ARRÊT DU
18 Janvier 2023
JYS/CR
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N° RG 21/00737
N° Portalis
DBVO-V-B7F-C5HC
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[B] [Z],
[G] [W]
épouse [Z]
C/
[E] [C]
veuve [Z]
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GROSSES le
aux avocats
ARRÊT n° 29-2023
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur [B] [L] [F] [Z]
né le 10 Avril 1938 à [Localité 14] (49)
de nationalité Française
Madame [G], [V], [O] [W]
épouse [Z]
née le 1er Novembre 1947 à [Localité 17] (49)
de nationalité Française
Domiciliés :
[Adresse 15]
[Localité 5]
Représentés par Me Hélène GUILHOT, avocate associée de la SCP TANDONNET ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AGEN
APPELANTS d'un Jugement du tribunal judiciaire d'AGEN en date du 01 Juin 2021, RG 19/00527
D'une part,
ET :
Madame [E] [C] veuve [Z]
née le 21 Juillet 1963 à [Localité 18]
de nationalité Française
[Adresse 15]
[Localité 5]
Représentée par Me François DELMOULY, membre de la SELARL AD-LEX, avocat au barreau D'AGEN
INTIMÉE
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 04 Mai 2022 devant la cour composée de :
Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre,
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Jean-Yves SEGONNES, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience
Greffière : Lors des débats : Charlotte ROSA , adjointe administrative faisant fonction
Lors de la mise à disposition : Nathalie CAILHETON
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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FAITS
[B] [Z], agriculteur, et son épouse [G] [W], avaient acquis divisément avec leur fille [V], des parcelles de la SCI des Coteaux à [Localité 5] (Lot-et-Garonne) en 1993. Ils ont eu aussi un fils [R], décédé, marié à [E] [C], légataire universelle depuis 2012 des parcelles contiguës rachetées en pleine propriété par lui en 2000 à [V] [Z].
L'ensemble rural immobilier litigieux se situe, en accédant par l'Ouest en haut d'un relief de côte, à l'aplomb d'une falaise à l'Est ; les parcelles n° : D [Cadastre 1] de terrain, [Cadastre 8] de maison et [Cadastre 10] de dépendance des époux [Z]-[W] sont au centre, les parcelles [Cadastre 4], de bois et [Cadastre 3] et [Cadastre 9], de jardin et maison de Mme F. [C] sont au Sud-Est, réunies en un ténement par sa parcelle [Cadastre 7] de ravin à l'Est. Deux servitudes conventionnelles permettent à Mme [E] [C], en passant notamment sur les deux parcelles attenantes [Cadastre 8] et [Cadastre 10] d'accéder à chacune de ses deux parcelles extrêmes, la [Cadastre 3] directement et la 129 par le ravin ; une autre convention de servitude permet d'alimenter le fonds [C] en eau et d'entretenir sa canalisation qui aboutit à son compteur à la lite des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 9] devant sa maison.
L'acte notarié du 14 décembre 1993, qui prévoit les deux servitudes de passage, renvoie au plan annexé à l'acte pour le tracé de leurs deux assiettes ; si l'assiette vers la parcelle [Cadastre 4] la plus éloignée y est tracée par le nord-ouest de la parcelle [Cadastre 10] pour descendre dans le ravin, l'assiette du passage sur cette parcelle vers la parcelle [Cadastre 3] la plus proche n'y est pas tracée.
Mme [E] [C] s'est plainte de la dégradation du mur de soutènement séparant la parcelle [Cadastre 10] de ses beaux-parents de sa parcelle [Cadastre 3] du jardin de sa maison ; elle s'est également plainte de l'obstruction de l'accès à son passage au droit du mur litigieux.
Elle a fait assigner les époux [Z]-[W] en 2016 sans succès puis en 2017 sur la base d'un constat d'huissier du mur dégradé devant le juge des référés pour obtenir une expertise de chiffrage du coût de remise en état dudit mur éboulé sur sa propriété et en prévention des chutes de pierres sur sa parcelle [Cadastre 3].
M. [P], expert désigné par l'ordonnance du 8 septembre 2017 du président du tribunal de grande instance, a fait rapport le 29 janvier 2018 : il conclut que les travaux consistent à rebâtir ponctuellement les zones instables et éboulées, étanchéifier le couronnement du mur et rejointoyer ce dernier pour le prix de 2 682 euros toutes taxes comprises.
PROCÉDURE
Suivant acte d'huissier délivré le 3 avril 2019, [E] [Z] née [C] a fait assigner [B] et [G] [Z] née [W] devant le tribunal judiciaire d'Agen pour être au principal, condamnés à faire réaliser, à leurs frais par tout professionnel du bâtiment dûment assuré, les travaux de reprise du mur de soutènement édifié sur leur parcelle située lieu-dit [Adresse 15] à Frespech 47140 cadastrée section D n° [Cadastre 8], tels que définis par l'expert judiciaire [Y] [P] dans son rapport du 29 janvier 2018 (rebâti des zones instables éboulées, étanchéité du couronnement du mur et rejointement), dire qu'ils devront l'informer de la réalisation des travaux au moins 8 jours avant le début du chantier, les condamner solidairement à lui payer 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices de jouissance, leur ordonner dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, de retirer les objets et matériels obturant la servitude de passage grevant leurs parcelles situées lieu-dit [Adresse 15] à Frespech cadastrée section D [Cadastre 10] au profit de sa parcelle cadastré D [Cadastre 3] sous astreinte provisoire de 1500 euros par jour de retard passé 1 mois après signification du jugement, leur interdire de troubler de quelque manière que ce soit l'exercice de la servitude de passage grevant leurs parcelles situées lieu-dit [Adresse 15] à Frespech cadastrées section D [Cadastre 8] et D [Cadastre 10] au profit de son fonds sous peine d'une astreinte provisoire de 1 500 euros par infraction constatée et les condamner solidairement à payer 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices de jouissance, leur ordonner dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, retirer la clôture installée sur l'assiette de la servitude de passage grevant leur parcelle située lieu-dit [Adresse 15] à Frespech 47140 cadastrée section D [Cadastre 1] anciennement [Cadastre 2] au profit de son fonds sous astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard.
Les époux [Z]-Matin se sont opposés à toutes ces demandes ; reconventionnellement, ils ont soulevé la cessation de l'état d'enclave et demandé de constater l'extinction des servitudes.
Par jugement contradictoire du 1er juin 2021, le tribunal a :
- condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à faire réaliser à leurs frais par tout professionnel du bâtiment dûment assuré les travaux de reprise du mur de soutènement édifié sur leur parcelle située lieu-dit [Adresse 15] à [Localité 5] [Localité 5] cadastrée section D N° [Cadastre 8] surplombant la parcelle cadastrée section D N° [Cadastre 3] appartenant à [E] [C] veuve [Z], tel que défini par l'expert judiciaire [Y] [P] dans son rapport du 29 janvier 2018,
- dit que [B] et [G] [Z] née [W] devront informer [E] [C] veuve [Z] de la réalisation des travaux au moins 8 jours avant le début du chantier,
- ordonné à [E] [C] veuve [Z] de laisser l'accès à sa propriété pour les besoins des travaux,
- ordonné à [B] et [G] [Z] née [W] dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, de retirer les objets et matériels obturant la servitude de passage grevant leurs parcelles situées lieu-dit [Adresse 15] à [Localité 5] cadastrées section D N° [Cadastre 8] et [Cadastre 10] au profit des parcelles cadastrées, section D N° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 9], [Cadastre 11] et [Cadastre 12] appartenant à [E] [C] veuve [Z],
- passé ce délai, condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à payer à [E] [C] veuve [Z] une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant 4 mois, à faire liquider par le juge de l'exécution,
- interdit également à [B] et [G] [Z] née [W] de troubler de quelque manière que ce soit l'exercice de la servitude de passage grevant leurs parcelles situées lieu-dit [Adresse 15] à [Localité 5] cadastrées section D N° [Cadastre 8] et [Cadastre 10] au profit des parcelles cadastrées, section D N° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 9], [Cadastre 11] et [Cadastre 12] appartenant à [E] [C] veuve [Z], sous peine d'une astreinte provisoire de 1 500 euros par jour de retard durant 4 mois, à faire liquider par le juge de l'exécution,
- ordonné à [B] et [G] [Z] née [W] dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, de retirer la clôture installée sur l'assiette de la servitude de passage grevant leur parcelle située [Adresse 16], cadastrée section D N° [Cadastre 1] anciennement [Cadastre 2] au profit des parcelles cadastrées, section D N° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 9], [Cadastre 11] et [Cadastre 12] appartenant à [E] [C] veuve [Z],
- passé ce délai, condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à payer à [E] [C] veuve [Z] une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard durant 4 mois, à faire liquider par le juge de l'exécution,
- condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à payer à [E] [C] veuve [Z] 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices de jouissance,
- condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] aux dépens, en ce compris les deux procédures de référé et frais d'expertise judiciaire mais à l'exception des constats d'huissier,
- condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à payer à [E] [C] veuve [Z] 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- rejeté le surplus des demandes.
Pour condamner les époux [Z] et [W] à la reprise du mur de soutènement, le tribunal a jugé qu'aux termes du rapport d'expertise, le mur est très ancien et constitué de pierres sans liant qui se sont éboulées et qu'elles constituent un empiètement de propriété immobilière ; il ne ressortait pas d'un devis de réparation accepté qu'il a été restauré ; le seul délitement du mur et les contraintes de son relèvement justifient l'octroi de dommages et intérêts.
Pour condamner les époux [Z] à l'enlèvement des obstructions, le tribunal a jugé qu'aux termes du constat d'huissier du 21 mars 2017, la servitude de passage par les parcelles D [Cadastre 8] et D [Cadastre 10] est bien obturée notamment par la présence d'un engin de chantier et qu'elle n'est pas éteinte, étant d'origine conventionnelle, au surplus, confirmée par les photographies ; pour rejeter l'extinction de cette seconde servitude par désenclavement, le tribunal a jugé qu'elle a été convenue indépendamment du fait que le fonds dominant était déjà desservi par un chemin rural, soit alors non enclavé.
Pour condamner les époux [Z] au retrait de la clôture obstruant le passage vers son compteur d'eau accessoire à une servitude de canalisation, le tribunal a jugé que le grillage du poulailler est bien de nature à en limiter l'usage, même si la titulaire l'utilise peu et le délai de sa prescription n'a pas encore couru, au surplus que la canalisation est toujours en eau ; pour rejeter l'offre de réinstallation du compteur d'eau, il a été jugé que son déplacement ne supprimera pas l'assiette sous le même tréfonds.
Suivant déclaration au greffe le 13 juillet 2021, [B] et [G] [Z] née [W] ont fait appel de tous les chefs de ce dispositif.
PRETENTIONS - MOYENS
Selon dernières conclusions visées au greffe le 17 mars 2022, [B] et [G] [Z] née [W] demandent principalement de :
- infirmer le jugement dans tout son dispositif,
- débouter Mme [C] de toutes ses demandes, ayant exécuté les travaux de restauration du muret,
- juger que le tribunal a fixé à tort l'assiette de la servitude de passage grevant les parcelles D [Cadastre 8] et D [Cadastre 10] à un endroit différent de celui déterminé par les actes authentiques sur les plans annexés et débouter Mme [C] de toute demande de ce chef ainsi que de retirer la clôture installée sur la parcelle D [Cadastre 1],
- les autoriser à déplacer le compteur d'eau par la SAUR selon devis accepté et tracé figurant sur l'extrait cadastral à leurs frais, tant pour le déplacement que pour l'entretien de la canalisation,
- condamner Mme [C] à payer 5 000 euros d'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [C] aux dépens de première instance et d'appel ;
Ils demandent subsidiairement, de :
- ordonner le transport de la cour sur les lieux,
- réserver les dépens.
Les appelants exposent et font valoir :
- sur le mur de soutènement, qu'il ressort des attestations de témoins et des énonciations de l'expert qu'il n'est pas près de s'écrouler et leur droit de propriété leur permet d'en disposer comme ils l'entendent ;
- sur la servitude de passage, que le chemin communal restauré et modifié en 2016 dessert désormais la parcelle [Cadastre 9] de la maison de Mme F. [C] qui n'est donc plus enclavée et qu'il convient de le constater, l'acquisition du passage n'étant pas prescrite, et ordonner son extinction ;
- sur la servitude de canalisation et de compteur, qu'il est possible de déplacer le compteur d'eau en limite de la parcelle de Mme F. [C] car cette servitude, qui ne s'exerce pas depuis qu'elle est créée, les empêche de cultiver leur propre parcelle.
Selon dernières conclusions visées au greffe le 22 mars 2022, [E] [C] veuve [Z] demande de :
- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,
et y ajoutant, de :
- condamner [B] et [G] [Z] née [W] au paiement d'une somme supplémentaire de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'intimée expose et fait valoir :
- sur le mur de soutènement qu'il a été convenablement restauré en novembre 2021 et que si la discussion est sans intérêt, les dispositions sur la responsabilité du propriétaire du fait du bâtiment, subsidiairement celle du gardien du fait de la chose, s'appliquent ;
- sur la servitude de passage, que le cultivateur rouillé faisant obstacle est situé sur le seul passage possible compte tenu du relief du terrain et la servitude conventionnelle est perpétuelle, les conditions d'accès à son fonds par le chemin communal n'ayant pas changé ;
- sur la servitude de canalisation et de compteur, que les époux [Z] allèguent faussement avoir enlevé le grillage comme en atteste le constat d'huissier du 13 août 2021 alors qu'il subsiste un portail trop étroit pour permettre l'entretien de la canalisation dont l'usage s'exerce de lui-même sans se prescrire tant qu'elle est alimentée.
La clôture de la procédure a été ordonnée le 23 mars 2022.
1 / Sur la réparation du mur de soutènement de la parcelle [Cadastre 10] :
Me [A], huissier, a constaté le 21 mars 2017 que par endroits, le mur et sa base sont constitués de rocher qui avance sur la parcelle de [Adresse 13] jusqu'à un endroit à 48 cm où une dizaine de pierres sont tombées au sol qui correspondent à des creux dans le mur.
L'expert, M. [P], constate le 16 novembre 2017 : " Nous observons la présence de pierres au pied du mur témoignant d'un délitement progressif de la tête du mur ".
L'article 1244 du code civil dispose : " Le propriétaire d'un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu'elle est arrivée par une suite du défaut d'entretien ou par le vice de sa construction. "
Cette responsabilité est la contrepartie du droit souverain de propriété des époux [Z] en vertu de l'article 544 du code civil qu'ils revendiquent sur ce mur. Le fait est que le muret a été restauré par les époux [Z] le 10 novembre 2021 à la satisfaction de Mme F. [C] au prix de 2 266 euros facturé par l'entrepreneur [N] [T]; sur ce fondement, le prix de la restauration du muret de soutènement n'incombe qu'aux époux [Z].
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Le dommage dont les époux [Z] doivent répondre est celui de l'empiètement de propriété et ses conséquences. Le dommage prouvé de Mme F. [C] dans la jouissance de sa parcelle [Cadastre 3] à usage de jardin est réparable ; le préjudice allégué n'est pas caractérisé en l'espèce par le procès-verbal d'huissier de Me [A] du 4 avril 2018 qui ne constate rien au-delà des pierres au pied du mur et sur la terre et les plantations du jardin ; les conclusions de Mme F. [C] ne caractérisent pas non plus un préjudice matériel agricole ni autre ; Mme F. [C] ne justifie donc pas de sa demande en argent à titre de dommage et intérêts.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
2 / Sur les demandes relatives aux servitudes :
A / de passages sur la parcelle [Cadastre 10] :
Aucun contentieux n'existe sur le passage par le nord-ouest de la parcelle [Cadastre 10] pour desservir les parcelles [Cadastre 6] et [Cadastre 4] de ravin et bois.
Il ressort du constat d'huissier de 2018 qu'à l'angle sud-est de ce fonds servant, un large outil aratoire rouillé, dit 'cultivateur', bloque la trouée dans la haie puis un vieux bidon sur une plaque de regard de 39 cm x 39 cm [Localité 14] le cheminement vers les parcelles [Cadastre 3] puis 978 de Mme F. [C]. L'exactitude matérielle de ce constat est juridiquement inopérante dans la mesure où ce chemin de servitude n'est pas déterminé à l'acte notarié pour desservir les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 9].
Aucune pièce, cliché ni témoin ne pouvant prouver outre l'acte authentique, les constatations de Me [A] ne sont pas probantes d'une entrave à l'exercice du droit de passage sur l'assiette de la servitude vers la parcelle [Cadastre 3]. La prescription trentenaire de l'acquisition de cette assiette de la servitude n'est pas acquise par les traces d'utilisation de l'accès litigieux à la date de la demande en justice, mais 25 années sont révolues seulement. Il s'ensuit que l'enlèvement du cultivateur et du bidon n'est pas justifié et la demande n'est pas fondée.
Le jugement doit être infirmé de ce chef.
B / de canalisation et de compteur d'eau sur la parcelle D [Cadastre 1] :
C'est par des motifs que la cour approuve et qu'elle adopte que le premier juge a prescrit le retrait de la clôture entravant l'exercice du passage pour l'entretien de la servitude de canalisation jusqu'au compteur d'eau.
Il conviendra de préciser que, si les époux [Z]-[W] offrent désormais le déplacement de ladite canalisation et son compteur, le devis du 19 février 2020 est un projet incertain sur le le trajet du tuyau, inabouti pour le fournisseur SAUR gestionnaire de la délégation du service public de l'eau et onéreux pour Mme F. [C], devenant très éloignée de son compteur à déplacer dans un endroit encore indéterminé avec tous les inconvénients dans la vie quotidienne qui peuvent en résulter, même si la parcelle à choisir pour le replacer lui appartiendrait.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Le dommage dont les époux [Z]-[W] doivent répondre est celui de l'entrave au passage de Mme F. [C] par le grillage du poulailler pour l'entretien de sa canalisation d'alimentation en eau potable ; il ressort des débats que cette dernière n'a jamais eu à y intervenir ; le préjudice invoqué n'est qu'éventuel et la demande n'est pas justifiée.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
C / d'extinction des servitudes sur la parcelle [Cadastre 10] au profit des parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 9], [Cadastre 7],[Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 4] :
L'article 685-1 du code civil dispose :
" En cas de cessation de l'enclave et quelle que soit la manière dont l'assiette et le mode de la servitude ont été déterminés, le propriétaire du fonds servant peut, à tout moment, invoquer l'extinction de la servitude si la desserte du fonds dominant est assurée dans les conditions de l'article 682. A défaut d'accord amiable, cette disparition est constatée par une décision de justice. "
La référence à l'article 682 du code nécessite d'examiner non seulement si le fonds avait une issue ou pas à la création de la servitude mais aussi, dans la positive, si cette issue n'était pas "insuffisante" par rapport à ce qu'elle est actuellement.
L'acte de vente de [V] [Z] à [R] [Z] le 31 mars 2000 rappelle qu'à l'acte d'échange-acquisition du 14 décembre 1993 : " RAPPEL DE SERVITUDES : c) pour permettre à Mlle [Z] d'accéder à l'immeuble qui vient de lui être cédé ", les époux [Z]-[W] lui concèdent le droit de passer sur les parcelles [Cadastre 8] et [Cadastre 10] pour le service de l'ensemble des biens cédés à elle par la SCI Les Coteaux, auteur commun.
Aux clichés photographiques échangés entre les parties, Mme F. [C] dispose d'un accès par l'arrière de sa maison au sud de sa parcelle [Cadastre 9], droit sur le chemin communal dit 'de [Adresse 15]', refait en 2016 sur la délibération unanime du conseil municipal pour la desserte du 'Foyer de vie de [Adresse 15]', géré par l'association 'Solincité' à [Localité 19], spécialisée dans l'accueil et l'accompagnement des personnes handicapées dont la structure est voisine mitoyenne de son fonds ; ces clichés montrent une voie de largeur suffisante pour tout véhicule comme en milieu rural et bien supérieure au chemin en terre de servitude, goudronnée par un revêtement bitumé tantôt de qualité tantôt très dégradé comme devant chez Mme F. [C], suivant les clichés produits.
La cour juge que l'abandon du revêtement de la chaussée uniquement au droit de l'entrée de la propriété privée n'a pas sa cause dans la négligence des services administratifs et techniques locaux mais trouve toute son explication dans la condamnation de son accès par une haute palissade élevée à la limite de propriété avec les inscriptions suivantes : " propriété privée - attention pièges - défense d'entrer ".
La preuve est ainsi rapportée que l'état du chemin communal, qui justifiait la servitude de passage en 1993 s'est très notablement amélioré, et avec un meilleur tracé, au cours des trente dernières années, ce qui ne justifie plus la survivance de la servitude litigieuse.
En conséquence, la demande d'extinction est fondée et cette extinction concerne non seulement les deux parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 9] mais également la desserte des parcelles [Cadastre 6], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 4] en ce qu'elles sont en continuité des deux premières.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
3 / Sur les dépens :
En application de l'article 696 du code de procédure civile, chacune des parties succombant en l'une quelconque de ses prétentions, supportera ses propres dépens.
Le jugement sera réformé de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
Infirme le jugement sauf des chefs d'avoir :
- condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à faire réaliser à leurs frais par tout professionnel du bâtiment dûment assuré les travaux de reprise du mur de soutènement édifié sur leur parcelle située lieu-dit [Adresse 15] à [Localité 5] [Localité 5] cadastrée section D N° [Cadastre 8] surplombant la parcelle cadastrée section D N° [Cadastre 3] appartenant à [E] [C] veuve [Z], tel que défini par l'expert judiciaire [Y] [P] dans son rapport du 29 janvier 2018,
- ordonné à [B] et [G] [Z] née [W] dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, de retirer la clôture installée sur l'assiette de la servitude de passage grevant leur parcelle située [Adresse 16], cadastrée section D N° [Cadastre 1] anciennement [Cadastre 2] au profit des parcelles cadastrées, section D N° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 9], [Cadastre 11] et [Cadastre 12] appartenant à [E] [C] veuve [Z],
- passé ce délai, condamné solidairement [B] et [G] [Z] née [W] à payer à [E] [C] veuve [Z] une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard durant 4 mois, à faire liquider par le juge de l'exécution,
Jugeant à nouveau les chefs infirmés ou réformés :
Constate l'extinction de la servitude de passage grevant les parcelles situées lieu-dit [Adresse 15] à [Localité 5] (Lot-et-Garonne) cadastrées section D N° [Cadastre 8] et [Cadastre 10] au profit des parcelles cadastrées, section D N° [Cadastre 3], [Cadastre 9], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 6] et [Cadastre 4] appartenant à [E] [C] veuve [Z],
Déboute [E] [C] veuve [Z] de ses demandes à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices de jouissance,
Dit que chacune des parties, [B] et [G] [Z] née [W] et [E] [C], conservera la charge des dépens par elles exposés,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
y ajoutant,
Dit que chacune des parties, [B] et [G] [Z] née [W] et [E] [C], conservera la charge des dépens d'appel par elles exposés,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu l'article 456 du code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Jean-Yves SEGONNES, Conseiller ayant participé au délibéré en l'absence de Mme la présidente de chambre empêchée, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, Le Conseiller,