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13/01/2005 | FRANCE | N°04/564

France | France, Cour d'appel d'agen, 13 janvier 2005, 04/564


DU 13 Janvier 2005 -------------------------

F.C/S.B Mohamed X... C/ Zineb Y... épouse X... Z... juridictionnelle RG N : 04/00564 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé A... l'audience publique du treize Janvier deux mille cinq, par François CERTNER, Conseiller, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1Pre Chambre dans l'affaire, ENTRE : Monsieur Mohamed X... représenté par Me Jean-Michel BURG, avoué assisté de Me Philippe REULET, avocat APPELANT d'une ordonnance de non-conciliation rendue par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de MARMANDE, en date

du 05 Mars 2004, enregistrée sous le n 03/00725 D'une part, E...

DU 13 Janvier 2005 -------------------------

F.C/S.B Mohamed X... C/ Zineb Y... épouse X... Z... juridictionnelle RG N : 04/00564 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé A... l'audience publique du treize Janvier deux mille cinq, par François CERTNER, Conseiller, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1Pre Chambre dans l'affaire, ENTRE : Monsieur Mohamed X... représenté par Me Jean-Michel BURG, avoué assisté de Me Philippe REULET, avocat APPELANT d'une ordonnance de non-conciliation rendue par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de MARMANDE, en date du 05 Mars 2004, enregistrée sous le n 03/00725 D'une part, ET : Madame Zineb Y... épouse X... représentée par la SCP TESTON - LLAMAS, avoués assistée de Me Christine ROUL, avocat (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2004/001994 du 21/05/2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN) INTIMEE D'autre part, a rendu l'arrLt contradictoire. La cause a été débattue et plaidée en Chambre du Conseil, le 09 Décembre 2004 sans opposition des parties, devant François CERTNER, Conseiller rapporteur assisté de Dominique SALEY, Greffier. Le Conseiller rapporteur et rédacteur en a, dans son délibéré, rendu compte A... la Cour composée, outre lui-mLme, de Bernard BOUTIE, Président de Chambre et Dominique NOLET, Conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date A... laquelle l'arrLt serait rendu. EXPOSE DU LITIGE

Dans des conditions de régularité de forme et de délai non discutées, Mohamed X... a interjeté appel de l'Ordonnance de non-conciliation rendue par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de MARMANDE le 05/03/04 ayant notamment :

* autorisé la poursuite de la procédure,

[* autorisé les époux A... résider séparément,

*] mis A... sa charge au titre de son devoir de secours le paiement A... Zineb Y... d'une pension alimentaire de 320 Euros par mois demeurant les ressources et charges des parties et l'inopposabilité de la décision marocaine non produite et au contenu inconnu mais seulement justifiée dans son existence par une "attestation de divorce définitif" délivrée par le Consul Général du MAROC A... BORDEAUX le 16/01/04 ;

Les faits de la cause ont été relatés par le premier Juge en des énonciations auxquelles la Cour se réfPre expressément ;

Vu les écritures déposées par l'appelant le 27/09/04 et celles déposées par l'intimée le 29/07/04, auxquelles il est formellement renvoyé pour l'exposé des prétentions et moyens des parties ; MOTIFS DE LA DECISION

Il est constant en droit que :

1 ) l'art. 16 de la Convention d'aide mutuelle judiciaire franco-marocaine du 05/10/57 dispose qu'en matiPre civile, les décisions contentieuses rendues par les Juridictions siégeant dans l'un des deux pays ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre pays si elles réunissent différentes conditions, notamment de ne rien contenir de contraire A... l'ordre public du pays oj elles sont invoquées ou aux principes de droit public applicables dans ledit pays,

2 ) l'art. 13 de la Convention franco-marocaine du 10/08/81 relative au statut des personnes et de la famille et A... la coopération

judiciaire dispose que les actes constatant la dissolution du lien conjugal homologués par un Juge au Maroc entre conjoints de nationalité marocaine dans les formes prévues par leur Loi nationale produisent effet en France dans les mLmes conditions que les Jugements de divorce prononcés A... l'étranger ;

Il est constant en fait que :

1 ) la convocation A... comparaître le 19/08/03 devant la Juridiction marocaine a été remise A... la personne de l'épouse ou A... son domicile, entre les mains de son pPre,

2 ) Zineb Y... a comparu en personne A... l'audience - qui s'est en réalité tenue le 20/10/03- au cours de laquelle le mari a demandé acte de ce qu'il entendait divorcer par "divorce révocable" et la femme, aprPs avoir déclaré ne pas Ltre en voie de famille, a perçu les indemnités prévues par le Loi marocaine en pareille matiPre et en a donné quittance,

3 ) par acte du 10/11/03, la Juridiction marocaine a reçu l'acte dressé par les notaires instrumentaires et l'a homologué ;

Demeurant ce qui précPde et aux motifs suivants, la décision précitée prononçant le divorce révocable des époux ne peut se voir reconnaître d'efficacité et sortir A... effets sur le territoire national français : * la condition posée A... l'art. 21 de la Convention d'aide mutuelle judiciaire franco-marocaine du 05/10/57, qui exige de la part de la partie qui invoque l'autorité d'une décision judiciaire (ou qui en demande l'exécution) de démontrer qu'elle est définitive et passée en force de chose jugée par la production de tous certificats utiles,

n'est pas remplie par l'appelant,

[* la procédure suivie, si elle paraît réguliPre sur le terrain des droits de la défense en ce que le principe du contradictoire a été respecté par la présence en personne de la femme devant la juridiction marocaine, relPve, non d'une répudiation par consentement mutuel des époux ou d'une répudiation décidée par le mari et acceptée par la femme car la perception réelle par la femme d'indemnités légales ne peut A... elle seule caractériser un acquiessement, mais d'une répudiation imposée par le mari usant d'un pouvoir discrétionnaire; on soulignera A... cet égard que ce divorce "révocable" permettant au mari de reprendre son conjoint dans le délai de retraite légale (marocain) ne s'apparente pas A... une séparation de corps faute de maintien du devoir de secours et de nécessité d'en obtenir la conversion qui est ici automatique,

*] s'il est jusqu'B présent admis que toutes les répudiation prononcées par des décisions contradictoires ne sont pas nécessairement contraires aux principes posés A... l'art. 5 du protocole n 7 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, il apparaît au cas précis que :

etgt; les principes posés A... l'art. 5 précité, lequel prévoit que les époux jouissent de l'égalité des droits (...) de caractPre civil entre eux (...) durant le mariage et lors de sa dissolution, n'ont pas été respectés car seul le mari peut, d'une part répudier son épouse, la possibilité inverse n'étant pas laissée A... cette derniPre, et d'autre part "reprendre" sa femme pendant une certaine période,

etgt; le fait d'Ltre en mesure d'Ltre présente A... la procédure et de faire valoir ses prétentions et défenses, ne permettait cependant pas A... l'épouse de s'opposer victorieusement A... la répudiation unilatéralement décidée par son mari,

etgt; la compensation financiPre octroyée A... la femme, appréciée notamment en considération des liens étroits entretenus par les époux avec le territoire français sur lequel ils paraissent avoir eu leur résidence habituelle, est notoirement insuffisante pour représenter A... peine environ 1.600 Euros ;

La décision du 10/11/03 par laquelle la Juridiction marocaine a reçu et homologué l'acte établi par les notaires instrumentaires et tendant au divorce révocable des époux étant attentatoire A... la conception nationale de l'ordre public international dPs lors que n'est pas assurée l'égalité des droits des époux lors de la dissolution de leur mariage, égalité reconnue par l'art. 5 du protocole susvisé dont la France s'est engagée A... garantir le bénéfice A... toute personne relevant comme en l'espPce de sa Juridiction, il convient de statuer sur les demandes formées au fond, sachant que la question de la date d'introduction des instances respectives au MAROC et ici est sans aucune influence ;

On notera par ailleurs que le protocole n 7 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme est postérieur aux Conventions franco-marocaine susmentionnées ;

Le premier Juge a procédé A... une analyse minutieuse et complPte des prétentions financiPres des parties au regard de leur situation active et passive respective ;

Cette analyse n'est nullement contestée utilement en cause d'appel par l'une ou l'autre des parties, lesquelles invoquent les mLmes arguments -en réalité touchant aux griefs fondant la demande en divorce pour ce qui est de l'appelant- A... l'appui des mLmes demandes qu'en premiPre instance ;

Or, il leur a été répondu en des attendus justes et bien fondés auxquels il n'y a rien A... ajouter, sinon qu'il y a bien lieu A... pension alimentaire au profit de la femme qui se trouve en état de besoin alors que rien n'établit qu'elle bénéficie de ressources occultes comme l'appelant croit devoir l'affirmer sans preuve ;

Il convient en conséquence d'adopter tant les motifs pertinents que la juste évaluation de la pension alimentaire retenus par le premier Juge et de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions aprPs avoir écarté les prétentions de l'appelant ;

L'équité et la situation économique ne commandent pas d'allouer A... ce dernier qui succombe le remboursement des sommes exposées par lui pour la défense de ses intérLts ;

DPs lors, sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile doit Ltre rejetée ;

De son côté, l'intimée, qui est attributaire de l'Aide Juridictionnelle totale, ne peut bénéficier des dispositions de cet article 700 ;

Les dépens d'appel doivent suivre le sort du principal ; PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant en audience publique aprPs débats en Chambre du Conseil, contradictoirement et en dernier ressort aprPs en avoir délibéré conformément A... la Loi

Confirme en toutes ses dispositions la décision querellée,

Déboute Mohamed X... de ses prétentions,

Dit n'y a voir lieu A... application de l'article 700 du Nouveau Code de

Procédure Civile,

Condamne Mohamed X... aux entiers dépens d'appel, étant précisé que Zineb Y... est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle,

Autorise les Avoués de la cause A... recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrLt a été signé par Bernard BOUTIE, Président de Chambre et Dominique SALEY, Greffier.

Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 04/564
Date de la décision : 13/01/2005

Analyses

CONFLIT DE LOIS.

L'article 16 de la Convention d'aide mutuelle judiciaire franco-marocaine du 05 octobre 1957 dispose qu'en matiPre civile, les décisions contentieuses rendues par les Juridictions siégeant dans l'un des deux pays ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre pays si elles réunissent différentes conditions, notamment de ne rien contenir de contraire B l'ordre public du pays oj elles sont invoquées ou aux principes de droit public applicables dans ledit pays. L'article 13 de la Convention franco-marocaine du 10 aoft 1981 relative au statut des personnes et de la famille et B la coopération judiciaire dispose que les actes constatant la dissolution du lien conjugal homologués par un juge au Maroc entre conjoints de nationalité marocaine dans les formes prévues par leur loi nationale produisent effet en France dans les mLmes conditions que les jugements de divorce prononcés B l'étranger. En l'espPce, la convocation B comparaître devant la juridiction marocaine a été remise B la personne de l'épouse appelante B son domicile, entre les mains de son pPre. Elle a comparu en personne B l'audience au cours de laquelle le mari a demandé acte de ce qu'il entendait divorcer par "divorce révocable" et la femme, aprPs avoir déclaré ne pas Ltre en voie de famille, a perçu les indemnités prévues par le loi marocaine en pareille matiPre et en a donné quittance. La juridiction marocaine a reçu l'acte dressé par les notaires instrumentaires et l'a homologué.

Demeurant ce qui précPde et aux motifs suivants, la décision précitée prononçant le divorce révocable des époux ne peut se voir reconnaître d'efficacité et sortir B effets sur le territoire national français : - la condition posée B l'article 21 de la Convention d'aide mutuelle judiciaire franco-marocaine du 05 octobre 1957, qui exige de la part de la partie qui invoque l'autorité d'une décision judiciaire (ou qui en demande l'exécution) de démontrer qu'elle est définitive et passée en force de chose jugée par la production de tous certificats utiles, n'est pas remplie par l'appelant ; - la procédure suivie, si elle paraît réguliPre sur le terrain des droits de la défense en ce que le principe du contradictoire a été respecté par la présence en personne de la femme devant la juridiction marocaine, relPve, non d'une répudiation par consentement mutuel des époux ou d'une répudiation décidée par le mari et acceptée par la femme (car la perception réelle par la femme d'indemnités légales ne peut B elle seule caractériser un acquiescement), mais d'une répudiation imposée par le mari usant d'un pouvoir discrétionnaire. On soulignera B cet égard que ce divorce "révocable" permettant au mari de reprendre son conjoint dans le délai de retraite légale marocain ne s'apparente pas B une séparation de corps faute de maintien du devoir de secours et de nécessité d'en obtenir la conversion qui est ici automatique ; - s'il est jusqu'B présent admis que toutes les répudiation prononcées par des décisions contradictoires ne sont pas nécessairement contraires aux principes posés B l'article 5 du protocole n 7 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, il apparaît au cas précis que :1) les principes posés B l'article 5 précité, lequel prévoit que les époux jouissent de l'égalité des droits (...) de caractPre civil entre eux (...) durant le mariage et

lors de sa dissolution, n'ont pas été respectés car seul le mari peut, d'une part, répudier son épouse, la possibilité inverse n'étant pas laissée B cette derniPre, et d'autre part "reprendre" sa femme pendant une certaine période, 2) le fait d'Ltre en mesure d'Ltre présente B la procédure et de faire valoir ses prétentions et défenses, ne permettait cependant pas B l'épouse de s'opposer victorieusement B la répudiation unilatéralement décidée par son mari, 3) la compensation financiPre octroyée B la femme, appréciée notamment en considération des liens étroits entretenus par les époux avec le territoire français sur lequel ils paraissent avoir eu leur résidence habituelle, est notoirement insuffisante pour représenter B peine environ 1.600 Euros. La décision par laquelle la juridiction marocaine a reçu et homologué l'acte établi par les notaires instrumentaires et tendant au divorce révocable des époux est attentatoire B la conception nationale de l'ordre public international dPs lors que n'est pas assurée l'égalité des droits des époux lors de la dissolution de leur mariage, égalité reconnue par l'article 5 du protocole susvisé dont la France s'est engagée B garantir le bénéfice B toute personne relevant, comme en l'espPce, de sa juridiction. On notera par ailleurs que le protocole n 7 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme est postérieur aux Conventions franco-marocaine susmentionnées. En conséquence, il y a bien lieu B pension alimentaire au profit de

l'épouse qui se trouve en état de besoin.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-01-13;04.564 ?
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