nouvelle affectation. Cependant Mme [I] [V] ne s'est jamais rendue sur ce site, de façon délibérée, ce qu'elle ne conteste pas. La salariée est ainsi mal venue à solliciter un rappel de salaires pour la période pendant laquelle elle s'est délibérément placée en absence injustifiée.

5. Sur la prétendue exécution déloyale du contrat de travail

- La salariée prétend que le badge du site « Orange » aurait été désactivé, l'empêchant de se rendre sur son lieu de travail. Celle-ci ne fait que des allégations sans en apporter la moindre preuve. Par ailleurs, il a été démontré que c'était Mme [I] [V] qui avait fait preuve de déloyauté dans l'exécution du contrat de travail en se plaçant en absence injustifiée, sans motif valable.

6. Sur la demande relative au reliquat de l'indemnité légale de licenciement

- L'indemnité de licenciement a été calculée sur la base des heures effectivement travaillées par Mme [I] [V], de sorte que le salaire de référence retenu est correct.

7. Sur les frais irrépétibles et les dépens

- La salariée a été déboutée de l'intégralité de ses demandes en première instance, cependant l'employeur a été condamné à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens. Le jugement devra être réformé sur ce point.

- Il est également sollicité la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, et la condamnation de la salariée aux entiers dépens de la procédure.

MOTIVATION

I. SUR L'EXÉCUTION DÉLOYALE DU CONTRAT DE TRAVAIL

L' appel incident n'est pas différent de l'appel principal par sa nature ou son objet.

Les conclusions de l'appelant, qu'il soit principal ou incident, doivent déterminer l'objet du litige porté devant la cour d' appel, l'étendue des prétentions dont est saisie la cour d' appel étant déterminée dans les conditions fixées par l'article 954 du code de procédure civile.

Force est de constater que les conclusions de l'intimé ne comportent aucune prétention tendant à l'infirmation ou à la réformation du jugement attaqué quant à l'exécution déloyale du contrat de travail mais bien la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [I] [V] la somme de 2.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail.

La cour ne peut que confirmer le jugement de première instance sur ce point.

II. SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

A. Sur le licenciement pour cause réelle et sérieuse

Sur la prescription :

En application de l'article L.1332-4 du code du travail, l'employeur doit engager les poursuites disciplinaires dans les deux mois qui suivent la date à laquelle il a eu connaissance des faits fautifs.

Cependant lorsque le comportement fautif du salarié, bien qu'ayant commencé plus de deux mois avant l'engagement des poursuites, s'est poursuivi ou s'est réitéré dans ce délai, la prescription des faits ne peut être opposée à l'employeur.

En l'espèce la lettre de licenciement vise expressément l'absence de la salariée « Vous ne vous êtes jamais présentée sur votre site ».

Par courrier du 23 juillet 2020 puis du 14 septembre 2020, la société ISS PROPRETÉ a mis en demeure Mme [I] [V] de prendre ses fonctions sur le site EDF du [Localité 10].

Malgré ses mises en demeure, l'absence de Mme [I] [V] s'est prolongée jusqu'au licenciement, de sorte que l'employeur ne peut se voir opposer aucune prescription.

Sur le fond :

La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte. La cause sérieuse doit présenter une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n'est pas nécessaire.

Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L.1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.

Pour qualifier la cause de sérieuse, les premiers juges ont retenu que le contrat de travail signé par les parties comprenait une clause de mobilité sur le département et départements limitrophes et que Mme [I] [V] ne s'étant pas présentée à son poste au [Localité 10], avait été en absence injustifiée.

Pour confirmer la décision du conseil de prud'homme, il suffira de rajouter que :

- la régularité de la clause de mobilité n'est pas discutée,

- l'employeur justifie que les horaires de travail de la salariée étaient compatibles avec les temps de trajet et qu'au demeurant seul le lieu d'affectation changeait, les horaires restant constants,

- dans son courrier du 14 septembre 2020, l'employeur a éclairci la situation auprès de sa salariée sur le temps de trajet : « Votre position nous surprend dans la mesure où les horaires demandés sur EDF LE TEMPLE SUR LOT sont strictement identiques à ceux que vous réalisiez sur le site SDIS 47 à [Localité 7]. Or ce dernier est éloigné de 49km, alors que votre nouvelle affectation est éloignée de 26km. Il va donc de soi que, de la même manière que votre temps de trajet était inclus dans votre première prestation dans le cadre de votre ancienne situation contractuelle, il l'est également dans le cadre de votre nouvel avenant. »,

- malgré les diverses relances de la part de l'employeur, Mme [I] [V] a persisté à ne pas se rendre sur son nouveau lieu d'affectation,

- le comportement fautif de Mme [I] [V], qui ne s'est pas rendue sur son lieu de travail, sans pouvoir justifier d'aucun motif légitime d'absence, constitue ainsi une cause réelle et sérieuse de licenciement.

B. Sur les conséquences financières du licenciement

Il a été jugé que Mme [I] [V] s'était effectivement placée en absence injustifiée et que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.

En conséquence, la cour confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Mme [I] [V] de sa demande de dommages-intérêts de la somme de 14.532,15 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [I] [V] de sa demande de 7.466,91 euros au titre de rappel de salaire,

- débouté Mme [I] [V] de la somme de 1.878,05 euros au titre du reliquat de l'indemnité de licenciement.

III. SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET LES DÉPENS

Mme [I] [V], qui succombe en ses demandes, sera déboutée de sa demande de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en appel. Elle sera également condamnée aux entiers dépens de l'instance.

La cour confirme le jugement entrepris en ce que la société ISS FACILITY SERVICES, venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ, a été condamnée à la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a été déboutée de sa demande au même titre en première instance et en ce qu'elle a été condamnée aux dépens.

L'équité commande de ne pas faire droit à la demande formulée par la société ISS FACILITY SERVICES, venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ selon les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, visant à voir condamner Mme [I] [V] à lui régler la somme de 3.500 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Marmande du 3 février 2022 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE Mme [I] [V] de sa demande de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la société ISS FACILITY SERVICES, venant aux droits de la société ISS PROPRETÉ de sa demande de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [I] [V] aux entiers dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre et Chloé ORRIERE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00242
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;22.00242 ?
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