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30/03/2009 | FRANCE | N°07/01668

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre commerciale, 30 mars 2009, 07/01668


ARRÊT DU
30 Mars 2009

C. A / S. B**

---------------------
RG N : 07 / 01668
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S. N. C. BANQUE EDEL

C /

Céline, Mireille X...

Patrick X...

Catherine Y... épouse X...

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Aide juridictionnelle

ARRÊT no

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Commerciale

Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le trente Mars deux mille neuf, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assi

sté d'Isabelle LECLERCQ, Greffier,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE :

S. N. C. BANQUE EDEL, prise en la personne...

ARRÊT DU
30 Mars 2009

C. A / S. B**

---------------------
RG N : 07 / 01668
---------------------

S. N. C. BANQUE EDEL

C /

Céline, Mireille X...

Patrick X...

Catherine Y... épouse X...

------------------

Aide juridictionnelle

ARRÊT no

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Commerciale

Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le trente Mars deux mille neuf, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assisté d'Isabelle LECLERCQ, Greffier,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE :

S. N. C. BANQUE EDEL, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est 5 avenue Marcel Dassault
Parc de la Plaine
31505 TOULOUSE CEDEX 05

représentée par Me Jean-Michel BURG, avoué
assistée de Me Serge DIDIER, avocat

APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal de Commerce d'AUCH en date du 12 Octobre 2007

D'une part,

ET :

Madame Céline, Mireille X...
née le 08 Mars 1970 à VIC FEZENSAC (32190)
de nationalité française
employée
Demeurant ...
...
32360 JEGUN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008 / 000011 du 18 / 01 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN)

représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués
assistée de Me Isabelle BRU, avocat

Monsieur Patrick X...
né le 12 Septembre 1961 à JEGUN (32360)
de nationalité française
Demeurant ...
...
32360 JEGUN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2008 / 000012 du 18 / 01 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN)

représenté par la SCP Henri TANDONNET, avoués
assisté de Me Isabelle BRU, avocat

Madame Catherine Y... épouse X...
Demeurant ...
12200 SANVENSA

ASSIGNÉE, n'ayant pas constitué avoué

INTIMÉS

D'autre part,

a rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 15 Décembre 2008, devant Raymond MULLER, Président de Chambre, François CERTNER, Conseiller et Chantal AUBER, Conseiller (laquelle, désignée par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable), assistés d'Isabelle LECLERCQ, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.

* *
*

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte sous seing privé du 22 avril 2003, la SNC Banque EDEL a consenti un prêt d'un montant de 320. 000 € d'une durée de sept ans, à la SARL X... qui exerçait une activité de garage automobile.

Préalablement, par acte sous seing privé du 17 avril 2003, Patrick X..., gérant de la SARL X..., Catherine X... et Céline X..., ses associées, se sont portés cautions solidaires pour le remboursement des sommes dues par la société X... à concurrence de 320. 000 € en principal outre intérêts, commissions, frais et accessoires.

Le 30 avril 2004, le prêt a été réaménagé pour le montant de 293. 296, 41 €. À la même date, Patrick X..., Catherine X... et Céline X... ont confirmé leurs engagements de caution.

Par jugement du 20 septembre 2005, le tribunal de commerce de RODEZ a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL X.... La Banque EDEL a déclaré sa créance auprès du mandataire judiciaire.

Par actes d'huissier des 19 juillet 2006 et 28 août 2006, la Banque EDEL a fait assigner en paiement Patrick X..., Catherine X... et Céline X... devant le tribunal de commerce d'AUCH qui, par jugement du 12 octobre 2007, a :

- prononcé la nullité des engagements de caution souscrits par Patrick X..., Catherine X... et Céline X...,

- débouté la SNC BANQUE EDEL de ses demandes,

- jugé que les cautions n'auraient pas dû être demandées au vu de la situation comptable, des revenus de salaires et du manque de patrimoine,

- prononcé la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite le 19 juin 2006 sur le bien appartenant à Céline X...,
- débouté Patrick X... de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné la SNC BANQUE EDEL à payer à Patrick X... et Céline X... la somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La SNC Banque EDEL a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 décembre 2008.

Catherine Y... épouse X..., assignée par acte du 3 juin 2008 remis à sa personne, n'a pas constitué avoué. Il y a donc lieu de statuer par arrêt réputé contradictoire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SNC BANQUE EDEL, dans ses conclusions récapitulatives déposées le 5 décembre 2008, demande à la cour, au visa des articles 1134 et 2288 et suivants du code civil :

- d'infirmer le jugement du tribunal de commerce,

- de juger que les actes de caution solidaires signés le 17 avril 2003 et confirmés le 30 avril 2004 par Patrick X..., Catherine X... et Céline X... à son profit, sont valables et réguliers tant en la forme que sur le fond,

- d'annuler la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite le 19 juin 2006 sur le bien appartenant à Céline X..., sis lieudit " Lacalm " 12200 SAVENSA, cadastré section ZV no 93,

- de condamner solidairement Patrick X..., Catherine X... et Céline X..., en qualité de cautions solidaires de la SARL X... au paiement :

* de la somme principale de 236. 70713 € avec intérêts au taux contractuel à compter du 12 octobre 2005 au titre du contrat de prêt no 0000014573 du 22 avril 2003,
* de la somme de 3. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir essentiellement, en ce qui concerne les engagements de caution, que les articles L 341-2, L 341-3 et L 341-4 du code de la consommation ne sont pas applicables aux opérations destinées au financement des besoins d'une activité professionnelle ni aux cautionnements antérieurs à loi du 1er août 2003, que Patrick X..., qui était gérant de la SARL X... et Catherine X... et Céline X... qui étaient associées, étaient des cautions averties informées de la situation de la société, qui ne sont pas fondées à invoquer une réticence dolosive de sa part.

Elle affirme avoir respecté son obligation d'information annuelle des cautions.

Elle soutient n'avoir commis aucune faute, ni à l'égard de la SARL X..., aucun élément n'établissant qu'au jour de la souscription du prêt et des cautionnements, sa situation financière était irrémédiablement compromise et les intimés étant parfaitement informés de sa situation, ni à l'égard des cautions averties qui ne sont pas fondées à rechercher sa responsabilité en raison d'une disproportion entre le montant de leur engagement et leur capacité financière.

Elle en déduit que les cautions sont tenues au paiement du capital restant dû au titre du prêt, majoré des pénalités de retard et frais et qu'elle est fondée à se prévaloir de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite sur un bien appartenant à Céline X... qui constitue une garantie indispensable pour le remboursement de sa créance.

* * *

Patrick X... et Céline X..., dans leurs dernières conclusions déposées le 12 décembre 2008, demandent à la cour :

A titre principal, au visa des articles L 341-2, L 341-3 et L 341-4 du code de la consommation, des articles 1116 et suivants du code civil, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité de leurs engagements de caution.

Subsidiairement, en application de l'article 1382 du code civil :

- de juger que la Banque EDEL a commis une faute lourde engageant sa responsabilité d'une part, à l'égard de la SARL X... et d'autre part, à l'égard des cautions et en conséquence, de rejeter sa demande en paiement,

- ou, le cas échéant, de la condamner à leur payer la somme de 250. 000 € à titre de dommages et intérêts et de juger que cette somme se compensera avec la créance dont se prévaut la Banque EDEL.

Très subsidiairement, de prononcer la déchéance du droit de la Banque EDEL aux pénalités et intérêts de retard.

En toutes hypothèses :

* de débouter la Banque EDEL de ses demandes,

* de prononcer la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite le 19 juin 2006, volume 2006V 330, sur le bien immobilier appartenant à Céline X..., sis lieudit " Lacalm " à SAVENSA (12) section ZV no 93,

* de condamner la Banque EDEL au paiement de la somme de 2. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Ils font valoir essentiellement que les engagements de caution sont nuls, sur le fondement des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation pour non respect des dispositions prescrites par ces textes, sur le fondement des articles 1116 et suivants du code civil et sur le fondement de l'article L 341-4 du code de la consommation à raison de la disproportion de leur engagement par rapport à leurs revenus.

Ils soutiennent par ailleurs que la Banque EDEL a engagé sa responsabilité par ses fautes commises :

- d'une part, à l'égard des cautions en leur demandant un engagement disproportionné à leurs revenus, en leur taisant la situation irrémédiablement compromise de la société X... et en sollicitant un engagement de caution pour un prêt dont l'objet était de payer deux découverts en compte ;

- d'autre part, à l'égard de la société, par l'octroi d'un crédit excessif et l'octroi d'un crédit à une société dont la situation irrémédiablement compromise était connue de la banque.

Ils précisent que les cautions peuvent être déchargées de leurs obligations en raison de la faute commise par le créancier à l'encontre du débiteur principal et qu'à défaut, ils sont fondés à solliciter des dommages et intérêts.

Ils rappellent par ailleurs le devoir d'information des cautions prévu par l'article L 341-6 du code de la consommation et ils soutiennent que la Banque EDEL qui a failli à cette obligation, au moins entre 2003 et 2005, doit être déboutée de ses demandes relatives aux pénalités et intérêts de retard.

Ils estiment enfin que le caractère non fondé des demandes de la Banque EDEL justifie la mainlevée de l'hypothèque provisoire inscrite sur le bien immobilier de Céline X....

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1) Sur la validité des engagements de caution :

Patrick X... et Céline X... fondent d'abord leur demande de nullité de leurs engagements sur le non respect des prescriptions des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation.

Cependant ces articles, nés des dispositions de la loi 2003-721 du 1er août 2003, ne sont entrés en vigueur que six mois après la date de publication de cette loi et ils ne sont donc pas applicables aux cautionnements souscrits par les intimés par actes du 17 avril 2003.

Les cautions ont certes confirmé leurs engagements le 30 avril 2004 lorsque, à la même date, le prêt consenti à la SARL X... a été réaménagé, mais chacun des actes que les consorts X... ont alors signés comportait la stipulation suivante :

" Je vous confirme la garantie consentie à titre personnel par cautionnement solidaire en date du 17 avril 2003 pour sûreté du remboursement de la somme de 320. 000 € en principal outre intérêts, frais et accessoires aux termes du contrat de prêt no 0000014573..., souscrit le 7 mai 2003 par la SARL X......

Mes engagement conservent tous leurs effets sans novation, ni dérogation. "

En outre, chacune des cautions a fait précéder sa signature de la mention
manuscrite : " Bon pour confirmation de caution solidaire que j'ai souscrite en date du 17 avril 2003. "

Il résulte de ces actes que les intimés n'ont pas souscrit un nouvel engagement de caution le 30 avril 2004, mais qu'ils ont seulement confirmé, sans novation, leur engagement antérieur donné par acte du 17 avril 2003 qui précisait d'ailleurs que chacun d'eux se portait caution pour le remboursement de toutes les sommes pouvant être dues par la SARL X... " pour quelque cause et à quelque titre que ce soit ", à concurrence de 320. 000 € en principal, outre intérêts et frais.

Ainsi, les cautionnements étant antérieurs à la loi du 1er août 2003, ils ne sont pas soumis aux règles prescrites par les articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation.

Patrick X... et Céline X... fondent ensuite leur demande sur les articles 1116 et suivants du code civil en soutenant que la banque a fait preuve de réticence dolosive.

Ils font état des résultats fiscaux négatifs de la SARL X... en 2003 et 2004 et d'un résultat de 10. 005, 76 € en 2002 et ils soulignent la mauvaise foi de la banque qui a imposé à la société la souscription du prêt de 320. 000 € pour absorber deux autorisations de découvert en compte d'un montant de 152. 000 € chacun, accordés à la société et à Monsieur X... personnellement et exigé leurs engagements de caution. Ils invoquent aussi l'obligation de la banque d'informer la société et les cautions du caractère non viable de l'opération et sa connaissance de la situation irrémédiablement compromise de la SARL X... au moment du prêt.

Les intimés n'apportent pas cependant la preuve d'un dol commis à leur égard par la Banque EDEL. En effet, ce vice du consentement, qui ne se présume pas, doit être établi par la preuve de manoeuvres ou d'une réticence dolosive émanant de l'une des partie au contrat et ayant déterminé le co-contractant à s'engager. Les manoeuvres ou la réticence dolosive doivent donc porter sur des faits qui, s'ils avaient été connus de celui qui invoque le dol, l'auraient l'empêché de contracter.

Or, il n'est pas contestable que Patrick X..., en sa qualité de gérant de la SARL X..., était parfaitement informé de la situation de la société, de ses résultats fiscaux, de l'état de ses comptes et de leurs découverts, de ses besoins de trésorerie et éventuellement du caractère obéré de sa situation.

La même constatation s'impose à l'égard de Céline X... qui non seulement était associée de la SARL X..., mais qui est aussi la soeur de son gérant et qui, selon les mentions d'un relevé de frais généraux de la société, occupait un emploi de secrétaire au sein de cette société au cours de l'année 2003, soit à l'époque de son engagement.

Il n'est pas établi, ni même allégué, que la Banque EDEL avait, sur la situation financière de la SARL X... et sur le caractère viable ou non de l'opération projetée, des informations que les cautions ignoraient à l'époque de leur engagement.

Il n'est en outre pas démontré qu'à la date du prêt et de l'engagement des cautions, la situation de la SARL X... était irrémédiablement compromise. En effet, son compte de résultat de l'exercice précédent, clos le 31 octobre 2002, présentait un bénéfice de
10. 006 € et sa liquidation judiciaire n'a été prononcée que le 20 septembre 2005, soit plus de deux ans après la souscription du prêt.

Les cautions se sont donc engagées le 17 avril 2003 en pleine connaissance de cause de la situation de la société emprunteuse et elles ont même confirmé leur engagement un an plus tard le 30 avril 2004, alors qu'elles savaient nécessairement que des échéances du prêt consenti le 22 avril 2003 n'avaient pas été honorées puisque le 23 janvier 2004, la Banque EDEL avait adressé à chacune d'elles une mise en demeure de régler les échéances impayées des mois de décembre 2003 et janvier 2004.

Dès lors, Patrick X... et Céline X... n'apportant la preuve d'aucune tromperie ou réticence dolosive commise par la Banque EDEL à leur égard, leur moyen de nullité de leur engagement pour dol doit être rejeté.

Patrick X... et Céline X... invoquent enfin l'article L 341-4 du code de la consommation qui interdit au créancier professionnel de se prévaloir d'un cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Or, cet article, qui est issu, comme les articles L 341-2 et L 341-3 susvisés de la loi du 1er août 2003, n'est pas applicable aux cautionnements souscrits avant l'entrée en vigueur de cette loi. Dès lors, pour les motifs précédemment indiqués, il ne s'applique pas aux cautionnements souscrits par les intimés.

Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité des engagements de caution de Patrick X..., de Catherine X... et de Céline X... et de juger que ces engagements sont valables.

2) Sur la responsabilité de la Banque EDEL :

- Sur la responsabilité à l'égard des cautions :

Patrick X... et Céline X... invoquent d'une part, le caractère disproportionné de leur engagement et d'autre part, le fait pour la banque de leur avoir tu la situation irrémédiablement compromise de la société X... et d'avoir sollicité leurs cautions pour un prêt dont l'objet n'était pas de financer le stock mais de payer deux découverts en compte.

Or, Patrick X..., en sa qualité de gérant de la SARL X..., débitrice principale, et Céline X..., en sa qualité d'associée et de secrétaire salariée de cette société, étaient directement intéressés au fonctionnement de cette entreprise et étaient des cautions averties en mesure d'appréhender la nature et la portée de l'opération litigieuse.

De plus, s'ils soulignent que leur engagement était sans aucune commune mesure avec leurs revenus, ils ne démontrent ni ne prétendent que la Banque EDEL aurait eu, sur leurs revenus, leur patrimoine et leurs facultés de remboursement raisonnablement prévisibles, des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées.

Il résulte de ces constatations que la Banque EDEL n'était pas tenue d'une obligation de mise en garde à leur égard et qu'ils ne sont pas fondés à se prévaloir de la disproportion entre leur cautionnement et leurs ressources et patrimoine.

Les intimés ne peuvent pas prétendre par ailleurs que la Banque EDEL leur a tu la situation irrémédiablement compromise de la société X..., alors que, comme cela a déjà été relevé, Patrick X... en sa qualité de gérant et Céline X... en sa qualité d'associée et de secrétaire de la société emprunteuse, connaissaient parfaitement, à l'époque de leur engagement, la situation financière de cette dernière, particulièrement ses résultats, l'état de ses comptes et ses besoins de trésorerie. Dès lors, si la situation de la société cautionnée était réellement obérée ou irrémédiablement compromise, comme ils l'affirment, ils en étaient les premiers informés et ils ne pouvaient pas raisonnablement ignorer l'objet auquel était destiné le prêt pour lequel ils se portaient cautions. Ils ne produisent d'ailleurs aucun élément de nature à établir que la banque avait, sur la situation de la SARL X..., des informations dont ils ne disposaient pas eux-mêmes et qu'elle n'aurait pas porté à leur connaissance.

Ils ne prouvent donc pas que la Banque EDEL a agi avec mauvaise foi à leur égard en sollicitant leurs cautionnements et qu'elle a engagé sa responsabilité à ce titre.

- Sur la responsabilité à l'égard de la SARL X... :

Patrick X... et Céline X... font valoir que la responsabilité du dispensateur de crédit est caractérisée, soit par l'octroi d'un crédit excessif, soit par l'octroi d'un crédit à une société dont la situation irrémédiablement compromise était connue de la banque et qu'en l'espèce sa responsabilité est d'autant plus engagée que ces deux conditions sont réunies.

Or, s'il est de principe que les banques commettent une faute génératrice de responsabilité si elles ont aggravé l'insolvabilité ou précipité la défaillance d'un débiteur par un financement inapproprié et que cette faute peut être invoquée par les cautions, tel n'est cependant pas le cas en l'espèce.

En effet, comme cela a été dit précédemment, les éléments versés aux débats ne font pas ressortir l'existence d'une situation irrémédiablement compromise de la SARL X... à la date du prêt qu'elle a souscrit le 22 avril 2003 ; son résultat de l'année précédente était positif ; rien ne démontre que sa défaillance était prévisible et inévitable ; sa liquidation judiciaire n'a été prononcée que plus de deux ans après, le 20 septembre 2005 et même si le prêt a été réaménagé en avril 2004, les seules échéances impayées figurant sur le relevé de compte de la Banque EDEL sont celles des mois d'août et septembre 2004 et septembre 2005. La preuve de l'octroi d'un crédit excessif et / ou d'un soutien abusif n'est donc pas apportée.

En outre, à supposer que la situation de la société emprunteuse aurait été irrémédiablement compromise à la date du prêt, il ne serait pas démontré que la Banque EDEL le savait. De plus, du fait de leurs fonctions exercées au sein de la SARL X..., Patrick X... et Céline X... connaissaient nécessairement sa situation et ses relations avec la Banque EDEL et ils n'établissent ni même ne prétendent qu'ils l'ignoraient par suite de circonstances exceptionnelles. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à se prévaloir d'une éventuelle responsabilité de la banque dans l'octroi du crédit.

3) Sur l'obligation d'information des cautions :

L'article L 341-6 du code de la consommation dispose : " Le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
À défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. "

La Banque EDEL, qui affirme avoir respecté cette obligation d'information, produit les lettres recommandées qu'elle a adressées aux cautions (pièces 30 à 41). La lecture de ces courriers montre que si la banque a informé chaque année les cautions des sommes dues au titre du prêt en principal, intérêts, indemnités de retard et frais, elle ne leur a pas rappelé leur faculté de révocation ni les conditions dans lesquelles elles pouvaient l'exercer.

Elle est donc déchue, à l'égard de Patrick X... et de Céline X..., du droit aux pénalités ou intérêts de retard échus à compter du 31 mars 2004, date à laquelle une première information complète aurait dû leur être adressée jusqu'au 24 mars 2006, date de la lettre recommandée par laquelle elle les a informés, en sus des sommes dues, de la déchéance du terme du financement prononcée le 12 octobre 2005.

4) Sur la demande en paiement de la Banque EDEL et l'hypothèque judiciaire prise sur bien de Céline X... :

La Banque EDEL, qui demande, au titre du contrat de prêt no 0000014573, le paiement de la somme de 236. 707, 13 €, produit un relevé de compte qui fait état des échéances impayées, des intérêts de retard sur échéances impayées, de la date de déchéance du terme, le 12 octobre 2005, du capital restant dû après l'échéance du 7 septembre 2005 et des intérêts intercalaires dus entre le 7 et 23 septembre 2005 et qui comporte la déduction d'une somme de 9. 916, 84 € versée au titre du fonds collectif de garantie EDEL.

Cependant, la banque étant privée, à l'égard de Patrick X... et Céline X..., des intérêts ou pénalités entre le 31 mars 2004 et le 24 mars 2006, il y a lieu de déduire de sa créance les sommes de 677, 13 € et de 462, 01 € représentant d'une part, les indemnités de retard sur les échéances impayées d'août et septembre 2004 et septembre 2005 et d'autre part, les intérêts intercalaires du 7 / 09 / 2005 23 / 09 / 2005.

Dès lors, Patrick X... et Céline X... seront condamnés solidairement au paiement de la somme principale de 235. 567, 99 € qui sera assortie des intérêts au taux contractuel à compter du 24 mars 2006.

Catherine Y... épouse X..., qui n'a formulé aucune demande de déchéance des intérêts ou pénalités, sera condamnée au paiement de la somme de 236. 707, 13 € et des intérêts au taux contractuel sur la somme principale de
235. 567, 99 € à compter du 12 octobre 2005, date de la déchéance du terme et ce, solidairement avec Patrick X... et Céline X... dans les limites de la condamnation prononcée à leur encontre.

La créance de la Banque EDEL étant fondée pour les montants ci-dessus indiqués, il n'y a pas lieu de prononcer la mainlevée de l'hypothèque prise sur un bien appartenant à Céline X....

Compte tenu de la situation des parties, l'application de l'article 700 du code de procédure civile n'est pas justifiée.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 12 octobre 2007 par le tribunal de commerce d'AUCH sauf en ce qu'il a débouté Patrick X... de sa demande de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau :

Dit et juge que les engagements de caution de Patrick X..., de Céline X... et de Catherine Y... épouse X... sont valables,

Dit que la SNC Banque EDEL est déchue, à l'égard de Patrick X... et de Céline X..., du droit aux pénalités ou intérêts de retard échus du 31 mars 2004 au 24 mars 2006,

Déboute Patrick X... et Céline X... de leurs autres demandes,

Condamne solidairement Patrick X... et Céline X... à payer à la SNC Banque EDEL la somme principale de 235. 567, 99 € avec intérêts au taux contractuel à compter du 24 mars 2006.

Condamne Catherine Y... épouse X..., solidairement avec Patrick X... et Céline X... dans les limites de la condamnation prononcée à leur encontre, à payer à la SNC Banque EDEL la somme de 236. 707, 13 € et les intérêts au taux contractuel sur la somme de 235. 567, 99 € à compter du 12 octobre 2005,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Patrick X..., Céline X... et Catherine épouse X... aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et sans préjudice de l'application de la loi sur l'aide juridictionnelle.

Le présent arrêt a été signé par Raymond MULLER, Président de Chambre et par Isabelle LECLERCQ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 07/01668
Date de la décision : 30/03/2009
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BANQUE - Responsabilité - Faute - Manquement à l'obligation de mise en garde - Obligation de mise en garde - Domaine d'application -

La Banque n'est pas tenue d'une obligation de mise en garde à l'égard des cautions qui ne sont pas fondées à se prévaloir de la disproportion entre leur cautionnement et leurs ressources et patrimoine alors que la première avait la qualité de gérant de la SARL, débitrice principale, et l'autre celle d'associée, secrétaire salariée de cette société,toutes deux étant directement intéressées au fonctionnement de cette entreprise et étant des cautions averties en mesure d'appréhender la nature et la portée de l'opération litigieuse et alors encore que si ces cautions soulignent que leur engagement était sans aucune commune mesure avec leurs revenus, elles ne démontrent ni ne prétendent que la Banque aurait eu, sur leurs revenus, leur patrimoine et leurs facultés de remboursement raisonnablement prévisibles, des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce d'Auch, 12 octobre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2009-03-30;07.01668 ?
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