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13/12/2022 | FRANCE | N°21/00636

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre sociale, 13 décembre 2022, 21/00636


ARRÊT DU

13 DECEMBRE

2022



PF/CR



-----------------------

N° RG 21/00636

N° Portalis

DBVO-V-B7F-C42Q

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[M] [B]





C/





S.A.S. VEGECROC





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Grosse délivrée

le :



à

ARRÊT n° /2022







COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale







Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d'appel d'Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le treize Décembre deux mille vingt deux par Pascale FOUQUET, Conseiller, assistée de Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière





La COUR d'APPE...

ARRÊT DU

13 DECEMBRE

2022

PF/CR

-----------------------

N° RG 21/00636

N° Portalis

DBVO-V-B7F-C42Q

-----------------------

[M] [B]

C/

S.A.S. VEGECROC

-----------------------

Grosse délivrée

le :

à

ARRÊT n° /2022

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d'appel d'Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le treize Décembre deux mille vingt deux par Pascale FOUQUET, Conseiller, assistée de Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière

La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire

ENTRE :

[M] [B]

Né le 17 juillet 1976 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Philippe BELLANDI, avocat au barreau d'AGEN

APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AGEN en date du 21 Mai 2021 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. F 19/00107

d'une part,

ET :

S.A.S. VEGECROC

RCS d'Agen n°824 148 068

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Gregory VEIGA, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

d'autre part,

A rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 11 Octobre 2022 sans opposition des parties devant Pascale FOUQUET, conseiller rapporteur, assisté de Chloé ORRIERE, greffière. Le magistrat rapporteur en a, dans son délibéré, rendu compte à la Cour composée, outre lui-même, de Jean-Yves SEGONNES, Conseiller et de Benjamin FAURE, Conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 805 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

* *

*

FAITS ET PROCÉDURE

Selon contrat de travail à durée indéterminée, M. [M] [B] a été engagé le 17 octobre 2017 par la société Les Jardins du Val de Garonne transférée à la société Vegecroc le 1er juin 2018, dont l'activité est située à [Localité 2] en qualité de coordinateur logistique, qualification cadre, niveau VIII, coefficient 350 et percevait un salaire brut de 3 750euros.

La convention collective applicable est celle de la fabrication de produits alimentaires élaborés (industries).

Le 15 janvier 2019, l'employeur a convoqué M. [B] à un entretien préalable.

Le 30 janvier 2019, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire.

Le 26 août 2019, M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes d'Agen, section encadrement, en contestation de son licenciement et pour obtenir les sommes de':

- 3 750 euros pour non-respect de la procédure de licenciement,

- 4 000 euros pour licenciement non causé,

- 1 218,75 euros au titre des indemnités légales de licenciement,

- 11 250 euros au titre du préavis,

- 112,50 euros au titre des congés payés afférents,

- 515,38 euros au titre des notes de frais,

- 2 300 euros au titre de la prime d'objectif,

la prime intéressement et participation (mémoire),

- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 21 mai 2021, le conseil de prud'hommes d'Agen, dans sa formation paritaire, a':

- dit que son licenciement pour faute grave était justifié et qu'il ne comportait pas d'irrégularité de forme,

- que le versement des autres sommes demandées (note de frais, prime d'objectif) n'était pas justifié,

- en conséquence, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes,

- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamné aux dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 17 juin 2021, M. [B] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions en intimant la société Vegecroc et en visant les chefs du jugement critiqué qu'il cite dans sa déclaration d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 juillet 2022 et l'affaire fixée pour plaider à l'audience du 11 octobre 2022.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

I. Moyens et prétentions de M. [B] appelant principal et intimé sur appel incident

Selon uniques conclusions enregistrées au greffe de la cour le 13 septembre 2021 expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelant, M. [M] [B] demande à la cour de réformer le jugement dont appel et':

- juger que la procédure de licenciement n'a pas été respectée,

- condamner la société Vegecroc à lui payer la somme de 3 750 euros pour non-respect de la procédure de licenciement,

- juger que la société Vegecroc ne rapporte pas la preuve de la commission d'une faute grave,

- juger que son licenciement est abusif,

- condamner la société Vegecroc à lui payer les sommes afférentes':

* 7 500 euros pour licenciement non causé (17 mois d'ancienneté, 2 mois de salaire),

* 1 218,75 euros au titre des indemnités légales de licenciement,

* 11 250 euros au titre du préavis,

* 112,50 euros au titre des congés payés afférents.

À titre infiniment subsidiaire,

Dans l'hypothèse où la cour considérerait que le licenciement reposerait sur une cause réelle et sérieuse':

- condamner la société Vegecroc à lui payer les sommes afférentes':

* 1 218,75euros au titre des indemnités légales de licenciement,

* 11 250euros au titre du préavis,

* 112,50euros au titre des congés payés afférents.

En toute hypothèse,

- condamner la société Vegecroc à lui payer les sommes suivantes':

* 518,38euros au titre des notes de frais,

* 2 300euros au titre de la prime pour objectif.

- condamner la société Vegecroc à lui payer la somme de 3 000euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que':

- il s'agit d'une irrégularité de forme substantielle consistant en s'abstenir de mentionner dans la lettre de convocation à l'entretien préalable non qu'un licenciement était envisagé mais seulement une sanction disciplinaire. Or la lettre de convocation doit préciser clairement son objet, à défaut la procédure n'est pas conforme.

- il a été convoqué à un simple entretien pour une «'mise au point'» selon son employeur et pendant lequel il s 'est exprimé croyant qu'il s'agissait d'une simple «'mise au point'», il s'est présenté sans être assisté et n'a pu faire valoir ses droits

il a donc subi un préjudice.

- il n'a reçu aucun avertissement durant la relation contractuelle aucune mise à pied conservatoire n'a été prononcée : un délai de 25 jours s'est écoulé entre l'entretien et l'envoi de la lettre de licenciement ce qui démontre que son maintien dans l'entreprise était possible et l'absence de toute faute grave.

- les faits qui lui sont reprochés, dont certains n'ont pas été abordés le jour de l'entretien, ne sont pas démontrés ou correspondent à des problèmes récurrents que doit régler un coordinateur logistique ':

Absence de mise en 'uvre du protocole d'autorisation de conduites des chariots élévateurs':

Il conteste les faits.

L'ensemble des salariés titulaires du certificat d'aptitude à la conduite en sécurité (CACES) a été formé entre avril et juin 2018. Ils avaient tous l'autorisation de conduite. Le problème ne concernait pas les autorisations en tant que telles, mais le fait que le personnel devait les détenir pendant le temps de travail. Suite à sa visite, l'inspection du travail n'a d'ailleurs fait aucune remarque à ce titre, ni sur les conditions de sécurité de travail des caristes.

Absence de réalisation d'une étude sur les accidents de travail':

- Le 5 novembre 2018, M. [T], directeur de la société VEGECROC, a demandé à M. [B] une analyse de ces accidents. Celle-ci a été réalisée et des mesures ont été prises, telle que la réduction des vitesses d'accélération et décélération du matériel roulant.

- Une formation du personnel encadrant pour la gestion des accidents du travail a également eu lieu la troisième semaine du mois de janvier 2019.

Absence de mise en 'uvre d'un système de bridage de vitesse des engins de manutention':

- Il justifie des actions menées pour procéder au bridage des chariots élévateurs et de l'intervention de M. [P], responsable commercial chez Toyota, constructeur des engins, à sa demande, pour réaliser l'intervention et la formation du personnel encadrant. Aucun reproche ne lui a été formulé à ce sujet par l'employeur.

- Les quatre accidents du mois d'octobre n'ont donné lieu à aucune sanction dans le délai de deux mois et ne peuvent donc pas justifier un motif de licenciement.

Absence de formalisation des consignes de sécurités liées à l'encombrement des allées piétonnes':

- M. [B] a averti par courriel l'ensemble des salariés de la nécessité de respecter les consignes sur le dégagement des allées et a finalisé cette mission courant janvier par la production d'affichage visuel de passage piéton et de note de service.

Absence de réparation de la douche de sécurité du local de charge et de mise en place des indicateurs':

- Ce grief n'a pas été évoqué lors de l'entretien,

- Une panne a eu lieu mais elle a été très brève et a été réparée.

Absence de formation du personnel au traitement des commandes, notamment pour la plate-forme AUCHAN':

- A compter du mois de septembre 2018, les préparateurs de commandes ont été formés et attitrés pour les deux plate-formes AUCHAN. Un document interne à l'entreprise mentionnait même le personnel attitré aux commandes AUCHAN et les suppléants.

- Les frais de déplacements journaliers concernent la distance entre les deux sites séparés d'environ 1,5 km. Différents courriels échangés avec la direction attestent de la réalité de ces déplacements

- L'employeur reconnaît lui devoir ces sommes par courriel

-Une prime sur objectif de 3 000euros figure dans le contrat, sans préciser ni les objectifs à réaliser ni les conditions de calcul. En l'absence de ces précisions, cette rémunération doit être payée intégralement. Il ne l'a perçue que partiellement.

II. Moyens et prétentions de la société Vegecroc intimée sur appel principal et appelante sur incident

Selon uniques conclusions enregistrées au greffe de la cour le 10 décembre 2021 expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l'intimée, la société Vegecroc demande à la cour, confirmant le jugement attaqué en toutes ses dispositions, de':

- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes pour prétendu non-respect de la procédure de licenciement,

- subsidiairement et dans la mesure où le caractère réel et sérieux du licenciement serait confirmé, ramener son éventuelle indemnisation à un montant symbolique en l'absence de tout préjudice établi,

- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes au titre du licenciement qui repose bien sur une faute grave,

- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes au titre de l'exécution du contrat de travail, celui-ci ayant été rempli de ses droits,

- subsidiairement, ramener l'éventuelle indemnisation de M. [B] à de justes proportions.

Y ajoutant,

- condamner M. [B] à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société Vegecroc fait valoir que':

- La lettre de convocation mentionnait l'article L. 1232-2 du code du travail, M. [B] était donc informé de la possibilité d'un éventuel licenciement. De plus, cette lettre indiquait bien «'qu'une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement était envisagée'» et les possibilités d'assistance par un salarié de l'entreprise ou un conseiller extérieur étaient indiquées. Les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ont tous été évoqués au cours de l'entretien.

- L'allocation de dommages et intérêts n'est pas automatiquement liée à cette irrégularité. Il ne démontre aucun préjudice. Il n'a donc pas droit à des dommages et intérêts

Sur les manquements à la sécurité':

- En l'espace de 6 mois, 13 accidents sont survenus dans la zone logistique. dont M. [B] avait la charge,

- De nombreux salariés placés sous sa responsabilité conduisaient les engins sans les autorisations de conduite délivrées par le directeur,

- Ce protocole est nécessaire et le salarié, en raison de ses fonctions et de son expérience, ne pouvait l'ignorer,

- Malgré le courriel du directeur du 27 juillet 2018 et ses demandes répétées toujours par courriels, le salarié n'a pas formalisé les autorisations de conduite ni organisé les formations nécessaires,

- M. [V], coordinateur sécurité du pôle Agenais, a été missionné en début d'année 2019 pour suppléer sa carence à la demande de la direction,

- Le salarié avait pourtant tout en main pour réaliser ces actions dont les procédures lui avaient été communiquées par M. [V] dès le mois d'avril 2018,

- Au mois d'août 2018, M. [V] a réalisé un audit sécurité des plates-formes logistiques et a constaté que M. [B] n'avait pas réagi,

- Il lui a rappelé l'obligation d'avoir une autorisation signée et de transmettre les procédures de rappel des consignes de sécurité à ses collaborateurs par courriel du 29 août 2018,

- L'inspectrice du travail avait émis des observations à ce sujet par courrier du 29 novembre 2018,

- M. [T] l'avait enjoint par courriel du 28 novembre 2018 à réaliser ce travail et l'avait relancé sans effet,

- Il n'existait pas d'affichage des personnes autorisées comme demandé par l'inspectrice et le directeur malgré le délai accordé jusqu'au 15 décembre,

- Le salarié n'a pas réalisé l'analyse des accidents de travail survenus depuis juillet 2018, demandée par le directeur. Il n'a proposé aucune solution pour supprimer ou diminuer les risques récurrents.

- Le 4 janvier 2019, l'employeur a constaté que les procédures de sécurité, liées au contrôle des engins, n'étaient plus appliquées. Alors qu'un chariot présentait un dysfonctionnement, le service de maintenance n'a pas été sollicité par M. [B], obligeant M. [V] à régler le problème,

- Il a fait brider les chariots à la suite d'un accident de travail survenu en septembre 2018, à charge pour M. [B] de poursuivre cette action par la suite, ce qu'il n'a pas fait. Ce dernier n'a pas non plus vérifié la bonne application de cette consigne lors de la mise en place de nouveaux chariots,

- Il a été constaté l'absence de formalisation des consignes de sécurité liées à l'encombrement des allées piétonnes dans la zone logistique. Lors de sa visite du 27 novembre 2018, l'inspectrice du travail a constaté que les allées étaient encombrées et a demandé que les voies soient libérées. Le lendemain, il a demandé à M. [B] de rappeler les consignes de sécurité et de les formaliser par une note de service. Au 31 décembre, M. [B] n'avait encore rien réalisé,

- M. [B] n'a pas non plus réalisé les actions qu'il lui avait demandées concernant la réparation de la douche de sécurité du local de charge, ainsi que la mise en place d'indicateurs.

- Il a été demandé à plusieurs reprises à M. [B] d'affecter des personnes spécialement formées au traitement des commandes de la plate-forme AUCHAN. Il s'agit d'un client exigeant qui demande des spécificités de préparation qui, si elles ne sont pas respectées, entraîne le refus des produits, ce qui constitue une perte financière pour l'entreprise et une atteinte à son image de marque. M. [B] n'a jamais formalisé de procédure et n'a pas affecté de préparateurs spécifiques à ces commandes,

- Il existe un contexte de réitération. Ces fautes faisaient courir un risque d'atteinte à la santé et sécurité du personnel, ainsi qu'une atteinte à l'image de l'entreprise.

Sur les frais de déplacement et la prime d'objectif':

-Aucune note n'a été transmise, concernant notamment des trajets effectués entre août et décembre 2018, puis durant le mois de janvier 2019. M. [B] ne fournit aucun justificatif du nombre de trajets réalisés permettant de vérifier le kilométrage effectué,

-La prime sur objectifs n'a vocation à être versée que si les objectifs sont remplis. M. [B] a commis des manquements à ses objectifs de poste, notamment garantir la qualité des livraisons, mettre en place et suivre des indicateurs logistiques. Cela ne lui permet pas de lui allouer une prime sur objectifs.

MOTIVATION

I. Sur le licenciement

Par courrier du 30 janvier 2019, qui fixe les limites du litige, M. [B] a été licencié pour faute grave avec mise à pied conservatoire.

Il résulte des dispositions des articles L.1232-1 et L.1235-1 du Code du Travail, que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ,et qu'en cas de litige relatif au licenciement , le juge auquel il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles .Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties , l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Toutefois, s'il invoque une faute grave pour justifier le licenciement, l'employeur doit en rapporter la preuve, étant rappelé que la faute grave, privative de préavis et d'indemnité de licenciement, est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ,même pour la durée limitée du délai-congé.

Il ressort de la lettre de licenciement 6 griefs pour des manquements à la sécurité :

- absence de mise en 'uvre du protocole d'autorisation de conduites des chariots élévateurs'

- absence de réalisation d'une étude sur les accidents de travail'

- absence de mise en 'uvre d'un système de bridage de vitesse des engins de manutention'

- absence de formalisation des consignes de sécurités liées à l'encombrement des allées piétonnes'

- absence de réparation de la douche de sécurité du local de charge et de mise en place des indicateurs'

- absence de formation du personnel au traitement des commandes, notamment pour la plate-forme AUCHAN'

Il y a lieu de rappeler que sur les neuf accidents recensés entre juillet et octobre 2018 survenus sur la plate forme gérée par le salarié, sept sont liés à l'utilisation des chariots élévateurs.

Sur l'absence de mise en 'uvre du protocole d'autorisation de conduites des chariots élévateurs':

L'employeur verse à l'appui de ce grief :

- une demande de compte rendu sur les formations concernant les engins élévateurs du 3 avril 2018

- son premier rappel par courriel du 27 juillet 2018 et son nouveau rappel du 28 novembre 2018 à la suite de la visite de l'inspectrice du travail avec date de réalisation maximale des instructions au 15 décembre

- l'attestation en date du 20 décembre 2019 de M. [V], coordinateur de sécurité

- son courriel du 31 décembre 2018

Le salarié conteste les faits reprochés mais ne produit aucune pièce.

Il soutient que le grief concerne la détention des autorisations de conduite pendant le temps de travail et non les autorisations de conduite en tant que telles, que les autorisations de conduite étaient signées par chaque salarié ce qui démontrait que la formation avait été réalisée et que l'inspectrice du travail n'avait formulé aucune remarque à ce titre ni sur les conditions de sécurité des caristes.

Pour confirmer la décision des premiers juges, il suffira d'ajouter qu'il ressort du courrier de l'inspectrice du travail du 29 novembre 2018, que :

- l'article R4323-56 du code du travail prévoit que : 'La conduite de certains équipements, présentant des risques particuliers en raison de leurs caractéristiques ou de leur objet, est subordonnée à l'obtention d'une autorisation de conduite délivrée par l'employeur'.

- l'article 3 de l'arrêté du 2 décembre 1998 prévoit que : 'Cette évaluation, destinée à établir que le travailleur dispose de l'aptitude et de la capacité à conduire l'équipement pour lequel l'autorisation est envisagée, prend en compte les trois éléments suivants :

a) Un examen d'aptitude à la conduite réalisé par le médecin du travail ;

b) Un contrôle des connaissances et du savoir-faire de l'opérateur pour la conduite en sécurité de l'équipement de travail ;

c) Un contrôle des connaissances des lieux et des instructions à respecter sur le ou les sites d'utilisation.'

La seule production du certificat d'aptitude à la conduite en sécurité (Caces) est par conséquent insuffisante.

Il ressort des courriels des 27 juillet 2018 et 28 novembre 2018 de M. [T] et de l'attestation de M. [V] que M. [B] n'a pris aucune mesure alors que les caristes étaient placés sous sa responsabilité. Les autorisations de conduite n'étaient pas signées par le directeur attestant du test d'aptitude et de la formation alors qu'il avait en charge la sécurité des plates-formes logistiques Vegecroc 1 et 2 avec mission de 'manager une équipe d'opérateurs logistiques dans le souci permanent de la sécurité des personnes et des biens' conformément à son contrat de travail.

De plus, M. [B] possédait l'expérience requise, avait le statut cadre et percevait un salaire tenant compte ses responsabilités.

La réglementation et les consignes de l'employeur, malgré ses rappels, n'ont pas été respectées par le salarié qui ne les a pas appliquées. Ce grief relatif aux régles de sécurité dans l'entreprise est suffisamment grave pour justifier à lui seul le licenciement prononcé.

II. Sur la procédure suivie

L'article L. 1235-2 alinéa 5 du code du travail'dispose que: «'Lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.'»

Aux termes de l'article L1232-2 : «'La lettre indique l'objet de la convocation.'»

La convocation doit contenir l'indication non équivoque qu'un licenciement est envisagé et l'absence d'une telle mention doit entraîne la condamnation de l'employeur

En l'espèce, il est fait état d'une «'sanction disciplinaire'» ce qui pouvait l'induire en erreur en raison de son imprécision.

La simple mention de l'article L1232-2 pour un salarié non spécialiste du droit et l'imprécision de l'objet de la convocation l'ont privé de préparer efficacement sa défense pour la tenue de cet entretien et lui ont créé un préjudice qu'il convient de réparer.

La méconnaissance de cette formalité vicie la procédure.

Elle 'justifie que lui soit tout au plus alloué, à titre de'dommages'et'intérêts, le montant prévu au dispositif, soit un mois de salaire. Le jugement entrepris sera donc réformé en ce sens.

Sur les notes de frais et prime sur objectif':

Le courriel du 8 juillet 2018 vaut reconnaissance par l'employeur qui se reconnaît débiteur des frais de déplacement du salarié pour l'année 2018.

Il est incontestable que la somme de 467,75 euros lui est due mais il sera débouté du surplus en l'absence de tout justificatif.

Faute pour l'employeur d'avoir précisé au salarié les objectifs à réaliser ainsi que les conditions de calcul vérifiables, et en l'absence de période de référence dans le contrat de travail, la rémunération, qui n'a été que partielle, doit être payée intégralement soit 2300euros pour la période du 1er mai 2018 au 9 février 2019.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

M. [M] [B], qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel.

Les circonstances particulières à l'espèce justifient que chaque partie conserve la charge de ses propres frais non répétibles engagés en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a':

- dit que le licenciement pour faute grave de M. [M] [B] était justifié

l'a débouté de ses demandes afférentes

- débouté les parties de leurs demandes en frais irrépétibles de procédure

- condamné M. [M] [B] aux dépens

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a':

dit que le licenciement ne comportait pas d'irrégularité de forme

- a débouté M. [M] [B] de sa demande en versement de la prime sur objectifs

- a débouté M. [M] [B] de sa demande au titre du versement des frais de déplacement

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONSTATE l'irrégularité'de'forme'ayant affecté la procédure de'licenciement,

CONDAMNE la société Vegecroc à payer à M. [M] [B] la somme de 3 750 euros de dommages et intérêts à ce titre

CONDAMNE la société Vegecroc à payer à M. [M] [B] la somme de 2300 euros au titre de la prime d'objectifs,

CONDAMNE la société Vegecroc à payer à M. [M] [B] la somme de 467,75 euros au titre des frais de déplacement,

DEBOUTE les parties de leurs demandes en frais irrépétibles de procédure,

CONDAMNE M. [M] [B] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Pascale FOUQUET, Conseiller, et Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière.

LE GREFFIER LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00636
Date de la décision : 13/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-13;21.00636 ?
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