ARRÊT DU
15 Mars 2023
AB/CR
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N° RG 22/00156
N° Portalis
DBVO-V-B7G-C7EE
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[F] [T]
C/
[O] [I]
exerçant sous l'enseigne PORTAIL AVENUE
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GROSSES le
Ã
ARRÊT n° 97-2023
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Madame [F] [T]
née le 04 Juin 1945 à [Localité 6] (94)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/001507 du 03/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AGEN)
Représentée par Me Louis VIVIER, avocat au barreau d'AGEN
APPELANTE d'un Jugement du tribunal judiciaire d'AGEN en date du 05 Janvier 2022, RG 19/00455
D'une part,
ET :
Monsieur [O] [I]
exerçant sous l'enseigne PORTAIL AVENUE
né le 10 Mars 1965 à [Localité 5] (47)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Philippe BELLANDI, avocat au barreau d'AGEN
INTIMÉ
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 06 Février 2023 devant la cour composée de :
Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre, qui a fait un rapport oral à l'audience
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Cyril VIDALIE, Conseiller
Greffières : Lors des débats : Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière
Lors de la mise à disposition : Nathalie CAILHETON, greffière
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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EXPOSÉ DU LITIGE.
Vu l'appel interjeté le 24 février 2022 par Mme [F] [T] à l'encontre d'un jugement du tribunal judiciaire d'AGEN en date du 5 janvier 2022.
Vu les conclusions de Mme [F] [T] en date du 23 mai 2022.
Vu les conclusions de M. [O] [I] en date du 3 août 2022.
Vu l'ordonnance de clôture du 14 décembre 2022 pour l'audience de plaidoiries fixée au 6 février 2023.
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Selon facture en date du 24 octobre 2014. M. [I] exerçant sous l'enseigne JÉRÔME PETIT HABITAT - Portail avenue, a facturé aux époux [T] pour un montant global de 10.996,18 euros, des travaux relatifs à la fourniture et la pose d'un portail (avec motorisation), d'un portillon, d'un carillon sans fil, d'un visiophone, d'une clôture rigide et d'une clôture souple sur murets.
Cette facture a donné lieu à règlement par chèque bancaire le 27 octobre 2014.
Estimant que ces travaux étaient entachés de malfaçons et de dysfonctionnements, Mme [T] a fait établir un procès-verbal de constat dressé par Me [E] huissier de justice à [Localité 5] (47), le 04 novembre 2014.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 avril 2015 transmise par son conseil (laquelle faisait suite à l'envoi de deux courriers en dates des 23 novembre 2014 et 5 janvier 2015), Mme [T] a demandé à M. [I] qu'il lui fasse connaître sous huitaine ses intentions quant aux dysfonctionnements qu'elle avait relevés.
Par courrier en date du 13 mai 2015, M. [I] a indiqué à Mme [T] que s'il était dans l'impossibilité immédiate de donner suite à cette affaire en raison de problèmes de santé, il restait engagé en tant que professionnel à parfaire son travail dont elle semblait insatisfaite.
Saisi par Madame [F] [I], par ordonnance en date du 15 décembre 2015, le juge des référés a ordonné une expertise, commettant pour y procéder M. [U] qui a déposé son rapport le 13 mai 2016.
Selon acte d'huissier du 20 mars 2019, Mme [T] a assigné M. [I], exerçant sous l'enseigne JÉRÔME PETIT HABITAT - Portail avenue, sur 1e fondement de la responsabilité civile contractuelle, en paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts.
Par jugement en date du 5 janvier 2022, le tribunal judiciaire d'AGEN a :
- condamné M. [I] exerçant sous l'enseigne JÉRÔME PETIT HABITAT - Portail avenue à payer à Mme [T] les sommes de :
- débouté Mme [T] de sa demande au titre du manquement à son devoir de conseil de la part de M. [I],
- condamné M. [I] exerçant sous l'enseigne JEROME PETIT HABITAT- Portail avenue, et Mme [T] à supporter chacun la charge de la moitié des dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
- débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et/ou de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991
- débout les parties de leurs plus amples demandes,
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal a retenu que Mme [T] ne démontrait pas la réalité de son préjudice du chef d'un manquement au devoir de conseil, que le portail installé n'est pas conforme et doit être repris et que les clôtures n'étaient pas adaptées à l'usage auquel elles étaient destinées, et qu'un préjudice de jouissance y afférent est établi.
Tous les chefs du jugement sont expressément critiqués dans la déclaration d'appel
Mme [T] demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris pour ces points, et statuant à nouveau,
- dire M. [I] a engagé sa responsabilité contractuelle et lui doit réparation.
- condamner la SARL PORTAIL AVENUE JÉRÔME PETIT HABITAT venant aux droits de M. [I] à lui régler les sommes de :
désordres affectant les clôtures,
- condamner ladite SARL à régler à Me VIVIER, la somme de 2.400,00 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,
- condamner la SARL aux entiers dépens dont les frais d'expertise qui seront recouvrés conformément aux dispositions sur l'aide juridictionnelle.
Elle fait valoir que :
- le professionnel n'a pas établi de devis de sorte que la motorisation proposée n'a pas été détaillée en particulier sur l'électrification du portillon, ce qui lui cause nécessairement un préjudice.
- son indemnisation des désordres affectant le portail non conforme a été sous estimée
- de même pour la reprise des clôtures et son préjudice de jouissance.
M. [I] demande à la cour de :
- à titre principal, débouter Madame [T] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
- la condamner à la somme de 3.600,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
- Ã titre subsidiaire, dire qu'il est redevable des sommes suivantes :
- débouter Mme [T] de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
- condamner chaque partie par moitié aux dépens.
Il fait valoir que :
- il a adapté sa prestation aux demandes de réduction de coût de Mme [T], il a proposé au cours de l'expertise l'installation d'une gâche électrique pilotable à distance,
- le portail fonctionne la norme invoquée n'est pas applicable, elle vise les portails des locaux industriels et commerciaux, et l'expert a justement déterminé les points à reprendre.
- la clôture est adaptée à la configuration du terrain, elle est conforme et ne présente aucun désordre.
- le préjudice de jouissance est nul, Mme [T] a attendu trois ans pour saisir la juridiction après le dépôt du rapport d'expertise.
Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION.
Aux termes de l'article 1134 ancien du code civil, applicable en l'espèce en considération de la date du contrat, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ...Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Aux termes de l'article 1147 ancien du même code civil, le débiteur est condamné s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts. soit à raison de l'inexécution de l'obligation. soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Les parties produisent une facture sur laquelle pour chaque prestation, sont mentionnées les différentes options et leur prix unitaire, puis la quantité effectivement retenue et le montant de la prestation effectuée.
Le rapport d'expertise met en évidence que :
-le devis ne permettait pas à Mme [T] de savoir que l'ouverture du portillon ne serait pas télécommandée alors qu'elle l'était pour le portail. L'artisan s'est engagé devant l'expert à installer une gâche électrique pilotable à distance.
-le portail n'est pas équipé d'une cellule d'arrêt d'urgence obligatoire, le moteur installé TELCOMA ne comprenant pas de sécurité intégrée
-l'ancienne butée n'a pas été retirée
- la lampe clignotante non obligatoire mais recommandée n'a pas été posée
- la longueur de la clôture facturée est de 5 mètres supérieure à celle posée.
-il existe un espace entre le muret et la clôture posée qui permet le passage d'un petit animal
L'expert a chiffré la reprise des désordres aux montants suivants :
- jonction entre le muret et la clôture : 660,00 euros
- gâche électrique : 300,00 euros
- lampe clignotante : 120,00 euros
- cellule à rajouter : 160,00 euros
- total : 1.240,00 euros.
1- Sur l'ouverture du portillon :
Mme [T] invoque un manquement de l'artisan à son devoir conseil à l'occasion de l'élaboration du devis lequel ne lui permettait pas de savoir si l'ouverture du portillon serait manuelle ou électrifiée. Mme [T] ne caractérise pas le préjudice résultant du manquement au devoir de conseil qu'elle invoque, le préjudice qu'elle décrit est celui de devoir sortir de son logement pour ouvrir le portillon lorsqu'elle reçoit une visite, alors qu'elle est âgée de 77 ans et que son logement est à l'étage.
Elle n'invoque pas un préjudice distinct du préjudice d'agrément qu'elle réclame par ailleurs, au-delà de la pose de la gâche électrique pour un montant de 300,00 euros, étant relevé que le devis ne mentionne qu'un seul moteur, donc que seul le portail devait être motorisé et non le portillon.
Le jugement est confirmé sur ce point.
2- Sur le portail électrique :
La norme NF EN 13241-1spécifie les exigences de performance et de sécurité relatives aux portes et barrières, destinées à être installées dans des zones accessibles aux personnes et dont l'utilisation principale prévue est de permettre l'accès des marchandises et des véhicules accompagnés ou conduits par des personnes, en toute sécurité dans ... des garages dans les zones d'habitation.
L'objet du litige est une barrière installée dans une zone d'habitation, la norme est applicable.
C'est à bon droit que le premier juge a fait application de l'article R 134-55 du code de la construction et de l'habitation qui dispose dans les bâtiments et groupes de bâtiments d'habitation, l'installation nouvelle de toute porte ou portail automatique de garage respecte les prescriptions suivantes :
...
2- Un système de sécurité doit interrompre immédiatement tout mouvement d'ouverture ou de fermeture de la porte lorsque ce mouvement peut causer un dommage à une personne;
-3 Lorsque ce système de sécurité est défectueux, le fonctionnement automatique de la porte doit être interrompu ;
-4 Le système de commande de la porte doit être volontaire et personnalisé à moins que la conception de la porte ne permette que son utilisation, même anormale, ne crée aucun danger pour les personnes;
5- L'aire de débattement de la porte doit être correctement éclairée et faire l'objet d'un marquage au sol;
-6 Tout mouvement de la porte doit être signalé, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, par un feu orange clignotant visible de l'aire de débattement. La signalisation doit précéder le mouvement de la porte;
7- La porte doit pouvoir être man'uvrée de l'extérieur comme de l'intérieur pour permettre de dégager une personne accidentée. La man'uvre extérieure est facultative si la pression exercée par la porte est telle qu'elle ne fait pas obstacle au dégagement de la personne accidentée.
Le rapport d'expertise a mis en évidence, et M. [I] l'a reconnu devant l'expert, que le moteur installé de marque TELCOMA ne présente aucune cellule d'arrêt d'urgence ni de sécurité intégrée, et que l'installation doit comprendre une cellule photoélectrique de détection automatique d'obstacle visant à empêcher tout dommage. L'installation n'est pourvue d'aucune lampe clignotante obligatoire lors du fonctionnement du portail.
Le rapport d'expertise n'établit pas les autres dysfonctionnements dont Mme [T] réclame la reprise, étant relevé qu'elle a reconnu devant l'expert être intervenue sur l'installation en arrachant la goulotte du boîtier électrique interne pour retapisser ce local, et que le lien entre les dégradations invoquées de l'installation en 2019 et la pose de cette dernière en 2014, est rompu.
Le premier juge a justement alloué à Mme [T] la somme de 120,00 euros pour la lampe clignotante et celle de 160,00 euros pour la cellule à rajouter.
Le jugement est confirmé sur ce point.
3- Sur les clôtures :
Les clôtures litigieuses ont été posées sur un muret préexistant dont la construction suit la pente du terrain. Cette configuration a nécessité une découpe des panneaux de grillage pour les adapter à la pente du muret.
Il ressort du devis que les parties ont contractuellement prévu une "plus value spéciale animaux soubassement deux câbles". Il était donc prévu de combler l'espace entre le muret et les panneaux.
Il apparaît en outre que la découpe des panneaux laisse à nu les pointes métalliques des panneaux, créant un risque de blessures.
Au vu de ces éléments c'est à bon droit que le premier juge a considéré que M. [I] a commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle en laissant un espace entre le muret et les panneaux, faute dont la réparation doit prendre la forme de reprise des désordres selon les préconisations de l'expert, sur la base du devis EUROTECH pour un montant de 600,00 euros majoré à 1.000,00 euros pour tenir compte du surcoût relevé par l'expert.
Le jugement est confirmé sur ce point.
4- Sur le préjudice de jouissance :
Le premier juge a justement retenu l'existence d'un préjudice de jouissance dans la privation d'une ouverture à distance du portillon et du fait d'une clôture dangereuse pour son chien et non conforme au devis.
Le jugement est confirmé en ce qu'il lui a alloué de ce chef la somme de 800,00 euros.
5 - Sur les demandes accessoires :
Chacune des parties succombe, chacune d'elles supporte les dépens d'appel par elle avancés, l'équité commande qu'il ne soit pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS.
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que chacune des parties supporte la charge des dépens d'appel par elle avancés.
Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,