ARRÊT DU
10 Août 2022
CG/CR
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N° RG 21/01042
N° Portalis
DBVO-V-B7F-C6KO
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[X] [Z]
C/
S.A. COMPAGNIE
EUROPEENNE
DE GARANTIES
ET CAUTIONS
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GROSSES le
à
ARRÊT n°
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur [X] [Z]
représenté par Mme [S] [K],
en qualité de mandataire spécial,
né le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 7] (47)
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représenté par Me Sophie DELMAS, avocate postulante inscrite au barreau d'AGEN et par Me Patrice HUMBERT,avocat plaidant inscrit au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
APPELANT d'un Jugement du TJ d'AGEN en date du 09 Novembre 2021, RG 21/00157
D'une part,
ET :
S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES
ET CAUTIONS
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Hélène GUILHOT, avocate inscrite au barreau d'AGEN
INTIMÉE
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 08 Juin 2022 devant la cour composée de :
Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre, qui a fait un rapport oral à l'audience
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Jean-Yves SEGONNES, Conseiller
Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON
Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière
ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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FAITS ET PROCÉDURE
[X] [Z] a souscrit le 10 janvier 2017 deux prêts auprès de la banque CAISSE D'ÉPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES :
- un prêt relais habitat différé partiel d'un montant de 28 304€ sur 24 mois, au taux de 2%, et générant 23 mensualités de 47,17€ hors assurance, et un paiement in fine de 28 351,17€, hors assurance,
- un prêt habitat primo report d'un montant de 148 651,29€ au taux de 1,560% remboursable d'abord en 36 mensualités de 37,16€ (avec assurance, outre intérêts), puis en 300 mensualités d'un montant de 598,71€ (hors assurance).
Suivant acte sous seing privé du 19 décembre 2016, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS s'est portée caution du remboursement des deux prêts en faveur de l'établissement prêteur.
[X] [Z] a été défaillant dans le règlement des mensualités d'emprunt à compter du mois de juin 2019.
Par lettres recommandées avec accusé de réception du 19 septembre 2019, la CAISSE D'ÉPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES a mis en demeure [X] [Z] de régler diverses sommes au titre des impayés. Aucun paiement spontané n'étant intervenu, la CAISSE D'ÉPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES a prononcé la déchéance du terme le 25 novembre 2019, concernant les deux contrats de prêt et a exigé le remboursement de l'intégralité des sommes prêtées d'un montant de 23 987,79€ et de 159 345,20€, suivant courriers recommandés avec accusés de réception signés le 27 novembre 2021 par [X] [Z].
Aucun paiement n'étant intervenu de la part de [X] [Z], la CAISSE D'ÉPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES a alors adressé une demande de remboursement à la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS le 16 janvier 2020.
Par lettre du 3 février 2020, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a fait part à [X] [Z] de son intervention en qualité de caution et l'a invité à prendre attache avec ses services pour trouver une solution de règlement de sa dette.
Le 21 juillet 2020, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a versé à la banque CAISSE D'ÉPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES, la somme de 172 808,94€ au titre du remboursement des prêts consentis à [X] [Z].
Suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 28 juillet 2020, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a mis en demeure [X] [Z] de lui régler la somme totale de 184 966,95€ suivant décompte arrêté au 28 juillet 2020. Le courrier n'a pas été distribué le destinataire étant inconnu à l'adresse sise à [Localité 6] (94 700).
Elle l'a de nouveau mis en demeure de lui payer la somme de 185 562,82€ suivant décompte arrêté au 14 octobre 2020, par courrier recommandé avec accusé de réception signé par [X] [Z] le 19 octobre 2020.
Par ordonnance du 13 octobre 2020, [X] [Z] a été placé sous sauvegarde de justice et un mandataire spécial, [S] [K], a été désigné pour percevoir ses pensions et revenus, les appliquer à son entretien et à l'acquittement de ses dettes et obligations alimentaires, et faire fonctionner ses comptes de dépôt, de placement et d'épargne.
Par acte d'huissier de justice délivré le 20 janvier 2021, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a fait assigner [X] [Z] et Mme [K] es qualité, devant le tribunal judiciaire d'Agen aux fins de voir sur le fondement des dispositions des articles 1103, 1231-1 et 2305 du code civil et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamner [X] [Z] à lui payer la somme de 172 808,94€ outre intérêts au taux légal de la date de la mise en demeure du 28 juillet 2020 jusqu'à parfait paiement, à capitaliser annuellement, débouter [X] [Z] de toute éventuelle demande de délais de paiement.
Le 20 avril 2021, [X] [Z] a été placé sous tutelle par jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villeneuve-sur-Lot. [S] [K] a, de nouveau, été désignée en qualité de tuteur.
Le 30 octobre 2021, la commission de surendettement du Lot-et-Garonne a établi un plan conventionnel de redressement définitif. Celui-ci met en place le paiement de mensualités de 200€ au profit de la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS.
[X] [Z] et [S] [K] n'ont pas comparu devant le tribunal.
Par jugement réputé contradictoire du 9 novembre 2021, le tribunal judiciaire d'Agen a :
- condamné Monsieur [X] [Z] à payer à la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS la somme de 172 808,94€, outre intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2020, date de la mise en demeure adressée à Monsieur [X] [Z],
- ordonné la capitalisation des intérêts,
- condamné Monsieur [X] [Z] à payer à la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS la somme de 1 500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [X] [Z] aux dépens,
- dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,
- rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Le tribunal a notamment retenu, sur l'action en paiement, qu'aucun élément de nature à contester le principe ou le montant de la dette n'était démontré. La COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a versé, en sa qualité de caution, la somme de 172 808,94€ au titre du remboursement des prêts consentis à [X] [Z]. La banque lui a remis une quittance subrogative prouvant son paiement. Ainsi, il y a lieu de condamner [X] [Z] à rembourser ce montant à la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS. Concernant l'exécution provisoire de la décision, aucun élément ne justifie en l'espèce que celle-ci soit écartée.
Par déclaration du 29 novembre 2021, [X] [Z], représenté par [S] [K], tuteur, a interjeté appel de la décision en ce que le tribunal l'a condamné à payer une somme de 172 808,94 € outre intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2020 date de mise en demeure qui lui a été adressée, et qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts outre une condamnation au titre des frais irrépétibles et des dépens.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses uniques conclusions du 9 décembre 2021, [X] [Z] représenté par [S] [K] mandataire judiciaire à la protection des majeurs demande à la cour de réformer le jugement dont appel et de :
- débouter la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- dire et juger que Monsieur [X] [Z] n'est redevable d'aucune somme à l'égard de la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS,
- condamner la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS aux entiers dépens.
Il fait valoir, après rappel de textes et jurisprudence sur les relations caution/ débiteur principal:
*La COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS ne peut rendre opposables sa lettre de mise en demeure envoyée à [X] [Z] par courrier du 3 février 2020 de son intervention, et sa lettre recommandée du 28 juillet 2020 l'informant avoir payé les sommes dues en ses lieu et place. En effet, en raison de son hospitalisation, [X] [Z] était dans l'incapacité physique et psychologique de pouvoir en prendre connaissance ou bien de comprendre ces lettres. D'ailleurs, suite à la désignation du mandataire spécial, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS n'a pas renouvelé sa demande à celle-ci, alors qu'elle connaissait son existence.
* De plus, la saisine de la commission des dettes et la reconnaissance de la situation de surendettement est caractérisée, en l'espèce, par l'impossibilité manifeste de [X] [Z] de faire face à l'ensemble de ses dettes non-professionnelles exigibles et à échoir aussi bien à titre principal qu'à titre de caution.
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Aux termes de ses uniques conclusions du 4 mars 2022, la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, demande à la cour de :
- débouter Monsieur [X] [Z] et Madame [S] [K] de leur appel et de l'intégralité de leurs contestations et demandes,
- confirmer le jugement rendu le 9 novembre 2021 par le tribunal judiciaire d'Agen,
Y ajoutant,
- condamner Monsieur [X] [Z] à payer à la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS la somme supplémentaire de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, ces derniers avec distraction au profit de la SCP TANDONNET ET ASSOCIES conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir :
Sur le débouté de l'appel et la confirmation du jugement :
* En vertu de l'article 2305 du code civil, «la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur». La demande de la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS est fondée sur ces dispositions, en vertu de son recours personnel.
* En l'espèce, le cautionnement de la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS est expressément prévu dans le cadre du contrat de prêt signé par [X] [Z] le 10 janvier 2017. Après qu'elle ait exécuté son engagement de caution auprès de l'établissement bancaire, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a tenté d'obtenir à l'amiable que [X] [Z] lui rembourse ce qu'elle avait payé. Des courriers ont été adressés les 3 février et 28 juillet 2020, alors que [X] [Z] ne faisait pas encore l'objet d'une mesure de protection. D'ailleurs, les certificats médicaux produits ne prouvent pas que celui-ci ne pouvait avoir connaissance de ces lettres et bien les comprendre, en raison de son hospitalisation.
* Lorsqu'elle a saisi le tribunal, la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a appelé en cause [S] [K] en sa qualité de mandataire spécial de [X] [Z], ainsi aucun grief ne peut valablement lui être opposé quant à l'exercice de son recours personnel.
*Il est de jurisprudence constante que l'ouverture d'une procédure de redressement, et l'adoption d'un plan de remboursement dans ce cadre, ne fait obstacle qu'à l'exercice de mesures d'exécution forcée. Cela n'interdit nullement aux créanciers de saisir le juge du fonds pendant le cours de l'exécution des mesures de redressement, pour obtenir un titre exécutoire qui n'est destiné à être mis à exécution qu'en cas d'échec des mesures de redressement.
* S'agissant du recours personnel, les intérêts sont en réalité dus de droit à compter du jour du paiement, et pas uniquement à compter du jour de la mise en demeure
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La Cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions déposées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 avril 2022 et l'affaire fixée au 8 juin 2022.
MOTIFS
C'est par des motifs que la cour adopte dans l'intégralité, et après avoir fait une très exacte analyse des faits de la cause et une juste application du droit compte tenu des éléments qui lui ont été soumis, et qui n'ont pas varié en cause d'appel, que le premier juge a fait droit aux demandes de la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS.
La CEGC justifie par la production de la quittance subrogative établie le 21 juillet 2020 avoir payé la somme de 148 651,29 € pour le premier prêt et celle de 28 304 € pour le second, soit au total la somme de 172 808,94 €.
Elle communique également les mises en demeure adressées à [X] [Z].
En particulier [X] [Z] ne dénie pas avoir accusé réception le 19 octobre 2020 de celle du 14 précédent, et le mandataire judiciaire à la protection des majeurs [S] [K] déjà désignée à cette date n'explique pas les raisons pour lesquelles elle n'y a pas donné suite.
S'il résulte des pièces médicales que [X] [Z] produit qu'il présente des troubles cognitifs globaux secondaires à un arrêt cardio-respiratoire après tentative de suicide survenue en décembre 2019, troubles majorés par un épisode dépressif associé, et qu'en raison de cet état de santé, une mesure de protection a été sollicitée le 2 octobre 2020, mise en place sous la forme d'une sauvegarde de justice le 13 octobre 2020, puis d'une tutelle le 20 avril 2021, ces circonstances ne peuvent à elles- seules empêcher l'application des dispositions de l'article 2305 du code civil dont se prévaut la CEGC pour exercer son recours personnel et dont la créance est justifiée.
En effet le créancier d'une personne admise au bénéfice d'une procédure de surendettement des particuliers est légitime à obtenir un titre exécutoire qui n'est destiné à être mis à exécution qu'en cas d'échec des mesures de redressement, de sorte que la circonstance que [X] [Z] respecte les modalités du plan de surendettement dont il dit bénéficier ne peuvent faire échec à l'action de la société de caution. Il ne conteste nullement que la CEGC a payé ni le montant des sommes qu'elle a réglé.
En conséquence le jugement non utilement critiqué sera confirmé.
Succombant en leur recours, [X] [Z] et le mandataire judiciaire à la protection des majeurs seront condamnés aux dépens et il sera alloué à la CEGC la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré
Y AJOUTANT
CONDAMNE [X] [Z] et [S] [K] es qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs à payer à la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE [X] [Z] et [S] [K] es qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, présidente, et par Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière,La Présidente,