ARRÊT DU
11 Juillet 2007
J.L.B/A.C
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RG N : 06/01388
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Michel X...
C/
Bernard Y...
Alain Z...
S.C.P. SILVESTRI-BAUJET
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ARRÊT no 764 - 07
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé à l'audience publique le onze Juillet deux mille sept, par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur Michel X...
né le 05 Septembre 1945 à PESSAC (33600)
Demeurant 18 chemin de Sonney
33360 CARIGNAN DE BORDEAUX
représenté par la SCP A.L. PATUREAU et P. RIGAULT, avoués
APPELANT d'une Ordonnance de référé rendue par le Tribunal de Grande Instance de MARMANDE en date du 28 Septembre 2006
D'une part,
ET :
Monsieur Bernard Y...
Conseiller à la Cour d'Appel de BORDEAUX
Monsieur Alain Z...
Procureur de la République adjoint près le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX
représentés par la SCP Henri TANDONNET, avoués
assistés de Me Georges TONNET de la SCP TONNET LESPRIT BAUDOUIN, avocats
S.C.P. SILVESTRI-BAUJET ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SCI Résidence Canteloup et de l'EURL d'Exploitation Résidence Canteloup
Dont le siège social est 23 rue du Chai des Farines
33000 BORDEAUX
représentée par la SCP TESTON - LLAMAS, avoués
assistée de la SCP GUIGNARD GARCIA TRASSARD, avocats
INTIMES
En présence de Monsieur Bernard BLAIS, Procureur Général
D'autre part,
a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été communiquée au Ministère Public, débattue et plaidée en audience publique, le 11 Juin 2007, devant Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre (lequel a fait un rapport oral préalable), François CERTNER, Conseiller et Dominique MARGUERY, Conseiller assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Le Docteur Michel X... a fondé la SCI Résidence CANTELOUP et l'EURL Société d'exploitation de la Résidence CANTELOUP.
Ces deux sociétés ont été placées en liquidation judiciaire par la Chambre du Conseil du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX le 8 février 1993 et Maître B... désigné en qualité de liquidateur. Celui-ci a été remplacé par Maître C..., selon jugement du 25 mai 1995, qui a été déclaré faux par jugement du 12 novembre 1998.
Par jugement du 26 février 1999, rendu sur la requête du Parquet de BORDEAUX, Maître C... a, à nouveau été désigné liquidateur de la SCI et de l'EURL. Ce jugement a été annulé pour des vices de procédure, par arrêt de la Cour d'Appel de BORDEAUX, de sorte qu'un nouveau jugement, également rendu à la requête du Parquet de BORDEAUX est intervenu le 12 mai 2000 désignant Maître C... en remplacement de Maître B....
Enfin, l'appel formé par Michel X... contre ce dernier jugement a été déclaré irrecevable par arrêt du 4 avril 2001.
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Par assignations des 13 et 14 septembre 2006, Michel X... a assigné, devant le Juge des référés du Tribunal de Grande instance de MARMANDE, Bernard Y... et Alain Z..., magistrats à la Cour d'Appel et au Tribunal de Grande instance de BORDEAUX ainsi que Maître C..., mandataire judiciaire pour :
- voir suspendre, au visa des dispositions de l'article 1399 du Code civil, les effets du jugement rendu le 22 mai 2000 par le Tribunal de Grande instance de BORDEAUX, désignant Maître C... en remplacement de Maître B... en qualité de liquidateur ;
- voir fixer une date d'audience afin qu'il soit débattu du fond dans des délais raisonnables.
Selon le demandeur, le jugement litigieux a été rendu sur le fondement d'un jugement du 15 mai 1999, déclaré faux par jugement du 12 novembre 1998 et persiste dans l'origine des pièces définies de faux lui cause un préjudice.
Il a, en outre rappelé s'être constitué partie civile à l'encontre de 3 jugements dont celui du 12 mai 2000 devant le Juge d'Instruction de RENNES, le 19 octobre 2005 des chefs de faux et usage de faux criminels, et a été inscrit en faux principal devant le Tribunal de Grande instance de MARMANDE le 30 août 2006, contre les jugements des 26 février 1999 et 12 mai 2000.
Les magistrats ont conclu à l'irrecevabilité des demandes dirigées contre eux et soutenu que l'article 1319 du Code civil ne visait que la suspension de l'exécution de l'acte déféré de faux.
La SCP SILVESTRI-BAUJET a également conclu au rejet de la demande, tout comme le Ministère Public intervenu à l'instance conformément à l'article 421 du nouveau Code de procédure civile.
Par ordonnance du 26 septembre 2006, la juridiction a déclaré Monsieur X... irrecevable en ses demandes dirigées contre Messieurs Y... et Z..., Magistrats de l'ordre judiciaire, et l'a débouté au visa des articles 808 et 809 du nouveau Code de procédure civile de ses demandes contre Maître C.... Enfin, il a été condamné à verser à Messieurs Y... et Z..., la somme de 3.000 € chacun au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens.
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Michel X... a relevé appel de l'ordonnance du 26 septembre 2006 et demande par conclusions No4 déposées le 16 mai 2007 :
Par ces motifs, dire et juger que :
Premièrement :
La mise en cause de l'ordre public est recevable, même en cas de première demande en cause de second degré, ce qui emporte Compétence de la Cour.
Que la seule jurisprudence opérante en le cas de l'espèce sera bien celle du Tribunal de Grande instance de BORDEAUX, qui, en date du 12 novembre 1998, et en la même configuration a dit et jugé que :
En substance : "nous ne sommes pas en la forme"
Mais très exactement déclaré :
"En effet l'ordre public est en cause et la fausseté de ce jugement - acte authentique- si elle est démontrée aura pour conséquence inéluctable de dépouiller la SCP C... BAUJET de toute qualité à diligenter la présente procédure de saisie immobilière et de vicier l'intégralité de celle-ci" ;
La Cour adoptera et fera sienne l'impériosité de ce que, dans le cas de fausses écritures publiques, le FOND du DROIT et la MISE en CAUSE de L'ORDRE PUBLIC l'emportent sur toute raison de forme.
Secondement :
La Compétence de la Cour est également consacrée de par l'application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile.
Troisièmement :
La mise en cause de l'ordre public et de ses dépositaires justifie de l'attraction de ces derniers en la cause, la notion d'ordre public l'emportant sur toute loi de rang inférieur.
Quatrièmement :
La voie du référé est licite en matière de demande en inscription de faux à titre principal, comme en toute autre cause, dés lors que l'urgence et le trouble illicite d'ordre public seront particulièrement lisibles, et que, dés lors il se doit d'y être mis un terme au plus tôt et par tous moyens.
La mise en cause et le trouble imputé par le demandeur à l'ordre public rendent fatalement compte de l'urgence, un tel trouble ne pouvant en aucun cas perdurer, qu'il soit le fait du demandeur ou celui des défendeurs.
Cinquièmement :
L'urgence résulte nécessairement des faits de la cause, de fausses écritures publiques de "jugement" n'emportant aucun droit pour quiconque d'en faire un quelconque usage et encore moins de tenter de les "dédempter" par requêtes d'ordre public et jugements rendus .... par dépositaires dudit Ordre.
Sixièmement :
Le Trouble Particulièrement illicite à l'ordre public résulte des mêmes considérations que ci-dessus.
Septièmement :
L'ordonnance de référé déférée, pourra être, ou non, examinée, mais elle restera en tout état de cause de force subsidiaire, dés lors qu'elle n'a pas eu pour objet d'examiner la mise en cause de l'ordre public.
Huitièmement :
Le demandeur sera accueilli en ses dires dés lors qu'il est en droit de mettre en cause l'ordre public directement en cause de second degré.
Neuvièmement :
Il sera fait droit à la demande d'application de l'article 811 du nouveau code de procédure civile (sans préjudice de tout autre moyen qui pourrait être relevé d'office) dès lors que la mise en cause de l'ordre public exige et nécessite l'abstraction de considération de forme ou de fond de rang inférieur à ladite mise en cause.
Le fond du droit et l'ordre public étant en cause,
L'évocation du moyen mis en oeuvre relevant du fond même du droit, pourrait alors légitimement être examiné directement en cause de second degré.
A moins que la Cour, en sa sagesse, indique qu'il se devra et y aura lieu de saisir une juridiction de premier degré.
Dixièmement :
Après avoir constaté la surabondance des mentions inexactes et/ou frauduleuses contenues en les deux jugements argués de faux, et qui les entachent, à savoir qu'il est inexact et/ou frauduleux de dire, indiquer ou prétendre :
A) - concernant le jugement du 26 février 1999 :
Que Maître C... (parce que faussement nommé) soit reçu à titre de "partie",
Qu'alors, Maître C... puisse s'exprimer "es qualités"....
Que Maître C... soit en "droit" de soutenir... quoi que ce soit.
Que (faussement nommé) Maître C... "se doive de poursuivre sa "mission" (inexistante).
Qu'un (faux) jugement "ne perde que" ...... sa "force probante" et/ou sa "force exécutoire" ..... sans être réputé être nul ou n'avoir jamais "existé"...
Que les "actions" .... (nées du faux) menées par C... ne seraient pas entachées ... de "manquements" .. à es "obligations légales"....
Que les actes effectués par C... antérieurement au 12 novembre 1998 sont "légitimes.... que donc, le demandeur n'a pas à s'en plaindre!
Que le mandataire agit ... sous l'autorité du juge commissaire.... (faussaire accompli!!!).
Que la connaissance du dossier par C... sera "validée", nonobstant ... l'existence de sa mission qui sera "légitimée"...... par le jugement critiqué!!!
Bo - concernant le jugement du 12 mai 2000 :
La requête du 2 mai 1995 du juge commissaire (Faussaire) ... ne saurait être invoquée .. (sauf à être écartée !) et il n'est pas conforme au droit d'y faire référence, cette référence étant particulièrement "inappropriée" tout autant que délibérée.
La requête du Parquet tendant à "réhabiliter" C... ne saurait être reçue, d'autant qu'en outre, elle sort du cadre de la LOI, cette référence est inexacte et délibérée.
Les conclusions de Maître B... ne sont pas plus recevables... puisque sortant tout autant du cadre de la LOI, cette référence est inexacte et délibérée.
Les prétentions de l'actuel demandeur sont rejetées sans être examinées, ce qui n'est pas conforme au DROIT, et; très probablement délibéré.
La procédure n'est sûrement pas "en l'état" ou elle était lors de la "saisine"... du Tribunal de Grande instance..... par le Juge commissaire...... (Faussaire d'ordre public) en date du 2 mai 1995.... cette mention est aussi inexacte que délibérée.
La requête du Ministère Public "n'existe" ....que pour autant que l'on veuille "légaliser" en s'y référant ... la Fausse Ecriture Publique.... ceci est inexact; non conforme au DROIT et délibéré.
La situation conflictuelle entre B... et le demandeur... n'est pas analysée, ce qui est non conforme au DROIT et délibéré.
La "bonne connaissance du "dossier" par Maître C... n'a d'autre "existence" .... que celle née ...... de la fausse écriture publique, cette "conception" venant "valider" de propos délibéré la "force de LOI" des..... Fausses Ecritures Publiques...
La "reconduction" de C... équivaut, très exactement..... à "valider" .... les (fausses) écritures publiques..... de propos délibéré.....
Une telle accumulation de mentions inexactes, illégales, voire frauduleuses, ôte enlève et exclut toute notion "d'erreurs" !!!
Les jugements des 26 février 1999, et 12 mai 2000, resteront donc suspendus en leurs effets et Force probante, jusqu'à examen dans des délais raisonnables de leur mise en cause quand au fond.
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Dans leurs conclusions No1 déposées le 25 janvier 2007, Bernard Y... et Alain Z... demandent de :
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise rendue en référé par le Président du Tribunal de Grande instance de MARMANDE le 28 septembre 2006,
Constatant l'obligation de plaider faite au concluant devant la Cour,
- allouer à chacun d'eux une somme complémentaire de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- laisser l'intégralité des dépens à la charge de Monsieur Michel X..., ceux d'appel avec distraction au profit de la SCP Henri TANDONNET, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
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Dans ses conclusions No2 déposées le 20 février 2007, la SCP SILVESTRI-BAUJET ès qualités demande de :
- débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses réclamations,
- condamner Monsieur X... à payer la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts et pour appel abusif,
- condamner Monsieur X... à payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
- condamner Monsieur X... aux dépens d'appel avec distraction pour deux d'appel au profit de la SCP TESTON-LLAMAS et pour ceux de première instance au profit de la SCP GUIGNARD-GARCIA-TRASSARD.
Dans ses conclusions du 13 mars 2007, Monsieur le Procureur Général demande de déclarer irrecevables les actions engagées par Monsieur X... et de le débouter de son appel.
Il demande également de condamner l'appelant à une amende civile de 3.000 €, son action lui paraissant parfaitement dilatoire et abusive.
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MOTIFS
Vu les conclusions déposées les 16 mai 2007, 20 février 2007 et 25 janvier 2007, respectivement notifiées le 16 mai 2007 pour Michel X..., le 19 février 2007 pour la SCP SILVESTRI-BAUJET ès qualités et le 24 janvier 2007 pour Monsieur Bernard Y... et Alain Z....
Vu les conclusions du Ministère Public du 13 mars 2007 régulièrement consignées le même jour à toutes les parties.
Ainsi que le font valoir les magistrats intimés, Monsieur le Procureur Général, et comme l'a retenu l'ordonnance déférée, l'action intentée par Michel X..., dirigée contre deux magistrats, de l'ordre judiciaire, nomément désignés, s'assimile à une prise à partie.
Or une telle procédure, comme le rappelle le Premier Juge a cessé d'exister depuis l'entrée en vigueur de l'article 11-1 ajouté à l'ordonnance du 22 décembre 1958, par la loi organique du 18 janvier 1979.
Ainsi, la responsabilité des magistrats de l'ordre judiciaire, à raison de leurs fautes personnelles se rattachant au service public de la justice ne peut être désormais engagée que sur l'action récursoire de l'Etat ;
C'est donc à juste titre que le Premier Juge a déclaré irrecevable l'action engagée devant lui par Michel X..., contre Messieurs Y... et Z..., Magistrats de l'ordre judiciaire.
D'autre part, le juge des référés n'est compétent, en cas d'urgence que pour ordonner des mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse, ou pour prescrire, en présence d'une telle contestation les mesures propres à faire cesser un trouble manifestement illicite.
Or, l'appelant ne démontre pas l'urgence qu'il n'a pas même alléguée, et qui est évidemment incompatible avec son attitude d'opposition, depuis 1995, aux diverses décisions de justice découlant notamment des procédures collectives ouvertes en 1993.
De plus, et contrairement à ce que semble penser l'appelant, l'article 1319 du Code civil se contente de prévoir la suspension de l'exécution de l'acte argué de faux mais n'interdit pas de tirer les conséquences de son inexécution, ni même qu'un nouveau jugement intervienne pour poursuivre la procédure et encore moins qu'il soit fait état d'un jugement ou d'un acte authentique, argué de faux.
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La décision déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions et l'appelant condamné aux dépens d'appel ainsi qu'à verser aux intimés la somme de 1.500 € à chacun au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Comme le souligne le Procureur Général, cette nouvelle procédure initiée par Michel X... est parfaitement dilatoire et abusive et justifie le prononcé, à son encontre d'une amende civile de 3.000 €.
Enfin, la demande de dommages et intérêts présentée par la SCP SILVESTRI-BAUJET sera rejetée, faute pour elle d'établir la réalité de son préjudice et d'en justifier.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Reçoit l'appel jugé régulier ; le déclare mal fondé,
Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance du 28 septembre 2006,
Y ajoutant, et vu l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne Michel X... à une amende civile de 3.000 €,
Le condamne aux dépens d'appel avec distraction au profit de la SCP TANDONNET et de la SCP TESTON-LLAMAS, avoués, conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile,
Le condamne en outre à verser à Messieurs Y... et Z... et à la SCP SILVESTRI-BAUJET, la somme de 1.500 € à chacun au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre et par Dominique SALEY Greffier, présent lors du prononcé.
Le Greffier, Le Président,