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07/12/2022 | FRANCE | N°22/00260

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre civile, 07 décembre 2022, 22/00260


ARRÊT DU

07 Décembre 2022





VS / NC



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N° RG 22/00260

N° Portalis DBVO-V-B7G -C7N7

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SAS PARIS PATRIMOINE CONSEIL



C/



[L] [F]



SAS IMOCONSEIL FRANCE



SAS [F] HOTEL





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GROSSES le

aux avocats

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ARRÊT n°











COUR D'APPEL D'AGEN



Chambre Civile









LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,







ENTRE :



SAS PARIS PATRIMOINE CONSEIL pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

RCS PARIS 398 395 939

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par ...

ARRÊT DU

07 Décembre 2022

VS / NC

--------------------

N° RG 22/00260

N° Portalis DBVO-V-B7G -C7N7

--------------------

SAS PARIS PATRIMOINE CONSEIL

C/

[L] [F]

SAS IMOCONSEIL FRANCE

SAS [F] HOTEL

-------------------

GROSSES le

aux avocats

ARRÊT n°

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,

ENTRE :

SAS PARIS PATRIMOINE CONSEIL pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

RCS PARIS 398 395 939

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Erwan VIMONT, membre de la SCP LEX ALLIANCE, avocat postulant au barreau d'AGEN

et Me François MENDY, avocat plaidant au barreau d'AMIENS

APPELANTE d'une ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de CAHORS en date du 25 février 2022,

RG 21/00118

D'une part,

ET :

Monsieur [L] [F]

né le 11 octobre 1970 à [Localité 5]

de nationalité française

domicilié : le Chateau

[Localité 7]

SAS [F] HOTEL pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 8]

[Localité 7]

représentés par Me Aurélie SMAGGHE, avocate postulante au barreau du LOT

et Me Cédric PARILLAUD, FIDAL, avocat plaidant au barreau de BRIVE

SAS IMOCONSEIL FRANCE pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

RCS 807 521 612

Futuropolis 5, téléport [Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Marie DULUC, substituée à l'audience par Me Laura CHIAPPINI, avocate postulante au barreau d'AGEN

et Me Stéphane PILON, avocat plaidant au barreau de POITIERS

INTIMÉS

D'autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 21 septembre 2022, sans opposition des parties, devant la cour composée de :

Valérie SCHMIDT, Conseiller

qui en a rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre elle-même de :

Cyril VIDALIE et Jean-Yves SEGONNES, Conseillers

en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, et après qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,

Greffière : Nathalie CAILHETON

ARRÊT : prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

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EXPOSÉ DU LITIGE

Du vivant de Mme [E] [F], décédée le 06 janvier 2020, propriétaire d'un ensemble immobilier à usage commercial et d'habitation consistant en murs d'hôtel, murs de restaurant, maison d'habitation et fonds de commerce hôtel-restaurant avec ses éléments mobiliers, exploité à [Localité 7] sous enseigne Hôtel Restaurant du Château, ont été conclus cinq contrats synallagmatiques de vente avec la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil dont la date de réalisation a été fixée au plus tard au mois de septembre 2020.

M. [L] [F], fils et unique héritier de feue Mme [F], lui-même propriétaire d'une maison d'habitation sur la même commune, objet d'un des compromis de vente et associé unique et président de la SAS [F] Hôtel, a accepté la succession.

Par acte du 28 septembre 2020, la date de réitération des actes de vente a été prorogée au 30 octobre 2020.

Par acte du 28 octobre 2020, M. [F] a fait délivrer à la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil une sommation de comparaître pour signature des actes de vente le 30 octobre 2020.

Par acte du même jour, le notaire instrumentaire a dressé procès verbal de carence.

Par mail du 04 novembre 2020, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil a sollicité une ultime prorogation au 18 décembre 2020.

Par exploit d'huissier du 17 février 2021, M. [F] et la SAS [F] Hôtel ont fait attraire la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil devant le tribunal judiciaire de Cahors aux fins d'obtenir réparation de leur préjudice, motif pris de la défaillance de cette dernière dans l'exécution de ses obligations contractuelles.

Par ordonnance du 25 février 2022, faisant suite aux écritures d'incident initié par la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil, le juge de la mise en état a :

- déclaré que le tribunal judiciaire de Cahors a compétence pour juger du litige,

- condamné la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer à M. [F] la somme de 260 000 euros à titre de provision à valoir sur indemnisation des préjudices découlant du défaut de réitération des actes de cession,

- condamné la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer à la SAS [F] Hôtel la somme de 75 000 euros à titre de provision à valoir sur indemnisation des préjudices découlant du défaut de réitération des actes de cession,

- condamné la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer à M. [F] et à SAS [F] Hôtel la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- rejeté le surplus des demandes.

Le juge de la mise en état a estimé que les cinq actes souscrits sont indissociables et conclus entre deux personnes physiques et deux sociétés commerciales et sont tous de nature mixte de sorte que le juge civil ayant été choisi, sa compétence est acquise. Partant, il a considéré qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à la demande de disjonction et de renvoi pour compétence au juge consulaire et de sursis à statuer s'y rattachant. Il a encore estimé que faute pour la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil d'avoir conclu au fond, sa demande de communication de pièces sous astreinte n'était pas fondée et qu'en l'absence d'éléments précis et justifiés sur son défaut de réitération, aucune contestation sérieuse n'était soutenue et de nature à s'opposer à l'allocation d'une provision.

La SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil a interjeté appel le 30 mars 2022 de cette décision en poursuivant son annulation et à tout le moins son infirmation en visant l'intégralité des chefs de jugement et en désignant en qualité d'intimés M. [F] et la SAS [F] Hôtel.

L'avis de fixation de l'affaire à bref délai est du 04 mai 2022.

Par dernières conclusions du 1er août 2022, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil demande à la cour de :

- réformer l'ordonnance déférée,

rejugeant de nouveau,

- juger que la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil a signé le 07 août 2019 cinq actes distincts avec respectivement feue Mme [F] propriétaire des bâtiments d'hôtel et de restaurant ainsi que du fonds de commerce, M. [F], propriétaire de la maison à usage d'habitation, et la SAS [F] Hôtel présentée comme propriétaire des éléments corporels et actifs mobiliers incorporés dans le fonds de commerce, dont deux relèvent de la compétence exclusive du tribunal de commerce,

- juger que le tribunal judiciaire saisi est incompétent pour statuer sur une cession de fonds et ses éléments constitutifs, acte de commerce, conclut entre deux commerçants, qui est de la compétence exclusive du tribunal de commerce en vertu des dispositions de l'article L. 721-3 3 du code de commerce,

- juger que l'opération envisagée par les parties était globale seulement en ce que la nullité éventuelle d'un acte emportait la nullité de tous les actes, ce qui ne fait nullement obstacle à la compétence exclusive du tribunal de commerce en matière commerciale et d'opérations entre commerçant, dès lors que pour une bonne administration de la justice il sera ordonné le sursis à statuer, permettant à la suite au tribunal judiciaire de Cahors de statuer sur l'opération globale in fine,

- renvoyer l'instance relative aux actes de cession de fonds de commerce et des éléments incorporels et actifs mobiliers y incorporés, au tribunal de commerce de Paris, et subsidiairement au tribunal de commerce de Cahors, en application des dispositions des articles 81 et suivants du code de procédure civile,

- ordonner pour une bonne administration de la justice la disjonction des instances en deux instances distinctes, l'une relative aux actes portant sur la cession d'immeubles (maison à usage d'habitation, bâtiment d'hôtel et bâtiment de restaurant) et l'autre relative aux actes portant sur la cession du fonds de commerce en application des dispositions de l'article 367 du code de procédure civile,

- prononcer pour une bonne administration de la justice le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir qui sera rendue par le tribunal de commerce, et le cas échéant après appel ou cassation,

- condamner M. [F] et la SAS [F] Hôtel à communiquer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par acte manquant, les pièces suivantes :

* le contrat de location-gérance signé en la forme authentique le 10 mars 1988,

* les justificatifs d'achat et de règlement des actifs mobiliers incorporés au

fonds de commerce d'hôtel-restaurant objets du compromis signé le 07 août 2019,

* les mandats de vente signés entre M. [F] et la SAS [F] Hôtel et la société Immo Conseil de [Localité 5],

* le livre d'entrée et de sortie du personnel attaché au fonds de commerce d'hôtel-restaurant appartenant à feue Mme [F] aux droits de laquelle vient M. [F] d'une part, et la société Envies de Terroir d'autre part,

* les bilans 2016, 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021 des sociétés SAS [F] Hôtel et Envies de Terroir et de M. [F],

* les justificatifs des préjudices prétendument subis du fait de l'immobilisation

des biens objets des actes litigieux fondant la demande d'allocation de la somme de 200 000 euros à titre de dommages-intérêts,

- juger que les demandes provisionnelles souffrent de contestations sérieuses qui échappent à la compétence du juge de la mise en état, en l'absence de démonstration d'un préjudice et de leur disproportion,

en conséquence :

- débouter les intimés de leurs demandes provisionnelles,

en tout état de cause :

- débouter la SAS [F] Hôtel et M. [F] de toutes leurs demandes, fins et moyens et les dire mal fondés,

- débouter la SAS Imoconseil de toutes ses demandes, fins et moyens et les dire mal fondés,

- condamner SAS [F] Hôtel et M. [F] in solidum à porter et payer à la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'appui de ses prétentions, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil fait valoir que :

- in limine litis, le juge de la mise en état n'est pas compétent en matière de cession de fonds de commerce entre commerçants,

- le tribunal de commerce a compétence exclusive pour connaître des litiges survenant à l'occasion de l'exécution des contrats signés entre commerçants,

- lesdits actes ont été rédigés par actes authentiques distincts et non en un acte unique de sorte que la compétence du tribunal judiciaire ne peut être retenue,

- le siège social de la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil étant à Paris, c'est le tribunal de commerce de Paris qui est compétent pour connaître du litige,

- l'exception de connexité ne peut prospérer car elle suppose que deux juridictions distinctes soient saisies ce qui n'est pas le cas,

- une bonne administration de la justice invite à procéder à la disjonction de l'instance en deux, une relevant de la compétence du tribunal judiciaire et l'autre relevant de la compétence de la juridiction consulaire,

- le sursis à statuer doit être prononcé pour éviter des décisions incompatibles entre elles,

- le rejet de sa demande de communication de pièces ne peut être prononcé au seul motif qu'elle n'a pas conclu au fond et alors que ces mêmes pièces sont indispensables pour articuler ses moyens de défense et permettre à la juridiction compétente de statuer en pleine connaissance de cause des éléments de fait et de droit,

- les pièces sollicitées ont un lien direct et incontestable avec le litige portant sur les compromis, leurs effets et suites, sachant qu'elle entend en tant que de besoin poursuivre leur nullité pour vice du consentement,

- les justificatifs demandés ont aussi pour but de comprendre comment ont été valorisés les actifs mobiliers incorporés au fonds de commerce,

- dans la mesure où il est envisagé des demandes indemnitaires au titre des commissions du notaire et de l'agent immobilier, elle doit disposer de tous les mandats signés,

- la discussion relative à l'insertion de la clause de non-concurrence dans les actes et subséquemment sur les actes de cession suppose que soit fourni le livre d'entrée et de sortie du personnel attaché au fonds de commerce d'hôtel-restaurant de la SAS [F] Hôtel et de la société Envies de Terroir,

- la communication des bilans 2019 et 2020 s'impose au regard de la demande indemnitaire faite au titre des charges importantes alléguées du fait de l'absence de réitération des actes,

- compte tenu de l'importance du montant des dommages et intérêts sollicités, il importe que M. [F] et la SAS [F] Hôtel justifient de leur préjudice,

- l'action de M. [F] et de la SAS [F] Hôtel a pour unique objectif de battre monnaie au mépris de la loyauté des débats,

- la sanction de l'application d'une clause pénale n'a pas été rappelée dans la sommation, à défaut de comparution et aucune notification à ce titre n'a été effectuée,

- aux termes des stipulations contractuelles, la clause pénale devait être prélevée automatiquement sur les dépôts de garantie, 10 jours après la sommation infructueuse faite au cessionnaire, ce qui n'est pas le cas,

- les contestations sérieuses faisant obstacle aux demandes provisionnelles résultent à tout le moins du caractère manifestement disproportionné des clauses pénales supposant le recours au pouvoir modérateur du juge,

- l'analyse du lien direct entre le préjudice allégué et les manquements attribués à la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil constitue une contestation sérieuse qui donne compétence au seul tribunal statuant au fond, et rend irrecevables les demandes provisionnelles.

Par uniques conclusions du 1er juillet 2022, M. [F] et la SAS [F] Hôtel sollicitent de la cour de :

- confirmer l'ordonnance déférée,

- condamner la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer une provision de 260 000 euros à M. [F],

- condamner la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer une provision de 75 000 euros à la SAS [F] Hôtel,

- débouter la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil de l'intégralité de ses demandes de disjonction et de communication de pièces complémentaires,

- condamner la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'incident.

A l'appui de leurs prétentions, M. [F] et la SAS [F] Hôtel font valoir que :

- la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil n'a jamais respecté ses engagements contractuels sans avancer le moindre motif légitime,

- l'attitude dilatoire de la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil se poursuit car elle n'a toujours pas conclu au fond,

- les 5 contrats synallagmatiques de vente sont indissociables et un long délai pour la réitération des actes a été convenu à la demande expresse de la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil pour lui permettre d'organiser son plan de financement,

- les actifs de succession principalement composés de biens immobiliers et de valeurs mobilières non liquides ne permettent pas de procéder au paiement des droits de succession à hauteur de 769 000 euros,

- si les litiges nés à l'occasion d'une cession de fonds de commerce relèvent en principe de la compétence d'attribution de la juridiction consulaire, la connexité y fait exception,

- il convient de soumettre à un même juge les questions indissociables relatives à plusieurs affaires ce qui constitue une prorogation légale de compétence,

- les demandes qui présentent un lien étroit, connexe et indivisible, doivent être prises en

compte par le même juge afin qu'il soit statué sur leur sort dans une même instance,

- la prorogation de compétence doit jouer en faveur de la juridiction de droit commun plutôt qu'en faveur de la juridiction d'exception,

- l'opération est indivisible de sorte que la non réalisation d'un seul contrat rend l'ensemble des compromis de plein droit nul et non avenus,

- n'entendant pas poursuivre les relations contractuelles avec la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil, les pièces complémentaires sollicitées par celle-ci n'ont aucun lien avec la demande soumise au tribunal judiciaire,

- le débat entre les parties ne porte pas sur la consistance des biens vendus ou leur prix qui ont déjà été arrêtés,

- en application des clauses pénales, les demandes présentées ont un caractère incontestable.

La SAS Imoconseil a constitué avocat le 19 mai 2022 sans déposer d'écritures ultérieures. La déclaration d'appel lui a été signifiée par acte du 06 mai 2022 avec remise à personne habilitée.

La cour pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions régulièrement déposées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à plaider le 21 septembre 2022.

MOTIFS

Considérations liminaires

Dans le cadre de l'appel relevé, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil a sollicité la nullité de l'ordonnance du juge de la mise en état du 25 février 2022, or la cour n'est saisie d'aucune demande subséquente à ce titre et cette prétention sera réputée abandonnée.

Sur la compétence du tribunal judiciaire

Aux termes de l'article 50 du code de procédure civile 'les incidents d'instance sont tranchés par la juridiction devant laquelle se déroule l'instance qu'ils affectent'.

En vertu de l'article 51 du code de procédure civile 'le tribunal judiciaire connaît de toutes les demandes incidentes qui ne relèvent pas de la compétence exclusive d'une autre juridiction'.

En l'espèce, il convient de relever que :

- les 5 actes signés en même temps le 07 août 2019 ont été souscrits de façon indivisible et forment un tout aux termes des conditions suspensives particulières incluses au sein des compromis de vente de la maison d'habitation, de vente des murs du restaurant, de cession de fonds de commerce de l'hôtel et de cession d'éléments d'actifs mobiliers, qui prévoient qu'il s'agit d''une opération globale indissociable' avec 'signature concomitante des actes authentiques' (...) 'la non réalisation, pour quelque raison que ce soit, d'une seule des opérations rendant caduque l'ensemble des cessions,' ou encore 'condition suspensive particulière essentielle et déterminante de l'opération globale', à savoir qu'à défaut elles n'auraient pas contracté de sorte que 'si la régularisation par acte authentique d'un seul compromis (...) ne pouvait se réaliser (...), l'ensemble des compromis régularisés entre les parties, seraient de plein droit nuls et non avenus',

- les actes litigieux ont une nature mixte pour avoir une nature commerciale pour l'une des parties, ici la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil mais aussi civile lorsque M. [F] procède à la vente de sa maison d'habitation, ce dernier n'agissant pas alors pour les besoins de son commerce,

- le présent litige comprend plusieurs objets en ce qu'il y a simultanément vente d'un fonds de commerce et de l'immeuble dans lequel ce fonds est exploité,

- la scission du litige pour le porter pour partie à la connaissance du tribunal de commerce s'agissant de la vente des fonds de commerce et pour partie à celle du tribunal judiciaire s'agissant de la vente des immeubles est contraire à une bonne administration de la justice et à la volonté des parties qui ont prévu l'ensemble comme un tout indivisible et aux prévisions de l'article 101 du code de procédure civile,

- le tribunal de commerce demeure une juridiction d'exception de sorte que le tribunal judiciaire conserve une plénitude de juridiction et l'acte mixte étant civil du côté du demandeur, et commercial du côté du défendeur, le demandeur peut saisir, à son choix, soit le tribunal de droit commun, soit le tribunal de commerce.

Du tout, il ressort que le tribunal judiciaire, choisi par M. [F], est compétent pour juger l'ensemble du procès, quelle que soit l'importance relative des questions civiles et des questions commerciales qu'il soulève. La demande de disjonction de la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil ne peut être que rejetée.

L'ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur la demande de communication de pièces

Aux termes de l'article 11 du code de procédure civile 'les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus.

Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre partie, lui enjoindre de le produire au besoin à peine d'astreinte (...)'.

L'article 770 du code de procédure civile dispose que 'le juge de la mise en état exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l'obtention et à la production des pièces'.

En l'espèce, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil sollicite la communication sous astreinte par M. [F] et la SAS [F] Hôtel de différentes pièces dont elle expose la nécessité d'en disposer pour assurer pleinement sa défense.

Toutefois, il convient de relever que la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil depuis l'introduction de l'instance le 17 février 2021 n'a pas encore conclu au fond alors que la demande de M. [F] et de la SAS [F] Hôtel se limite à solliciter des dommages et intérêts pour inexécution contractuelle et qu'aucune prétention ne tend à poursuivre l'exécution forcée. Sa demande très exhaustive de pièces sans le soutien d'écritures en réplique ne permet pas d'en établir la pertinence et la nécessité dans la démonstration d'ensemble recherchée. Dès lors, cette demande revêt un caractère dilatoire alors qu'à ce stade, il est toujours ignoré les motifs pour lesquels, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil ne s'est pas présentée devant le notaire instrumentaire le 30 octobre 2020.

Par conséquent, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil ne démontre pas en quoi elle est placée dans l'impossibilité de faire valoir ses arguments en défense.

Elle sera donc déboutée de sa demande de communication de pièces complémentaires.

Sur la demande de provision

L'article 789-3° du code de procédure civile prévoit que 'lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal pour accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable (...)'.

Aux termes de l'article 1231-5 du code civil 'lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. (...).

Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure'.

Il est constant que la provision correspond à la somme que le juge alloue au créancier à titre d'avance à valoir sur les causes du jugement définitif à intervenir.

M. [F] et la SAS [F] Hôtel entendent obtenir la confirmation de l'ordonnance ayant condamné la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à leur verser une somme globale de 335.000 euros.

En l'espèce, les compromis litigieux ont prévu contractuellement des pénalités pour défaut de réitération par acte authentique pour un montant total de 670.000 euros.

Contrairement à ce que soutient la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil, le juge de la mise en état ne s'est pas livré à une appréciation du caractère manifestement excessif ou dérisoire de la clause pénale lorsqu'il fixe le montant de la provision mais a estimé que l'obligation de la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil n'était pas sérieusement discutable en ce que celle-ci n'apporte aucun élément à ce stade de nature à fonder une contestation sérieuse en contrepoint de la demande indemnitaire articulée à son encontre.

En tout état de cause, le moyen tiré de l'absence de notification ou signification d'une mise en demeure conditionnant l'application de la clause pénale n'est pas suffisant pour élever une contestation sérieuse en présence d'une inexécution définitive des obligations contractuelles.

En outre, la validité de la clause pénale et son évaluation forfaitaire ressortent de la compétence du juge du fond à qui il appartiendra d'apprécier les moyens en défense de la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil qui ne peut opposer que la contestation sérieuse existe du seul fait de la saisine du tribunal judiciaire de préférence à celle du juge des référés.

Enfin, la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil ne peut soutenir que la contestation sérieuse réside dans la disproportion existante entre le montant inhabituel des clauses pénales qu'elle a souscrites et l'absence de préjudice subi par les demandeurs alors que la preuve d'un préjudice n'a pas à être rapportée, la sanction contractuelle s'appliquant du seul fait de l'inexécution.

Compte tenu de ce que le débat sur le fond reste à venir et que l'octroi d'une provision est une somme allouée à titre provisoire, les montants accordés à ce titre ne peuvent toutefois être de nature à compromettre le caractère réversible de son allocation.

En conséquence, il convient d'allouer à M. [F] la somme de 100.000 euros et à la SAS [F] Hôtel la somme de 50.000 euros, le tout correspondant au montant du séquestre en l'étude du notaire instrumentaire.

L'ordonnance déférée sera infirmée sur ce point.

Cependant, il ne peut être fait droit à la demande tendant à autoriser le notaire ayant procédé à ce séquestre à le libérer entre les mains de M. [F], cette demande non reprise au dispositif des écritures ne saisit pas la cour qui ne peut la considérer.

Sur les dépens et frais irrépétibles

La SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil, succombant à l'instance, sera condamnée aux dépens d'appel et à verser à M. [F] et la SAS [F] Hôtel la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition et en dernier ressort,

CONFIRME l'ordonnance déférée des chefs critiqués sauf en ce qu'elle a condamné la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer à M. [F] la somme de 260.000 euros et à la SAS [F] Hôtel la somme de 75 000 euros à titre de provision à valoir sur indemnisation des préjudices découlant du défaut de réitération des actes de cession ;

Statuant de nouveau :

CONDAMNE la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer à M. [F] la somme de 100.000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation des préjudices découlant du défaut de réitération des actes de cession ;

CONDAMNE la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à payer à la SAS [F] Hôtel la somme de 50.000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation des préjudices découlant du défaut de réitération des actes de cession ;

CONSTATE que la cour n'est pas valablement saisie de la demande tendant à voir autoriser le notaire à libérer le montant du séquestre entre les mains de M. [F] ;

CONDAMNE la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil aux dépens d'appel ;

CONDAMNE la SAS [Localité 6] Patrimoine Conseil à verser à M. [F] et la SAS [F] Hôtel la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Valérie SCHMIDT, conseiller faisant fonction de présidente, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00260
Date de la décision : 07/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-07;22.00260 ?
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