ARRÊT DU
07 Septembre 2022
CG/CR
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N° RG 14/00256
N° Portalis
DBVO-V-B66-CBI4
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[F] [R]
C/
[J] [M]
es qualité de liquidateur de la SARL L'HOTELIERE
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GROSSES le
à
ARRÊT n°
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Section commerciale
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur [F] [R]
né le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 4] (47)
de nationalité Française
'La Comedia'
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représenté par Me David LLAMAS, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN et par la SELARL VOXEL représentée par Me François DUVAL, avocat plaidant inscrit au barreau de TOULOUSE
APPELANT d'un Jugement du Tribunal de Commerce d'AGEN en date du 27 Novembre 2013, RG 2013004538
D'une part,
ET :
Maître [J] [M]
es qualité de liquidateur de la SARL L'HOTELIERE
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Erwan VIMONT, avocat inscrit au barreau d'AGEN
INTIMÉ
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 02 Mai 2022 devant la cour composée de :
Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre, qui a fait un rapport oral à l'audience
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Cyril VIDALIE, Conseiller
Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON
Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier
ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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FAITS ET PROCÉDURE
La SARL L'HOTELIERE, enseigne LE TEMPO, a été constituée à [Localité 4] le 14 janvier 2002, par acte sous seing privé, avec un capital social de 7 622,45 euros divisé en 500 parts sociales de 15,24 euros nominal. Le gérant désigné dans les statuts était [F] [R], également associé unique.
[F] [R], a effectué à la société un apport en numéraire de 1 524,50 euros, correspondant à 1/5ème du capital social.
Le 18 avril 2002, une cession des 500 parts sociales détenues par [F] [R] a été faite à [I] [O], sa compagne, qui les lui a rétrocédées le 1er mai 2009 moyennant le prix d'un euro, sans garantie de passif.
En juin 2012, [F] [R] a cédé le bail commercial de la SARL L'HOTELIERE à [G] [W], au prix de 39 314 euros, au moyen d'un crédit vendeur sur 5 ans.
En juillet 2012, [F] [R] a cédé à [G] [W] du matériel de restauration pour la somme de 20 000 euros.
Sur assignation de l' URSSAF, par jugement du 11 décembre 2012, le tribunal de commerce d'Agen a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL L'HOTELIERE, enseigne LE TEMPO. Maître [J] [M] a été désigné comme liquidateur judiciaire.
En date des 7 janvier et 11 février 2013, maître [J] [M], a adressé deux courriers recommandés à [F] [R] portant sur le remboursement de plusieurs sommes dues à la société.
Selon l'inventaire dressé par maître [N] le 26 mars 2013, le seul actif mobilier est un véhicule Citroen Berlingo immatriculé [Immatriculation 5], valorisé à 1 000€.
La liste succincte des créances éditée au 26 avril 2013 fait apparaître des dettes pour 317 595,95 euros. La valeur d'exploitation a été fixée à 1 000 euros. Aucune comptabilité n'a été effectuée depuis le dernier bilan clos au 30 avril 2010.
Se fondant sur les dispositions de l'article L 640-1 du code de commerce selon lequel le prononcé de la liquidation judiciaire rend exigible toutes les créances dues à la société, par assignation du 6 juin 2013, maître [J] [M], es qualité, a saisi le tribunal de commerce afin de voir condamner [F] [R] sous le bénéfice de l' exécution provisoire, au paiement du capital non libéré pour 6097,95 €, de la somme de 20 000 euros au titre du matériel vendu et celle de 4500 € au titre de la caution du bail commercial, outre 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
[F] [R] cité à sa personne n'a pas comparu.
Par jugement réputé contradictoire du 27 novembre 2013, le tribunal de commerce d'Agen a :
- condamné [F] [R] à verser entre les mains de maître [J] [M], en sa qualité de liquidateur de la SARL L'HOTELIERE, les sommes ci-dessous, avec exécution provisoire du jugement :
* 6 097,95€ au titre de la libération du solde du capital social de la SARL L'HOTELIERE,
* 20 000€ au titre de reversement du prix de cession de matériel de restauration cédé par la SARL L'HOTELIERE à Monsieur [W],
* 686.02€ au titre de reversement de la caution du bail commercial cédé par la SARL L'HOTELIERE à Monsieur [W],
* 750€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné Monsieur [F] [R] aux entiers dépens, liquidés à la somme de 80,85€.
Le tribunal a notamment retenu que le prononcé de la liquidation judiciaire d'une société rend exigibles toutes les créances qui lui sont dues. [F] [R] doit payer à la SARL L'HOTELIERE la somme de 6 097,95€ au titre de la libération du solde du capital social, puisque ce dernier n'a été libéré qu'à hauteur de la somme de 1 524,50€. Il est également tenu de lui payer celle de 20 000€, suite à la vente du matériel de restauration appartenant à la SARL et dont le mandataire judiciaire n'a pas trouvé trace du crédit dans les comptes de la société. Enfin, la caution perçue lors de la cession de bail commercial aurait dû être reversée à la SARL, de sorte que [F] [R] doit rembourser la somme de 686,02€.
Par déclaration du 14 février 2014, [F] [R] a interjeté appel de la décision et a demandé l'annulation du jugement ou, subsidiairement, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce d'Agen du 27 novembre 2013.
Par ordonnance de référé du 3 septembre 2014, le Premier Président a rejeté la demande de suspension de l'exécution provisoire présentée par [F] [R].
Dans le cadre de la procédure pendante devant la cour, l'appelant a versé aux débats une facture en date du 21 juillet 2012 afin de démontrer que le matériel vendu à [G] [W] lui appartenait personnellement et non à la SARL L'HOTELIERE. Maître [J] [M], es qualité, a déposé plainte entre les mains du procureur de la République le 6 février 2015, estimant que cette facture était un faux dès lors qu'il détenait au dossier une facture du 21 juillet 2012 émise par la SARL L'HOTELIERE.
Suivant ordonnance du 24 juin 2015, le conseiller de la mise en état a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive qui serait prise sur la plainte déposée par maître [J] [M].
Par ordonnance pénale du 11 août 2021, [F] [R] a été déclaré coupable d'usage de faux en écriture et condamné au paiement d'une amende de 500 euros. Un certificat de non-opposition a été délivré par le greffe du tribunal judiciaire d'Agen, non daté, rappelant que la décision a été notifiée par lettre recommandée du 31 août 2021 avec accusé de réception signé le 1 septembre 2021.
L'affaire a été remise au rôle le 26 janvier 2022 par les conclusions de Maître [M], [F] [R] n'a pas pris de nouvelles écritures.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions du 18 novembre 2014, [F] [R] demande à la cour de dire et juger que les créances, dont le paiement lui est réclamé sont injustifiées. Par conséquent :
* infirmer dans son intégralité le jugement du tribunal de commerce d'Agen,
débouter maître [M], es qualité, de l'ensemble de ses demandes,
* condamner maître [M], es qualité, à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamner maître [M], es qualité, aux entiers dépens.
Il fait valoir :
Sur la libération du capital social et la prescription de la demande :
* La SARL L'HOTELIERE a été immatriculée le 30 janvier 2002, la libération du surplus du capital social devait intervenir dans un délai de 5 ans à compter de l'immatriculation. Ainsi le paiement de la partie non libérée du capital social est devenu exigible au 1er février 2007. L'action en paiement de la partie non libérée du capital est prescrite à l'issu d'un délai de 5 ans, soit au 2 février 2012 en l'espèce. Or, maître [M] a assigné Monsieur [R] le 6 juin 2013.
* la prescription ne peut être écartée pour fraude de Monsieur [R]. En effet, maître [M] n'apporte pas la preuve de «man'uvre» ayant eu pour but de permettre l'accomplissement de la prescription.
Sur le reversement du prix de cession du matériel de restauration:
*Le matériel cédé à [G] [W] le 21 juillet 2012 appartenait à [F] [R]: maître [M] ne démontre pas que ce matériel appartenait au patrimoine de la SARL L'HOTELIERE. Il se fonde uniquement sur le procès-verbal d'inventaire du 19/12/2001 produit par l'appelant pour en conclure que ce dernier aurait procédé à un apport en nature au capital de la SARL. Or il résulte des statuts que la SARL L'HOTELIERE n'a été créée que par des apports en numéraire, d'où la somme réclamée au titre de libération du capital. Ainsi, maître [M] soutient deux thèses distinctes.
Ce matériel était la propriété de [F] [R] au jour de la cession, soit le 3 juillet 2012. Par ailleurs, l'acte de cession a bien été fait entre Monsieur [R] et Monsieur [W], ce dernier listant de manière exhaustive le matériel acquis.
* Le bilan de 2009/2010 ne suffit pas à présumer la propriété du matériel en cause. Ce document démontre que le matériel cédé n'a jamais été apporté à la SARL, puisque le matériel listé dans le procès-verbal d'inventaire du 19/12/2001 est tout à fait différent de celui présent dans l'état des immobilisations de la période du 01/05/2009 au 30/04/2010. D'ailleurs la valeur inscrite au bilan (35 912,65€) est sans commune mesure avec la valeur des biens en cause qui étaient évalués en 2001 à 168 700 francs, soit 26 000€. Il est difficilement concevable que le matériel ait pu prendre autant de valeur quasiment 10 ans après. D'ailleurs, la majeure partie des inscriptions en comptabilité de matériel remonte à 2007 ou 2010 pour un total de 36 251,67€, donc bien après 2001, ce qui démontre que ce matériel ne correspond pas à celui vendu à titre personnel par [F] [R] à [G] [W].
*Le matériel acquis en 2010 est immeuble par destination: les matériels acquis en avril 2010 auprès de METRO pour 19 390€ et AQUITHERM 47 pour 7 098€ sont immeubles par destination. Ces installations sont donc devenues la propriété du bailleur, s'agissant d'immobilisations s'incorporant à l'immeuble. Elles ont donc été laissées à la disposition du cessionnaire du droit au bail.
Sur le dépôt de garantie :
* la somme de 686,02€ est partie intégrante de l'économie générale du contrat de cession de bail commercial. Le montant de cette cession est de 40 000€, dont 686,02€ au titre de la restitution du dépôt de garantie et 39 314€ au titre de la cession de droit au bail proprement dite. Monsieur [R] n'est pas débiteur de cette somme, puisqu'elle a été mise à la charge du preneur. D'ailleurs, elle a été réglée à la SARL comme indiqué dans le contrat et maître [M] n'apporte pas la preuve qu 'elle ait été perçue entre les mains de l'appelant.
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Aux termes de ses dernières conclusions du 26 janvier 2022, Maître [J] [M], demande à la cour de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions et de condamner [F] [R] à lui payer, es qualité de mandataire judiciaire de la SARL L'HOTELIERE, les sommes suivantes :
* la somme de 6 097,95 euros au titre du solde du capital social,
* la somme de 20 000 euros au titre de la vente du matériel immobilier,
* la somme de 682 euros au titre de la caution du bail commercial,
* y ajoutant, condamner [F] [R] à payer la somme complémentaire de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que les entiers dépens.
Il fait valoir :
Sur le recouvrement du capital social non libéré:
* Il résulte du dernier bilan de l'EURL L'HOTELIERE du 30 avril 2010 que le capital social n'a pas été intégralement libéré, seule la somme de 1 525€ figure au titre des capitaux propres. La société est créancière de 6 097,95€ à l'égard de [F] [R].
*L'action en paiement a été initiée le 6 juin 2013, depuis le 1er mai 2009 [F] [R] était le gérant et l'unique associé de sorte qu'il était le seul à pouvoir intenter une action en paiement contre lui-même, maître [J] [M] n'ayant été désigné en qualité de mandataire judiciaire qu'à compter du 11 décembre 2012.
*La prescription ne court pas dans l'hypothèse d'une fraude, ce qui est le cas en l'espèce.
Sur le recouvrement du produit de cession :
* Le matériel : la société a vendu du matériel de restauration à [G] [W] pour la somme de 20 000€, comme en atteste la facture du 21 juillet 2012 produite au nom de la SARL. Or cette somme a été versée directement entre les mains de l'appelant, il convient donc de le condamner à payer cette somme.
* [F] [R] a ensuite affirmé que ce matériel lui appartenait personnellement et a établi une facture identique, avec pour seule différence le nom du facturier. Une plainte a été déposée par l'intimé le 06/02/2015 pour usage de faux et une ordonnance pénale a été rendue, déclarant [F] [R] coupable des faits.
*Aucun inventaire n'est joint à l'acte de cession, la désignation du matériel vendu est inconnue. Le seul document permettant de l'identifier est une attestation de l'acquéreur qui liste le matériel acquis. Celui-ci correspond exactement au matériel inventorié par maître [X] dans son procès-verbal du 19 décembre 2001, qui avait été estimé à 167 000 francs en 2001 et que [F] [R] prétend avoir cédé pour 20 000€. Il semble peu crédible que le matériel ait cette valeur quasiment 10 ans après.
* Le bilan à l'actif pour la période du 01/05/2009 au 30/04/2010 mentionne des installations techniques, matériel et outillage industriels (35 912€) et autres immobilisations corporelles (7587€), soit un total de 43 500€. Ces actifs auraient été acquis pour la plupart en avril 2010 comme le révèle le grand livre qui fait état d'acquisitions auprès de METRO et AQUITHERMS 47. Sachant que l'inventaire réalisé par le commissaire-priseur le 26 mars 2013 ne contient plus aucun actif, à l'exception d'un véhicule valorisé à la somme de 1 000 euros, la destination du matériel immobilisé valorisé à 43 500€ reste inconnue. [F] [R] ne peut donc pas soutenir que le matériel lui appartenait en propre, alors que le registre des immobilisations indique que le matériel a été acquis par la SARL en 2010.
*Il n'est pas démontré que les installations sont des immeubles par destination.
Sur le remboursement du dépôt de garantie :
*L'acte de cession du bail indique un dépôt de garantie d'un montant de 686,02 euros. Cette somme a elle aussi été réglée directement entre les mains de [F] [R], il doit la restituer à la procédure collective.
Sur la demande de dommages et intérêts :
*Des dommages et intérêts pour résistance abusive sur le fondement de l'article 1382 du code civil sont justifiés
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La Cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions déposées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 avril 2022 et l'affaire fixée au 2 mai 2022.
MOTIFS
1/ Sur le recouvrement du capital social non libéré
[F] [R] ne conteste pas que le capital social fixé à la somme de 7622,45 € aux statuts de la SARL L'HOTELLIERE n'a pas été intégralement versé, ni qu'il était l'associé unique et le gérant.
A la demande de Maître [M], il oppose la prescription quinquennale de l'action et invoque l'article L 110-4 du code de commerce et l'article L 223-7 du même code selon lequel les parts représentant des apports en numéraire doivent être libérées pour le surplus en une ou plusieurs fois sur décision du gérant dans un délai qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés.
[F] [R] ajoute qu'il n'a commis aucune fraude ou manoeuvre dans le but de permettre l'accomplissement de la prescription.
Le capital social non libéré est une créance de la société contre son associé et en application de l'article 1832, alinéa 3 du code civil qui définit le contrat de société, les associés s'engagent par ce contrat à contribuer aux pertes.
En l'absence de toute disposition dérogatoire, l'action du liquidateur judiciaire, exerçant les droits de la société dessaisie pour obtenir des actionnaires le paiement du capital non libéré sur le fondement du contrat de société, est soumise à la prescription de cinq ans de l'article 2224 du code civil dont le point de départ est le prononcé du jugement de liquidation judiciaire, qui rend exigible la créance d'apport détenue par la société débitrice sur ses actionnaires.
En l'espèce le jugement de liquidation judiciaire a été rendu le 11 décembre 2012 de sorte que l'assignation délivrée à [F] [R] le 6 juin 2013 a été faite dans le délai de cinq ans et l'action est recevable.
[F] [R] reconnaissant le principe de sa dette, il sera en conséquence condamné à payer à Maître [M] es qualité la somme de 6097,95 € et le jugement sera confirmé sur ce point.
2/ Sur le recouvrement du prix du matériel vendu au cessionnaire
Maître [M] se fondant sur une facture émise par la SARL L'HOTELLIERE du 21 juillet 2012 portant sur la vente de «matériel de restauration» à [G] [W] pour un montant de 20 000 euros, dont le crédit n'a pas été retrouvé dans les comptes de la société, en sollicite le remboursement par [F] [R].
Cette facture portant le timbre de la SARL L'HOTELLIERE lui a été adressée par [F] [R] suivant courrier du 23 janvier 2013 aux termes duquel celui-ci a indiqué que cette facture correspondait «à la cession de l'ensemble des actifs mobiliers corporels de la SARL LE TEMPO». Il faisait ainsi réponse à la correspondance de Maître [M] du 11 janvier 2013 qui lui rappelait que le droit au bail dépendant de l'actif de la SARL L'HOTELLIERE avait été cédé ainsi que le matériel, et que le prix de cession correspondant avait été versé entre ses mains, ce que [F] [R] n'a nullement démenti dans son courrier du 23 janvier 2013, alors qu'il a également répondu sur la licence IV sur laquelle le liquidateur l'avait interrogé pour dire qu'elle appartenait à son frère [P].
En cause d'appel [F] [R] a produit une autre facture libellée à son nom pour la même transaction pour soutenir que le matériel vendu était sa propriété.
Il est désormais définitivement condamné pour faux pour l'établissement de cette deuxième facture.
Les arguments qu'il a présenté dans ses écritures sur l'origine du matériel vendu à [G] [W] suivant acte de cession du 3 juillet 2012 sont donc dénués de toute portée, étant rappelé qu'il n'y a aucune description du matériel cédé à ladite facture judiciairement reconnue comme fausse.
[F] [R] ne s'est d'ailleurs jamais expliqué dans le cadre de la procédure d'appel sur la facture au nom de la SARL L'HOTELLIERE qu'il a lui même adressée à Maître [M], reconnaissant expressément à son courrier du 23 janvier 2013 une vente de matériel faite au repreneur ( [G] [W]) au profit de la société.
Il convient de relever que selon les pièces du dossier, le 10 août 2001 la SARL L'HOTELLIERE a acquis un droit au bail portant sur des locaux composés essentiellement d'un magasin, de locaux à usage de réserve, de sanitaires et d'une pièce studio pouvant servir d'habitation. Elle a fait réaliser des travaux pour les aménager en restaurant à compter de février 2002 et a fait l'acquisition de divers matériels de 2002 à avril 2010 tel que cela ressort du compte «immobilisations et amortissements» établi pour la période du 1 mai 2009 au 30 avril 2010. Ce poste a été inscrit au bilan pour 35 912,45 €, auquel s'ajoute le compte «mobilier» ( tabouret bar, chaises, tables...) pour des acquisitions enregistrées du 15 mars 2002 au 2 avril 2010 pour un total de7587,36 €.
Dès lors que ces éléments ont été enregistrés dans les comptes de la SARL L'HOTELLIERE c'est nécessairement sous la responsabilité de son gérant, [F] [R], et ce dernier est plutôt malvenu de soutenir que «la production de ce bilan ne suffit pas à présumer la propriété du matériel» et «qu'il conviendrait de vérifier avec un titre de propriété ou à tout le moins des factures d'achat», sauf à admettre implicitement que ce bilan est faux et qu'il y a été artificiellement ajouté des éléments d'actif inexistants. La tenue d 'une comptabilité régulière, et pour chaque exercice, relève de la responsabilité du gérant de la société, or Maître [M] indique à ses écritures, sans être démenti, qu'aucune comptabilité n'a été effectuée après le dernier bilan clôt au 30 avril 2010 et le commissaire-priseur chargé d'inventorier les éléments d'actifs de la SARL L'HOTELLIERE n'a recensé le 26 mars 2013 qu'un véhicule d'une valeur de 1000 €.
[F] [R] entretient en réalité une confusion avec des matériels qu'il a pu détenir dans le cadre de précédentes activités de restauration, puisqu'il est indiqué à un rapport de Maître [M] qu'il a été gérant du restaurant «LE ROSSINI» et du café -bar «LE VOLTAIRE» ayant faits l'objet de liquidations judiciaires en novembre 1999 et février 2002, clôturées pour insuffisance d'actifs en 2005 et 2008 (pièce 17) et qu'il a lui même fait procéder à un inventaire le 19 décembre 2001 dans des locaux sis [Adresse 2] de divers matériels de restauration ( sa pièce 3).
De l'ensemble de ces éléments il est suffisamment établi que [F] [R] est redevable de la somme de 20 000 € pour le matériel de la SARL L'HOTELLIERE qu'il a reconnu avoir vendu et le jugement qui l'a condamné au paiement sera confirmé.
3/ Sur le remboursement du dépôt de garantie
Maître [M] demande la condamnation de [F] [R] à payer le montant du dépôt de garantie de 686,02 € ( ramené à 682 € au dispositif de ses écritures) que l'acte de cession du droit au bail a mis à la charge de Monsieur [W] au profit de la SARL L'HOTELLIERE.
Le contrat signé le 3 juillet 2012 stipule en son article 3-C que la cédante (SARL L'HOTELLIERE ) a versé à l'origine au bailleur un dépôt de garantie, somme qui a été conservée par le bailleur pendant toute la durée du bail, et que le cessionnaire lui règlera ce dépôt de garantie le 20 juillet 2012.
Pour autant Maître [M] ne prouve par aucune pièce que [G] [W] a effectivement versé cette somme et que [F] [R] l'aurait conservée indument ; par suite cette demande de paiement ne peut qu'être rejetée et le jugement par voie de conséquence infirmé de ce chef.
4/ Sur la demande de dommages-intérêts
L'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à des dommages-intérêts que dans le cas de malice ou mauvaise foi ou erreur grossière.
En l'espèce il est avéré que [F] [R] a résisté abusivement aux prétentions de son adversaire, en contraignant ce dernier à intenter une action pénale pour faire reconnaître la fausseté d'un document produit en cause d'appel pour tromper la Cour, ce qui caractérise un acte de malice ou de mauvaise foi, tel que requis par le principe ci-dessus rappelé. Ce comportement est constitutif d'une faute de la part de [F] [R] qui excède les limites de l'exercice normal des droits de la défense et traduit un abus de procédure, une intention de nuire à la procédure collective et par suite, à ses créanciers, représentés par Maître [M] es qualité de mandataire liquidateur.
Ce dernier est donc fondé à en réclamer réparation et il lui sera alloué la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi.
5/ Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
L'article 700 du code de procédure civile prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Partie perdante [F] [R] a été à juste titre condamné aux dépens et à une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance.
Le recours étant au principal infondé, il sera condamné aux dépens d'appel.
L'équité commande de faire droit à la demande d'indemnisation de frais irrépétibles présentée par Maître [M] es qualité à hauteur de 2 000 €.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement du 27 novembre 2013 rendu par le tribunal de commerce d'Agen SAUF en ce qu'il a condamné [F] [R] à payer à Maître [M] es qualité la somme de 686,02 € au titre du reversement de la caution du bail commercial cédé par la SARL L'HOTELLIERE à [G] [W],
STATUANT A NOUVEAU
DÉBOUTE Maître [M] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL L'HOTELLIERE de sa demande en paiement de la somme de 686,02 € (ou 682 €) au titre du reversement de la caution du bail commercial cédé par la SARL L'HOTELLIERE à [G] [W],
Y AJOUTANT
CONDAMNE [F] [R] à payer à Maître [M] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL L'HOTELLIERE la somme de 10 000 € à titre de demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
CONDAMNE [F] [R] à payer à Maître [M] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL L'HOTELLIERE la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE [F] [R] aux dépens d'appel qui comprendront les dépens de l'incident du 24 juin 2015,
Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, présidente, et par Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière,La Présidente,