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11/05/2022 | FRANCE | N°20/00341

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre civile, 11 mai 2022, 20/00341


ARRÊT DU

11 Mai 2022





NE/CR





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N° RG 20/00341

N° Portalis

DBVO-V-B7E-CZBH

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[X] [Z]



C/



[D] [V]







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GROSSES le 11.05.2022

à Mes DELBREL et BRUNEAU









ARRÊT n°










r>COUR D'APPEL D'AGEN



Chambre Civile









LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,







ENTRE :



Monsieur [X] [Z]

né le 24 Mai 1950 à [Localité 1] (47)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté par Me Yann DELBREL, avocat inscrit au barreau d'AGEN



APPELANT d'un Jugement du Juge des contentieux de la ...

ARRÊT DU

11 Mai 2022

NE/CR

---------------------

N° RG 20/00341

N° Portalis

DBVO-V-B7E-CZBH

---------------------

[X] [Z]

C/

[D] [V]

------------------

GROSSES le 11.05.2022

à Mes DELBREL et BRUNEAU

ARRÊT n°

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,

ENTRE :

Monsieur [X] [Z]

né le 24 Mai 1950 à [Localité 1] (47)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Yann DELBREL, avocat inscrit au barreau d'AGEN

APPELANT d'un Jugement du Juge des contentieux de la protection de VILLENEUVE SUR LOT en date du 03 Avril 2020, RG 1119000152

D'une part,

ET :

Madame [D] [V]

née le 11 mai 1979 à [Localité 3] (TCHAD)

[Adresse 4]

[Localité 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/003835 du 08/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AGEN)

Représentée par Me Laurent BRUNEAU, avocat inscrit au barreau d'AGEN

INTIMÉE

D'autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 14 Février 2022 devant la cour composée de :

Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller

Nelly EMIN, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience

Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON

Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

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FAITS ET PROCEDURE

Selon contrat du 1er décembre 2012, Madame [V] a pris à bail un logement situé au [Adresse 4] moyennant un loyer d'un montant de 326 € par mois charges comprises.

Au début de l'année 2015, Madame [V] a saisi les services de l'Agence Régionale de Santé ( ARS) pour faire procéder à une enquête d'insalubrité. Un rapport a été déposé le 06 février 2015 et communiqué au bailleur le 16 février 2015.

Le 17 février 2015, un arrêté préfectoral a mis le bailleur, Monsieur [Z], dans l'obligation d'installer un chauffage fixe dans chaque pièce de l'habitation.

Madame [V] a saisi le tribunal d'instance de Villeneuve-sur-Lot, en référé, afin de voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire.

Selon ordonnance du 17 mars 2017, le juge des référés a fait droit à cette demande et désigné Monsieur [H] en qualité d'expert judiciaire.

Cet expert a rendu son rapport le 9 octobre 2017, constatant que l'immeuble était impropre à sa destination et présentait des risques importants pour la sécurité et la salubrité de son occupant.

Madame [V] a ensuite fait délivrer une assignation le 5 juin 2019 devant le tribunal d'instance de Villeneuve sur Lot afin de solliciter la condamnation du bailleur, à lui régler la somme de 19.560 € en réparation de son préjudice de jouissance, celle de 8.000 € en réparation de son préjudice moral et celle de 1.440 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Reconventionnellement, Monsieur [Z] a sollicité la résiliation du bail, l'expulsion de la locataire et sa condamnation à payer l'arriéré des loyers et charges locatives en cours puis une indemnité d'occupation jusqu'au départ effectif des lieux, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 3 avril 2020, le juge du contentieux de la protection a :

- condamné Monsieur [Z] à verser à Madame [V] la somme de 19560 € en réparation de son préjudice de jouissance,

-condamné Monsieur [Z] à verser à Madame [V] la somme de 2500 € en réparation de son préjudice moral,

-débouté Monsieur [Z] de l'ensemble de ses demandes,

-condamné Monsieur [Z] à verser à Maître Bruneau la somme de 1000€ au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

-condamné Monsieur [Z] aux entiers dépens,

-ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Le tribunal a constaté, en considération notamment du rapport d'expertise, que malgré les multiples mises en demeure et avertissement délivrés à Monsieur [Z], le logement loué à Madame [V] était encore considéré près de deux années plus tard, comme «impropre à sa destination présentant des risques importants pour la sécurité et la salubrité de son occupant», que ce bailleur refusait clairement d'effectuer les travaux, ce qui caractérisait un comportement et des omissions ayant engagé sa responsabilité à l'égard de la locataire au titre d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral.

S'agissant de la demande reconventionnelle, le tribunal estimait que Monsieur [Z] ne produisait aucun élément permettant d'établir l'existence d'un manquement de la locataire dans ses obligations contractuelles.

Par déclaration du 18 mai 2020, Monsieur [Z] a interjeté appel de la décision en visant tous les chefs du dispositif du jugement.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses uniques conclusions reçues le du 03 avril 2020, Monsieur [Z] demande à la cour de :

-infirmer le jugement du juge du contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villeneuve-sur-Lot du 3 avril 2020,

-débouter Madame [V] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Reconventionnellement,

-constater que Madame [V] a failli à ses obligations de preneur,

En conséquence,

-prononcer la résiliation du bail conclu le 1er décembre 2012 entre lui et Madame [V],

-prononcer l'expulsion de Madame [V] et de tous occupants de son chef des lieux situés « [Adresse 4], et ce avec l'assistance de la force publique si besoin est,

-condamner Madame [V] à lui payer l'arriéré des loyers et charges locatives en cours jusqu'à la date de la décision à intervenir,

-condamner Madame [V] à lui payer une indemnité d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges en cours jusqu'au départ effectif des lieux,

-condamner Madame [V] à lui payer la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner Madame [V] aux entiers dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que :

sur les demandes indemnitaires de la locataire

-Madame [V] a elle-même effectué des travaux dans le logement loué comme cela était prévu dans le contrat de bail signé entre les parties où il était rappelé : «si des travaux sont réalisés, avec l'accord du bailleur, ils seront déduits le mois suivant »,

-l'expert judiciaire mentionne qu'un certain nombre de travaux ont été réalisés par la locataire et ne sont pas conformes aux règles de l'art des corps d'états correspondants (électricité, plomberie, sanitaires, ventilation, menuiserie') et des risques réels majeurs pour la sécurité des personnes existent,

- il ne saurait être tenu pour responsable de ces manquements,

- il n'a jamais nié que l'immeuble loué présentait des installations et des équipements sommaires, relevés notamment par l'ARS et c'est précisément parce qu'il avait conscience de cette situation que le loyer était extrêmement modéré (326 € par mois charges comprises pour une maison d'habitation de 4 pièces avec jardin et dépendance) et qu'il avait été convenu un dégrèvement des loyers dans l'attente de la finalisation de certains travaux,

-il a tenté, à plusieurs reprises, d'effectuer des travaux, Madame [V] n'y a jamais donné suite, l'entreprise MARCELO ELECTRICITE a d'ailleurs établi une attestation aux termes de laquelle il apparaît que celle-ci a tenté de joindre à plusieurs reprises Madame [V],

en lui laissant des messages aux fins de prise d'un rendez-vous, sans succès,

-le comportement du locataire empêchant la réalisation des travaux doit être pris en considération dans l'évaluation du trouble de jouissance en vue d'une minoration de l'indemnisation due par le bailleur,

-malgré ses faibles ressources, Madame [V], qui est éligible à un certain nombre de dispositifs de protection sociale aurait pu se reloger ailleurs, manifestement, elle ne l'a pas souhaité,

-Madame [V] ne règle plus le reliquat de loyer de 70 € par mois depuis le mois de mai 2017, or les locataires ne peuvent d'autorité différer le paiement du loyer au motif que le bailleur n'exécuterait pas les travaux que la loi impose,

-depuis le mois d'avril 2015, la Caisse d'allocations familiales ne lui a plus versé d'allocations logement, de sorte qu'il ne perçoit plus de revenus locatifs,

-le juge du contentieux de la protection a ordonné le versement de dommages et intérêts au profit de la locataire pour un préjudice moral alors qu'il s'agit en réalité du même préjudice dont l'indemnisation a déjà été ordonnée au titre du préjudice de jouissance,

sur la demande reconventionnelle

-Madame [V], conformément à la clause n°7 du chapitre VIII « Obligations du locataire », se devait de « ne pas transformer sans l'accord écrit du bailleur les locaux loués et leurs équipements », or elle a notamment posé un poêle dans la pièce centrale du logement loué,

-la clause n°8 des obligations du locataire mentionne que ce dernier doit « laisser exécuter dans les lieux loués les travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, ainsi que les travaux nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués », or il n'est pas contestable que Madame [V] n'a pas laissé entrer les employés de la société MARCELO ELECTRICITE,

-ce comportement n'étant en aucun cas justifié, il constitue manifestement un manquement à son obligation légale et constitue un motif de résiliation,

-la relation contractuelle ne peut perdurer dans de telles conditions et ce d'autant plus que la locataire n'est pas à jour du règlement des charges et du loyer, ce qui constitue également un manquement grave,

-Madame [V] qui bénéficie d'une aide juridictionnelle totale doit être déboutée de sa demande infondée sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, alors qu'il ne perçoit qu'une retraite modeste et n'est absolument pas en capacité économique de procéder à un tel

règlement.

Aux termes de ses uniques conclusions reçues le du 10 novembre 2020, Madame [V] demande à la cour de :

-rejeter l'intégralité des demandes de Monsieur [Z],

-confirmer dans son intégralité le jugement rendu le 3 avril 2020 par le juge des contentieux et de la protection,

Et y ajouter

-condamner Monsieur [Z] à verser à Maître Bruneau la somme de 2400,00€ en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

-condamner Monsieur [Z] aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que:

sur ses demandes indemnitaires :

-de manière concordante, le rapport de l'ARS et le rapport d'expertise judiciaire mettent en exergue que le logement insatisfait à de multiples conditions de décence,

-le rapport d'expertise souligne la présence « de risques importants pour la sécurité des personnes et la solidité de l'ouvrage » et que le bien objet du bail litigieux « peut difficilement être qualifié de logement»,

- c'est à juste titre que le jugement a retenu le caractère indécent du logement et a, également, parfaitement justifié l'indifférence de Monsieur [Z] face à cette situation relevant les multiples demandes de mise en conformité du logement auxquelles le bailleur est resté impassible,

-ces éléments caractérisent le manquement du bailleur à son obligation de délivrance d'un logement décent, et la volonté de ce dernier de ne pas y remédier,

-ces constatations mettent en exergue un préjudice de jouissance indéniable et l'impossible qualification du local en logement justifie que ledit préjudice soit évalué sur l'intégralité du loyer sollicité par le bailleur, soit la somme de 326,00€, et ce sur toute la période contractuelle,

- le préjudice moral se caractérise par le fait pour une partie d'avoir abusé de la faiblesse, de l'ignorance de son cocontractant pour lui imposer des conditions d'hébergement indignes,

-Monsieur [Z] n'encaisse pas les chèques qu'elle lui adresse mensuellement pour ensuite les déposer simultanément, et malgré le paiement régulier des loyers, Monsieur [Z] refuse d'adresser des quittances; or, sans quittance, elle ne peut constituer des dossiers auprès des organismes de logement sociaux,

sur la demande reconventionnelle

-il résulte des témoignages de Monsieur [U] et de Madame [W] que le propriétaire visitait régulièrement le logement loué, et du dire adressé à l'expert par le conseil de Monsieur [Z] qu'il reconnaît qu'il «était convenu entre le bailleur et la locataire que Madame [V] effectuerait des travaux, dont le coût serait à déduire du loyer, sur présentation des factures,"

-aucun manquement ne peut alors lui être reproché pour avoir réalisé des travaux avec l'accord du bailleur,

-le bailleur n'a formalisé aucune démarche auprès d'elle afin d'organiser une visite d'une société pour des travaux et des appels, si tant est qu'ils aient été réalisés, ne peuvent caractériser une obstruction de la locataire, sans qu'une mise en demeure n'ait été adressée ou à tout le moins des demandes écrites de son bailleur,

-concernant le règlement des loyers de 2017, Monsieur [Z] a déposé, deux chèques en janvier, puis sept chèques au mois de décembre 2017, alors qu'il prétend n'avoir perçu aucun règlement à compter de juin de la même année, deux chèques ont ensuite été déposés en février 2018 et elle a continué à adresser les chèques à son bailleur qui ne sont, à ce jour, toujours pas encaissés.

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux conclusions déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2022 et l'affaire fixée au 14 février 2022.

MOTIVATION

Sur les demandes indemnitaires de la locataire

Sur le préjudice de jouissance

L'alinéa 1 de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Le 3eme alinéa de cet article indique que le bailleur est obligé :

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées ; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas.

Aux termes du contrat de bail signé par les parties, le bailleur est tenu de «délivrer au locataire un logement décent, ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Délivrer au locataire un logement en bon état d'usage et de réparation, ainsi que des équipements mentionnée au contrat en bon état de fonctionnement».

Le contrat contient en outre une clause particulière ainsi libellée: si des travaux sont réalisés, avec l'accord du bailleur, ils seront déduits le mois suivant.

La cour constate que le premier juge a considéré à juste titre qu'en sa qualité de bailleur Monsieur [Z] a engagé sa responsabilité à l'égard de Madame [V] en relevant que :

-du rapport d'expertise du 9 octobre 2017 il résulte que l'immeuble présente «plusieurs caractéristiques défectueuses... il peut difficilement être qualifié de logement, il est non conforme au code de la construction et de l'habitat», que l'expert a conclu que l'immeuble est «impropre à sa destination, aucune solution économique viable n'est envisageable pour remédier à l'insalubrité des locaux... tout est à reprendre... tout est à refaire ou à faire», et que le bailleur n'a effectué aucun travaux majeurs nécessaires et loue un immeuble impropre à sa destination présentant des risques importants pour la sécurité et la salubrité de son occupant,

-dans son rapport du 29 janvier 2015, l'ARS relevait déjà plusieurs infractions au règlement sanitaire départemental et invitait alors, dans son courrier du 16 février 2015, Monsieur [Z] à remédier à la situation dans les plus brefs délais,

-par arrêté préfectoral du 17 février 2015, Monsieur [Z] a été mis en demeure d'exécuter sous quinze jours des travaux d'installation du chauffage fixe dans chaque pièce,

-malgré les multiples mises en demeure et avertissements délivrés à Monsieur [Z], le logement qu'il loue a encore été considéré en octobre 2017, près de deux années plus tard comme impropre à sa destination présentant des risques importants pour la sécurité et la salubrité de son occupant,

-il résulte de la lettre du 24 novembre 2015 que Monsieur [Z] a clairement indiqué qu'il refusait d'effectuer des travaux, malgré les multiples demandes de sa locataire.

Pour confirmer la décision entreprise, il suffira de rajouter que :

-le bailleur ne peut se prévaloir d'une aggravation de la situation de l'immeuble du fait de travaux non conformes aux règles de l'art réalisés par la locataire dès lors que cette dernière l'avait mis en demeure par courriers des 12 novembre et 21 décembre 2015 d'effectuer les travaux nécessaires et que celui-ci ne s'est pas exécuté,

-l'expert a indiqué que si les travaux réalisés dans le logement n'étaient pas conformes aux règles de l'art, les travaux réalisés par la locataire n'étaient pas clairement identifiés, à défaut d'information fournies par les parties sur l'état des lieux lors de l'entrée dans le logement et d'informations,

-les caractéristiques défectueuses relevées par l'expert montrent que l'insalubrité de l'immeuble préexistait aux travaux réalisés par la locataire, (ventilation des locaux absente dans plusieurs pièces, couverture présentant des gouttières en toiture et des infiltrations, un seul chauffage dans une seule pièce sur les quatre pièces existantes, un morceau de mur qui s'écarte et laisse passer l'air et l'eau), que l'état du logement ne résulte donc pas du fait de la locataire, l'immeuble demeurant insalubre avant comme après ses travaux, de sorte que le préjudice de jouissance de la locataire ne saurait être minoré du fait des travaux qu'elle a tenté de réaliser pour pallier à la carence de son bailleur,

-le bailleur ne rapporte pas la preuve d'un comportement de la locataire ayant empêché la réalisation des travaux, l'unique pièce produite à savoir une attestation du 5 janvier 2017 de l'entreprise MARCELLO ELECTRICITE indiquant n'avoir pas pu joindre Madame [V] malgré plusieurs appels et deux messages est insuffisante à caractériser une opposition de la locataire à la réalisation des travaux qu'elle réclamait depuis 2015.

Par ailleurs, le premier juge a justement estimé le montant du préjudice en considérant que le logement loué présente de tels désordres que ce préjudice doit être évalué à la totalité des loyers que la locataire a versé au bailleur depuis son entrée dans le lieux soit la somme de 19560 euros.

Sur le préjudice moral

Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a caractérisé l'existence d'un préjudice moral résultant du comportement inadapté du bailleur envers sa locataire dans l'exécution du contrat en refusant d'effectuer les travaux nécessaires à la mise en conformité du logement loué, en n'adressant pas régulièrement les quittances de loyers et a tout aussi justement évalué le montant en fixant ce préjudice à la somme de 2500 euros.

Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.

Sur les demandes reconventionnelles formées par l'intimé

Monsieur [Z] fonde son action sur l'article 1728 du code civil qui dispose que le preneur est tenu de deux obligations principales :

1° D'user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention,

2° De payer le prix du bail aux termes convenus.

Il appartient au bailleur qui invoque des manquements de la locataire à ses obligations contractuelles d'en rapporter la preuve.

Il a déjà été vu que le bailleur ne rapporte pas la preuve d'une opposition de Madame [V] à la réalisation des travaux dans le logement.

Madame [V] justifie par la production de ses relevés de compte et des photocopies de chèques s'être acquittée des loyers dus, déduction faite du montant de la prestation versée par la caisse d'allocations familiales.

La pose d'un poêle à bois dans la pièce principale par la locataire ne saurait être qualifiée de manquement par cette dernière à son obligation d'user raisonnablement de la chose dès lors que le logement était dépourvu de tout système de chauffage et que le bailleur a refusé de réaliser lui même les travaux nécessaires à cet effet, louant ainsi un logement impropre à l'habitation.

La décision du juge du contentieux de la proximité qui a débouté Monsieur [Z] de ses demandes tendant à obtenir la résiliation du contrat de bail, l'expulsion de la locataire, le paiement de l'arriéré de loyers et une indemnité d'occupation sera ainsi confirmée, aucun manquement de la locataire à ses obligations n'étant démontré.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dispose que les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la personne condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre, que le juge condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide le juge tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Monsieur [Z] succombant, il convient de confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a condamné Monsieur [Z] à verser à Maître Bruneau la somme de 1000€ au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et a condamné Monsieur [Z] aux entiers dépens.

Madame [V] est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale et son conseil, Maître Bruneau indique vouloir renoncer à percevoir la contribution de l'Etat. Il sollicite à cet effet la condamnation de Monsieur [Z] à lui payer la somme de 2400 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et repris à l'article 700 alinéa 1er 2° du code de procédure civile. Monsieur [Z] partie perdante et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, sera tenu de faire face aux frais et honoraires non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide et qui peuvent être évalués à la somme réclamée de 2000 euros.

Il y a lieu, en conséquence, de condamner Monsieur [Z] à verser à Maître Bruneau, avocat de la bénéficiaire de l'aide qui en fait la demande, la somme de 2000 euros.

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, Maître Bruneau dispose d'un délai de 12 mois à compter du jour où la présente décision est passée en force de chose jugée pour demander le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, à défaut, il est réputé avoir renoncé à celle-ci.

Monsieur [Z] sera également condamné aux dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du juge du contentieux de la proximité du 3 avril 2020 en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [Z] sera également condamné à verser à Maître Bruneau la somme de 2000 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

RAPPELLE que si Maître Bruneau , avocat de Madame [V] , recouvre tout ou partie des sommes allouées en application de l'article 37de la loi du 10 juillet 1991, il renonce à percevoir à due concurrence la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

CONDAMNE Monsieur [Z] aux dépens de l'appel.

Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, présidente, et par Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00341
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;20.00341 ?
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