DU 14 Novembre 2006-------------------------
J.M.I/S.B
Pierre BOXBERGERFrançoise BOXBERGERC/CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINERG N : 05/00219 - A R R E T No 1092 - 06-----------------------------Prononcé à l'audience publique du quatorze Novembre deux mille six, par Jean-Marie IMBERT, Président de Chambre LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire ENTRE :Monsieur Pierre BOXBERGERné le 31 Octobre 1952 à LONGUEVILLE (47200)Demeurant Au Sabot47400 GONTAUD DE NOGARETMadame Françoise BOXBERGERnée le 19 Mai 1959Demeurant Au Sabot47400 GONTAUD DE NOGARETreprésentés par la SCP Henri TANDONNET, avoués
APPELANTS d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de MARMANDE en date du 17 Décembre 2004D'une part ET :CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINE, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siègeDont le siège social est 304 Boulevard du Président Wilson33076 BORDEAUX CEDEXreprésentée par la SCP A.L. PATUREAU etamp; P. RIGAULT, avouésassistée de la SCP ROINAC - ROUL, avocatsINTIMEED'autre part a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 10 Octobre 2006, devant Jean-Marie IMBERT, Président de Chambre (lequel a fait un rapport oral préalable), Francis TCHERKEZ, Conseiller et Christophe Y..., Vice-Président placé désigné par ordonnance du Premier Président en date du 28 Septembre 2006, assistés de Nicole CUESTA, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Par jugement réputé contradictoire du 17 décembre 2004 le Tribunal de grande instance de Marmande a condamné M. X... Pierre et Mme X... Françoise à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINE (CRCAMA) la somme de 22.465,49 ç avec intérêts au taux de 12,20% calculés sur la somme de 10.601,33 ç à compter du 9 mars 2004 jusqu'à parfait paiement et a débouté la CRCAMA de ses autres demandes ;
M. et Mme X... ont interjeté appel de ce jugement par déclaration enregistrée le 9 février 2005 au greffe de la Cour ;
Aux termes de leurs écritures M. et Mme X... demandent à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter la CRCAMA de ses demandes par application de l'article L 341-4 du Code de la consommation, leur engagement étant manifestement disproportionné à leurs facultés financières,
Subsidiairement, de dire qu'elle a engagé sa responsabilité pour violation de ses devoirs d'information et de conseil et de la condamner à leur payer à titre de dommages intérêts les sommes qui leur sont réclamées et de constater la compensation,
En tout cas, de dire que leurs engagements ne sauraient garantir des intérêts et accessoires non mentionnés, de constater que la CRCAMA est déchue des intérêts faute d'avoir satisfait à son obligation d'information annuelle et que les intérêts antérieurs au 7 avril 1999 sont prescrits,
Très subsidiairement de leur accorder les plus larges délais de paiement,
De condamner la CRCAMA à leur payer une indemnité de procédure de1.000 ç ;
La CRCAMA , aux termes de ses conclusions, fait valoir :
que les époux X... ne peuvent prétendre que l'engagement souscrit était manifestement disproportionné ; qu'elle avait été
informé en 1993 que leur patrimoine comprenait plusieurs immeubles,
qu'elle n'a pas manqué à son devoir de conseil, la situation de la débitrice n'apparaissant pas compromise lorsque le prêt lui a été consenti,
que le contrat de prêt a été signé au moment de l'engagement des cautions et que la date de septembre 1993 correspond à une réactualisation suite à l'enregistrement du nantissement du fonds de commerce, et qu'elles avaient parfaite connaissance de la portée de leur engagement ; qu'elles ont été régulièrement informées par la lettre annuelle d'information ;
qu'ils ne justifient d'aucune difficulté au soutien de leur demande de délais de paiement ;
Elle conclut au rejet de l'appel et à la condamnation des époux X... au paiement de la somme de 25.462,63 ç selon décompte actualisé au 30 juin 2006 et d'une indemnité de procédure de 1.000 ç ;
SUR CE, LA COUR
Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas mise en cause et qu'aucun élément n'amène la Cour à le faire d'office ;
Attendu que la CRCAMA a consenti le 27 septembre 1993 un prêt dit de trésorerie de 150.000 F à Mme X... Annie, commerçante, et à M. X... Michel remboursable en 24 mensualités, au taux de 12,20 % ;
Attendu que par acte daté du 2 mars 1993, M. X... Pierre et Mme X... Françoise s'étaient portés cautions solidaires de Mme X... Annie pour ce montant ;
Attendu qu'il ressort des pièces produites que Mme X... Annie a cessé ses paiements et a été mise en redressement judiciaire en 1994 puis en liquidation judiciaire en 1999 ; que la CRCAMA a déclaré sa créance ; que le dossier a été clôturé pour insuffisance d'actif
courant 2001 ; que le 11 janvier 2002, la banque a demandé aux cautions le règlement de la somme de 18.785,46 ç puis les a vainement relancés ;
Attendu que M. et Mme X... s'opposent à la demande en invoquant les dispositions de l'article L 341-4 du Code de la consommation (Loi du 1er août 2003), selon lequel le créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement lors de sa conclusion était manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permettent de faire face à son obligation ;
Attendu que, comme l'a déjà jugé la Cour de ce siège le 13 juin 2006 et le 12 juillet 2006, la loi du 1er août 2003, publiée le 5 août 2003, prévoit l'application immédiate de l'article L 341-4 du Code de la consommation qu'elle crée et qui élargit la sanction de la disproportion du cautionnement sans impliquer la révision des documents contractuels ; que les travaux parlementaires et plus particulièrement les propos du rapporteur à la Commission mixte paritaire établissent la volonté du législateur de faire bénéficier des nouvelles dispositions en la matière toutes cautions existantes ou à venir ; que les dispositions de l'article L 341-4 dudit Code sont donc applicables à la présente instance, engagée le 7 avril 2004, soit postérieurement à la promulgation de la loi du 1er août 2003 ;
Attendu que la banque ne fournit aucun élément ni sur le patrimoine actuel des cautions ni sur leur patrimoine en 1993 ; qu'il ressort des pièces produites (avis de non imposition) que le revenu du couple s'établissait en 1993 à 53.882 F et à 53.461 F en 1994 ; que l'engagement de caution souscrit représente ainsi trois fois le revenu annuel des cautions et est d'autant plus manifestement
disproportionné que le prêt était remboursable sur deux ans seulement ; que la banque se trouve ainsi déchue du droit de poursuite et que, par voie de réformation, les cautions seront totalement déchargées ;
Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elle a exposés ;PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, contradictoirement, en dernier ressort,
Déclare l'appel recevable;
Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
Dit que la CRCAMA est déchue de son droit de poursuite et la déboute de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne la CRCAMA aux dépens, ceux d'appel avec distraction au profit de la SCP TANDONNET, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Jean-Marie IMBERT, Président de Chambre et par Nicole CUESTA, Greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier
Le Président