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18/05/2022 | FRANCE | N°21/00288

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre civile, 18 mai 2022, 21/00288


ARRÊT DU

18 Mai 2022





CG/CR





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N° RG 21/00288

N° Portalis

DBVO-V-B7F-C33Y

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[M] [W] [Z]



C/



[S] [D]



S.C.P. [D]







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GROSSES le

à









ARRÊT n°











COUR D'APP

EL D'AGEN



Chambre Civile









LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,







ENTRE :



Monsieur [M] [W] [Z]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 8] (ESPAGNE)

de nationalité Française

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 4]



Représenté par Me Emilie ISSAGARRE, avocate postulante inscrite au barreau d'AGEN et par Me Patricia CA...

ARRÊT DU

18 Mai 2022

CG/CR

---------------------

N° RG 21/00288

N° Portalis

DBVO-V-B7F-C33Y

---------------------

[M] [W] [Z]

C/

[S] [D]

S.C.P. [D]

------------------

GROSSES le

à

ARRÊT n°

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,

ENTRE :

Monsieur [M] [W] [Z]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 8] (ESPAGNE)

de nationalité Française

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 4]

Représenté par Me Emilie ISSAGARRE, avocate postulante inscrite au barreau d'AGEN et par Me Patricia CARDIN, avocate plaidante inscrite au barreau d'AVIGNON

APPELANT d'un Jugement du tribunal judiciaire d'AGEN en date du 23 Février 2021, RG 18/01487

D'une part,

ET :

Maître [S] [D]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 3] (47)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 3]

S.C.P. [D]

pris en la personne de son répresentant légal

domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentés par Me Erwan VIMONT, avocat inscrit au barreau d'AGEN

INTIMÉS

D'autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 07 Février 2022 devant la cour composée de :

Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre, qui a fait un rapport oral à l'audience

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller

Cyril VIDALIE, Conseiller

Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON

Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

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FAITS ET PROCEDURE

Au cours de l'année 2010, la Société Civile de Construction Vente (SCCV) Les Résidences d'Aquitaine a entrepris l'édification d'un programme immobilier à [Localité 9] (47).

Par acte authentique de vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) établi par la SCP [S] [D] et Maître [S], notaires associés à [Localité 3], le 9 juin 2010, [M] [W] [Z] a acquis auprès de la société Les Résidences d'Aquitaine, moyennant le prix principal de 110 000 € TTC, trois lots numéro 206, 216 et 514 cadastrées AB[Cadastre 6] et AB[Cadastre 7] de ce programme immobilier, soit respectivement un garage fermé, un appartement T2 et un emplacement de parking, avec une livraison prévue au deuxième trimestre de l'année 2010.

Estimant que le vendeur n'avait pas respecté ses engagements en ne livrant pas l'immeuble dans les délais impartis, [M] [W] [Z] a fait assigner, par acte d'huissier du 12 septembre 2014, devant le tribunal de grande instance d'Agen, la SCCV Les Résidences d'Aquitaine, aux fins d'obtenir notamment la résolution du contrat de vente.

Par jugement du 10 juin 2016, définitif, le tribunal de grande instance d'Agen a, entre autres dispositions et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, prononcé la résolution de la vente en l'état futur d'achèvement précitée et condamné la SCCV Les Résidences d'Aquitaine à payer à [M] [W] [Z] les sommes suivantes :

- 99 000 € au titre de la restitution du montant du prix de vente versée avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2014 ;

- 11 000 € au titre de l'indemnité forfaitaire contractuelle, avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2014 ;

- 2900 € au titre des frais d'acte notarié du 9 juin 2010

- 2000 € titrent de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par acte du 25 octobre 2017, [M] [W] [Z] a signifié au Crédit Agricole un procès-verbal de saisie attribution en exécution du jugement susvisé, aux fins d'obtenir paiement d'une somme de 133 836,63 €, suite auquel le Crédit Agricole a répondu, par courrier du 26 octobre 2017, que le compte bancaire de la SCCV Les Résidences d'Aquitaine présentait un solde débiteur de 716 225,77 €.

Un certificat d'irrecouvrabilité de la créance de [M] [W] [Z] envers la SCCV en vertu du jugement en date du 10 juin 2016 susvisé, a été établi le 5 mars 2018 par la SCP Delaye, huissiers de justice à Toulouse, précisant que que cette société avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire courant septembre 2017.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 11 avril 2018, signé le 20 avril 2018, [M] [W] [Z] a sollicité le paiement de la somme de 133 836,63 €, afférente à la résolution de la vente de son bien immobilier, à la SCP [S] [D] et Maître [S], notaires, en qualité de rédacteurs de l'acte de VEFA résolu judiciairement.

Faute d'obtenir satisfaction, [M] [W] [Z] a, par acte délivré le 7 septembre 2018, assigné Maître [S] [D] et la SCP [S] [D], notaires, devant le tribunal de grande instance d'Agen, devenu tribunal judiciaire, aux fins d'engager leur responsabilité notariale et obtenir réparation de son préjudice en sollicitant notamment la somme de 146 590,34 € en réparation du préjudice subi en lien avec la résolution du contrat de vente avec intérêts au taux légal à compter du 7 septembre 2018.

Par jugement du 23 février 2021, le Tribunal judiciaire d' Agen a :

- dit que le jugement rendu le 10 juin 2016 par le tribunal de grande instance d'Agen est opposable à la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires ;

- déclaré recevable l'action de [M] [W] [Z] à l'encontre de la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires ;

- débouté [M] [W] [Z] de sa demande en paiement formulé à l'encontre de la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires ;

- débouté [M] [W] [Z] de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné [M] [W] [Z] à payer à la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires, la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné [M] [W] [Z] aux dépens.

Le tribunal a notamment retenu que le jugement du 10 juin 2016 est opposable à la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires, en raison de l'insolvabilité de la société Les Résidences d'Aquitaine et compte tenu de la possibilité de voir le notaire condamné à garantir le paiement de la restitution du prix de vente en sa seule qualité de rédacteur de l'acte de vente annulée en cas d'insolvabilité de la société venderesse. La prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil n'était pas acquise à la date de l'assignation du 7 septembre 2018, le délai n'ayant commencé à courir qu'à compter du 26 octobre 2017, date de la connaissance par [M] [W] [Z] de l'insolvabilité de la société venderesse.

Au fond, le tribunal a considéré que [M] [W] [Z] n'apportait aucun élément permettant de démontrer un quelconque manquement de la SCP [S] [D] et [S] [D], notaires, à leur obligation d'assurer la validité et l'efficacité de l'acte de VEFA. Il ne démontrait pas plus qu'ils auraient failli à leur obligation de conseil et d'information alors que ces derniers se sont assurés de la souscription par la société venderesse des garanties et assurances obligatoires pour la conclusion de ce type d'acte. Il appartenait à [M] [W] [Z] d'actionner la garantie extrinsèque d'achèvement prévue au contrat de vente, ce dont il ne justifie pas, ayant choisi de demander la résolution de la vente pour inexécution d'une obligation contractuelle, résolution judiciaire qu'il a obtenue l'empêchant partant d'imputer la faute aux intimés de l'impossibilité de la vente. Aucun manquement à leur obligation de conseil et d'information ne peut être non plus reproché à la SCP [S] [D] et à Maître [S] [D], notaires.

Par déclaration du 16 mars 2021, [M] [W] [Z] a interjeté appel de la décision en ce que le tribunal l'a débouté :

- de sa demande en paiement formé in solidum à l'encontre de la SCP [S] [D] et de Maître [S] [D], notaires, en réparation de son préjudice subi en lien avec la résolution du contrat de vente, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

- de la condamnation formée in solidum à l'encontre de la SCP [S] [D] et de Maître [S] [D], notaires, sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi que des dépens.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses uniques conclusions du 16 avril 2021, [M] [W] [Z] demande à la Cour de :

- déclarer recevable son appel ;

- réformer partiellement la décision entreprise ;

- dire et juger que le défaut de recouvrement de la créance constitue un préjudice en rapport avec la résolution de la vente dont la SCP [S] [D] et Maître [S] [D] notaires sont responsables ;

- condamner in solidum la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires, à lui payer la somme de 146 590,34 € en réparation du préjudice subi en lien avec la résolution du contrat de vente ;

- les condamner également au paiement de la somme de 5.000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Emilie Issagarre, Avocat sur ses affirmations de droit ;

- dire et juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Il fait valoir:

In limine litis, sur l'inopposabilité aux tiers du jugement du 10 juin 2016 et la prescription:

* Il n'est pas contesté que ce jugement n'a autorité de la chose jugée qu'entre les parties mais en revanche, il peut se retourner contre les notaires responsables de son préjudice pour ne pas avoir assuré la validité et l'efficacité de l'acte litigieux ;

* Le point de départ de la prescription quinquennale de l'action engagée contre les notaires étant fixé à la date de la connaissance de l'insolvabilité du vendeur, le délai commence à courir en l'espèce le 26 octobre 2017 date du courrier du Crédit Agricole l'informant de ladite insolvabilité ;

Sur la responsabilité du notaire devant restituer le prix de vente du bien immobilier :

* Maître [S] [D], notaire, a failli à son obligation de conseil et d'information en ne vérifiant pas l'efficacité de la garantie de la police souscrite au moment des opérations de construction, entraînant la mise en 'uvre de sa responsabilité délictuelle et causant un grave préjudice aux copropriétaires requérants lié à la perte de chance ; les actes de vente ont été établis entre le 5 juin 2009 et le 31 août 2010 alors que l'attestation d'assurance ne datait que du 18 juillet 2008 et que les primes d'assurance étaient impayées depuis le mois d'avril 2009 et ce alors, que les appartements des bâtiments A et B ont été livrés les 24 et 25 avril, 16 mai et 23 août 2012 et dans un courrier du 26 avril 2012, adressé au notaire, le maître d''uvre d'exécution, la société ERGO, dénonçait ces livraisons des appartements en ce que l'attestation d'achèvement des travaux n'avait jamais été émise dès lors que ces derniers n'étaient pas entièrement terminés, les bâtiments n'étant pas raccordés au réseau d'assainissement public ce qui était confirmé par le rapport final du bureau du contrôle DEKRA établi le 15 janvier 2013 qui mentionnait d'importantes non-conformités et malfaçons substantielles ;

*Deux lettres recommandées adressées par le syndic SNG à Maître [S] [D] le 30 octobre 2012 démontrent également les fautes professionnelles de celui-ci, notamment concernant le règlement de copropriété qu'il avait établi en non-conformité avec la suppression des jardins privatifs ; la faute de la part du notaire dans son obligation de conseil alors qu'il était informé de l'ensemble des éléments est donc démontrée ;

* Le Crédit agricole a débloqué les fonds en vue de la livraison sans attestation d'achèvement contrairement à ce qui était prévu dans l'acte de vente ;

Sur le préjudice indemnisable :

* Si l'acquéreur ne parvient pas à recouvrer sa créance auprès du vendeur notamment en cas d'insolvabilité, la jurisprudence considère que ce défaut de recouvrement constitue un préjudice pour l'acquéreur en rapport avec l'annulation de la vente dont le notaire est responsable ; la SCP [S] [D] et Maître [S] [D], notaires, sont tenus à la restitution du prix de vente et à réparer le préjudice subi par lui, soit la somme de 146 590,34 € afférente au procès-verbal de saisie attribution en exécution du jugement du 10 juin 2016 rendu à l'encontre de la SCCV Les Résidences d'Aquitaine.

Aux termes de leurs uniques conclusions du 12 juillet 2021, la SCP [S] [D] et [S] [D] demandent à la Cour de :

- prononcer la recevabilité de leur appel incident

- prononcer la prescription de l'action formée à leur encontre suite à l'acte authentique de vente instrumenté le 9 juin 2010.

En tout état de cause :

- débouter purement et simplement Monsieur [W] [Z] des termes de son appel.

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement,

- y ajoutant condamner Monsieur [W] [Z] à leur régler in solidum la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ils font valoir:

Sur la prescription :

* Le point de départ de la prescription est à rechercher à compter de la faute supposée du notaire, à l'origine du fait dommageable invoqué, puisqu'il ne peut y avoir de responsabilité délictuelle sans faute ;

* Pour écarter la prescription de l'action il est indispensable de qualifier juridiquement l'époque à laquelle la faute du notaire a été connue dans ses conséquences de la part du demandeur ; en l'espèce le notaire est étranger aux causes de la résolution de la vente et à l'insolvabilité du vendeur ;

* Aucune nullité de l'acte de vente établi le 9 juin 2010 n'a été prononcée en raison d'une faute du notaire ; la résolution de la vente a été prononcée en raison de la faute personnelle du vendeur pour défaut de livraison dans le délai prévu à l'acte authentique ; le notaire n'a pas perçu le prix et n'a pas vocation à le restituer ;

* Aucune interruption de la prescription n'est opposable au notaire ;

Sur la validité et l'efficacité de l'acte de vente :

*La vente est parfaite en l'espèce et c'est la raison pour laquelle [M] [W] [Z] a pu en obtenir la résolution et non la nullité telle qu'il le soutient dans son dispositif, le tribunal ayant considéré que l'absence de livraison à la date de l'assignation en septembre 2014 constitue une faute du vendeur justifiant cette résolution dès lors que celle initialement prévue au deuxième trimestre 2010 était parfaitement indiquée dans l'acte authentique ;

* Seule la faute personnelle du cocontractant de [M] [W] [Z], la SCCV Les Résidences d' Aquitaine existe donc en l'espèce et l'appelant ne peut se fonder sur la seule impossibilité d'exécution d'une décision judiciaire pour engager la responsabilité du notaire qui implique la démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité dont il ne rapporte nullement la preuve ;

Sur l'obligation du conseil d'information :

* Il est surprenant que l'appelant reproche au notaire de ne pas avoir vérifié l'efficacité de la garantie de la police souscrite au moment des opérations de construction alors qu'il ne justifie d'aucune manière de ce qu'il a tenté d'obtenir la mise en 'uvre de ladite garantie ;

* Il ressort en tout état de cause de l'acte de vente que le vendeur a fourni à l'acquéreur une garantie extrinsèque d'achèvement de l'immeuble sous la forme d'une ouverture de crédit qui lui a été consentie par la société Calyon suivant acte sous signature privée du 13 décembre 2007 à [Localité 10], prise en application des articles R. 261-17 et R. 261 -21 du code de la construction de l'habitation ;

* [M] [W] [Z] était parfaitement informé de l'existence de cette garantie souscrite jusqu'à réception du bâtiment et donc définitive et sans réserve ; il lui appartenait de l'actionner pour en bénéficier, ayant préféré opter pour la résolution de la vente il ne peut en faire le reproche notaire ;

*Concernant le défaut de paiement des primes invoquées par l'appelant, elles ne sont pas démontrées, pas plus que le fait que le défaut de paiement puisse se rapporter à la garantie extrinsèque d'achèvement ou que le notaire en ait été informé, étant rappelé que le notaire n'est pas tenu des informations qui ne sont pas portées à sa connaissance, ni de la parfaite exécution d'un contrat d'assurance auquel il est tiers.

La Cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2022 et l'affaire fixée au 7 février 2022.

MOTIFS

Liminairement il sera relevé que les parties demandent aux dispositifs de leurs écritures que la Cour se prononce sur la recevabilité de leurs appels, principal et incident, sans développer aucune motivation sur ce point, ces demandes relèvent donc d'une «clause de style» et il n'y a pas lieu de statuer. En tout état de cause le conseiller de la mise en état seul compétent pour se prononcer n'a pas été saisi.

1/ Sur la prescription

Vu l'article 2224 du code civil,

En l'espèce l'acte authentique de vente établi le 9 juin 2010 par Maître [S] [D] n'a pas été annulé mais le tribunal de grande instance d' Agen a prononcé le 10 juin 2016 la résolution de la vente en l'état de futur achèvement pour retard dans l'achèvement des travaux à raison de la faute exclusive de la société SCCV Les Résidences d'Aquitaine.

Selon une jurisprudence constante, en cas d'annulation ou de résolution de l'acte établi avec le concours du professionnel du droit, les restitutions réciproques consécutives à l'annulation ou la résolution d'un contrat qui ne constituent pas en elles-mêmes un préjudice indemnisable ne sont garanties par le notaire, si sa faute est établie, que si elles s'avèrent impossibles à obtenir, notamment en raison de l'insolvabilité du contractant qui en est débiteur.

Par suite c'est donc à juste titre que le tribunal a apprécié le point de départ du délai de prescription de l'action de [M] [W] [Z], sur le fondement de la responsabilité délictuelle du notaire, à compter de la manifestation du dommage, soit à partir du courrier du CREDIT AGRICOLE du 26 octobre 2017 l'informant de l'insolvabilité de la SCCV.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

2/ Sur la faute de Maître [S] [D] et la SCP [S] [D]

C'est après une analyse complète des éléments qui lui étaient soumis et par des motifs pertinents que la Cour adopte, que le tribunal a débouté [M] [W] [Z] de ses demandes indemnitaires à l'encontre des intimés.

Il suffira d'ajouter les éléments suivants, après avoir rappelé que [M] [W] [Z] fait uniquement grief à Maître [S] [D] de n'avoir pas rempli son obligation de conseil et d'information en ne vérifiant pas l'efficacité de la garantie de la police d'assurance souscrite au moment des opérations de construction.

Or dans ses écritures [M] [W] [Z] fait de longs développements pour critiquer les conditions dans lesquelles les travaux ont été réalisés, les fonds débloqués par le CREDIT AGRICOLE sans attestation d'achèvement et rappeler des non conformités et malfaçons constatées. Autant d'éléments qui sont sans rapport avec le grief formulé.

Il convient de relever que l'acte de vente établi le 9 juin 2010 stipule que le prix a été payé le même jour à hauteur de 65% , soit 71 500 €, le surplus du prix soit 38 500 €, étant payable au fur et à mesure de l'avancement des travaux par fractions «suffisamment justifiées par des attestations de l'architecte de l'opération» et «information de l'acquéreur par lettre recommandée avec accusé de réception à la diligence du vendeur». Au regard des allégations de l'appelant, nulle intervention du notaire à ce stade n'était donc prévue, ni postérieurement dans le cadre du déroulement du chantier.

S'agissant des garanties, il résulte de l'acte notarié que :

- une garantie extrinsèque d'achèvement a été consentie ( pages 17 à 20) par la CALYON sous la forme d'une ouverture de crédit à la société venderesse suivant acte signé le 13 décembre 2007 annexé à l'acte de dépôt de pièces reçu par le notaire le 5 novembre 2008 ;

- aux termes de l'acte du 13 décembre 2007 la «CALYON s'est engagée envers les acquéreurs dans les conditions prévues par les articles L 261-11, R261-17 et R261-1 (alinéa a) du code de la construction et de l' habitation, à ouvrir un crédit devant suppléer à la défaillance éventuelle de la société venderesse dans son obligation d'achever l'ensemble immobilier» , [M] [W] [Z] en signant l'acte de vente a accepté cette stipulation et a déclaré avoir eu connaissance de l'acte susvisé ;

- des extraits des dispositions de cette convention d'achèvement ont encore été reproduits à l'acte notarié signé par [M] [W] [Z] ; il a ainsi eu connaissance des conditions dans lesquelles cette garantie était donnée et pouvait être actionnée ;

- la société venderesse a justifié des assurances DOMMAGES OUVRAGE, CONSTRUCTION NON REALISATEUR auprès des AGF en remettant les attestations originales des polices d'assurances en date du 18 juillet 2008 (pages 22 et suivantes), TOUS RISQUES CHANTIER auprès de la compagnie d'assurances ALBINGIA avec remise d'une copie des conditions particulières de cette assurance au notaire qui en atteste du dépôt le 5 novembre 2008 et d'une assurance incendie.

Au vu de ces éléments Maître [S] [D] n'avait pas à vérifier en sus auprès de la société CALYON la pérennité de la garantie octroyée, et en cause d'appel pas plus qu'en première instance [M] [W] [Z] ne prouve qu'il a actionné les garanties souscrites par la SCCV, et il procède encore uniquement par affirmation en indiquant à ses écritures que «les primes d'assurance sont impayées depuis le mois d'avril 2009».

Comme relevé à juste titre par le tribunal il a fait le choix de poursuivre la résolution de la vente et non d'actionner la garantie de la société CALYON dont il ne prouve pas qu'elle n'était pas acquise.

Le jugement qui a rejeté ses demandes en écartant tout manquement fautif de Maître [S] [D] à son obligation d'information et de conseil sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

Succombant à la procédure d'appel, [M] [W] [Z] sera condamné à en supporter les dépens et à payer aux intimés la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré

Y AJOUTANT

CONDAMNE [M] [W] [Z] à payer à Maître [S] [D] et à la SCP [S] [D] la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE [M] [W] [Z] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, présidente, et par Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00288
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;21.00288 ?
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