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14/06/2022 | FRANCE | N°21/00359

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre sociale, 14 juin 2022, 21/00359


ARRÊT DU

14 JUIN 2022



NE/CO



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N° RG 21/00359 -

N° Portalis DBVO-V-B7F-C4BL

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[C] [Z]





C/





SCA VIVADOUR venant aux droits de la SCA LES VIGNERONS DU GERLAND





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Grosse délivrée

le :



à

ARRÊT n° 67 /2022







COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale





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Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d'appel d'Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le quatorze juin deux mille vingt deux par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président assisté de Chloé ORRIERE, greffier



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ARRÊT DU

14 JUIN 2022

NE/CO

-----------------------

N° RG 21/00359 -

N° Portalis DBVO-V-B7F-C4BL

-----------------------

[C] [Z]

C/

SCA VIVADOUR venant aux droits de la SCA LES VIGNERONS DU GERLAND

-----------------------

Grosse délivrée

le :

à

ARRÊT n° 67 /2022

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d'appel d'Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le quatorze juin deux mille vingt deux par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président assisté de Chloé ORRIERE, greffier

La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire

ENTRE :

[C] [Z]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Pierre THERSIQUEL, avocat inscrit au barreau du GERS

APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes - formation paritaire d'AUCH en date du 10 mars 2021 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. F 19/00108

d'une part,

ET :

La SCA VIVADOUR venant aux droits de la SCA LES VIGNERONS DU GERLAND prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-Laure SOULA, avocat inscrit au barreau de GERS

INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 12 avril 2022 sans opposition des parties devant Nelly EMIN, conseiller rapporteur, assisté de Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier. Le magistrat rapporteur en a, dans son délibéré, rendu compte à la cour composée outre lui-même de Jean-Yves SEGONNES, conseiller et de Benjamin FAURE, conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 805 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

* *

*

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [C] [Z] a été embauché par le groupement viticole Les Vignerons du Gerland par plusieurs contrats à durée déterminée depuis le 23 septembre1999, puis à compter du 1er mai 2005, par contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, en qualité d'ouvrier polyvalent.

Le 1er janvier 2015, son contrat de travail était transféré au sein de la société coopérative agricole (SCA )Vignerons du Gerland.

Au dernier état de la relation contractuelle, Monsieur [Z] percevait un salaire mensuel brut de 1.679,93€.

Lors d'une visite périodique à la médecine du travail le 06 avril 2016, le Docteur [A] émettait un avis d'aptitude avec réserves, préconisant «d'éviter les travaux bras au-dessus des épaules et le port de charge répété.»

Le 15 septembre 2016, Monsieur [Z] était placé en arrêt de travail jusqu'au 15 octobre. Cet arrêt était prolongé du 16 octobre au 13 novembre 2016.

Par la suite, Monsieur [Z] a été placé à plusieurs reprises en arrêt de travail soit du 1er au 16 décembre 2016, du 13 janvier au 28 février 2017, du 31 juillet au 3 novembre 2017, du 6 novembre 2017 au 6 janvier 2018, du 9 janvier au 11 mars 2018.

Le 24 juillet 2018, Monsieur [Z] a été victime d'un accident du travail et placé en arrêt de travail. Les arrêts de travail ont été prolongés à plusieurs reprises.

Le 2 avril 2019, le médecin du travail, le Docteur [A], a déclaré Monsieur [Z] inapte à son poste d'ouvrier agricole polyvalent.

Concernant les indications relatives au reclassement, le médecin du travail prononçait les restrictions suivantes :

- éviter le port de charges répété

- éviter les travaux bras en hauteur au-dessus des épaules

- éviter les efforts longs et soutenus

- éviter le travail rachis dorso lombaires en flexion ou rotation

- éviter le travail au-delà de 9 heures consécutives

- en capacité de réaliser quelques tâches administratives après formation adéquate sur un temps partiel.

Le 24 juin 2019, le président des Vignerons du Gerland, Monsieur [E], informait Monsieur [Z] de l'impossibilité de le reclasser au sein de l'entreprise, ainsi qu'au sein du groupe.

Monsieur [Z] était convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé le 8 juillet 2019.

Par courrier recommandé du 15 juillet 2019 , il était licencié aux motifs suivants :

« L'impossibilité de vous reclasser au sein de l'entreprise suite à la reconnaissance par la médecine du travail de votre inaptitude médicale au poste que vous occupiez au préalable dans celle-ci, lors d'une visite médicale en date du 02/04/2019.

Vous avez été déclaré inapte à votre poste de travail par le Docteur [A] après étude de poste et des conditions de travail conformément à l'article R717-24 du code rural et de la pêche maritime.

Le Docteur [A] nous indique que vous êtes apte sur un poste avec éviction du port des charges répété, de travail nécessitant de porter les bras en hauteur au dessus des épaules des efforts longs et soutenus, de travail rachis dorso lombaire en flexion et/ou en rotation, de travail au delà de 9 heures consécutives. Elle précise que vous pourriez être en capacité d'exercer des tâches administratives après formation adéquate, et sur un temps partiel.

A la suite de cette visite, nous avons entamé une procédure de recherches approfondie de reclassement dans notre société.

Au vu des restrictions énoncées par la médecine du travail sur votre fiche d'inaptitude et des échanges que nous avons pu avoir avec le Docteur [F] [A] nous sommes contraints de constater qu'aucun poste compatible avec votre état de santé n'est vacant.

En effet, les postes en viticulture ou production sont difficilement compatibles avec les restrictions médicales dont vous faites l'objet. De plus, aucun aménagement de poste n'est envisageable afin de les adapter à vos pathologies ».

Le 4 novembre 2019, Monsieur [Z] a saisi le conseil des prud'hommes d'Auch afin de voir juger que la SCA Les Vignerons du Gerland a manqué à son obligation de sécurité de résultat ; que le licenciement prononcé pour inaptitude d'origine professionnelle par la SCA Les Vignerons du Gerland est dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'une part, l'inaptitude découlant d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, et d'autre part, l'employeur ayant manqué à son obligation de reclassement.

En conséquence il sollicitait la condamnation de la SCA Les Vignerons du Gerland, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui verser :

- la somme de 17 725,20 € à titre de dommages-intérêts suite au manquement à l'obligation de sécurité de résultat ;

- la somme de 42 540,48 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- la somme de 2 000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

- et sa condamnation à lui délivrer les bulletins de salaire du mois de mars 2016, sous astreinte, à raison de 50 € par jour.

Par jugement du 10 mars 2021, le conseil des prud'hommes a :

- dit que la SCA Les Vignerons du Gerland n'a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat ;

- dit que le licenciement prononcé par la SCA Les Vignerons du Gerland est un licenciement pourvu de cause réelle et sérieuse ;

- pris acte de la remise du bulletin de salaire du mois de Mars 2016 ;

- débouté Monsieur [Z] de la totalité de ses demandes ;

- débouté le défendeur de sa demande reconventionnelle ;

- mis les éventuels dépens à la charge du demandeur.

Par déclaration au greffe du 31 mars 2021, dont les conditions de forme et de délais ne sont pas critiquées, Monsieur [Z] a formé appel de l'ensemble des dispositions du jugement du conseil des prud'hommes d'Auch du 10 mars 2021.

L'ordonnance de clôture est en date du 03 février 2022.

L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 12 avril 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Suivant uniques conclusions en date du 22 juin 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens et de l'argumentation, Monsieur [Z] demande à la Cour de :

- juger tant recevable que bien-fondée son action ;

- juger que la SCA Les Vignerons du Gerland a manqué à son obligation de sécurité de résultat ;

- juger que le licenciement prononcé pour inaptitude d'origine professionnelle par la SCA Les Vignerons du Gerland est dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'une part, l'inaptitude découlant d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, et d'autre part, l'employeur ayant manqué à son obligation de reclassement ;

- condamner la SCA Les Vignerons du Gerland à lui verser la somme de 17 725,20 € à titre de dommages-intérêts, quant au manquement à l'obligation de sécurité de résultat ;

- condamner la SCA Les Vignerons du Gerland au paiement d'une somme de 42 540,48 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner la SCA Les Vignerons du Gerland au paiement d'une somme de 2 000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SCA Les Vignerons du Gerland en tous les dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir :

Concernant le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité

- depuis le 06 avril 2016, et ce jusqu'au licenciement, soit le 15 juillet 2019, le Dr [A], médecin du travail, a émis des avis d'aptitude avec réserve, et des préconisations,

- pourtant son état de santé n'a cessé de se détériorer, il a été placé à plusieurs reprises en arrêt maladie puis a été victime d'un accident du travail le 24 juillet 2018,

- son poste n'a jamais été aménagé et aucune tâche n'avait été répartie pour lui éviter le port de charges, malgré les alertes de la médecine du travail,

Concernant l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et manquement à l'obligation de reclassement

- son inaptitude a été causée par l'inaction de la SCA Les Vignerons du Gerland, en dépit des préconisations de la médecine du travail durant plus de trois ans,

- l'expertise du Docteur [J] établie pour le compte de la MSA en date du 5 février 2019 et portant sur l'accident du 24 juillet 2018 indique : « 'en soulevant un rouleau de fil de fer, Monsieur [Z] a ressenti une vive douleur au niveau du bas-ventre' cette récidive est survenue sur une paroi fragilisée, ayant déjà fait l'objet d'une cure chirurgicale pour hernie inguinale droite en 2012 »,

- les couronnes de fil utilisées pour la vigne sont conditionnées en bobine de 25 kilogrammes, or les prescriptions de la médecine du travail étaient pourtant claires, dès le 15 novembre 2016, le Dr [A] émettait un avis d'aptitude avec réserves, conseillant d'éviter le port de charges,

- la SCA Les Vignerons du Gerland n'a proposé aucun emploi de reclassement, dans les conditions prévues à l'article L.1226-10 du code du travail,

- la SCA Les Vignerons du Gerland est devenue partenaire du groupe coopératif VIVADOUR qui emploie plus de 1000 salariés (dont 80 % dans le Gers), sur 127 sites,

- la recherche faite par l'employeur apparaît ainsi insuffisante, plusieurs entreprises du groupe n'ont pas été sollicitées,

- si le médecin avait estimé que tout reclassement était impossible, il aurait dispensé l'employeur de l'obligation de rechercher un emploi dans l'avis d'inaptitude, ce qu'il n'a pas fait.

Suivant dernières conclusions du 02 septembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens et de l'argumentation, la SCA VIVADOUR venant aux droits de la SCA Les Vignerons du Gerland demande à la Cour de confirmer le jugement du conseil des prud'hommes d'Auch du 10 mars 2021 en toutes ses dispositions et de condamner Monsieur [Z] au paiement de la somme de 2 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

Concernant son absence de manquement à son obligation de sécurité de résultat

- il résulte des arrêts de travail produits par Monsieur [Z] que hormis l'accident du travail du 24 juillet 2018, tous les autres arrêts antérieurs avaient pour origine la maladie, sûrement en lien avec son tabagisme, et n'étaient pas en lien avec ses conditions de travail,

- le fait que Monsieur [Z] ait indiqué s'être blessé en portant une bobine de fil est insuffisant à établir que l'accident serait survenu parce que l'employeur n'aurait pas respecté les restrictions émises,

- la lecture des avis d'aptitude permet de constater qu'aucune tâche n'a jamais été interdite par le médecin du travail qui a seulement demandé par exemple que le port de charges ou le travail au-delà de 9 heures par jour consécutives soit « évités » ce qui n'est pas les interdire,

- si le médecin du travail avait considéré que l'entreprise ne respectait pas ses obligations et les restrictions émises, il avait la possibilité au cours de ses multiples examens d'alerter l'entreprise, de procéder à un contrôle, à une nouvelle étude de poste voire d'interdire certaines tâches, or, il a toujours énoncé des avis d'aptitude qui s'imposaient à l'employeur,

- à aucun moment Monsieur [Z] ne fera part de la moindre difficulté quant à l'adaptation de son poste ou à l'origine de son inaptitude,

- la société a adapté le poste de Monsieur [Z] pour respecter les recommandations du médecin du travail ainsi qu'en attestent Monsieur [V] [O], responsable technique des domaines et supérieur de Monsieur [Z] et Monsieur [K], qui n'est plus salarié de l'entreprise,

- la preuve du respect par l'employeur de l'adaptation du poste résulte également de l'étude de poste et des conditions de travail effectuée par le médecin du travail le 10 janvier 2019,

Concernant le bien fondé du licenciement

- l'inaptitude de Monsieur [Z] à son poste de travail est consécutive à un état de santé défaillant mais sûrement pas à ses conditions de travail ou à un manquement de l'employeur,

- l'accident de travail faisait suite à une récidive d'hernie inguinale, accident qui aurait très bien pu survenir dans le cadre de la vie privée et qui s'ajoutait à une longue série d'arrêts de travail pour maladie,

- si cette hernie est survenue pendant le temps de travail et sur le lieu de travail elle n'avait en réalité aucun lien avec le travail d'autant que depuis l'employeur a été informé de l'activité d'entretien de jardins qu'effectuait Monsieur [Z] en dehors de son temps de travail,

- le jour de l'accident, contrairement à ce qu'il prétend, Monsieur [Z] n'était pas seul à porter la bobine de fil puisque Monsieur [I] [M] l'aidait,

- l'obligation de reclassement constitue une obligation de moyen et non une obligation de résultat,

- les possibilités de reclassement envisageables étaient extrêmement réduites compte tenu de l'activé de la coopérative viticole mais en dépit de ces éléments, la société a procédé à une recherche sérieuse de reclassement,

- le médecin du travail, qui a une connaissance des postes de l'entreprise et de son activité, reconnaissait dans un courriel l'impossibilité de procéder au reclassement de Monsieur [Z],

- elle a interrogé les entreprises du Groupe Vignerons du Gerland, et les sociétés partenaires, alors même qu'elle n'était pas tenue de les consulter,

- les postes disponibles ne correspondaient pas aux recommandations du médecin du travail, ni aux capacités de Monsieur [Z],

- la société s'est également rapprochée de CAP EMPLOI afin d'être accompagnée dans la recherche de reclassement,

- le CSE a constaté « qu'aucun poste tenant compte des réserves émises par le médecin du travail n'a pu être identifié, création, mutation, transformation ou aménagement de temps de travail ».

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'obligation de sécurité

L'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, doit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés.

Il incombe à l'employeur de prévenir, par des moyens adaptés, tout risque lié non seulement à l'exécution de la prestation de travail, mais également à l'environnement professionnel dans lequel elle est délivrée.

En application des dispositions de l'article L.4121-1 du code du travail, '' l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes''.

Selon l'article L.4121-2 du même code, « l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L.4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L.1152-1 ; 8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs''.

En l'espèce, Monsieur [Z] reproche à l'employeur de ne pas avoir adapté son poste de travail, ni mis en place un temps partiel thérapeutique, alors que depuis le 6 avril 2016, le médecin du travail avait émis trois avis d'aptitude avec réserves, et que son état de santé n'avait cessé de se dégrader.

Afin de confirmer la décision du conseil des prud'hommes d'Auch qui a, à juste titre, considéré que l'attestation détaillée de [V] [O], supérieur hiérarchique de Monsieur [Z], établissait suffisamment que l'employeur avait respecté les restrictions émises par le médecin du travail, il suffira de rappeler et rajouter que :

- l'employeur produit en sus une attestation de Monsieur [U] [K], adjoint au responsable domaine, licencié au mois de novembre 2020 et qui ne faisait donc plus partie des effectifs de la société, qui confirme avoir reçu des consignes relatives aux aménagements de poste de Monsieur [Z] et notamment la manutention en binôme des rouleaux de fils,

- l'employeur justifie d'une reprise de travail à temps partiel thérapeutique du 1er janvier au 31 mars 2017, date à laquelle le docteur [S] a évalué Monsieur [Z] apte à reprendre à temps complet, puis d'un nouveau mi temps thérapeutique à compter du 1er février 2018.

D'autre part, comme l'a justement souligné le conseil des prud'hommes, les arrêts de travail hormis celui du 4 juillet 2018, ne peuvent être rattachés aux conditions de travail s'agissant d'affections autres que professionnels (embolie pulmonaire, psychiatrie, problèmes vasculaires, artère proplitée gauche, suite chirurgie jambe gauche).

Il n'est donc pas établi que l'employeur n'aurait pas respecté son obligation de sécurité et la décision du conseil des prud'hommes qui a débouté Monsieur [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à cette obligation sera en conséquence confirmée.

Sur le licenciement

L'appelant soutient une absence de cause réelle et sérieuse du licenciement prononcé à son encontre en raison d'une part de l'inaptitude professionnelle qui serait la conséquence du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et d'autre part d'une recherche de reclassement qui n'aurait pas été menée de façon précise et sérieuse.

Sur l'inaptitude du salarié

Le 2 avril 2019, le médecin du travail, le Docteur [A] a déclaré Monsieur [Z] inapte à son poste d'ouvrier agricole polyvalent.

Monsieur [Z] était alors en accident de travail depuis le 24 juillet 2018 pour une «récidive hernie inguinale droite invalidante pour un travailleur manuel».

Le rapport du médecin conseil du 5 février 2019 précise que l'assuré est inapte à son poste au 1er avril 2018 pour d'autres motifs médicaux relevant du risque maladie.

Contrairement à ce que soutient le salarié, le médecin conseil n'a pas indiqué que le rouleau soulevé était une charge trop lourde pour Monsieur [Z] compte tenu de son état de santé, le rapport se limitant à rapporter que le salarié a ressenti une vive douleur au niveau du bas ventre en soulevant un rouleau de fil de fer. Aucun élément ne permet d'indiquer que le rouleau de fer en question était une charge trop lourde en regard des restrictions préconisées antérieurement par le médecin conseil.

La cour n'a par ailleurs constaté aucun manquement de l'employeur à son obligation de sécurité durant la relation de travail.

Sur l'obligation de reclassement

En application de l'article L.1226- 10 du code du travail, l'employeur doit proposer au salarié déclaré inapte à son emploi par le médecin du travail, en tenant compte des conclusions écrites de celui-ci et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

Le conseil des prud'hommes a retenu les recherches de reclassement menées par l'employeur auprès des entreprises du groupe Vignerons du Gerland mais aussi des sociétés partenaires, auprès de CAP EMPLOI, le courriel du médecin du travail constatant l'absence de reclassement possible au sein de l'entreprise, la consultation des représentants du personnel, l'attestation du secrétaire du CSE pour juger que l'employeur avait bien recherché les possibilités de reclassement de Monsieur [Z] et en déduire que le licenciement comporte une cause réelle et sérieuse.

La cour observe que les premiers juge ont fait une exacte appréciation du caractère loyal et complet des recherches de l'employeur, et il suffira de rajouter que Monsieur [Z] ne saurait faire grief à l'employeur de ne pas avoir proposé un poste de travail au sein de la coopérative VIVADOUR alors que d'une part, il ne s'agit pas d'une société du groupe Vignerons du Gerland, que d'autre part les profils de postes vacants étaient qualifiés par la responsable de peu compatibles avec l'expérience professionnelle et les restrictions du salarié s'agissant de postes de sélectionneur semences, technico commercial, responsable secteur végétal et magasinier agro fournitures, et que ce dernier avait déclaré lors de son entretien avec les membres du CSE ne pas souhaiter suivre de formation.

La décision du conseil des prud'hommes ayant déclaré le licenciement de Monsieur [Z] pourvu de cause réelle et sérieuse sera ainsi confirmée.

Sur les dépens et les frais non répétibles

Monsieur [Z] succombant, il sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamné aux dépens de la procédure d'appel et la décision de première instance l'ayant débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné aux dépens de première instance, sera confirmée.

L'équité conduit à débouter la SCA VIVADOUR venant aux droits de la SCA Les Vignerons du Gerland de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE la SCA VIVADOUR venant aux droits de la SCA Les Vignerons du Gerland de la demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE Monsieur [Z] la demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [Z] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président et Chloé ORRIERE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00359
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;21.00359 ?
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